Ils étaient cinq.
Cinq coureurs tous avec des raisons précises d’y être, dans ce final de Liège-Bastogne-Liège.
Dossard 41 le jour de son 41e anniversaire de naissance, Alejandro Valverde voulait écrire une ligne de plus à son histoire et à l’histoire du cyclisme en rejoignant Eddy Merckx comme quintuple vainqueur de La Doyenne.
Julian Alaphilippe voulait effacer la gêne de 2020 où il avait perdu la course au sprint face à Primoz Roglic en levant les bras trop tôt avant la ligne.
Tadej Pogacar voulait quant à lui simplement montrer qu’il n’était pas venu sur les Ardennaises pour y faire de la figuration, frustré de son éviction de la Flèche Wallonne mercredi dernier sur un test faux-positif de Covid-19 au sein de son équipe.
David Gaudu voulait quant à lui en décrocher une belle et redonner le sourire à la Groupama-FDJ éprouvée par un leader Thibault Pinot qui va de mal en pis. Et pourquoi pas franchir un statut à la Groupama-FDJ, question de prouver que lui aussi peut être un vrai grand leader.
Et enfin Mike Woods, 2e en 2018 sur l’épreuve, qui voulait enfin – enfin – en décrocher une belle pour laisser sa marque dans le cyclisme, et rejoindre Steve Bauer et Ryder Hesjedal au panthéon du vélo canadien.
Inutile de vous dire qu’une fois partis, on n’allait pas revoir ces cinq là.
Une sélection opérée de brillante façon par Mike Woods sur le haut de la Roche aux Faucons, une attaque parfaite, au bon moment, bien dosée, et qui a fait mal à plusieurs favoris, les Ineos en premier lieu mais aussi Primoz Roglic.
Juste avant, Davide Formolo chez UAE Team Emirates avait produit un gros relais pour aller chercher Carapaz, montrant que l’équipe en force sur ce LBL n’était peut-être pas Ineos mais bien UAE!
Carapaz, c’était évident que c’était un feu de paille, juste trop fort son intensité, et de trop loin. Mention très bien toutefois à son coéquipier Tao Geoghegan, qui a provoqué la première grosse sélection dans La Redoute.
En gros hier, c’est Mike Woods qui a tout fait péter en haut de la Roche aux Faucons, et ça, ça nous a vraiment électrisé. Thanks Mike for making every Canadian cycling fan out there proud! I’ll make sure to be on your wheel on your next attack going up Pink Lake…
Malheureusement par après pour Woods, restaient 10 bornes roulantes.
La collaboration a été excellente entre les 5 coureurs, qui ont tous fait une vraie belle course. Ça s’est joué à la pédale. Et après 255 bornes, la pédale, ben c’est pas simple.
Si on veut chipoter un peu, on pourra dire que Mike Woods en a fait beaucoup sur ces 10 derniers kilomètres, davantage par exemple que ce vieux briscard de Valverde.
Perso, si j’avais été à la place de Mike, après avoir initié le move, je n’aurais plus bougé devant le plateau autour de moi: Valverde 4 fois vainqueur, Alaf champion du monde, et Pogacar vainqueur en titre du Tour. Vous me demandez un relais les boys? Yeah, right, je n’ai pas le tiers de la moitié de votre palmarès, alors sur ce coup-là, c’est à vous de voir si vous voulez que ça revienne derrière mais moi, je reste planqué dans vos roues. J’ai déjà donné d’ailleurs. On se revoit au sprint.
Mike est beaucoup passé en tête, très bien, mais ça lui a surement coûté de la fraicheur dans le sprint, notamment sa relance avec 1,4 kilomètre à faire, où il a manifestement tenté de surprendre son monde. Il est 5e sur la ligne.
Valverde a cru bon de nous refaire le coup des Mondiaux 2018 en menant le sprint en tête; ce n’est pas passé cette fois-ci. Mike était dans sa roue, peut-être pas le meilleur choix mais à ce moment-là, les choix ne sont pas simples.
Pogacar a choisi la roue d’Alaf, bien vu. Il le remonte dans les derniers 25 mètres, en puissance, rien à dire. Propre. Le plus fort a gagné, point barre. Pour preuve, aux 200 mètres, Pogacar était 5e!
La surprise est venue de David Gaudu, 3e. Sous la flamme rouge, je le plaçais 5e et dernier du groupe.
Bref, très belle épreuve, passionnante à partir de La Redoute. Je suis déçu pour Mike Woods, qui a fait une belle course, qui était probablement le 2e plus fort avec Pogacar, et qui a simplement été battu par plus fort que lui. Valverde demeure sa bête noire.
Alaphilippe mouché une 2e année de suite au sprint, et par un coureur slovène, c’est peut-être lui qui a le plus de regrets aujourd’hui, même si beau joueur en entrevue d’après-course, il semblait déjà très satisfait de son podium et de sa semaine dans les Ardennes. Effectivement, en cyclisme, tu ne peux pas toutes les gagner. À moins de t’appeler Eddy Merckx bien sûr.
Insulte suprême pour le couac Ineos sur LBL, Carapaz est disqualifié pour avoir pratiqué la position « supertuck ». Je me suis fait la réflexion en direct devant mon écran! On peut être pour ou contre cette mesure, mais force est de reconnaître que l’UCI a de la suite dans les idées. Aucun doute pour moi que Carapaz était fautif ; du coup, le premier Ineos à l’arrivée, Kwiatkowski, est 11e, en dehors du top-10!
Notre intérêt se tourne désormais vers le magnifique Tour de Romandie, ultime épreuve de prépa en vue du Giro qui est à nos portes. Thibault Pinot a déjà annoncé son forfait pour ce Giro, sans annoncer la suite de son programme. Mais c’est une autre histoire. Nous y reviendrons.



