Ce n’est pas si souvent qu’un coureur canadien s’impose en World Tour.
Ces douze dernières années, il y a eu bien sûr Ryder Hesjedal sur le Giro 2012 et sur une étape de la Vuelta 2014, David Veilleux sur les Trois Vallées Varésines en 2012 et une étape du Dauphiné en 2013, Hugo Houle sur une étape du Tour de France 2022, et les victoires de Mike Woods: une étape sur la Vuelta 2018, Milan-Turin 2019, une étape du Tour de Romandie 2021, la Route d’Occitanie 2022 et 2023, ainsi qu’une étape du Tour de France l’an dernier.
Hier, Derek Gee a ajouté son nom à ce palmarès en remportant la 3e étape du Dauphiné Libéré grâce à une solide double-accélération à quelques hectomètres de la ligne.
Sa première accélération lui a permis de se dégager avec le coureur français Romain Grégoire. Du coup, je pensais alors que Gee avait course perdue.
Et bien non: Gee en a remis une deuxième couche, après une ou deux respirations dans la roue du coureur français. Magnifique!
Y’a pas à dire, c’est le plus fort qui a gagné hier.
Gee confirme enfin son excellent Giro 2023, où il avait été très offensif et où il était allé chercher pas moins de… quatre places de deuxième sur une étape.
Cette performance l’an dernier avait été suffisante pour que son équipe Israel-Premier Tech lui fasse signer un contrat jusqu’en… 2028. Ses dirigeants savent qu’ils tiennent là l’avenir du cyclisme canadien en World Tour.
Le Tour en point de mire
Pour Gee, cette victoire tombe à pic. Âgé de 26 ans, il arrive à pleine maturité et cette victoire boostera sa confiance en lui, à quelques semaines du départ du Tour de France, LE grand rendez-vous de l’année. Gageons que Gee bénéficiera de quelques bons de sortie au sein de son équipe pour tenter d’aller chercher la gagne.
De toute façon, Israel-Premier Tech n’a pas vraiment de leader pour le classement général ni sur ce Dauphiné, ni pour le Tour. Chris Froome agonise et traine sa misère, lâché tous les jours sur ce Dauphiné. Mike Woods est dans la région d’Ottawa-Gatineau actuellement, prévu sur la Vuelta plutôt que sur le Tour.
La controverse a frappé l’équipe ces derniers jours avec des rumeurs de mésententes entre Woods et Froome. Ragots ou faits avérés? Difficile de dire, l’équipe et les coureurs démentent, mais ce n’est pas le genre de truc qu’on veut débattre en public non plus.
Quoi qu’il en soit, Gee a répondu de la plus belle manière qui soit hier permettant de détourner l’attention sur du vrai positif au sein de son équipe, porte aujourd’hui le maillot jaune de leader et qui sait jusqu’où il peut aller? Personne ne semble connaître ses réelles limites…
Derek Gee? La meilleure nouvelle pour le cyclisme canadien depuis des lunes.
Le plateau du Critérium du Dauphiné Libéré qui commence ce dimanche est ma foi bien plus intéressant que celui du récent Giro.
Et la course est d’un intérêt particulier en prévision du prochain Tour de France qui débute fin juin, car certains coureurs présents sur ce Dauphiné y font une rentrée capitale.
En premier lieu Primoz Roglic au sein de sa nouvelle équipe Bora-Hansgrohe. Pris dans la chute du Tour du Pays Basque, le coureur de 34 ans voudra faire le point sur sa condition physique, et se testera probablement sur le chrono de 34 kilomètres lors de la 4e étape, puis en montagne le week-end prochain.
Il sera également épaulé par une bonne équipe avec Jay Hindley et Alexandr Vlasov comme coéquipiers, tous deux aussi vu comme des coureurs de premier plan pour le prochain Tour de France.
Outre Roglic, l’autre intérêt de ce Dauphiné, c’est évidemment Remco Evenepoel, lui aussi en rentrée et lui aussi qui voudra se tester, notamment sur le chrono. Evenepoel a consenti à de gros entrainements au cours des trois dernières semaines, et pour lui, il est temps de livrer la marchandise sur un grand tour. Il a la pression.
Roglic-Evenepoel, le match de ce Dauphiné!
Il faudra également suivre nombre d’autres coureurs pouvant jouer un rôle important en juillet.
