J’aime bien Arnaud Demare. Depuis le début de sa carrière professionnelle.
Peut-être parce que je me retrouve beaucoup chez lui.
Un mec simple, très famille.
Un gars presque ordinaire, si ce n’était de son talent pour le cyclisme, extraordinaire lui. Tu ne gagnes pas les Mondiaux U23, Milan SanRemo, trois Championnats de France et des étapes sur le Tour et le Giro sans avoir une sacrée caisse.
Aussi attaché à ses racines, près de Beauvais, le Arnaud.
Le chalet à la montagne on en rêve tous, mais moi, ca va cinq minutes.
Arnaud Demare
Un bosseur aussi, près à tous les sacrifices car lui ne les perçoit pas comme tel, peut-être grâce à l’équilibre manifeste qu’il a su trouver entre vélo, famille, conjointe.
Tout cela transpire partout dans son récent livre nous faisant vivre sa saison cycliste 2021.
Une saison parfois compliquée, notamment en raison de sa mise hors délai sur l’étape dantesque sous la grande pluie et le froid, vers Tignes et remportée par Ben O’Connor. Pour quatre petites minutes après plus de cinq heures d’effort.
Il a eu du mal à s’en remettre, Arnaud. Une grosse déception, celle de n’avoir pu montrer ce qu’il pouvait faire sur ce Tour.
Déjà, le début de saison avait été ponctué par un manque de succès.
C’est souvent compliqué d’être sprinter, ca se joue à rien un sprint. Un écart, un coup de vent de pris, une erreur du poisson-pilote, et la victoire s’envole.
Puis il y a eu une belle fin de saison.
La Vuelta, pour se refaire.
Puis sa sélection et les succès de l’Équipe de France sur les Mondiaux remportés par Alaf.
Un Paris-Roubaix dantesque ensuite, qu’Arnaud nous fait vivre de l’intérieur. La guerre!
Puis cette magnifique victoire sur Paris-Tours, après s’être battu dans le final pour revenir sur les fuyards devant.
Le livre d’Arnaud, fait en collaboration avec Mathieu Coureau, ce n’est pas Blondin. Pas de la grande littérature.
Mais c’est efficace pour vous immerger dans la saison d’un coureur pro.
Pour ceux qui aiment le cyclisme, ce livre offre un bon moment de détente, après une journée chargée au travail par exemple. Perso, j’ai aimé retrouver le bouquin un peu tous les soirs ces deux dernières semaines.
Organisé de façon chronologique, on y retrouve des chapitres parfois différents, comme par exemple celui où Marc Madiot parle d’Arnaud Demare. Intéressant de voir la perspective du directeur sportif qui n’hésite pas à remettre les pendules à l’heure lorsqu’il le faut.
C’est un vrai cycliste Arnaud: il y a le moment où il met le dossard, et le moment où il l’enlève.
Marc Madiot
Bref, « Une année dans ma roue », c’est un livre simple, mais intéressant. À l’image du champion qu’Arnaud est.
Les deux premières épreuves de la saison de Coupe du Monde de ski de fond n’ont pas déçu: les hostilités entre Norvégiens et Russes sont commencées!
Ce fut d’abord le scandale Ruka: l’équipe norvégienne masculine au grand complet a décidé de ne pas prendre le départ du 15km style libre du dimanche, trop froid à leur goût (-18 au départ).
Les règles FIS ont pourtant été respectées.
Raison évoquée par les fondeurs norvégiens: la saison est longue, veulent pas prendre de chance avec leur santé.
De nombreux acteurs du milieu – y compris Norvégiens – ont dénoncé la situation, regrettable il est vrai.
Pour les Canadiens, ce fut une aubaine: Antoine Cyr (12e) et Olivier Léveillé (17e) en ont profité pour faire des performances remarquables, et obtenir ainsi leur ticket pour les prochains Jeux Olympiques. Kennedy n’est pas loin non plus.
Piqués au vif, les Norvégiens ont évidemment répliqué.
Les poules mouillées vous donnent rendez-vous en février, on verra ce qui se passera aux JO.
Johannes Hosflot Klaebo
Ruka est en tout cas à oublier pour les Norvégiens: au sprint, Klaebo s’est même fait battre par un jeune russe de 22 ans, Alexander Terentev, un sacré costaud celui-là pour s’offrir ainsi le roi de la discipline. Ouf!
Les images sont ici.
https://www.youtube.com/watch?v=M_cAsmbtn8Y
On remettait ça le week-end dernier du côté de Littlehammer, à domicile donc pour les Norvégiens.
Carton plein!
