Tous les jours, la passion du cyclisme

 

Auteur/autrice : Laurent Page 23 of 351

Entraînement polarisé vs « sweetspot »: le débat éclairé, avec Guy Thibault

Lequel est le mieux? Le programme d’entraînement polarisé, ou le programme « sweetspot », autrement dit, « au seuil »?

Le débat fait rage depuis que Dylan Johnson, ce jeune coach présent sur YouTube et que j’aime beaucoup en raison de son approche scientifique, a remis en question les programmes d’entraînement « sweetspot » proposés par des plateformes très populaires comme TrainerRoad ou Zwift.

Évidemment, TrainerRoad a répliqué en diffusant cette vidéo qui présente selon moi davantage de limites, notamment celle de ne critiquer qu’une seule étude, au lieu de s’en remettre à plusieurs comme le fait toujours Johnson dans ses vidéos.

Enfin peu importe, ce qui est sûr, c’est que le débat divise actuellement.

D’un côté, l’entraînement « sweetspot », essentiellement en zone 2 (selon une nomenclature en trois zones seulement) que certains appellent péjorativement la zone « Maîtres », sous-entendu que beaucoup de sportifs, notamment vieillissants, adoptent spontanément cette formule, rechignant aux efforts violents qu’impose un entraînement dit « polarisé ».

La zone sweetspot, c’est en effet cette zone certes inconfortable, mais pas extrêmement intense, située entre 75 et 85% de votre fréquence cardiaque maximale. En gros, ça lamine à petit feu car le but est d’accroitre la capacité de résistance long terme à la fatigue.

Certains programmes sur des plateformes populaires d’entraînement proposent jusqu’à cinq séances par semaine de sweetspot, et presqu’aucune à des intensités élevées ou très élevées, par exemple à VO2max ou à puissance supérieures. Épuisant, cinq séances sweetspot dans une semaine!

Le polarisé, c’est différent et assez simple: zone 3 environ 20% du temps lors de séances d’intervalles le plus souvent courts, le reste (environ 80%) en zone 1, molto piano. À son époque, Geneviève Jeanson s’entrainait déjà en polarisé.

Perso, j’ai adopté le polarisé depuis quelques années avec d’excellents résultats. Si je ne m’interdis pas une sortie « sweetspot » de temps en temps, fini pour moi ces longues sorties d’équipe à jouer à qui pisse le plus loin. Mes « testo rides » sont désormais solo, lors de séances d’intervalles courts bien structurés, et sur divers terrains pour pratiquer techniquement aussi: en danseuse, assis, etc. Le reste, ben du mollo discipliné, mais pas trop mollo non plus! J’y reviendrai.

Des études scientifiques récentes indiquent que cette formule polarisée est meilleure pour progresser que la formule « sweetspot ». Et, surprise: pour progresser partout, même en endurance!

Cette formule est également la plus rentable pour les athlètes amateurs qui ne disposent pas, comme les pros, de 20 voire 25 heures d’entrainement par semaine, ce qui permet de tout travailler à la fois: zone 1, zone 2 et zone 3.

Des partenaires d’entraînement proches ont des résultats encore plus spectaculaires que les miens avec le polarisé, en combinant muscu spécifique et entraînement par intervalles courts (EPIC): une condition physique excellente, en dépit d’un faible nombre d’heures d’entraînement par semaine (souvent moins que six).

J’ai voulu faire le point sur la question de l’entraînement polarisé versus le sweetspot, pour nous cyclistes amateurs.

Mais je ne suis pas un expert en sciences du sport.

Alors j’ai fait appel à un expert. L’un des meilleurs à mes yeux, reconnu internationalement: Guy Thibault.

Guy est un lecteur de La Flamme Rouge depuis longtemps, et a généreusement accepté de collaborer. Je l’en remercie.

Si Guy se passe de présentation, je le rappelle quand même: docteur en physiologie de l’exercice, directeur des sciences du sport à l’Institut national du sport du Québec et professeur associé à l’École de kinésiologie et des sciences de l’activité physique de l’Université de Montréal, Guy a mené de nombreuses recherches dans le domaine des sciences de l’entraînement depuis quatre décennies. Et publié de nombreux livres grand public également (Renaud-Bray, Decitre), ayant comme moi la vulgarisation à cœur.

Il est aussi le créateur de l’application 3-2-1 Go! qui dicte toutes mes séances d’intervalles depuis plusieurs années. En d’autres mots, Guy me fait souffrir! Et ça paye… Son graphique de planification des intervalles fait également école.

Guy est enfin l’auteur du site Nature-Humaine, très utile pour nous sportifs d’endurance.

Façon « Le moine et le philosophe », discussion entre le profane et l’expert au sujet de l’entraînement polarisé.

La Flamme Rouge: Guy, sweetspot ou polarisé?

Guy Thibault: Depuis longtemps Laurent, les scientifiques du sport cherchent à établir les intensités optimales des périodes d’effort lors de séances d’intervalles qui mèneraient vers les meilleurs améliorations des déterminants de performance en cyclisme comme dans d’autres sports d’endurance.

La réalité, c’est qu’il n’y a actuellement pas de consensus absolu sur ces séances, ni sur l’orchestration de ces séances dans une semaine d’entraînement. Les recherches récentes (depuis 2015 environ) pointent cependant vers la conclusion que l’entraînement polarisé améliore davantage les performances que l’entraînement au seuil, ou « sweetspot ».

LFR: Le polarisé donne-t-il de meilleurs résultats pour toutes les filières en cyclisme?

GT: C’est un des résultats les plus surprenants des recherches scientifiques récentes. Celles-ci indiquent en effet qu’un entraînement polarisé comprenant des séances où l’intensité des fractions d’effort est très élevée s’accompagne très rapidement d’améliorations importantes non seulement de la capacité anaérobie, mais également du VO2max, de la puissance aérobie maximale et même… de l’endurance!

On ne comprend pas parfaitement pourquoi, mais des recherches sont en cours pour y voir plus clair.

LFR: En polarisé, 20% du temps environ est consacré aux intervalles courts à haute ou très haute intensité. Je fais souvent des séances de quelques fractions d’effort de 30 secondes, selon ton application 3-2-1 Go. La science a-t-elle identifié des séances plus efficaces que d’autres?