Je pense à Mikel Landa, coéquipier d’Evenepoel, et surtout Sepp Kuss, vainqueur l’an dernier de la Vuelta. Si jamais Jonas Vingegaard (actuellement à l’entraînement du côté de Tignes) ne pouvait participer au Tour, Kuss serait probablement le leader remplaçant de la Jumbo-Lease a Bike en juillet. Il doit rassurer, et surtout gagner la confiance de ses coéquipiers. Son chantier sur ce Dauphiné est de limiter la casse sur le chrono, pour ensuite viser faire la différence lors des deux arrivées en altitude.
Kuss sera épaulé par Jorgenson sur ce Dauphiné, lui aussi intéressant à suivre car on ne connait pas vraiment ses limites.
Chez UAE, équipe d’un certain Pogacar, on surveillera Juan Ayuso, Pavel Sivakov et Marc Soler, tous les trois pouvant prétendre être sur l’équipe pour le Tour.
Surprenant, on annonce Chris Froome au départ de ce Dauphiné pour Israel-Premier Tech. Vous y croyez vous?
Je surveillerai aussi les performances de Warren Barguil, Giulio Ciccone, Tao Geoghegan, Rémi Cavagna, David Gaudu, Valentin Madouas, Guillaume Martin, Rigoberto Uran ainsi que Fred Wright la semaine prochaine.
À noter qu’Antonio Tiberi, récent 5e du Giro, est annoncé au départ de ce Dauphiné. Grosse santé!!
Les étapes
L’intérêt pour ce Dauphiné sera d’abord et avant tout la 4e étape chrono sur 34 kilomètres, le premier gros test qui établira clairement les forces en présence.
Les trois dernières étapes en montagne seront les autres véritables tests de ce Dauphiné, surtout les arrivées au Collet d’Allevard et à Samoens lors des deux dernières étapes le week-end prochain.
Il arbore la moustache, comme les mousquetaires du temps de Louis XIV.
L’oeil romantique, la tignasse au vent, sans complexe aucun et dans une certaine désinvolture que lui donne assurément l’assurance d’un talent cycliste confirmé, il part à l’aventure comme D’Artagnan le faisait en son époque.
Et l’aventure pour Julien, ca veut dire 100 bornes d’échappée solo – là où il y a de la gêne il n’y a pas de plaisir! – pour aller gagner avec presque trois minutes d’avance sur son dauphin un certain… Nikki Terpstra la récente course de gravel bike Locos à Hico au Texas.
Et sur la même course, deux autres mousquetaires de sa patrie terminent respectivement 3e et 8e, soit Adam Roberge et Alexis Cartier.
Une compagnie autoproclamée « la Poutine Mafia »!
Bref, plus motivé que jamais, Julien Gagné poursuit ses rêves, roule toujours et gagne! On fait le point avec lui, à quelques jours du Unbound Gravel Race, peut-être la plus prestigieuse course de gravel aux États-Unis et qui verra à son départ outre les habitués, des certains Daniel Oss, Nicholas Roche, Greg Van Avermaet et même le champion du monde en titre, Matej Mohoric, qui y sera en pensant à sa prochaine participation au… Tour de France.
Julien Gagné: Oui, content, une belle étape de franchie! Ca prouve qu’en gravel je peux tirer mon épingle du jeu parmi les meilleurs du moment, et je m’impose en solitaire après une échappée qui a duré 100 kilomètres. Un peu ma signature!
LFR: Avant la Locos, tu as également eu d’excellents résultats, très constants.
Julien: J’ai une bonne saison oui. Ma première course a été au Texas, la Valley of Tears, ou je termine 6e après une chute durant la course. Un peu plus tard, sur la Mid-South en Oklahoma, je suis mal positionné à l’entrée d’un single tract, et je ne peux faire mieux qu’une 9e place. L’expérience de gravel qui rentre! Enfin, j’ai terminé 4e à la Belgium Waffle Ride en Utah, sur cette course j’avais de très bonnes jambes mais il m’a manqué un peu de confiance pour partir de loin en solo.
LFR: Tu as aussi pris le départ de la fameuse Rasputitsa.
Julien: Quelle journée! Je casse ma chaine dès le départ des élites à 8h. On m’en remet une, mais trop courte et je ne peux pas passer les vitesses les plus faciles. Je prends le second départ à 8h30, je vise faire un bon entrainement, je me retrouve rapidement solo et comme ca, je réalise le 3e meilleur temps de la journée! Dommage que je n’étais pas dans le peloton des élites mais bien tout seul devant le 2e peloton du jour.
LFR: Quels sont tes prochains objectifs?
