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Affaire Armstrong: les réponses à vos questions

Depuis une semaine, on lit tout et n’importe quoi sur l’Affaire Armstrong. Il y a 7 ans par exemple, c’était la jalousie des Français qui était évoquée pour expliquer le dossier L’Équipe. Plus tard, ce fut l’esprit mercantile de Walsh et Ballester comme explication à leurs livres-enquête L.A. Confidentiel et L.A. Officiel. Ironie du sort, Armstrong est maintenant condamné par l’agence anti-dopage de son propre pays. Du coup, on évoque désormais un « agenda caché » ou une « chasse à la sorcière ». Chaque fois donc, on trouve quelque chose pour délirer.

Je vous propose de tenter de faire le point sur un certain nombre de vos possibles questions. Je ne prétend pas tout savoir des dessous de l’affaire. Néanmoins, je propose mon analyse à votre sens critique, estimant que cette analyse est raisonnable et probablement assez proche de la réalité pragmatique des choses.

Pourquoi l’USADA a-t-elle poursuivi Armstrong pour dopage?

Tout simplement parce que son mandat est de garantir l’intégrité du sport aux États-Unis, comme celui du CCES est de garantir l’intégrité du sport au Canada. L’USADA n’a eu d’autres choix en raison de l’accumulation des preuves et des témoignages de dopage à l’endroit de Lance Armstrong. Devant une telle accumulation, que pouvait-elle faire d’autre? L’inaction aurait été pire encore, on aurait alors reproché à l’USADA de ne pas faire son travail.

L’USADA a-t-elle un agenda caché pour « descendre » Armstrong?

Je ne crois pas. Il est en effet difficile de voir en quoi le procès Armstrong est bénéfique pour l’USADA, qui n’est pas un organisme à but lucratif. L’USADA fait son travail, c’est tout, et elle n’avait d’autre choix que de le faire devant l’accumulation des preuves à l’endroit d’Armstrong. C’est un peu comme le scandale de la construction au Québec: devant l’importance des scandales, le gouvernement n’a eu d’autres choix, à un certain moment, que de mettre sur pied une commission d’enquête.

Pourquoi le gouvernement américain a-t-il mené une enquête avant l’USADA?

Parce que US Postal est une compagnie américaine publique et parce que la constitution des États-Unis interdit à un fonctionnaire (le statut d’Armstrong chez US Postal en quelque sorte puisqu’il était payé à partir de fonds publics) de mentir. Hors, Armstrong niait s’être dopé. Devant l’accumulation des preuves et des témoignages dans le procès entre Armstrong et sa compagnie d’assurance chargée de lui verser des sommes considérables en cas de victoire sur le Tour de France (prémisse à toutes ces enquêtes), le gouvernement n’a eu d’autres choix que de chercher la vérité, étant responsable à l’égard du peuple américain.

Pourquoi Novitsky a-t-il abandonné son enquête fédérale?

C’est une question difficile auquelle on ne peut répondre avec certitude. L’enquête s’est terminée abruptement, laissant croire à une décision politique soudaine d’un supérieur de Novitsky. Il n’est pas impossible (voire probable) que Lance Armstrong et son entourage aient pu influencer une personne ayant le pouvoir de tout stopper. Qui plus est, l’enquête des fédéraux américains visait à prouver qu’Armstrong avait menti au peuple américain, pas qu’il s’était dopé…

Pourquoi Armstrong n’a-t-il pas réussi à stopper l’USADA?

Ce n’est pas faute d’avoir essayé! Armstrong s’y est pris par trois fois, et a été à chaque fois débouté. Il a perdu parce que c’est le mandat de l’USADA que de lutter contre le dopage dans le sport aux États-Unis. Aucun juge, aucun tribunal n’a pu aller contre cela. Armstrong avait même reconnu, plus tôt dans sa carrière, l’autorité de l’USADA en la matière!

Armstrong demeure le meilleur puisque tous ses adversaires étaient aussi dopés que lui.