Klaebo s’est imposé dans les sprints, podium complet sur le 15km style libre (Krueger, Holund, Nyenget) et au relais par équipe.
Frustrés, les Russes! Chervotkin a été leur meilleur, mais ca n’a pas suffit pour donner la réplique aux Norvégiens, revanchards et chez eux. Ils sont neuf parmi les 12 premiers du 15 km!!
Chez les femmes par contre, deux performances incroyables: la suédoise Frida Karlsson qui s’offre la super-championne norvégienne Therese Johaug sur le 10 km style libre, cette dernière jouant à domicile, il fallait le faire.
Et dans le relais féminin, les Russes qui battent les Suédoises et les Norvégiennes grâce à leur jeune prodige de 20 ans à peine, Veronika Stepanova, lors du dernier relais. Superbe!
Retenez-bien ce nom, elle pourrait être la prochaine grande figure internationale du ski de fond féminin.
Je ne comprends pas la sélection norvégienne, qui a décidé de finir son relais avec Helene Marie Fossesholm, plutôt que Therese Johaug.
Intéressants, les relais en ski de fond: quatre relayeurs, deux en style classique (les deux premiers), deux en style libre, pour 7,5km chez les hommes et 5km chez les femmes.
Une gestion compliquée, tactique.
Évidemment, tu veux finir avec ton meilleur sprinter, au cas où. Pour les Norvégiens c’est simple, Klaebo.
Le relais qui peut faire la différence, c’est souvent le 2e en classique. Les Russes y avaient dépêché Bolshunov le week-end dernier, ca n’a pas suffit. Nyenget et Irversen ont pu résister au Russe, pour bien placer leur équipes Norvège 1 et Norvège 2.
Côté canadien, remarquable relais masculin qui termine 10e, devant les équipes France1 et France2 excusez-du-peu. Les Cyr, Kennedy, Ritchie et Léveillé ont été super-efficaces, et sur ce coup-là, personne ne pourra leur dire que les Norvégiens n’y étaient pas.
Par contre, moins bon chez le relais canadien féminin, avec une 16e et dernière place. Les filles (Steward-Jones, Browne, Beatty et Macisaac-Jones) veulent rebondir vite, et on leur souhaite bien entendu.
Payez-vous les images des courses relais Hommes et Femmes, c’est ici.
https://www.youtube.com/watch?v=LEOkrOnp-SM
https://www.youtube.com/watch?v=I0YohkN1Dhk
La suite
C’est le week-end prochain du côté de Davos, en Suisse. Un très beau parcours.
Au menu, des sprints en style classique le samedi, et un 15km en style libre le dimanche (10km chez les femmes).
La revanche des Russes?
Chez les Norvégiens en tout cas, la sélection nationale demeure très rude: Emil Irvensen, champion du monde en titre du 50 km, est laissé à la maison, condition physique jugée insuffisante. Aie, l’égo doit en prendre un coup.
On verra à l’oeuvre les Amundsen, Nyenget et Larsen en remplacement.
Sur le 15km, à surveiller Simen Hegstad Krüger, tout un skieur norvégien celui-là. Technique irréprochable. La classe sur des skis.
Pour ceux qui suivent le cyclo-cross, la saison nous avait habitué, jusqu’à présent, aux Iserbyt, Toon Aerts, Van der Haar, Vanthourenhout, Van Kessel et Sweek, entre autre.
À sa première apparition, Wout Van Aert a remis les pendules à l’heure!
Il a simplement détruit l’opposition ce week-end sur le très boueux parcours du Cyclocross Boom, un parcours parfait pour lui. N’avait-il pas battu Mathieu Van Der Poel sur un parcours très boueux l’an dernier déjà?
On attend avec impatience le 26 décembre prochain à Termonde, premier clash entre les deux grands de la discipline, Wout Van Aert et Mathieu Van Der Poel, avec Thomas Pidcock en arbitre.
D’ici là, on surveillera la rentrée de Mathieu le 18 décembre prochain du côté de Rucphen puis le lendemain en Coupe du Monde à Namur.
Ce sont des monstres!
Chez les femmes
La championne du monde Lucinda Brand continue de dominer sans partage.
Les Denise Betsema, Fem Van Empel, Ceylin Alvarado, Sanne Cant et Inge Van Der Heijden ne sont pas loin.
À noter l’excellente 4e de la Québécoise Maghalie Rochette, qui se rapproche progressivement du podium depuis un mois. La suite devrait être intéressante.
La Coupe du Monde 2021-2022 de ski de fond organisée par la Fédération internationale de ski (FIS) démarre demain vendredi depuis Ruka en Finlande, une fidèle étape depuis des années déjà.