GT: Pas vraiment Laurent. Seule certitude que la science nous apporte, il est de loin préférable d’engranger un grand nombre d’intervalles courts à forte intensité, plutôt que quelques intervalles longs à intensité moindre, par exemple à 75-80% de la PAM (puissance aérobie maximale).

De récentes recherches tout à fait fascinantes montrent même que les effets bénéfiques des fractions d’effort de seulement 10 secondes sont les mêmes que ceux induits par des fractions d’effort de 30 secondes. Certains y verront des liens avec le fameux Tabata.

En d’autres mots, du court, voire du très court, c’est très payant. Le but, c’est toujours d’accumuler un grand volume de travail à très haute intensité et pour cela, le décomposer en de nombreux intervalles courts entrecoupés de périodes de récupération est le meilleur moyen.

LFR: Un des défis du polarisé, c’est aussi de bien calibrer le 80% du temps passé en « zone 1 ». Pourrait-on y perdre son temps?

GT: Tout à fait Laurent! On sait qu’en deçà d’environ 50% de la PAM, les gains sont à peu près nuls, peu importe la durée. Pour être bénéfique, certains suggèrent que cette fraction de 80% du temps d’entraînement passée à faible intensité dans le modèle polarisé doit probablement se faire entre 55 et 75% de la PAM. Autrement dit, il y a quand même une intensité minimale requise pour tout ce temps passé en zone « 1 ».

J’irais même plus loin, simplement pour t’illustrer que davantage de travaux sont nécessaires pour bien comprendre: le 80% du temps en zone « 1 » est-il vraiment nécessaire?! On n’a pas encore vraiment testé d’autres modèles d’entraînement polarisé et des formules plus efficaces que le 80:20 existent peut-être.

LFR: Les besoins énergétiques, notamment en alimentation, sont-ils différents si on adopte un entraînement polarisé?

GT: À ma connaissance, il n’y a probablement pas de grandes différences ici, le polarisé ne nécessite pas d’adopter une alimentation différente des autres modèles d’entraînement. Chose intéressante cependant, les séances d’intervalles courts comporteraient des effets anorexiques. Je m’explique.

De retour d’une séance composée de pointes à haute ou très haute intensité, on ne ressent généralement pas la faim. Le corps continue cependant de « brûler » de l’énergie. Ainsi, certaines recherches suggèrent-elles qu’il est moins difficile de perdre du poids si l’on met l’accent sur des séances d’entraînement par intervalles où l’intensité des répétitions est très élevée. 

LFR: C’est tout à fait ça Guy! Je n’ai jamais faim de retour de ces séances difficiles. Et je remarque que je récupère vite de ces séances.

GT: Je ne suis pas surpris Laurent! Des études nouvelles portent sur ce qu’on appelle les analyses métabolimiques. En gros, on analyse les urines d’athlètes 24h après divers types de séances pour vérifier les effets concrets sur divers marqueurs biologiques du corps.

Trouvailles? Les déchets sont généralement plus présents après des séances sweetspot, même 24h après. En d’autres mots, le sweetspot, ça magane!! On récupère mieux des intervalles courts, même s’ils sont faits à très hautes intensités (parfois même plus de 175% de la PAM).

LFR: La PAM, justement, ou « puissance aérobie maximale ». Je préfère de loin calibrer mes intervalles sur ce concept plutôt que sur celui, actuellement populaire, du « FTP », ou « Functional Threashold Power ».

GT: Et tu as raison! Le FTP, c’est un peu une « aberration commerciale » selon moi (et selon plusieurs autres entraineurs chevronnés). En réalité, le FTP n’est pas un seuil proprement dit. Vaut mieux une mesure sur une période brève; la PAM c’est la puissance moyenne critique sur seulement cinq minutes, selon moi plus utile pour calibrer des séances d’intervalles à très haute intensité.

En plus, le FTP, c’est très difficile à mesurer: quel athlète veut se soumettre à un protocole où il (elle) aura à rouler une heure à bloc? C’est un record de l’heure! La PAM, ça se mesure beaucoup mieux et plus rapidement, notamment en laboratoire, même si ça reste un cinq minutes très difficile.

Dans l’avenir (on y travaille à l’INS Québec), on élaborera les séances d’entraînement à partir de la « signature » de l’athlète, c’est-à-dire sa propre courbe des puissances critiques pour des durées de tests maximaux allant de quelques secondes à plusieurs minutes. Cette courbe diffère pour des athlètes d’un même niveau, et reflète leurs qualités physiques : VO2max, capacité anaérobie et endurance. On personnalisera ainsi bien mieux qu’en ne se basant que sur la PAM ou le FTP.

LFR: Très intéressant! Et pourtant, des plateformes populaires continuent d’offrir des programmes composés de beaucoup de séances « sweetspot » par semaine, sur la base du FTP.

GT: En effet. C’est peut-être parce que ces outils reposent sur des modèles de l’entraînement par intervalles qui sont imparfaits, et que peu d’entraîneurs maîtrisent à ce jour l’art de la programmation de séances comprenant des fractions d’effort d’intensité très élevée. Personnellement, je préconise certaines séances d’entraînement composées de 120 fractions d’effort de 15 secondes seulement!

Si plusieurs valorisent depuis longtemps l’entraînement sweetspot, c’est surtout parce qu’ils croient que c’est la meilleure façon de repousser le FTP, ce seuil qui n’en est pas un, vers le haut. Trop souvent, ce sont des séances où les fractions d’effort sont plutôt longues et trop peu nombreuses. Elles demandent beaucoup de motivation et peuvent générer une grande fatigue mentale tout autant que physique.

LFR: Wow. Le polarisé, c’est vraiment très différent et très intéressant par rapport à des séances de type Gimenez ou autres « Over-Under »!

GT: Le « over-under » Laurent, je ne trouve pas ça intéressant pour bâtir la condition physique d’un athlète : beaucoup trop difficile et épuisant mentalement et physiquement. Le but des périodes de récupération lors de séances d’intervalles, c’est justement de récupérer pour pouvoir enchaîner les répétitions sans baisser l’intensité. Il faut donc vraiment récupérer, à très, très faible intensité. Avec la formule « over-under » c’est impossible, car on travaille trop fort lors des récup.