C’est peu probable. Le dopage n’est pas uniforme dans le peloton professionnel puisque les moyens financiers ne le sont pas. Il est utopique de penser qu’un coureur gagnant 40,000 euros par an dans le peloton pro peut se permettre un programme de dopage aussi sophistiqué que ceux gagnant des centaines de milliers d’euros. Déjà en 1997, Richard Virenque chez Festina consacrait des sommes considérables à son programme de dopage. Les chèques retracés entre Lance Armstrong et Michele Ferrari font aussi état de sommes considérables, de l’ordre d’un demi-million de dollars.

Lance Armstrong a gagné 7 Tours de France car il était dopé, et mieux que les autres. Il n’est pas impossible que la même chose se produise actuellement chez les Sky, l’équipe la plus riche du peloton professionnel actuel.

Armstrong n’a jamais échoué de tests antidopage, donc on ne peut croire l’USADA.

Les contrôles anti-dopage ne prennent qu’une infime proportion des coureurs cyclistes qui se dopent. Le plus souvent, on peut croire que ceux qui sont pris ont commis une erreur. Beaucoup de coureurs pros suspendus pour dopage depuis 15 ans l’ont été à la suite d’enquêtes judiciaires ou d’actions policières: Puerto, Oil for Drugs, etc. Qui plus est, l’USADA aurait les preuves que Lance Armstrong était prévenu d’avance des contrôles, lui permettant de se préparer à les déjouer. Et au pire des cas, lorsqu’un contrôle était positif dans son cas, l’UCI a étouffé l’affaire, comme sur le Tour de Suisse 2001.

D’autre part, les témoignages recueillis à l’endroit d’Armstrong et provenant de ses ex-équipiers sont largement suffisants, sur le plan légal, pour convaincre quelqu’un d’usage de produits dopants. Si les témoignages de Landis et Hamilton n’auraient peut-être pas été suffisants, ceux de Vaughters, de Leipheimer et d’Hincapie ont « bétonné » le dossier.

Lance Armstrong était un grand coureur.

Lance Armstrong était un bon coureur pro, mais pas un grand champion. Le dopage sanguin permet aujourd’hui de convertir un coureur moyen en un super-champion. L’exemple de Bjarne Riis est éloquent à ce sujet. Coureur modeste du peloton, l’EPO a fait de lui le tombeur de Miguel Indurain en 1996, rien de moins! Et je laisse tomber l’équipe Gewiss de 1994…

Il est connu que la VO2 max de Lance Armstrong était moyenne. Ses qualités sportives étaient ailleurs: une tolérance aux lactates peu commune et surtout, un mental de fer, hors norme. L’honnêteté intellectuelle exige de lui reconnaître ces deux dernières qualités.

Sans le dopage, Lance Armstrong aurait fait une carrière honnête, à l’image par exemple de celle d’un Maurizio Fondriest qui possède un beau palmarès sur les courses d’un jour, dont un titre de champion du monde comme Armstrong. Le dopage aura permis à Lance Armstrong de s’élever au rang de super-champion et de flouer des coureurs avec davantage de talent que lui, comme par exemple Jan Ullrich (qui était dopé lui-aussi, bien sûr, mais peut-être pas de la même façon qu’Armstrong, où pas aux mêmes doses). Un peu comme le dopage aura permis à Geneviève Jeanson d’elle aussi s’élever au rang de super-championne, alors que ses qualités physiques initiales étaient plus modestes.

En ce sens, le dopage sanguin est une vraie merde car il peut fausser profondément les hiérarchies génétiques, une chose que le dopage plus classique (non sanguin, celui des années 1980 et avant) ne pouvait pas faire.

L’UCI portera-t-elle les sanctions de l’USADA en appel?

Je pense que c’est peu probable. La preuve accumulée par l’USADA renferme des éléments très embarrassants pour l’UCI, notamment des preuves de contributions monétaires d’Armstrong, voire de protection en cas de contrôle positif. L’UCI sera tentée de porter l’affaire en appel pour protéger  l’image du cyclisme, mais elle prendrait alors un très gros risque, celui de voir toute la preuve étalée au grand jour, et donc des éléments très accablants pour sa propre crédibilité.