Payez-vous les images de la course l’an dernier à Ruka, magnifique. Et un cours de belle technique libre en ski par Klaebo et Bolshunov!
Je parle très rarement d’autres sujets que le cyclisme sur route sur La Flamme Rouge. En presque 20 ans, il n’y a peut-être que le Vendée Globe qui s’est taillé une place récurrente, aux quatre ans.
Depuis au moins cinq ans, je suis de près et pratique moi-même assidument le ski de fond en technique libre. Je m’intéresse à tout, autant les athlètes de la Coupe du Monde et ceux sur l’équipe canadienne, les courses internationales et nationales, la technique, le fartage, le matériel, l’entrainement en salle, etc. Je suis également depuis plusieurs années les vlog de plusieurs coureurs de la Coupe du Monde, dont ceux de Klaebo et Burman.
Du coup, je me sens un peu moins imposteur aujourd’hui qu’avant, et ai décidé d’écrire de temps en temps sur ce sujet. D’où ce premier article.
Je rassure tout de suite tout le monde: le cyclisme sur route restera de très, très loin le sujet principal de ce blog. Mais comme de nombreux cyclistes sont fondeurs l’hiver, que le sport cycliste et le ski de fond sont des sports d’endurance similaires, que les techniques d’entrainement sont souvent communes à ces deux sports (et le dopage aussi bien tristement, Anderlass…), ben on peut se permettre quelques articles sur le sujet durant l’intersaison cycliste, non?
Les enjeux de la Coupe du Monde cette année
Avec 2022 année olympique, ils sont nombreux à avoir les Jeux comme principal objectif de leur saison.
Plus que 70 jours avant le début des Jeux.
Certains coureurs ne pensent qu’à ca depuis des mois déjà.
L’épouvantail cette année s’appelle Alexandr Bolshunov, le solide Russe de 24 ans. L’or olympique occupe toutes ses pensées, lui qui a décroché trois médailles d’argent et une de bronze aux derniers JO de Pyeongchang.
LA grande question: Bolshunov courra-t-il enfin intelligemment? Véritable force de la nature, un peu bourrin aussi, Bolshunov la joue toujours pareil en course, peu importe la distance: rythme très élevé mais assez constant, et essayez de me suivre!
Sauf que les Norvégiens, Klaebo en tête, peuvent eux, le suivre… et le torcher dans les derniers mètres de chaque course.
Il aurait intérêt à pratiquer le cyclisme sur route l’été, Bolshunov, parce qu’en vélo, t’as vite fait de comprendre qu’être derrière, c’est souvent très payant… quand l’autre bouffe du vent pour toi devant!!
Autour de Bolshunov, les autres Russes sont solides: Ustiugov, Melnichenko, Spitsov, Belov, Chervotkin, pour ne nommer qu’eux. Tous courent un peu à la Bolshunov cependant…
L’équipe norvégienne amenée par Klaebo demeure de loin la plus redoutable et la plus homogène. C’est dément!
Le plus dur pour un skieur norvégien, ce n’est pas de gagner une Coupe de Monde, c’est de faire l’équipe nationale pour pouvoir prendre le départ d’une Coupe du Monde…
Klaebo est actuellement intouchable dans les sprints, fort d’une technique spectaculaire: personne ne possède sa vitesse d’éxécution en « offset » lors d’ascension.
Klaebo a travaillé ses points faibles tout l’été, et il faudra voir s’il peut être plus constant sur les épreuves plus longues cette saison, par exemple les skiathlons ou les grandes distances (50 kms).
Les autres Norvégiens – Valnes, Holund, Irvensen, Kruger, Rothe, Amundsen, Golberg, Skar, Tonseth, Nyenget – sont tous capables de s’imposer au plus haut niveau, et régulièrement.
Désormais supérieure à l’équipe de Norvège chez les femmes, l’équipe de Suède monte aussi en puissance chez les hommes, amenée par Jens Burman. À suivre de près.
Pour le reste, ca sera des coups d’éclat, par exemple des Italiens avec Pelligrino, les Suisses avec Cologna qui a de beaux restes, et bien sûr les Français qui ont une belle équipe avec Magnificat, Chanavat, Jouve, Lapalus, Parisse, Lapierre, entre autre.
Chez les femmes, c’est simple: les courses se résumeront à un duel de tous les instants entre l’équipe de Suède, très riche en talents et amenée par Frida Karlsson, contre une seule norvégienne, l’extra-terrestre Therese Johaug.