Les over-under, c’est du très spécifique, utile pour un athlète déjà dans une très grande condition physique, par exemple un coureur qui voudrait bien performer sur des critériums comme les Mardis cyclistes de Lachine, ou il y a beaucoup de relances avec pics de puissance, suivies de périodes moins intenses certes, mais où il faut être capable de tenir une intensité élevée quand même, le tout sur une heure environ.

LFR: En conclusion Guy, il reste beaucoup de questions sans réponse dans le monde de la science du sport, mais on peut quand même affirmer aujourd’hui qu’avec du polarisé, on ne se trompe pas: on profite de gains plus intéressants qu’avec la formule « sweetspot ».

GT: Oui Laurent.

Mais si l’entraînement polarisé semble meilleur que l’entraînement au seuil, ce n’est peut-être pas parce qu’il est polarisé! C’est peut-être parce qu’il comprend des séances où les répétitions sont nombreuses et d’intensité élevée ou très élevée. Il faudra mener d’autres recherches pour mieux cerner la meilleure approche. Qui sait? elle pourrait être une répartition différente, par exemple 50-50 au lieu de 80-20!

En attendant, si je crois que toutes les intensités d’effort supérieures à 75 % de la PAM sont utiles, il faut préférer les séances comprenant un grand nombre de courtes répétitions à haute ou très haute intensité.

LFR: Merci Guy, et j’y retourne demain avec 24x30sec en côte!

Le Tour de Slovénie

L’épreuve s’est élancée hier, et comporte cinq étapes.

L’intérêt?

C’est beau, la Slovénie.

Mais le réel intérêt de notre point de vue, c’est évidemment Tadej Pogacar!

Primoz Roglic, lui, a décidé de ne plus courir d’ici le départ du Tour, et se prépare solo du côté de Tignes actuellement, en altitude évidemment.

L’équipe UAE Team Emirates est manifestement, par son alignement en Slovénie, en répétition générale en vue du très prochain Tour de France.

Outre Pogacar, on y retrouve les Majka, Ulissi, Trentin, Polanc, Oliveira. On soude le groupe.

L’opposition viendra de trois autres équipes WorldTour: BikeExchange avec Kangert, Astana avec Felline et Bahrain-Victorious, avec Mohoric et Haussler.

Remarquez hier, c’est (encore!) la Bahrain-Victorious qui a débloqué son compteur sur l’épreuve avec la victoire au sprint de l’Allemand Phil Bauhaus. Décidément, on n’arrête plus cette équipe!

Une foule d’autres équipes continentales pro sont de la partie, notamment Bardiana et Androni-Giocattoli, mais des équipes avec moins de profondeur. Des équipes espagnoles, polonaises, anglaises, danoises, russes, slovaques, et slovènes aussi.

L’étape de samedi est celle à surveiller, avec une arrivée au terme d’une ascension. Pogacar s’y testera. On le dit motivé à enfin remporter son tour national.

Dommage cependant que ce Tour de Slovénie ne comporte aucun chrono… et gageons que les organisateurs reverront peut-être la copie en prévision de 2022 si des coureurs comme Pogacar ou Roglic veulent en faire une épreuve de prépa régulière en vue du Tour.

Intraitable MVDP!

Mathieu Van Der Poel: RE-BANG!

D’autres questions?!

Deuxième victoire d’étape consécutive pour le champion des Pays-Bas hier sur la 3e étape du Tour de Suisse. On n’avait pas vu ca depuis… depuis Marc Padun sur le Dauphiné en fin de semaine dernière en fait!

Ceci étant, magnifique de maitrise à l’approche de la ligne hier, MVDP. Il n’a pas hésité à lancer le sprint le premier, juste avant les 250 mètres, c’était super-bien vu face à la concurrence, surtout face à Julian Alaphilippe qui était avec lui.

Le sprint était en léger faux plat ascendant: un Alaphilippe est toujours très dangereux sur un tel terrain, car très explosif. En partant le premier de loin, MVDP défaisait les plans d’Alaf, en plus de lui imposer un long sprint. Alaf n’est jamais revenu. Vraiment bien joué.

Ceci étant, la question: combien de temps MVDP peut-il tenir le maillot jaune de leader de l’épreuve, conquis hier?

Ca sera déjà plus difficile aujourd’hui avec un final compliqué, et son équipe Alpecin-Fenix a désormais le poids de la course. Les Ineos, les Deceuninck, les Bora avec Schachmann qui me parait vraiment très bien, les Israel Start-Up Nation avec Woods devant avant-hier, voire les Astana, tout ce beau monde n’hésitera pas à profiter du travail des Alpecin avant de les attaquer dans le final.

Chose certaine, c’est peut-être la première fois que MVDP doit défendre un maillot de leader sur une course par étape importante à l’approche de la montagne. On sera vite fixé sur ses moyens sur ce terrain particulier, un terrain qu’il retrouvera forcément sur le prochain Tour de France qui part dans moins de trois semaines rappelons-le.

J’ai personnellement bien hâte de voir. Avec MVDP, c’est parfois tout ou rien, et ca sera peut-être rien demain dans le final?

Alaphilippe se diperse-t-il?

Certains lecteurs estiment qu’Alaf se disperse peut-être trop un peu tôt dans le final, et que certaines cartouches lui manquent peut-être pour l’emballage final.

Je ne crois pas.

Il essaie, c’est tout. Il attaque. MVDP fait pareil! Mathieu a les jambes pour conclure, Alaf pour le moment n’est pas capable de rivaliser avec le Néerlandais. Mais on ne peut pas lui reprocher de tenter des choses, d’animer la course, de vouloir sortir du paquet.

Les Canadiens

Je trouve ce Tour de Suisse intéressant aussi pour les coureurs canadiens qui y participent.

J’étais inquiet pour Mike Woods suite à un chrono moyen le week-end dernier. Mike nous a rassuré en étant un acteur du final des deux dernières étapes, étant avec Alaf et les autres dans les coups.

Je suis certain que Mike sera devant sur les étapes à venir, surtout vendredi et dimanche prochain. Il tentera quelque chose, j’en suis convaincu.

Zuko et Matteo ont offert aussi de beaux moments sur la 2e étape, étant échappés devant avec deux autres coureurs. Ils se sont malheureusement faits distancer dans une descente de col sous la pluie, qui prouve que ces descentes sont décidément un exercice bien particulier. Perso, je préfère les savoir encore en course aujourd’hui plutôt qu’à l’hôpital avant-hier… et je pense que Rally voudra encore se montrer cette semaine pour justifier leur invitation.