Julien: Certainement la première édition de la Bromont Gravelooza, prévue le 8 juin prochain, un parcours de 140 kilomètres en Estrie, ma région. La course est notamment organisée par le Centre National de Cyclisme de Bromont, alors c’est l’fun de voir le vélo gravel se développer au Québec. Ensuite ce sera les Canadiens à Calgary mi-juin, puis la Belgium Waffle Ride en Caroline du Nord les 21 et 22 juin.
LFR: Des chances de te voir en Outaouais lors de la Big Red à Greenville-sur-la-Rouge?
Julien: À voir Laurent, je n’ai jamais fait cet événement, mais on m’en a parlé en bien.
LFR: Et la Unbound en fin de semaine prochaine?
Julien: Ca n’a pas fonctionné cette année, vraiment dommage car je suis en bonne condition en ce moment. Je me suis pris un peu tard, c’est aussi un budget mais c’est définitivement une course qui est à mon programme l’an prochain, un beau 320 kilomètres, le genre de truc que j’aime beaucoup et sur lequel je peux bien faire.
LFR: Tu t’es converti au gravel bike après une carrière en cyclisme sur route.
Julien: Oui, pour moi désormais c’est du gravel bike à temps plein, et je trouve ca plus l’fun, en gravel tu es dans la nature, dans des prairies, je préfère ca désormais à me faire frôler par des voitures pendant 250 kilomètres à l’entrainement.
LFR: En course, c’est très différent de la route?
Julien: En gravel, c’est plus honnête dans le sens que ca se joue vraiment à la pédale, tu peux vraiment exprimer le moteur que tu as. Le gravel, c’est souvent plus diesel que la route. Autre point, tu ne peux pas vraiment te cacher comme sur la route, et puis il y a moins de stratégie en gravel. Enfin, je trouve ca généralement plus ludique, tu as plus de pilotage à gérer, le temps passe vite même si les vitesses moyennes sont généralement moins élevées que sur la route.
LFR: Tu roules avec une équipe cette saison?
Julien: J’ai la chance de pouvoir compter sur la boutique Qui Roule à Sherbrooke, notamment leurs vélos Trek. Et puis, d’autres partenaires de la région de Sherbrooke m’aident également, comme la microbrasserie Siboire et la compagnie Fino, qui aide les compagnies à mieux servir leurs clients.
LFR: Tes partenaires s’appellent aussi Adam Roberge et Alexis Cartier…
Julien: Oui, on n’est pas vraiment dans la même équipe mais on voyage ensemble le plus souvent possible, on s’aide, on partage la logistique lorsque nous sommes sur des courses à l’étranger, ca aide beaucoup. Et puis, ca divise aussi la facture!
LFR: Un pour tous et tous pour un…
Julien: C’est exactement ca!!!
LFR: Ce passage au gravel a entrainé un changement dans ton entrainement?
Julien: Disons que j’évolue. Aujourd’hui, je fais moins de très haute intensité comme de l’anaérobie, que je réserve en course seulement. Je fais davantage de zone 1 et de zone 2, ainsi que pas mal de volume. Ca été spécial la semaine dernière, 41h de vélo! (le Strava de Julien est ici).
LFR: De la musculation?
Julien: J’aimerais en intégrer davantage, l’an prochain j’espère pour bien faire cette transition. Je fais cependant du core, du gainage.
LFR: Et tu avais préparé ta saison comment?
Julien: Juste du home-trainer cet hiver Laurent, souvent deux séances par jour, matin et soir avec Zwift. Un peu de fat bike dans le Mont Bellevue à Sherbrooke aussi, pour prendre l’air. Je n’ai pas fait de camp d’entrainement, la saison de gravel commençait tôt.
LFR: Tu as modifié ta position sur le vélo pour passer au gravel?
Julien: Peu d’ajustement en fait. Je roule sur un vélo un peu plus grand, et j’ai adopté une position un peu plus moderne disons, guidon assez étroit et position peut-être un peu plus avancée. La prochaine étape est de réviser la longueur des manivelles, la tendance est d’aller actuellement vers du plus court, comme sur la route.
LFR: Ce sont des gros budgets maintenant le vélo…
Julien: À qui le dis-tu! Mais je veux continuer de mettre l’emphase sur le gravel en 2024 et plus encore en 2025, car je crois pouvoir y faire de très belles choses. Il faut trouver les moyens de poursuivre, de performer encore mieux sur les grands événements du calendrier, car le moteur est là et ne demande que ca. Comme souvent, les moyens financiers sont cruciaux!