Attention cependant à l’autre norvégienne Heidi Weng qui s’est entrainée comme une bête tout l’été. Il faudra aussi surveiller la progression de Helene Marie Fossesholm, norvégienne elle aussi. Enfin, l’équipe américaine chez les femmes est intéressante, avec la très colorée et talentueuse Jessie Diggins.
Les Canadiens(iennes)
Beaucoup d’enjeux de ce côté-là, pas facile de succéder à un super-champion comme Alex Harvey.
Chez les hommes, il faudra surveiller bien évidemment Antoine « Tony » Cyr, présenté comme le meilleur fondeur canadien en exercice. Percer le top-15, être régulier, seront ses défis cette saison. Pas facile, tellement un haut niveau le ski de fond en Coupe du Monde.
D’autres seront à surveiller: Graham Ritchie, Rémi Drolet, et le jeune prodige Olivier Léveillé, gros moteur celui-là et dont on peut penser que le développement musculaire est encore loin d’être terminé. Il débarque au plus haut niveau, c’est possiblement lui la perle en devenir du ski de fond canadien.
Chez les femmes, Catherine Steward-Jones, Cendrine Browne et Dharia Beatty seront les têtes d’affiche.
L’équipe canadienne a bien débutée sa saison récemment avec quelques belles perfs tant chez les hommes que chez les femmes, du côté de Beitostolen en Norvège et de Gallivare en Suède.
C’est Pierre-Olivier qui l’a dit hier en introduction à cette soirée conférence « Parlons Vélo » au Siboire Dépôt avec les invités Guy Thibault et Guillaume Boivin: la vision, c’est de faire de la ville de Sherbrooke une ville vélo.
Peut pas être plus clair.
Beaucoup de choses encore à venir dans les prochains mois!
Et c’est une bonne partie du gratin du vélo au Québec qui était présent hier au Siboire: on était venu de Gatineau certes, mais aussi de Bromont, de Drummondville, de Montréal, et de bien d’autres endroits au Québec et ailleurs (la Virginie par exemple) pour écouter Guy et Guillaume.
Très belle soirée, fort intéressante.
Autant pendant, qu’après!
Guy Thibault nous a d’abord servi un condensé des derniers développements en matière d’entrainement par intervalles. C’est toujours intéressant d’en apprendre davantage sur les formules qui donnent les meilleurs résultats, et notamment ce fameux 12x30sec full gas avec 4min de récup entre les intervalles. Formule « Gibala » pour ceux qui veulent en savoir plus!
Intéressant aussi de savoir qu’on peut faire des séances d’intervalles tout le temps, même à faibles intensités en mode récup.
Évidemment, il a été question avec Guy d’entrainement polarisé, la formule « à la mode » actuellement.
De la tyrannie du FTP aussi, comme celle des lactates. Une bonne idée, d’ailleurs, les lactates dans le sang au départ d’un chrono…
Ce fut ensuite le tour de Guillaume Boivin qui est évidemment revenu sur son Paris-Roubaix d’anthologie il y a quelques semaines avec son équipe Israel Start-Up Nation.
C’était « gooooood »….
Roule aux watts, Guillaume? Pas du tout.
L’important au bout du compte, c’est pas les watts, mais bien la vitesse. Parce que quand vient le temps de t’accrocher à la roue de Mathieu Van Der Poel, ben tu t’en fous des watts: faut juste que tu trouves le moyen de rester dans la roue de Mathieu!
Guillaume boivin, 23 novembre 2021
Sept gels à l’heure sur une course comme Paris-Roubaix, l’alimentation en course chez les pros n’est pas forcément celle qu’on croit…
53 psi dans les pneus de 30mm de section pour Guillaume sur Paris-Roubaix cette année, disputé sous la flotte.
Maudite chute…
Le plus dur pour un coureur québécois en WorldTour en Europe? L’exil, loin de sa famille.
Le secret du succès des jeunes pros en Europe actuellement, comme Pogacar ou Evenepoel? Pas facile à déterminer avec certitude, mais ces coureurs s’entrainent très bien depuis des années déjà, la science de l’entrainement ayant beaucoup progressé.
Et oui, on perd encore beaucoup de très bons athlètes en cyclisme au Québec, faute de bien pouvoir les développer et de leur offrir des opportunités de se faire valoir au plus haut niveau.
Oui, le développement du gravel du côté de l’UCI et des Fédés, c’est une bonne chose.
Enfin, ce qui fait la différence chez les pros? Selon Guillaume, la fraicheur au départ d’une course.
La déclaration est récente et nous vient d’Arnaud Démare, qui a évolué en 2021 au coeur du peloton WorldTour.
Il évoque aussi un « peloton à deux vitesses », et ca de quoi faire peur puisqu’on a l’impression, à quelque part, de revivre un mauvais film.