Tour de Suisse, 2e étape

Mathieu Van Der Poel: BANG!

Des questions?

https://www.youtube.com/watch?v=ocdTqi-mmBU&t=6325s

Le Tour de l’actualité

1 – Bahrain-Victorious. Y’a pas à dire, cette équipe a trouvé, depuis quelques semaines, la bonne carburation.

Gino Mader et Damiano Caruso remportent chacun une victoire d’étape sur le récent Giro, avec Caruso qui signe une 2e place derrière Bernal.

On ne les avait pas vu venir.

Tu as maintenant Mark Padun, 24 ans, vainqueur « back to back » de deux étapes de montagne sur le Dauphiné.

Jusque cette semaine, Padun, y’avait que sa mère qui le connaissait.

Surprenant.

Je n’ai pas d’explications. Molto forte, tout simplement.

Padun sort au train de sa roue Richie Porte et Sepp Kuss samedi dernier sur les pentes de La Plagne. Ouf.

On peut simplement dire que les talents de grimpeur de Padun ont déjà été notés: chez les amateurs, il a ramené les maillots de meilleur grimpeur des prestigieuses courses Giro Della Friuli Venezia Giulia (2015) et du Tour du Val d’Aoste (2016). Pour le reste, je ne sais pas.

Padun espère en avoir assez fait pour être retenu par son équipe sur le prochain Tour de France. C’est un minimum!!!

2 – Dauphiné. On attendait Geraint Thomas, c’est finalement Richie Porte, 36 ans, qui s’impose, sa première grande victoire depuis le Tour de Suisse 2018.

Porte a également terminé 3e du Tour l’an dernier.

Chez Ineos-Grenadier, on doit se poser des questions: qui, de Geraint Thomas, Richie Porte, Richard Carapaz ou Tao Geoghegan doit être le leader de l’équipe sur le Tour?

Quod abundat non vitiat. Ou « Abondance de biens ne nuit pas », dit-on. Ce qui ne veut strictement rien dire, mais l’effet reste le même…

À mon avis, plusieurs partiront avec un statut de coureur « protégé » et l’équipe s’ajustera en fonction des circonstances de course.

Et à ce petit jeu, parfois le mieux servi c’est celui qui passe le premier à l’offensive…

3 – Arkea-Samsic, le coup de gueule. Celui d’Yvon Ledanois, pas du tout satisfait de la performance de ses coureurs sur ce Dauphiné, en premier lieu très certainement Nairo Quintana et Warren Barguil.

Quintana termine 18e à presque 5 minutes, Barguil est 38e à plus d’une demi-heure!

Encore que, le général n’est pas tout: si on les avait vu tenter quelque chose, être devant, être acteurs. Rien du tout.

Le Tour de France approche vite, pas rassurant!

4 – Tour de Suisse. On est ravi en Suisse, les deux premières places de la première étape hier, un chrono de 11 kilomètres, sont occupées par des coureurs… suisses. Ils ont le même prénom en plus, facile à retenir!

Stefan Kung 1er, Stefan Bissegger 2e.

L’intérêt est ailleurs.

Des favoris, on note la belle perf de Julian Alaphilippe, excellent 5e hier et qui traduit donc une belle condition après une coupure au terme de la saison des Classiques. De bonne augure pour la suite.

Maximilan Schachmann, 11e, signe aussi une perf digne de mention selon moi; c’est un excellent grimpeur.

Carapaz (15e), Dumoulin (16e), Van der Poel (25e), Sivakov (40e), Uran (41e) sont à moins de 50 secondes.

Moins bon pour Fuglsang, Soler, Hirschi ou encore – et surtout – Mike Woods, « seulement » 128e de ce chrono à 1min19 du vainqueur. Aie. Je suis inquiet pour la suite, espérons que Mike nous rassurera plus tard cette semaine.

5 – Suisse, la suite. Ca se jouera certainement vendredi, samedi et dimanche prochain avec trois belles étapes en montagne autour d’Andermatt.

Vendredi, 130 petits kilomètres mais le Gothard en intro, puis dans le final deux belles ascensions.

Samedi, un chrono de 23 bornes autour d’Andermatt, une ascension de l’Oberalpass, 700m de dénivelé quand même, puis sa descente. Molto bene!

Et dimanche, 160 kms avec, dans le final, le Gothard de nouveau, versant Airolo. Ce sera le festival des photographes, toujours une occasion de photos très spectaculaires ce Gothard, une ascension en pavés!

D’ailleurs, je vous recommande fortement, si vous le pouvez, de faire une fois dans votre vie la sortie « Giants of Switzerland »: la Furka, le Nufenen et le Gothard depuis Andermatt. Absolument indescriptible. Dur. Magnifique. Inoubliable. One true game changer.

6 – Hugo Houle. C’est le meilleur des coureurs canadiens hier sur le Tour de Suisse, et c’est très bien.

Houle est en reprise après une coupure suite aux Classiques.

Fait intéressant, plusieurs coureurs canadiens ont pris hier le départ du Tour de Suisse: outre Houle, on note Guillaume Boivin, James Piccoli et Mike Woods chez Israel Start-Up Nation, ainsi que Mateo Dal-Cin, Nickolas Zukowsky et Rob Britton pour Rally Cycling.

On verra ce qu’ils peuvent faire cette semaine, c’est une occasion en or pour les coureurs de Rally Cycling de se mettre en évidence. Zuko en particulier.

7 – Thibault Pinot. Le Vosgien a disparu de la planète vélo. Même sur Strava!

Inquiétant.

Les dernières nouvelles nous viennent de Marc Madiot en mai dernier: pas de Tour de France, pas de JO, pas de Vuelta, la seule priorité est de guérir ce sacrum qui le fait tant souffrir dès qu’il monte en puissance.

Prompt rétablissement à Thibault. Triste cette affaire qui dure.

La FDJ se tourne désormais vers David Gaudu, auteur d’un honnête Dauphiné, pour faire briller les couleurs de l’équipe française en juillet.

8 – Unbound Gravel. Méga-battage publicitaire autour de l’ex- Dirty Kanza ces derniers jours, en particulier sur le site CyclingNews.

Y’a pas à dire, le Gravel Bike séduit en Amérique, peut-être plus qu’en Europe. Il y a peut-être aussi davantage de routes de « gravel » de ce côté-ci de l’Atlantique.