Je pense donc que l’UCI « larguera » Armstrong car elle voudra d’abord se protéger elle-même en gardant les preuves dans le domaine privé.

La Fédération Française de Cyclisme a-t-elle raison de demander à Lance Armstrong de lui redonner les prix monétaires gagnés lors des compétitions?

Je crois que oui. L’USADA possède les preuves que les victoires de Lance Armstrong ont été acquises grâce au dopage. Il est donc normal que Lance Armstrong, qui a triché, redonne les primes monétaires de ses victoires, car il n’aurait pas dû les toucher.

Pourquoi revenir si loin en arrière?

Parce qu’il est possible de le faire, tout simplement. Et parce que cela envoie un message fort qui aide la lutte contre le dopage: les tricheurs ne seront jamais tranquilles si on peut revenir en arrière comme on a pu le faire avec le dossier Armstrong, dont une partie non-négligeable repose sur des témoignages de ses ex-équipiers (et ils sont nombreux).

Landis, Hamilton, et les autres ne sont que des menteurs et des jaloux.

La réalité est qu’ils n’ont rien à perdre, puisqu’ils ont déjà tout perdu eux-mêmes dans leurs propres affaires de dopage. Dans ce contexte, ils ont décidé de se libérer la conscience et de parler, brisant ainsi l’omerta tacite du milieu. Ils ont très certainement été encouragés par les aveux de Bjarne Riis et d’autres, tout comme Vaughters récemment. Une vengeance à l’endroit d’Armstrong? Non, je ne crois pas. Encore une fois, la simple nécessité de se soulager la conscience après des années de mensonge prime probablement. Et aussi d’enfin se faire lâcher par ceux qui les poursuivaient sans relâche pour comprendre le « système US Postal ». En parlant, Hamilton, Landis et les autres (dont probablement Hincapie) vont retrouver la paix, la sainte paix.

Il faudrait que la preuve USADA sorte au grand jour.

Je suis bien d’accord! C’est la condition nécessaire pour que l’Affaire Armstrong dépasse le simple cas de ce coureur cycliste. C’est la condition nécessaire à un grand ménage dans le cyclisme. Je crois, encore une fois, que l’UCI ne portera pas la cause en appel car son intérêt est que la preuve demeure privée. L’UCI a trop à perdre dans l’affaire… Mais ce serait tellement bien que Lance Armstrong se mette à table et nous aide à comprendre les années 1990 et 2000, ces années sombres du cyclisme…

Lance Armstrong a donné de l’espoir à des millions de gens.

Vrai et faux. Vrai dans la mesure qu’on ne peut contester qu’il a vaincu le cancer des testicules, un cancer qui, par ailleurs, présente de bonnes statistiques de guérison. Faux lorsqu’il affirme qu’on peut gagner un Tour de France après un cancer. C’est le dopage, un dopage sophistiqué, organisé, institutionnalisé au sein de son équipe, qui lui a permis de réaliser cela. En ce sens, sans le dopage, Armstrong ne serait pas devenu un « héros américain » sur la base d’accomplissements exceptionnels. Mais il aurait pu mettre de l’avant qu’il a réussi à vaincre le cancer, comme d’autres personnes. On ne peut lui enlever cette victoire sur la maladie.

Affaire Armstrong: pourquoi nous sommes tous perdants

Plusieurs penseront que je me réjouis de la chute de Lance Armstrong qui a décidé de ne pas contester les sanctions imposées par l’USADA à son endroit dans le cadre de son procès pour dopage durant sa carrière.

Et bien non.

Car dans l’affaire, nous sommes tous perdants, du moins pour le moment. Il n’y a vraiment pas de quoi se réjouir.