Le coureur français se pose manifestement des questions, et a le courage de les exprimer publiquement à l’occasion de la sortie de son livre « Un an dans ma roue« .
De nombreux coureurs ressentent la même chose que moi.
Arnaud Demare
Surtout, l’info est crédible puisqu’elle nous vient du coeur du peloton pro.
Je me pose aussi des questions plus sérieuses depuis quelques mois devant ce que je vois. D’autres aussi, dont les Antoine Vayer, Marc Kluszczynski et d’autres observateurs éclairés du cyclisme.
2022 pourrait nous apporter quelques réponses. Il faudra voir les performances offertes, les analyses de puissance, les forces en présence et celles qui, au contraire, auront du mal à suivre.
Nous vivons une époque particulière, il faut en être conscient: des jeunes coureurs, 20, 21, 22 ans, qui gagnent les plus grandes courses du monde, habituellement réservées à des coureurs plus matures. Des équipes qui gagnent avec des coureurs modestes, et d’autres qui marquent le pas. Des vitesses en hausse. Des coureurs qui ne courent plus beaucoup, qui s’entrainent dans leur petit coin et qui débarquent soudainement pour gagner. Et des nouveaux produits qui, constamment, débarquent du côté des pharmaceutiques, certains défiant toute imagination.
Parmi les conclusions de cette saison 2021, peut-être celle que le cyclisme ne tourne plus tout à fait rond.
Avec l’affaire récente de la tizanidine, on peut se demander si les autorités antidopage en font actuellement assez pour prévenir les dérives.
Déjà, des coureurs pro avaient exprimé leurs inquiétudes en 2020 devant la baisse drastique (baisse de 90%!) du nombre de contrôles hors-compétition. La situation serait revenue à la normale en 2021.
Les contrôles ne sont pas tout: encore faut-il qu’ils soient efficaces! Le sont-ils? Pas sûr! L’Affaire Armstrong nous a prouvé les limites de ces contrôles.
Marc Kluszczynski nous aidę aujourd’hui à y voir plus clair, et notamment du côté de l’Agence mondiale antidopage. Je le remercie encore de cette contribution!
Les limites de l’AMA (par Marc Kluszczynski)
Dans l’affaire de la tizanidine, l’AMA a une nouvelle fois montré des limites évidentes.
Non seulement la tizanidine n’est pas citée dans la liste des interdictions, mais la clonidine, substance dont elle dérive, est citée dans les exceptions des stimulants non spécifiés S6b. Elle est donc autorisée alors qu’elle favorise la sécrétion d’hormones de croissance et la mobilisation des lipides.
La trimétazidine, quant à elle, de stimulante, est maintenant au chapitre des modulateurs métaboliques (S4.4), alors qu’aucune preuve de son action n’existe.
Autre exemple,depuis plus de dix ans, on a assisté à la libéralisation des bronchodilatateurs et l’Agence mondiale antidopage (AMA) continue à nier leurs effets favorisant la performance.
Si les corticoïdes sont maintenant interdits en compétition pour toutes voies injectables, leur effet systémique quand ils sont administrés localement ont été reconnu avec 20 ans de retard.
Tous les ans, l’agence promet des études (comme avec les bronchodilatateurs) mais son faible budget annuel ne lui permet pas de les réaliser, ou alors elle n’en a pas la liberté puisque dépendante du Comité international olympique, son principal bailleur. Certains employés, exaspérés, ont démissionné.
Howman claque la porte
Alors qu’il avait occupé le poste de Directeur général de l’AMA de 2003 à juin 2016, David Howman, avocat néo-zélandais, avait déclaré le 16 avril 2019 lors d’une conférence des Partenaires pour un sport propre, que les méthodes de détection du dopage ont 50 ans de retard.
Selon lui, ces méthodes sont tout juste bonnes à attraper les « petits bricoleurs du dopage ». Lors de son passage à l’AMA, Howman avait subi les critiques de scientifiques s’étonnant du manque de volonté (ou de moyens) de l’agence pour innover. L’avocat, dans ses discours, citait « les progrès considérables réalisés par la communauté antidopage au cours des dernières années » (le 21 septembre 2015) ou encore « Notre travail consiste à faire en sorte que ceux qui empêchent les sportifs propres d’avoir un terrain de jeu équitable, soient expulsés du sport ».
Mais ces belles déclarations d’Howman n’étaient pas en adéquation avec les moyens très limités de l’AMA, moyens qui dépendent des pays signataires du code mondial antidopage et du CIO.