Ma région, l’Outaouais, est bien pourvue en route de gravel.

Au final, Laurens Ten Dam, l’ancien coureur pro chez Rabobank, SunWeb puis CCC, a été battu par un ex-pro également, Ian Boswell, moins connu celui-là mais qui a quand même séjourné chez Sky (2013 à 2017) puis chez Kathusha (2018-2019) avant de ne pas voir son contrat renouvelé.

Aucun coureur canadien dans les 20 premiers.

9 – Tour de Suisse féminin. J’aime le cyclisme féminin, la compétition y est également très féroce.

Fait intéressant, la championne de VTT Yolanda Neff participait à ce Tour de Suisse féminin remporté par Lizzie Deignan.

Ca frotte dans le peloton féminin: ce vidéo est saisissant!

Rouler sous la canicule

43 degrés.

C’était la température affichée au thermomètre en Alsace durant cette dernière semaine de juin 2019. Pascal en sait quelque chose!

La cyclosportive L’Alsacienne n’a pas eu l’autorisation d’organiser le grand parcours de 160 bornes compte tenu de la canicule extrême; les participants ont tous été rebasculés sur l’épreuve de 125 bornes.

Ce fut quand même une sacré épreuve. Perso j’ai bien préformé, mais j’en ai bavé dans le final!

Cyclisme et canicule, incompatible compte tenu de l’intensité de notre sport?

Non.

On annonce très chaud au Québec au cours des prochains jours.

Vous pouvez rouler quant il fait très chaud. Soyez simplement intelligents, adaptez votre pratique!

Nous avons tous des tolérances variables à la chaleur. Perso, je supporte mieux que la moyenne, probablement en raison d’un degré permanent d’affutage élevé.

Autrement dit, je suis maigre. Pas pour mon bien.

Comme pour le froid, on peut aussi s’acclimater à la chaleur: quelques sorties, et ça va nettement mieux.

Voici quelques trucs pour vous permettre de rouler par temps très chaud, une situation que j’affectionne particulièrement.

Tôt le matin

Pour des longues sorties, pensez à partir plus tôt le matin, lorsque le temps est plus frais: départ à 8h, voire 7h. On peut ainsi engranger deux ou trois heures de temps de selle par temps plus frais avant de commencer à souffrir de la chaleur qui augmente vraiment dès 10h le matin. Un autre avantage de ces départs matinaux est que le vent est souvent quasi-inexistant à ces heures!

Écourtez vos sorties

Si canicule il y a, avez-vous vraiment besoin de prévoir une sortie de 5h ou plus? Écourtez si possible! Il y a une grande différence entre rouler 5h par 27 degrés versus par 32 degrés Celsius… Adaptez vos séances, on laisse beaucoup d’énergie dans les vents du printemps au Québec, mais aussi dans les grosses canicules. Au besoin, rabattez-vous sur des séances plus courtes, mais plus intenses. Vous vous en remettrez plus rapidement, et elles seront plus bénéfiques pour votre condition générale.

Maillot ouvert

Ouvrez votre maillot! Je me surprend de croiser plein de cyclistes avec maillots à fermeture centrale, mais je vois très rarement ces maillots ouverts au complet. Une fermeture centrale, ça sert à ça: ouvrir! Particulièrement utile dans les ascensions, où on respire mieux avec un maillot complètement ouvert par temps très chaud. S’il fait vraiment très chaud, gardez-le ouvert en tout temps, ça fait du bien dans la descente…

Sous-maillots

Un maillot lycra plein de sueur qui vous colle à la peau, pas top pour évacuer la chaleur, ca fait effet « wetsuit ». Je préfère l’option d’un sous-maillot en mesh très léger, qui empêche le maillot de coller à la peau et qui créé une circulation d’air bénéfique pour thermoréguler la température corporelle. Même par temps très chaud, deux couches valent parfois mieux qu’une! Les Touaregs l’ont compris depuis des générations…

De l’ombre

Choisissez vos parcours! Je n’hésite pas à programmer des intervalles par temps caniculaire, mais j’adapte: 1) si je ne me sens pas bien durant le réchauffement, je coupe et 2) je choisis mes endroits à l’ombre. Un exemple? Pour les cyclistes de Gatineau, les chemins Musie et Ojai (mes ascensions de prédilection depuis quelques années), très ombragés et agréables même lorsqu’il fait très chaud, offrent de quoi bien travailler à l’ombre. Et ces deux ascensions sont situées à quelques kilomètres seulement d’un point d’eau facilement accessible, celui du Centre des visiteurs d’Old Chelsea. Le bon plan ! Même si vous sortez d’Ojai détruit et déshydraté après 6 ascensions, votre bonheur n’est qu’à 5 petites minutes de distance… l’agonie n’est jamais longue.

Des points d’eau

Choisissez des parcours avec plusieurs points d’eau en cours de route. Par temps caniculaire, l’arrêt à la source de Wakefield, par exemple, pour les cyclistes de la région de Gatineau, est très indiqué. Une autre source se situe sur le chemin Montée Paiement, une fois complétée l’ascension du Lac Létourneau via le McGregor. Le bon plan de parcours pour ravitailler régulièrement et à peu de frais, pour ainsi ne pas souffrir de déshydratation.

Aspergez vous!

Ne négligez pas les effets de vous asperger à l’eau claire par temps très chaud, ce n’est pas pour rien qu’on voit nombre de coureurs pro s’asperger ainsi dans les longs cols (parfois avec l’aide du public qui leur tend des bouteilles d’eau qu’ils se vident sur la tête). J’ai adopté cette pratique il y a plusieurs années, et ça fait vraiment du bien. Un quart de bidon sur la tête, qui ruisselle ensuite vers le bas, excellente douche rafraichissante, surtout si la descente arrive bientôt.

Limitez la zone 5

Les efforts maximaux peuvent être difficiles par temps caniculaire, les énergies pouvant être moindres, et les nausées plus fréquentes. Adaptez votre entrainement! Vos sensations au départ, durant les 15-20 premières minutes, doivent guider la suite. Si elles sont mauvaises, n’hésitez pas à changer le plan de match. 6x2min en zone 4 peuvent aisément être modifiées pour faire 3 ou 4×5-6min en zone 3. Ca demeurera payant, et votre acclimatation à la canicule sera préservée. La prochaine sortie n’en sera que meilleure.