Lance Armstrong est évidemment perdant. Il est désormais reconnu de dopage durant toute sa carrière. Il perdra probablement ses sept victoires au Tour de France, peu importe ce qu’il en dit. Son image est à jamais ternie, il est désormais reconnu comme un tricheur. Sa fondation en souffrira probablement, mais peut-être pas tout de suite. En attendant, Armstrong s’est placé en mode « damage control » et continue sa manipulation de l’opinion publique, faisant soudainement passé son statut de survivant du cancer à l’avant plan de ses communications, et reléguant son statut de champion cycliste derrière. Il cherche désespérément à garder le contrôle, notamment en essayant de se placer au dessus des lois, ce qui est évidemment insupportable et une preuve que ce type n’a aucun respect pour ses semblables, c’est à dire ses fans, vous et moi.

Lance Armstrong est cependant probablement moins perdant qu’on le croit. Car en acceptant de ne plus se battre contre l’USADA, Armstrong s’est assuré d’une chose fondamentale pour lui: que la preuve demeure privée. Cela lui permet d’entretenir le doute dans l’esprit des gens, ce qu’il s’efforce admirablement de faire durant les derniers jours. Je suis convaincu que les avocats d’Armstrong lui ont conseillé d’accepter la sanction de l’USADA car le plus important, c’est désormais de faire du « damage control » tout en s’assurant que le grand déballage n’aura pas lieu.

L’UCI est également perdante dans l’affaire. Sa crédibilité a été une fois de plus très malmenée dans l’affaire. Se tenant loin au départ, l’UCI a en effet très maladroitement essayé de prendre le contrôle de l’Affaire Armstrong il y a quelques semaines. Et voilà qu’Armstrong la place dans une situation très embarrassante en ne contestant plus l’USADA: l’UCI est désormais la seule à pouvoir contester, devant le Tribunal d’Arbitrage du Sport, la sanction de l’USADA. Bref, en clair, Armstrong a refilé l’épineux dossier à l’UCI. C’est bien joué.

La situation est très délicate pour l’UCI. Si elle conteste l’USADA, elle a beaucoup à perdre. La preuve serait alors rendue publique et l’UCI sait que cette preuve pourrait porter encore davantage atteinte à sa crédibilité, des preuves qu’elle aurait protégé Armstrong pouvant faire surface. Elle sait aussi la preuve solide, donc c’est très risqué que de contester puisqu’on l’accusera assurément de prendre parti pour Lance Armstrong malgré la solidité du dossier.

Je pense donc que l’UCI se taira et acceptera les sanctions, comme Lance Armstrong l’a fait. Cela leur permet de garder la preuve privée, donc de limiter les dégâts et d’entretenir le doute.

L’USADA est également perdante car elle n’a jamais rien eu à gagner dans cette affaire et elle porte atteinte au sport cycliste, bien malgré elle. L’USADA n’a rempli que son mandat qui est de garantir l’intégrité du sport aux États-Unis. Devant les accumulations de preuves de dopage à l’endroit de Lance Armstrong, notamment les déclarations de ses ex-équipiers, elle n’avait d’autres choix que d’instruire cette enquête afin de remplir son mandat.

Enfin, nous sommes tous perdants, nous les fans et le public, car cette affaire risque d’en rester là. En l’absence d’une contestation par l’UCI, la preuve demeurera privée, nous empêchant de connaître les détails du système Armstrong, nous empêchant de comprendre, et donc de donner un grand coup de balai dans le cyclisme. Je suis convaincu que la preuve accumulée par l’USADA, notamment les témoignages, auraient pu nous permettre de bien comprendre comment fonctionne le dopage dans le cyclisme, et donc de condamner d’autres acteurs et de faire avancer la lutte contre le dopage.

Ce sera donc une immense frustration d’une occasion manquée si jamais l’affaire Armstrong en restait là, ce que je crois par ailleurs qu’il va arriver, l’UCI ayant trop à perdre si jamais elle contestait l’USADA. Le dopé et menteur Lance Armstrong va continuer à raconter ses inepties au public pour entretenir sa crédibilité auprès de gens peu au fait de la situation. Johan Bruyneel va continuer d’opérer dans les coulisses des équipes pros. Michele Ferrari continuera de doper des athlètes de divers sports. L’UCI continuera de régenter le cyclisme avec un seul but, préserver son image, peu importe les moyens pris.