Le pire des constats concerne les transfusions sanguines autologues : alors que le Pr Björn Ekblom, pionnier de cette méthode dans le sport, déclarait qu’il est possible de les détecter, rien n’a été fait depuis 50 ans pour venir à bout de leur usage! Cela n’a jamais été un sujet prioritaire pour l’AMA depuis sa création en 1999, malgré leur probable généralisation dans tous les sports.
Pour le passeport sanguin, on sait qu’il peut être manipulé et truqué. Qui va le faire évoluer ?
Le 27 janvier 2019, Howman avait déjà mis la pression sur son ex-employeur, déclarant que Craig Reedie, président à l’époque, était plutôt au service de l’industrie du sport mondial qu’à la protection des athlètes propres. Il ne s’était pas gêné non plus pour critiquer Reedie et sa décision de réintégrer la RUSADA, alors que les critères exigés n’étaient pas atteints (reconnaissance des rapports Mc Laren et transmission des données du laboratoire de Moscou avant le 31 décembre 2018).
Devenu un des plus farouches critiques de l’AMA, Howman est devenu en avril 2017 le directeur de l’AIU (Athletics Integrity Unit) qui oeuvre de façon indépendante pour assainir l’athlétisme mondial. L’affaire n’est pas gagnée!
Howman avait reçu le renfort d’un autre éjecté de l’AMA, le Dr Alain Garnier
Le Dr Alain Garnier, ex-directeur médical de l’AMA dans les années 2000, déclarait en 2018 : « Les préoccupations de l’AMA ne sont pas de lutter contre le dopage, mais de le gérer afin qu’il ne nuise pas au sport ». Garnier, qui n’avait pas hésité à critiquer l’AMA en 2012 dans la conduite de l’affaire Armstrong, sera vite éjecté et remplacé par le Dr Olivier Rabin.
Garnier déclarait encore à propos de l’AMA : « Continuer à utiliser un système qui a fait la preuve de son inefficacité équivaut à tolérer le dopage ».
Avec hypocrisie, on continue de réaffirmer la nécessité de lutter contre le dopage, mais on n’agit que peu, ce qui convient à tout le monde, sauf encore une fois, aux sportifs propres, qui demeurent les premiers bernés.
Bref, l’AMA présente de nombreuses limites: ne vient-elle pas seulement de s’apercevoir que l’agence nationale antidopage d’Ukraine prévenait depuis 2012 les athlètes ukrainiens des contrôles inopinés qu’elle allait réaliser?
Ca fait beaucoup de bruit dans le monde du cyclisme professionnel depuis quelques jours: une équipe de scientifiques strasbourgeois a retrouvé des traces de tizanidine dans les échantillons capillaires des coureurs de la Bahrain-Victorious, perquisitionnée en juillet dernier lors du Tour de France.
Même s’il est surprenant d’en trouver un usage chez des coureurs cyclistes pro en excellente santé, la tizanidine n’est pas un produit interdit actuellement, il faut le dire.
La tizanidine est un relaxant musculaire, surtout utilisé pour traiter les spasmes musculaires liés à diverses pathologies.
Ce qui me gêne beaucoup plus, c’est que l’équipe Bahrain-Victorious ment: elle nie l’utilisation du produit durant le dernier Tour.
Or, on a bel et bien retrouvé des traces de ce produit dans les échantillons capillaires de trois de leurs coureurs, grâce à leur étude scientifique.
Et les gendarmes de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) qui ont mené la perquisition ont bel et bien retrouvé des boites de ce produit dans la chambre du médecin de l’équipe.
Quoi qu’il en soit et pour nous aider à y voir plus clair, on fait le point avec Marc Kluszczynski, que je remercie une fois de plus pour sa contribution à La Flamme Rouge.
Surprise attendue chez Bahrain-Victorious? Par Marc Kluszczynski
Le 14 juillet, au soir de la 17ème étape du Tour de France 2021, l’Oclaesp perquisitionnait l’hôtel de l’équipe Bahrain-Victorious. Des prélèvements de cheveux ont été effectués. Un résultat partiel vient de tomber (1) : présence de tizanidine chez trois coureurs.
Dans un premier temps, on est étonné de la trouvaille. Comme on l’a lu partout, ce médicament est utilisé pour traiter les spasmes musculaires de la sclérose en plaques et certaines paralysies, bien que son mécanisme d’action soit inconnu. Elle a tellement d’effets indésirables que l’on se demande comment des cyclistes peuvent l’utiliser. Est-ce pour son effet hypnotique, couplé à la relaxation musculaire, ou pour remplacer les benzodiazépines classiques ?
Pas sûr car l’accoutumance et la tolérance de la tizanidine sont connues.