Pogacar a course gagnée, sauf incident, sur ce Giro.
Sa domination sur la Foscagno a été sans appel: il est dans une classe à part. Le rapproché sur Quintana en l’espace de quelques kilomètres était monstrueux; il devait rouler 4-5 km/h plus vite que le coureur colombien, ancien vainqueur du Giro.
Sur le chrono samedi, il a fallu un Ganna revanchard pour le priver d’un deuxième succès contre-la-montre. Les autres sont loin.
Mais la course n’est pas terminée, et un invité surprise apparait: la météo!
Pluie et températures fraiches annoncées pour le reste de la semaine sur le nord de l’Italie.
Du coup, ca peut compliquer les choses. D’une part, les risques de chute dans les descentes sont multipliés.
Les gommes étant plus tendres sous la pluie, les risques de crevaison sont aussi plus grands. Gageons que toutes les équipes ont profité de la journée de repos pour revoir les pneumatiques en prévision des prochains jours.
Enfin, il ne faut pas négliger les risques de maladies pulmonaires, voire de tendinites lorsque les organismes sont sollicités sous cette météo compliquée. Le chaud, le froid dans les descentes, l’altitude, voire la neige, ca peut rapidement compliquer une course.
Les exemples sont légion, à commencer par ce pauvre Luis, victime d’un orage alors qu’il avait le Tour 1971 gagné.
Gageons que les UAE voudront garder Pogacar bien au chaud dans les roues le plus loin possible, en roulant le plus constant possible, régulier, sans à-coups.
Pour les plus téméraires, l’occasion peut être belle d’affoler la course dans ces circonstances climatiques incertaines.
Ca pourrait conduire à une dernière semaine plus intéressante qu’elle ne paraissait. Le mauvais temps fait partie du cyclisme. Et j’ai déjà donné dans ce registre, pas plus tard qu’en septembre dernier sur les deux premières étapes de la Haute Route Dolomites, ou il a fallu modifier le parcours de la 1ere étape et éviter comme aujourd’hui le Stelvio, trop enneigé et trop froid pour y passer.
Magnifique victoire de Julian Alaphilippe hier sur la 12e étape du Giro.
Payez-vous les images, ca vaut la peine.
Entreprenant loin de l’arrivée (125 kilomètres d’échappée, quand même…), Alaf nous a donné, l’espace d’une étape, tout ce qu’on aime dans le cyclisme.
D’une part, le panache d’un coureur qui n’a jamais baissé les bras, malgré une longue disette ces deux dernières années.
Et puis, la manière durant l’étape, surtout avec l’entraide affichée avec son compagnon d’échappée, le modeste Mirco Maestri de Polti-Kometa, une équipe invitée sur ce Giro puisqu’en Continentale.
À toi Mirco les primes durant l’étape, pas de soucis je t’attends par moment dans les bosses parce que j’ai besoin de toi pour aller au bout, c’est entendu, et tout le monde y trouve son compte.
L’accolade entre les deux coureurs à l’arrivée en disait long du respect qu’ils ont eu l’un pour l’autre durant l’étape. Alaf confiait à Maestri qu’il n’oublierait jamais cette journée.
Bref, un cyclisme humain, emprunt d’une camaraderie et d’un respect qui fait du bien. À l’ère des robots, de la gestion de l’image et du message, du rouleau-compresseur et des sprints à la limite trop souvent de l’éthique, ce cyclisme me fait du bien.
Tadej Pogacar s’est offert Filippo Ganna vendredi dernier sur le long chrono de 40 bornes du Giro.
Pogacar, 176cm pour 66 kilos. Ganna, 193cm pour 83 kilos.
En tout cas, on a hâte de voir le Slovène s’attaquer au record de l’heure, Merckx style si possible!!
Ganna a été le seul sur ce chrono à résister à Pogi un tant soit peu. Les autres ont déboursé. Mention quand même très bien au jeune Antonio Tiberi, dans sa spécialité: 6e de l’étape à 1min20 de Pogi, très bien.
Pogi nous a remis ca le lendemain à Prati di Tivo, confortant son maillot rose en remportant l’étape au terme d’une belle montée de 12 kilomètres. Presque du cannibalisme…
Au pied, je croyais au duo Bardet-Paret-Peintre et puis non. Paret-Peintre a fait un bel effort, partant au bon moment, mais ce ne fut pas suffisant face au rouleau-compresseur UAE qui voulait l’étape.
Mais c’est bien d’essayer: on ne sait jamais, sur un malentendu, ca peut marcher.