Hydratez-vous avant l’effort

Mon expérience personnelle m’indique que l’hydratation avant l’effort est fondamentale par temps très chaud. Par temps frais, not so much, vous avez droit à l’erreur. Mais si vous partez pour un gros entrainement par 40 degrés avec un déficit hydrique, ça risque d’être rapidement la galère si ça roule vite. Soignez votre hydratation dans les 24h précédant vos entrainements par temps caniculaire.

Augmentez votre apport énergétique

Par temps très chaud, vos repères traditionnels ne sont plus les bons, à intensité égale bien sûr. Vous consommez un bidon par 40 kms d’ordinaire? Probablement plus le bon ratio par temps très chaud. Vous n’avez besoin que d’une barre énergétique par 80 kms d’ordinaire? Là encore, ce n’est plus valable par temps très chaud. Vos pertes hydriques sont beaucoup plus importantes, il faut modifier vos repères en conséquence. Dans le doute, buvez, buvez, buvez encore. Sur le long terme, le gagnant ce sera vous!

La dérive cardiaque

Pas d’affolement si vos pulsations cardiaques sont un peu différentes par temps très chaud, c’est normal. Celles-ci sont souvent plus élevées, pour un même effort. Le corps travaille en double: pour soutenir l’effort et pour évacuer la chaleur qui s’accumule vite. Encore une fois, la bonne pratique dans ces conditions est de soit réduire l’intensité, soit de réduire la durée de ces intensités.

Le corps s’adaptera

Quoi qu’il en soit, le corps humain est capable de s’adapter aux efforts par chaleur extrême, aucun doute là-dessus. Mes 10 jours en Alsace en 2019 par canicule extrême, à faire de gros efforts dans les cols, a été très concluante sur ce point; après quelques jours, rouler par 40 degrés voire plus n’était plus un problème, malgré que cela rendait quand même les sorties plus difficiles. Évidemment, la prise d’altitude aide souvent en montagne, une situation inexistante dans les autres régions où l’on peut avoir à gérer 35 voire 40 degrés sur toute la sortie.

Soyez à l’écoute de vos sensations! On aura beau dire, nous avons tous une tolérance variable aux froids et aux chaleurs extrêmes.

Dauphiné: un chrono… surprenant!

Les 16 kilomètres du premier test – un chrono – sur le Critérium du Dauphiné Libéré ont été riches en enseignement.

Et surprenant!

D’abord, doublé Astana avec Lutsenko et Izagirre.

Izagirre, 32 ans, connait une bonne saison: 3e de Paris-Nice, il a fini 7e sur le Tour de Romandie et il semble monter en puissance juste au bon moment pour le Tour. Il sait grimper, donc il devrait être un client pour la suite.

Lutsenko, 28 ans, c’est davantage une surprise. Je pense que le circuit hier, avec une 2e partie du chrono assez accidentée où ils ont été nombreux à se casser les dents, a favorisé ce solide coureur kazakh.

Kasper Asgreen 3e, fait plaisir.

Wilco Kelderman, toujours capable du meilleur comme du pire, est 4e pour la Bora-Hansgrohe. Il faudra attendre samedi pour savoir de quoi il sera capable sur ce Dauphiné. Comme souvent, il demeure une énigme.

Richie Porte 6e à 15sec, il est le meilleur des Grenadiers hier. N’oublions pas que Porte a terminé 3e du Tour l’an dernier, et qu’il offre de belles garanties de régularité.

Geraint Thomas « seulement » 10e, c’est la surprise du jour; tout le monde le voyait largement vainqueur. Il a déclaré avoir mal géré ce chrono en partant beaucoup trop vite.

Perso, certains me trouveront durs, je trouve ca non-professionnel. Quand ta seule job dans la vie est de gagner des courses cyclistes, que tu disposes de tout un encadrement exclusivement orienté envers ce seul et unique but, tu fais le métier. Et faire le métier, ça comprend reconnaitre le parcours, analyser, établir un plan de match. Des coureurs Grenadiers l’avaient précédé, ne pouvaient-ils pas le conseiller sur la façon de gérer ce chrono? Ne savait-il pas que la 2e partie était largement plus difficile que la première?

S’était-il contenté d’une simple reconnaissance du parcours via une app comme Google Maps?

Je ne comprends pas.

Et lui l’ancien pistard, qui amène manifestement beaucoup trop gros comme braquet?

Anyway. Il mérite qu’on lui remonte les bretelles!

La belle surprise qui fait plaisir, c’est Aurélien Paret-Peintre, excellent 16e à 15 petites secondes de Thomas sur un chrono de 16 bornes. Le grimpeur d’AG2R-Citroen confirme sa victoire en début de saison sur le GP de la Marseillaise, et je pense qu’il a les moyens de surprendre encore plus tard cette semaine, et sur le Tour.

Paret-Peintre, c’est le Bardet 2.0 si vous voulez mon avis, le chrono en mieux…

D’autres coureurs sauvent la mise: Gaudu, Geoghegan, Valverde, Quintana, Enric Mas. Ils peuvent tenter quelque chose ce week-end. Geoghegan sera probablement plutôt au service de Porte et Thomas.

Pour Fabio Aru, Pierre Rolland et Warren Barguil, c’est moins concluant. À la décharge de Barguil, il a déjà affirmé vouloir faire ce Dauphiné en guise d’entrainement, estimant que dans le passé, un bon Dauphiné signifiait un mauvais Tour de France et l’inverse. Wait and see.

Le grand perdant du jour s’appelle très certainement Chris Froome, à des années lumière de son niveau du passé. C’est même un peu pathétique selon moi. L’équipe Israel Start-Up Nation n’a aucune raison de le sélectionner pour le prochain Tour de France, ses objectifs devraient être revus à plus long terme. Si on veut bien épauler des coureurs comme Mike Woods, il y a chez Israel d’autres choix à faire pour la Grande Boucle.

Sur ce Dauphiné, on attend désormais les étapes de samedi et dimanche en haute montagne pour faire le ménage dans le classement. Ça sera intéressant, car ce chrono a resserré le classement général. Une lutte Astana-Grenadiers se dessine, avec beaucoup d’arbitres entre les deux équipes, et beaucoup d’inconnu.