D’autres effets indésirables sont gênants : sensation de bouche sèche, tachycardie, tremblements, anxiété, vertiges, hypotension orthostatique, révélation d’une dépression latente… Bref, tous les effets que l’on appelle anticholinergiques, qui empêchent la pratique d’un sport à haut niveau. En gros, une grosse saloperie !
Pourquoi alors la Bahrain-Victorious a-t-elle utilisé de la tizanidine ?
Il s’agit bien de cette équipe car c’est la seule à avoir été perquisitionnée lors du dernier Tour de France. Il s’agit bien de cette équipe car c’est la seule à avoir été perquisitionnée lors du dernier Tour de France. Les démentis du directeur sportif, Milan Erzen, sont donc sans fondement.
L’Oclaesp retrouva dans la chambre du médecin de l’équipe, le Dr Marjan Korsic, de nombreuses boîtes de Sirdalud ou Zanaflex, noms commerciaux de la tizanidine, vendue en pharmacie dans certains pays dont les États-Unis. En France, elle n’est disponible qu’à l’hôpital et bénéficie d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU, à ne pas confondre avec les autorisations pour usage thérapeutiques, les fameuses AUT !).
Quand on fouille dans la littérature, on apprend que la tizanidine est apparentée à la clonidine (antihypertenseur central dont la commercialisation a cessé en France en 2016 suite à des problèmes d’usage détourné chez les toxicomanes).
Sédative et anxiolytique, la clonidine renforce l’effet analgésique de la morphine et est utilisé dans le sevrage morphinique. On sait que la clonidine provoque une hyperglycémie légère, augmente la mobilisation des lipides et favorise la sécrétion d’hormone de croissance endogène. Autant de propriétés intéressantes pour un cycliste.
L’usage d’un myorelaxant et d’un antalgique (par quoi le tramadol a-t-il été remplacé dans le peloton ?) pourrait favoriser l’effort en fin d’étape.
Les effets indésirables à base de somnolence devront être vraisemblablement contrebalancés par une bonne dose de caféine le lendemain. Ce n’est certainement pas un problème (2). De très nombreuses équipes comptent parmi leurs sponsors ou fournisseurs officiels un torréfacteur. On peut citer Caffè Bristot pour Bahrain-Victorious, Il Magistrale Cycling Coffee pour Jumbo-Visma, Caffè Vergnano pour Lotto-Soudal ou encore Segafredo, sponsor principal de l’équipe Trek-Segafredo depuis 2016.
Les gels à la caféine sont également très populaires. La marque suédoise Maurten commercialise un gel contenant 100mg de caféine. Elle fournit officiellement pas moins de trois équipes UCI WorldTeam (Israel Start-Up Nation, Jumbo-Visma et Intermarché Wanty Gobert) ainsi qu’une équipe UCI ProTeam (Team Novo Nordisk).
L’Agence Mondiale Antidopage (AMA), comme souvent, n’a rien vu venir. La clonidine (donc ses apparentés et la tizanidine) figure dans la liste des interdictions 2022 au chapitre S6B des stimulants spécifiés (?) mais au bas de la page à l’alinéa exception (!). La clonidine (et la tizanidine) sont donc des substances autorisées et ne nécessitent pas d’AUT.
Les organisateurs du Tour de France savaient-ils ?
Chaque équipe doit déposer la liste des médicaments autorisés utilisés pendant le Tour. On s’attend à ce que la clonidine et la tizanidine passent maintenant d’urgence dans la catégorie S4 des modulateurs métaboliques.
On peut constater dans cette histoire que l’encadrement médical des Bahrain-Victorious (le Dr Marjan Korsic) est très fort, se fiche de l’éthique médicale, et que l’AMA est encore à la traîne (3).
La médicalisation à outrance semble continuer en World Tour, grâce à l’aide de médecins à l’affût qui savent interpréter la liste des produits interdits de l’AMA.
Mais il serait étonnant que la Bahrain-Victorious ne doivent tous ses succès de la dernière saison qu’à la tizanidine !
(1) L’article paru dans Wiley Analytical Sc J (Pascal Kintz, Laurie Gheddar, Jean-Sébastien Raul) ne cite pas le nom de l’équipe. Les concentrations retrouvées sont de 1,1 ;3,7 et 11,1 pg/mg. Seuls des prélèvements urinaire et sanguin sont officiellement reconnus par l’AMA.
(2) L’AMA a libéralisé la caféine en 2004, elle figure maintenant depuis 18 ans sur la liste des substances sous surveillance !