Après une étape au sprint dimanche, journée de repos hier et on remet ca pour six jours de course.
Intéressante arrivée aujourd’hui à Cusano Mutri, en altitude. Mais on voit mal qui pourrait battre Pogacar, même si c’est roulant ; les UAE ont la puissance pour assurer le train, avec Majka qui termine le travail pour Pogi dans les trois derniers kilomètres.
Après, ben rendez-vous vendredi pour le 2e chrono, 30 bornes cette fois. Seul enjeu, Ganna pourra-t-il y tenir sa revanche?
L’étape de montagne du lendemain n’est pas très dangereuse pour le maillot rose: le Mortirolo est escaladé par son côté le plus facile (et de loin!) et seule la Foscagno vers Livigno représente une menace, quelques belles rampes quand même.
Bref, ce Giro va être encore long pour les spectateurs, et possiblement ennuyeux. Si Pogacar n’a évidemment pas course gagnée, on ne sait jamais, il est actuellement dans un fauteuil et on ne voit pas où et quand il peut être menacé. Les étapes 17 (vers le Passo Brocon) et 20 (le circuit du Monte Grappa) seront les deux points d’intérêt selon moi, qui vaudront la peine d’être regardés. Pour le reste…
… pour le reste, on se tourne vers le Tour, en espérant que la présence possible de Mathieu, de Jonas et de Remco dynamise la course. Wout Van Aert a déjà annoncé que ses objectifs seront ailleurs, notamment la Vuelta.
C’est l’avance dont dispose Tadej Pogacar, déjà maillot rose du Giro, sur Geraint Thomas, actuel 2e.
Après seulement deux étapes.
Rappelons que l’an dernier, Primoz Roglic a remporté le Giro avec une avance de… 14 secondes sur Thomas, après 21 étapes…
Autant vous dire que c’est bien parti pour le Slovène, malgré le fait que rien ne soit encore joué pour le moment.
45 secondes, c’est même pas le temps requis pour un changement de roue dans le cyclisme moderne, celui qui a oublié l’utilité des déblocages rapides. Quant je vois les mécanos arriver avec leur perceuse pour dévisser les axes et les coureurs prendre tout de suite une minute dans la vue, je me marre.
Enfin bref, le propos n’en est pas là, revenons au Giro.
L’enseignement du week-end, c’est Romain Bardet selon moi, qui a déjà perdu pas mal de temps. Le coureur français doit être déçu, et espérons qu’il a l’explication. Bardet pointe déjà à 2min31 du maillot rose, aie.
Pour le reste, Geraint Thomas semble dans le coup comme l’an dernier, tout comme Daniel Felipe Martinez, actuel 3e et qui confirme le début de Giro tonitruant des coureurs colombiens, avec Narvaez vainqueur de la première étape, et le surprenant Einer Rubio chez Movistar, qui pointe à la 5e place du général.
J’aime bien aussi le comportement de Cian Uijtdebroeks jusqu’ici, il est 4e du général pour le moment.
Le prochain rendez-vous c’est vendredi prochain pour le chrono de 40 bornes du côté de Pérouse dans la région de l’Ombrie. 40 bornes, c’est long dans le cyclisme moderne, et de quoi faire des écarts plus conséquents que ce à quoi on nous a habitué ces dernières années.
Le Giro 2024 s’élance samedi prochain pas très loin de Turin, la… 107e édition de ce grand tour mythique.
Comme d’hab, 21 étapes qui totalisent 3 400 kilomètres et… 44 600m de dénivelé.
Particularité intéressante de ce Giro, deux chronos individuels plutôt longs, soit 41 et 31 kilomètres, pour un total de 72 kilomètres contre-la-montre. Pas beaucoup de grands tours avec une telle distance chrono au cours des dernières années…
Pour le reste, ca se jouera très certainement sur les étapes 14, 15, 16 et 17, soit quatre jours et quatre grands rendez-vous, soit le dernier chrono lors de la 14e étape suivi de trois étapes de haute montagne dans les Alpes-Dolomites, et trois arrivées en altitude consécutives, dont une à Livigno après avoir escaladé le Mortirolo par son côté le plus facile (Monno).
L’archi-favori de ce Giro, c’est Tadej Pogacar, première participation. Le coureur slovène s’est donné le défi cette saison de faire le doublé Giro-Tour, pas simple à réaliser. Rappelons-le que le dernier à avoir réalisé pareil exploit est Marco Pantani en 1998, mais c’était une autre époque.