Ineos: d’Egan à Geraint

Les Ineos-Grenadier continuent de marquer le cyclisme professionnel de leur marque sur les grands tours.

Hier, Egan Bernal a remporté « comme prévu » le Giro d’Italia, succédant à Tao Geoghegan l’an dernier, lui-aussi chez Ineos-Grenadier.

Et comme prévu, Filippo Ganna a remporté le chrono dans les rues de Milan, enroulant son plateau de 62 dents afin de respecter une ligne de chaine minimisant la friction, et donc les watts perdus.

Pour Bernal, 24 ans, c’est une consécration, et s’il s’aligne sur la Vuelta en septembre prochain, il pourrait devenir le plus jeune coureur de l’histoire à remporter les trois grands tours. De quoi donner une certaine motivation, et je pense qu’il pourrait très bien se tourner vers cet objectif. Bernal n’est pas prévu pour le Tour de France cette année… mais qui sait, s’il récupère bien, l’équipe pourrait certainement lui faire une petite place… à suivre!

Quoi qu’il en soit, Ineos-Grenadier continuera probablement sa domination sur les grands tours cette semaine avec le Critérium du Dauphiné Libéré.

Le favori s’appelle en effet Geraint Thomas, qui débarque avec une équipe Ineos surpuissante. Voyez un peu: Richie Porte, Tao Geoghegan, Andrei Amador, Michal Kwiatkowski, Dylan Van Baarle… de quoi voir venir.

Thomas et Porte ont terminé 1er et 2e déjà cette année du récent Tour de Romandie.

On dit de Geraint Thomas qu’il est en grande condition, surpuissant. On en saura plus mercredi lors du chrono de 16 bornes du côté de Firminy.

Ce Critérium du Dauphiné se jouera samedi et dimanche prochain, aucun doute là-dessus.

Samedi, ca sera l’ascension du Cormet de Roseland, puis une arrivée au sommet de La Plagne, belle montée très régulière mais où il s’est toujours passé des choses sur le Tour de France.

Dimanche, une très belle étape: les Aravis, la Colombière, Joux Plane, 147 kms de très belle montagne. Joux Plane, ce n’est jamais simple dans le final d’une étape… Un de mes parcours favori pour mettre la touche finale à ma préparation pour la Marmotte, à une certaine époque, depuis Genève.

L’opposition sur ce Dauphiné sera toutefois intéressante.

Les Francais d’abord: on a hâte de voir où en sont les Warren Barguil, David Gaudu, Guillaume Martin et Pierre Rolland, à un mois du départ du Tour.

La Jumbo-Visma aussi. Si Primoz Roglic a fait le choix – risqué selon moi – de ne plus courir d’ici le Tour de France, l’équipe néerlandaise débarque avec Steven Kruijswijk, Robert Gesink, Tony Martin et un certain Sepp Kuss. En rodage.

Chez Movistar, on ne sera pas en reste avec Alejet Valverde, Enric Mas et Miguel Angel Lopez.

Chris Froome est de la partie pour Israel-Start-Up Nation dans le but de maigrir en prévision du Tour. Mike Woods n’est pas au départ, il est plutôt prévu que le coureur d’Ottawa s’aligne avec Alaphilippe sur le prochain Tour de Suisse.

Parmi les autres coureurs à surveiller, Nairo Quintana, Alexey Lutsenko, Tim Wellens, Brendon McNulty ainsi que… Fabio Aru.

Deux Canadiens au départ, soit Alexandre Cataford chez Israel Start-Up Nation ainsi que Benjamin Perry chez Astana. Je pense que Hugo Houle se réserve pour le Tour de Suisse.

Bref, un beau plateau sur ce Dauphiné, à un mois du départ du Tour. Les deux absents de ce mois de juin seront les deux slovènes Roglic et Pogacar. Roglic s’entraine solo sans courir, et Pogacar a prévu de s’aligner sur son tour national, le Tour de Slovénie du 9 au 13 juin prochain.

Plusieurs coureurs présents sur ce Dauphiné s’aligneront probablement aussi sur la Route d’Occitanie, du 10 au 13 juin prochain. Avant une période d’affutage, ceci afin d’optimiser la condition pour les Championnats nationaux le 20 juin prochain, puis une autre récup-affutage avant le départ du Tour prévu le samedi 26 juin prochain en Bretagne.

Bernal: le plus dur est fait

En principe, Egan Bernal deviendra aujourd’hui le deuxième coureur colombien à remporter le Giro d’Italia après Nairo Quintana (2014).

Il rejoindra également Nairo Quintana à titre d’un vainqueur de deux grands tours cyclistes. Bernal a toutefois gagné le Saint Graal, le Tour de France (2019). Quintana, un Giro et une Vuelta.

Il ne manquera donc que la Vuelta à Bernal pour inscrire son nom au palmarès rarissime des coureurs qui ont gagné les trois grands Tours cyclistes. S’il le fait cette année, il devancera Alberto Contador, auteur du triplé à 25 ans. L’an prochain, Bernal égalerait le record de Contador.

Le Colombien a su hier s’appuyer sur son équipe Ineos, encore très forte. Il peut dire merci aux Narvaez, Moscon, Castroviejo et son compatriote Martinez, auteurs d’un boulot remarquable pour sa pomme.

Seul moment de panique, quand Castroviejo a largué son coéquipier Martinez dans la dernière descente, sous la flotte. Ils se sont vite repris en laissant l’équipier colombien recoller. Grand bien leur en a pris!

Au passage, je n’ai pas remarqué de grandes différences entre l’efficacité des Ineos dans la descente sous la pluie, comparé aux autres équipes. L’équipe Ineos est montée sur freins à mâchoires, les autres freins à disques… De quoi revoir les copies?

Tellement fort, le marketing de nos jours!

Anyway. Ca vous prend des freins à disque. Vous aurez l’air de coureurs pros.

Pour le reste, on n’a pas vu Ganna hier. Free ride, ses directeurs sportifs lui ont certainement dit « Filippo, aujourd’hui tranquillo, tu y vas dimanche pour la victoire d’étape alors repose tes jambes, pas d’efforts, et all out dans les rues de Milan« .

Bref, aujourd’hui, Ganna.