(3) Les similitudes avec la trimétazidine, qui avait suivi le même chemin, sont présentes. Sauf qu’on se demande encore pourquoi cette dernière substance est interdite.
Un coureur WorldTour, c’est actuellement autour de 30 000 kilomètres par an.
Soit presque 100 bornes par jour, six jours sur sept, 52 semaines par an.
C’est leur métier. Ils sont payés pour ca.
Mais ca pose quand même la question: font comment pour récupérer, et pour durer ?
Surtout qu’on apprend hier que UAE Team Emirates est cette semaine sur leur premier camp d’entrainement en prévision de 2022.
Ouf!
Perdent pas de temps eux.
Ca se passe du côté des Émirats Arabes Unis. Toute l’équipe est réunie pour ce premier stage.
Imaginez, Pogacar vient de gagner la Lombardie et pas trop le temps de souffler, il roule déjà sur les routes du désert avec ses équipiers, la saison 2022 en tête. À moins que lui ait bénéficié d’un aménagement particulier, c’est bien possible.
J’ignore de quoi est composé ce camp d’entrainement, et on peut supposer qu’il s’agit davantage d’entretenir les bonnes habitudes que de faire de grosses séances d’intervalles.
C’est la mode actuellement dans le peloton pro: ils sont rarement inactifs, comme pouvaient l’être les pros jusqu’il y a quelques années, qui n’hésitaient souvent pas à observer une coupure complète des semaines durant, de novembre à janvier.
Aujourd’hui, ca roule plus vite partout, sur la moindre course, le niveau est plus homogène, tu ne peux plus te permettre de perdre de la condition physique en observant un arrêt de six ou huit semaines.
Alors les camps d’entrainement se succèdent, jusque quatre au sein de certaines formations d’ici la reprise des courses fin janvier.
Pour récupérer, c’est technique micro-coupures: entre trois et sept jours de break, rarement plus, mais régulièrement durant la saison.
Et on orchestre savamment les séances de « zone 1 » (endurance de base) avec les séances d’intervalles très intenses, en ne manquant évidemment pas d’ajuster l’alimentation en conséquence chaque fois, question d’aussi faire attention aux kilos superflus.
Autrement dit, on ne bouffe pas la même chose lors du 4e camp d’entrainement qu’en octobre lors du premier. On ne bouffe pas la même chose le soir d’une séance d’intervalles dans les cols, que le soir d’une longue sortie relax.
Tout est au millimètre. Optimisé. Un héritage des fameux « marginal gains »?
Il y a un revers de la médaille: la santé mentale. Plusieurs ont du mal à supporter la pression constante, comme s’ils ne pouvaient jamais vraiment débrancher la tête pour vraiment récupérer. Les cas de coureurs fragilisés mentalement se sont multipliés ces dernières années.
Même sur six jours de repos seulement, certains culpabilisent. D’autres y perdent leur passion du cyclisme, qui devient alors un métier, voire une obligation.
Il faudra voir si le cyclisme féminin, en plein essor, sera soumis à pareil régime. J’ai bien peur que oui. Rendez-vous pris pour faire le bilan dans quelques années de ces régimes infernaux.
Le temps de Bernard Hinault et Greg Lemond pour franchir les 163 kilomètres de l’étape Briançon – L’Alpe d’Huez lors du Tour de France 1986.
Une étape reprise à l’identique sur le Tour 2022.
Et sur l’Étape du Tour cyclo.
Vous avez été très nombreux à répondre à l’appel, les inscriptions pour l’Étape du Tour se sont envolées hier en quelques heures à peine. Fou!
De quoi vous mesurer directement avec l’histoire du vélo.
Ca sera très intéressant de voir le temps des tous premiers sur l’Étape du Tour, ainsi que le temps du vainqueur sur le Tour 2022, Tadej Pogacar peut-être!
Une magnifique étape, avec les majestueux Lautaret puis Galibier depuis Briançon, souvent escaladés vent de face.
Puis la belle descente sur Valloire, roulante, et la descente plus technique du Télégraphe.
La vallée entre St-Michel et St-Jean, plus roulante dans ce sens que l’inverse.
Le sauvage col de la Croix de Fer et ses difficiles rampes après St-Sorlin d’Arves.
La plongée casse-pattes vers Allemont, puis la courte vallée vers Bourg d’Oisans avant d’entamer les 21 célèbres lacets de l’Alpe d’Huez.
Pas super-difficile l’Alpe d’Huez, mais après 145 bornes en haute montagne c’est une autre histoire…
Pour revivre cette belle étape du Tour 1986, et dans l’attente de 2022, voici de quoi revivre des grandes heures du cyclisme, avec des animateurs télé de légende.