Bref, dans toute cette histoire, je ne vois absolument aucune raison de nous réjouir. C’est même d’une tristesse infinie.

Réaction au texte de Pierre Foglia

Comme beaucoup d’autres, Pierre Foglia laisse entendre, dans un récent texte, que comme tous les adversaires d’Armstrong étaient aussi dopés à l’EPO, c’est tout de même le meilleur qui a gagné. Il écrit « Lance Armstrong a triché comme tout le monde« .

Ce raisonnement ne tient pas la route.

Ce que beaucoup de monde ne réalise pas, c’est que d’une part, tout le monde n’était pas dopé. Il faut tout de même le dire et l’écrire, ne serait-ce que par respect pour Christophe Bassons et d’autres encore! Donc Lance Armstrong a bel et bien volé le palmarès de nombreux coureurs intègres, de la même façon que Geneviève Jeanson a volé le palmarès d’autres filles, et notamment de Lyne Bessette.

Il faut ensuite réaliser que le raisonnement de Foglia sous-entend une hypothèse, celle que les dopés sont dopés égal. C’est évidemment faux! Entre un Lance Armstrong multi-millionnaire pouvant s’offrir les cures de préparation de Michele Ferrari et un autre coureur, aussi dopé, pointant 23e du général, il y a un monde de différence dans les produits dopants utilisés! On sait que le programme annuel de dopage de Richard Virenque lui coûtait 300,000 euros en 1997 chez Festina! C’était probablement beaucoup plus encore pour Lance Armstrong.

Bref, il ne faut jamais oublié que sur une ligne de départ d’une course professionnelle, il y a des coureurs non-dopés, il y a des coureurs « un peu » dopés et il y a des coureurs « très dopés » avec les meilleurs produits du moment. L’éthique sépare les non-dopés des autres, le portefeuille sépare les peu dopés des très dopés.

Affaire Armstrong: l’AMA sert un camouflet à l’UCI

Je suis ravi de la déclaration faite hier par l’Agence Mondiale Antidopage (AMA) qui a affirmé que l’USADA a toute l’autorité nécessaire pour poursuivre Lance Armstrong et 4 autres personnes dans un procès pour dopage organisé entre 1999 et 2010.

Voilà tout un camouflet pour l’UCI qui, une fois de plus, paraît partiale dans cette histoire. On peut en effet raisonnablement penser que la seule volonté de l’UCI lorsqu’elle réclamait l’autorité de l’Affaire Armstrong était en fait de protéger le champion américain, et donc l’image du cyclisme… et surtout la sienne.

Espérons de tout coeur que l’USADA ira de l’avant. Nous en saurons davantage autour du 15 août prochain.

Un ciel pas tout à fait clair pour l’équipe Sky

Très intéressant commentaire à propos de l’équipe Sky laissé par Alain39, un fidèle lecteur de La Flamme Rouge. Je reprend la balle au bond, et me permet quelques commentaires supplémentaires.

Le commentaire d’Alain porte sur la suspicion qu’engendrent les performances peu communes de l’équipe Sky sur le récent Tour de France. Revenons sur les éléments crédibles pouvant alimenter cette suspicion, question d’étoffer un peu le discours sans verser dans le jugement facile.

1 – Les calculs de puissance. Antoine Vayer est sans appel: les puissances moyennes ont ré-augmenté sur le Tour cette année, après quelques années où elles étaient en baisse. On est revenu, dans certains cas, aux valeurs des belles années EPO, notamment dans ce col de Peyresourde que Wiggins et Froome ont grimpé seulement 34 secondes plus lentement que Rasmussen et Contador dans le Tour 2007, alors qu’ils se tiraient la bourre à raison de grands sprints sur-réalistes. Wiggins et Froome ont ensuite réussi à accélérer le rythme dans la dernière montée sur Peyragues!

Bref, il convient de regarder ces performances avec un peu de recul car elles sont surprenantes. Limites même.