Le défi de Pogacar pourrait cependant être facilité par une… faible opposition selon moi au départ de ce Giro.
J’ai beau chercher, je ne vois personne capable de rivaliser avec lui s’il est dans la condition physique qu’il a montré sur Liège-Bastogne-Liège.
Le défi de Pogacar pour gagner ce Giro sera donc de 1) rester sur son vélo et donc éviter les chutes, plus nombreuses que jamais et 2) ne pas tomber malade si jamais la météo devait être moins clémente. Si ces deux conditions sont remplies, le rose lui est promis à Rome le 26 mai prochain selon moi.
Les autres protagonistes
L’opposition viendra d’une petite poignée de coureurs, Juan Pedro Lopez (Lidl-Trek) et Ben O’Connor (Decathlon-AG2R La Mondiale) en premier lieu, ces deux coureurs ayant terminé respectivement 1er et 2e du récent Tour des Alpes. Ils ont tous deux de belles dispositions contre-la-montre et une équipe à leur service.
L’Anglais Geraint Thomas, 2e l’an dernier sur ce Giro derrière Primoz Roglic, portera cette année le dossard #1, et l’Italie en cette saison lui réussit bien habituellement. Thomas n’a cependant pas beaucoup couru cette saison, et ne donne donc aucune garantie quant à sa condition.
J’ajoute à cette (très courte) liste Romain Bardet bien sûr, excellent 2e de la Doyenne et qui a la caisse pour un tel Giro. Un Daniel Felipe Martinez chez Bora-Hansgrohe également, ainsi que Hugh Carthy chez EF.
Trois jeunes auront également toute mon attention, soit Cian Uijtdebroeks chez Jumbo-Lease a Bike, Florian Lipowitz chez Bora-Hansgrohe ainsi qu’Antonio Tiberi chez Bahrain – Victorious. Âgés de 21, 22 et 23 ans, ils sont certes très jeunes, mais ont tous les trois montré de belles dispositions. Rappelons que Tiberi a été champion du monde du chrono en 2019 dans les rangs junior.
Nairo Quintana? Je n’y crois pas une seconde, mais une victoire d’étape demeure probablement possible pour le Colombien dans la tourmente depuis 12 mois.
Deux coureurs canadiens au départ: Riley Pickrell, 22 ans, qui découvre le cyclisme pro cette saison. Être à l’arrivée sera déjà très bien dans son cas.
L’autre, c’est Mike Woods, désormais un vétéran du peloton à 37 balais. Woods a peu couru cette saison, mais semblait en bonne condition mi-avril alors qu’il a terminé 13e du Tour du Jura cycliste. Je pense que Woods voudra se concentrer sur une belle victoire d’étape et les six arrivées en altitude seront très certainement son terrain de chasse privilégié.
Les autres classements
D’autres coureurs d’intérêt sont au départ de ce Giro pour jouer les victoires d’étape, chronos compris: Julian Alaphilippe, Filippo Ganna, Damiano Caruso, Christophe Laporte, Davide Cimolai, Biniam Girmay, Esteban Chaves, les frères Paret-Peintre et Alexey Lutsenko par exemple.
C’est peut-être pour les sprints que ca sera le plus intéressant, et six étapes au minimum devraient se terminer par un emballage massif.
On a en effet les Tim Merlier, Jonathan Milan, Fabio Jakobsen, Caleb Ewan, Fernando Gaviria, Kaden Groves, Olav Kooij et Phil Bauhaus dans ce registre.
Réponse le 26 mai prochain à Rome, mais on aura déjà des indications claires en première semaine vu le parcours.
Liège-Bastogne-Liège disputée hier marque la fin de la saison des Classiques, et l’entrée dans la deuxième phase du calendrier cycliste professionnel, soit le temps des grands tours.
En effet, on enchaine sous peu avec la Romandie, puis le Giro, le Dauphiné, la Suisse, et le Tour.
Si les épouvantails que sont Tadej Pogacar et Mathieu Van Der Poel ont régné en maitres absolus de ces Classiques (Tadej termine 3e à SanRemo, 1er sur les Strade Bianche et gagne hier à Liège, Mathieu remporte le Ronde, Paris-Roubaix, le GP E3 et fait 2e de Gent-Wevelgem) en l’absence de Wout Van Aert (presque) le seul à pouvoir donner la réplique, les coureurs français ont été impressionnants durant ce dernier mois, et il faut s’en réjouir.