Mention très bien hier pour Romain Bardet. Avec Almeida, ca le faisait. Avec Caruso, not a chance, les Ineos allaient forcément rouler derrière. Des fois, au niveau professionnel, tes chances de succès ne sont pas en fonction des jambes que tu as, mais bien d’avec qui tu roules.

Mention très bien aussi à Caruso, belle performance. Probablement deuxième du général selon le chrono aujourd’hui, une belle victoire d’étape solo en montagne hier, rien à dire d’autre que bravo! À 33 ans, c’est pour lui une véritable consécration.

Yates a montré certaines limites hier. Le Britannique a souvent des jours sans sur les grands tours, une confirmation? Les Yates, je résumerais en disant « capable du meilleur, comme du pire ».

Les alliances d’équipe? Sur la route hier, on a vu les BikeExchange rouler avec les Ineos pour limiter la casse derrière Caruso, qui menaçait les chances de Yates de monter sur la 2e place du podium à Milan. Logique.

Et on a aussi vu une alliance italienne avec un Giovanni Visconti (Bardiani) qui roulait pour Caruso (Bahrain-Victorious) dans l’échappée. Juste une saine revanche italienne face à l’alliance colombienne!

Par contre, pour Louis Vervaeke chez Fenix, faudra m’expliquer pourquoi il a roulé aussi vite au pied de l’avant dernier col en faveur de l’échappée, pour sauter 4 km plus haut.

Giro: Bernal au métier

C’est un consensus: Simon Yates est bien le coureur le plus fort en cette fin de Giro.

Egan Bernal est sur les vapeurs.

Mais il dispose de la meilleure équipe qui soit.

Et manifestement, l’équipe court très intelligemment.

Chez Ineos, on reste groupé jusque très tard dans la course, on ne répond plus aux attaques dans la dernière ascension et on monte au train pour abriter Bernal.

La recette est éprouvée.

Yates a 2min49 de retard sur Bernal. De quoi gérer.

Assurément, Yates vise plutôt la 2e place, avec seulement 20sec d’écart à combler sur Caruso. La lutte sera là aujourd’hui sur la route de Alpe Motta, et dimanche dans le chrono.

Et on ne sait jamais, Bernal peut craquer. Il faut essayer. L’altitude, avec deux cols à franchir en haut de 2000m, réussit toutefois bien à Bernal. La dernière ascension n’est pas très difficile, son équipe devrait pouvoir l’épauler jusque tard dans l’étape.

Chose certaine, ils ne sont plus que trois pour le podium: Bernal, Caruso et Yates. Tous les autres viseront une belle victoire d’étape, et pour cela il faudra lancer dès l’ascension du San Bernardino, en espérant résister au rouleau-compresseur Ineos dans le final.

Bardet, Carthy, Vlasov, Almeida, Bennett, Formolo, Nibali, ils ont tous un va-tout à jouer aujourd’hui. Espérons une course de mouvement!

C’est Almeida qui a probablement le plus faim.

Et les Ineos savent que ce soir, leur Giro est terminé; dans le chrono dimanche, ce sera chacun pour soi. Ils donneront tout ce qu’il leur reste dans l’étape d’aujourd’hui pour protéger l’avance de Bernal. Et ainsi faire un doublé, avec la victoire de Geoghegan l’an dernier.

Le dernier chrono dimanche? Bernal, Yates et Caruso ont fait à peu près jeu égal dans le chrono du premier jour. Ganna remportera l’étape, mais je doute que ce chrono provoque de gros changements pour le podium.

Des alliances d’équipe demain? Pas impossible non plus. On sera vite fixé. Chose certaine, tous les coureurs colombiens de ce Giro roulent pour Bernal. Sinon, comment expliquer hier l’action de Molano chez UAE Team Emirates?

Quelques vidéos d’intérêt: Ineos, Carapaz, Almeida et Adam Roberge

Ténérife. Désormais mythique dans le monde du cyclisme professionnel, le lieu de si nombreux camps d’entrainement au cours des 15 dernières années.

Richard Carapaz, le premier cycliste équatorien à connaitre autant de succès en World Tour. L’histoire d’un homme simple, issu des milieux les plus modestes. Parce que tout le monde ne peut pas devenir un grand cycliste, mais un grand cycliste peut venir de n’importe où au monde.

Joao Almeida, qui finit fort ce Giro d’Italia.

Performance remarquable (3e place) du Québécois Adam Roberge sur le récent Gravel Locos, remporté par Laurens Ten Dam qui se passe de présentation sur ce site. Bravo Adam!

Giro: c’est pas fini!!!

On dirait bien que la montée de Sega di Ala en a surpris plus d’un hier. Pour une première, c’est réussi!

En premier lieu le maillot rose d’Egan Bernal, jusqu’ici sans faille aucune. Hier, sur les pentes abruptes de cette ascension finale, il a montré des signes de défaillance, ne pouvant suivre le rythme de Yates et d’Almeida.

Je pense que Bernal a fait l’erreur de répondre trop violemment à l’attaque de Yates. Il s’est manifestement mis dans le rouge, et a sauté quelques mètres plus loin.

En tout cas, Bernal peut dire merci à son compatriote Daniel Martinez qui l’a épaulé jusqu’au bout, n’hésitant pas d’ailleurs à parfois l’haranguer pour qu’il reste motivé et qu’il appuie plus fort sur les pédales.

Chez Ineos, on était proche de la panique, j’en suis sûr.

Du coup, Yates et Caruso penseront que Bernal est prenable. De quoi donner des idées pour les étapes de vendredi et samedi.

Tous deux n’auront pas de mal à trouver des alliés de circonstances qui voudront faire tomber le rouleau-compresseur Ineos.

Joao Almeida d’abord, qui semble finir très fort ce Giro et qui cherche certainement une belle victoire d’étape. Yates et lui peuvent faire un duo de choc.

Romain Bardet aussi voudra profiter d’une condition en hausse.

Giulio Ciccone devra aussi se rabattre vers cet objectif d’une victoire d’étape après avoir perdu pas mal de temps hier, étant pris dans la chute qui a entrainé Remco Evenepoel aussi, et qui l’a contraint à l’abandon hier soir.

George Bennett, Davide Formolo veulent aussi exister sur ce Giro.

Bref, c’est loin d’être fini! Et on a déjà vu des défaillances sur un dernier chrono. Toujours difficile, un dernier chrono après trois semaines de course intense dans les jambes. Révélateur des facultés de récupération.

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