Tour à tour, les Benoit Cosnefroy, Valentin Madouas, Christophe Laporte, Aurélien et Valentin Paret-Peintre, Paul Lapeira, Guillaume Martin, Romain Grégoire, Quentin Pacher, Kevin Vauquelin, Dorian Godon, Clément Champoussin et hier Romain Bardet, très bon 2e de cette Doyenne, ont pu obtenir des places d’honneur sur des courses majeures au cours du dernier mois.
Beau tir groupé pour le cyclisme français!
Et surtout, pas l’oeuvre d’un seul coureur: cette diversité laisse penser qu’il y a actuellement en France une profondeur de talents. On pourrait penser que la suite n’en sera que meilleure, notamment pour chasser des victoires d’étape sur les grands tours dès cette saison.
Excellent 2e hier, Romain Bardet nous a fait plaisir: entreprenant, osant l’attaque, il a fait la course jusqu’au bout, et sa place vaut quasiment une victoire derrière l’extra-terrestre Pogacar, coureur pour lequel je suis toujours aussi incapable d’expliquer une telle domination. Pogi hier, c’est le plus grand écart à l’arrivée depuis Bernard Hinault en 1981 sous la neige!
Je n’ai pas compris non plus pourquoi Mathieu n’était pas dans la roue de Pogi au pied de la Redoute, sachant que le gus d’UAE avait annoncé vouloir attaquer à ce moment précis de la course. Sûr qu’il n’avait pas les jambes pour suivre, mais au moins il aurait pu essayer. Au lieu de ca, VDP naviguait 20 coureurs derrière, on ne sait trop pourquoi.
Pidcock et le vainqueur de la Flèche, le cadavérique Williams, n’ont pu réellement peser sur la course dans le final.
Quoi qu’il en soit, j’ai bien aimé ce sommaire totalement décalé de Cycling Highlights.
Bref, le cyclisme français a de quoi se réjouir selon moi. Reste plus qu’à retrouver un Alaphilippe actuellement un peu à la dérive (mais c’est pas la faute à Marion), et ca sera complet pour la suite. Alaphilippe serait d’ailleurs actuellement en négociation avec Total Énergie (ou Cofidis?!) pour l’an prochain, et on le comprend après les déclarations malheureuses d’un Patrick Lefevere toujours aussi insipide, et de plus en plus ringard dans le cyclisme moderne, notamment par des propos déplacés envers le cyclisme féminin.
Pour le reste, ben vous m’avez manqué, lecteurs de La Flamme Rouge. Après de (très) longs mois de pause, La Flamme Rouge reprend un peu du service, tout simplement parce que j’en ai marre du désert d’information critique que nous offre actuellement la sphère média – que ce soit sites officiels, vlog ou vidéos YouTube, Instagram et j’en passe. Il y a deux ans, je me sentais perdu dans cet univers qui a beaucoup évolué, ne sachant plus quelle était ma valeur ajoutée… qui m’apparait plus claire aujourd’hui, toujours bien modestement. Si l’univers du ski de fond est désormais un centre d’intérêt très important dans ma vie, le cyclisme demeure, et demeurera toujours, une passion bien ancrée chez moi. C’est que je ne peux pas m’empêcher d’être sur le bout de ma chaise lorsque les coureurs abordent le Vieux Quaremont, ou entrent sur le Carrefour de l’Arbre!
Je compte sur vous pour la qualité de vos commentaires, question de continuer de faire de ce site une référence crédible dans le monde du cyclisme. Soyons articulés, respectueux de l’avis d’autrui, constructifs, et passionnés comme ces… 21 dernières années!
1min38 : c’est la facture de Pogacar par rapport à l’extra-terrestre Vingegaard hier sur ce chrono de 22 bornes. 22 petits kilomètres!
Personne n’a fait mieux dans l’histoire (moderne) du cyclisme selon moi.
Et jamais je n’aurais cru de tels écarts au départ.
On parle aujourd’hui encore de la performance de Miguel Indurain sur l’étape chrono de Luxembourg durant le Tour 1992.
Ce jour-là, Indurain avait créé un séisme sur le Tour en reléguant son co-équipier De La Cuevas à 3 minutes, sur 65 kilomètres. Bugno était 3min41, LeMond, encore la plus grosse cylindrée mesurée du cyclisme à ce jour, à plus de 4 minutes.
Ben hier, les 1min38 en 22 kilomètres de Vingegaard, c’est encore mieux!!
On a su par la suite que la victoire d’Indurain sur le(s) Tour était surtout celle de Sabino Padilla, lui-même disciple à la bonne école de Francesco Conconi.
Vinge hier, c’est en tout cas encore mieux que les 1min21 prise par Pogacar sur Tom Dumoulin dans le chrono de la Planche des Belles Filles sur le Tour 2020, sur 36 kilomètres et une ascension crissement plus longue qu’hier.
En d’autres mots, je suis sans mot.
Peut-être LA performance chrono de l’histoire du Tour de France. LeMond avait repris 58 secondes à Fignon sur le dernier chrono du Tour 1989, Versailles-Champs Élysées, 24,5 kilomètres.
Indurain, LeMond, Pogacar, out.
Vingegaard a fait beaucoup mieux hier. Il ré-écrit l’histoire.
Ne lisez plus ce site, je ne connais plus le cyclisme: je vous avoue franchement ne pas comprendre.
Seule chose qui me rassure, même Vingegaard a déclaré à l’arrivée hier s’être surpris lui-même… Hallucinant… je vous dis pas à quel point j’ai hâte que mon Garmin qui affiche mes watts me surprenne…
Devant une telle performance qui relègue tous les concurrents, Pogacar compris, à de vulgaires figurants sur ce Tour de France, l’humour reste la meilleure explication. Et la palme revient à ce twitt d’un observateur inspiré du cyclisme:
Et c’est vers la fin de Domancy que je me suis aperçu que j’avais gardé mes tongs à la place de mes chaussures de vélo, c’est cocasse.
Jonas vingegaard, facon erwann Mingam
Rien à ajouter. Apprécions le spectacle. La Loze? Un vulgaire ruban tout plat pour Vinge aujourd’hui.
Le mec fait 60 kilos (avec les tongs), et il y a encore trois ans, y’avait que sa mère qui le connaissait. Vinge, un vrai extra-terrestre. D’ailleurs, y’a un petit quelque chose du sourire de Venom dans celui du Vinge, non?!
C’est un Tour de France très serré jusqu’ici cette année, 10 petites secondes d’écart au classement général entre les deux monstres des courses par étape, Jonas Vingegaard et Tadej Pogacar, et ce après 15 étapes.
On peut trouver beaucoup, beaucoup d’analyses, de vidéos, de commentaires évoquant ce qui pourrait se passer d’ici à l’arrivée à Paris. Vingegaard ? Pogacar? J’ai pu lire et écouter tout et n’importe quoi hier.
On peut même entendre des analyses sur le port des gants par Pogacar, c’est dire… que voulez-vous, faut meubler le vide…
Pour moi, c’est très simple: contrairement à ce que beaucoup disent, le Tour ne se jouera pas aujourd’hui sur le chrono entre Passy et Combloux: trop court (22 kms), et la côte de Domancy n’est à la fois pas assez longue et pas assez sélective pour faire de grands écarts.
Bien sûr, avec 10 petites secondes à combler, Pogacar pourrait prendre le maillot jaune aujourd’hui. Mais il n’aura pas course gagnée pour autant, sauf accident bien sûr.
Pour moi, et certainement pour ceux qui l’ont déjà monté sur un vélo, le Tour de France se jouera ce mercredi entre Saint-Gervais Mont Blanc et Courchevel, sur les pentes cruelles du col de la Loze.
Une tuerie. Vraiment.
Du moment que vous quittez le haut de Méribel et entrez sur la piste cyclable qui monte au sommet de la Loze, c’est un enfer: 8 km atroces, des pentes très irrégulières, avec des ruptures de pente sans arrêt, un coup à 22%, un coup à 3%, et allez que ca recommence…
Dans un tel contexte, il est très, très difficile de trouver un rythme. Et le sommet est à 2300m d’altitude!
Sur mon 34-29 l’an dernier sur la Haute Route, j’ai souffert le martyr, comme tous les participants ce jour-là. Je compte sur les doigts d’une seule main les fois où j’ai eu envie de vomir sur une ligne d’arrivée, en 25 ans de compétition cycliste ; au col de la Loze, c’est passé très près.
Je vous rappelle que mercredi, on abordera la Loze après les Saisies, le Cormet de Roseland, puis la longue montée depuis Moutiers vers LePraz, 149 kms pour laminer les organismes déjà fatigués puisque dans la 3e semaine du Tour, avant d’attaquer ces pentes terribles de la Loze. Il faudra être fort mentalement pour ne pas craquer dans le final ce jour-là!
Rendez-vous mercredi soir pour connaître le vainqueur du Tour 2023. L’étape du Markstein samedi prochain ne changera plus rien.