2 – l’AICAR. Ce produit miracle est-il vraiment détectable comme on le laisse penser? Pas sûr. Dans le doute, on ne peut avoir la certitude que les coureurs du Tour étaient propres, ce produit ayant pu échapper aux contrôles. Peut-être pas pour bien longtemps, et c’est là un véritable espoir si des tests rétroactifs sont appliqués.

3 – Ténérife. Comme c’est la mode depuis quelques années, les grands favoris du Tour s’éclipsent dans les 3 semaines précédents la compétition, voire en mai (c’est de plus en plus fréquent). Wiggins a choisi Ténérife pour s’entrainer un mois durant, adoptant apparemment une vie de moine (il aurait grimpé 100,000m de dénivelé en un mois!). Le but était triple: s’acclimater à la chaleur, grimper des cols (un volcan) et s’acclimater à l’altitude. Ténérife est aussi un des lieux où officie un certain Michele Ferrari. Un hasard, probablement. Que voulez-vous, c’est bien connu: on ne choisit pas ses voisins…

4 – Tim Kerrison. Le « scientifique du sport » chez Sky, l’homme qui a transformé Bradley Wiggins. Il travaillait auparavant comme entraineur en… natation. C’est bien connu aussi: rien de tel qu’une approche « nouvelle » pour repousser les limites. Nous n’avons pour l’instant rien à reprocher à M. Kerrison, mais la transformation Wiggins qu’il a dirigé est assez spectaculaire merci.

5 – L’affaire de la Vuelta 2010. Un mystérieux virus. De nombreux coureurs de l’équipe affectés. Flecha à l’hopital. Et le décès d’un soigneur sur septicémie. Une affaire jamais élucidée, qui est restée sans réponse. Bizarre.

Ces cinq éléments me paraissent pour le moment les plus crédibles pour soulever un doute raisonnable quant à la probité des coureurs chez Sky. Laissons le temps faire son oeuvre, de la même façon qu’il a agit pour l’équipe américaine US Postal. Pour le moment, il convient de les féliciter de leur Tour 2012, c’était d’une maitrise parfaite.

Armstrong éclipse Greipel

La vedette du jour sur le Tour de France ne fut pas André Greipel hier mais bien Lance Armstrong, bien malheureusement.

Il faut dire que les étapes actuelles ne sont pas les plus emballantes, car réglées comme du papier à musique. Certains lecteurs ne sont pas d’accord avec moi et continuent de croire que les oreillettes n’y sont pour rien. Je demeure convaincu du contraire, comme je demeure convaincu que des échappées allaient beaucoup plus souvent au bout du temps où ces oreillettes n’existaient pas. Prenez des exemples concrets, sur le Tour 1986, 1987 ou 1990 par exemple. Prenez l’échappée fleuve de Thierry Marie quelques années plus tard… toutes des situations qui n’existent plus aujourd’hui, malheureusement. Rappelons aussi que de nombreux directeurs sportifs sont du côté de l’UCI qui cherche à éliminer ces oreillettes pour retrouver un peu l’essence de ce sport.

Quoi qu’il en soit, Greipel a gagné hier sa 2e étape de suite. Cavendish a été enfermé, Goss a raté une belle chance car il a amené un trop gros braquet dans les derniers mètres et Sagan a été retardé par une chute. Greipel n’est cependant pas une menace pour le maillot vert selon moi.

L’actualité a plutôt tourné autour de l’Affaire Armstrong qui commence à éclabousser Jonathan Vaughters, le directeur sportif chez Garmin. L’équipe avait clairement communiqué ses directives qu’on peut résumer ainsi: « no comments ». C’est légitime à ce stade-ci.

Plusieurs d’entre vous croyez qu’il est inutile de revenir en arrière et de s’en prendre à Armstrong, comme s’il était « looser » de le faire. Évidemment, je ne suis pas d’accord. Comment en effet aller de l’avant dans la lutte contre le dopage si le message qu’on envoie est « pas vu, pas pris, donc tranquille pour toujours » aux coureurs? L’Affaire Armstrong est, je l’ai déjà dit, l’occasion de faire un immense ménage dans le cyclisme, car elle va bien au delà de sa seule personne. Comment croire à un cyclisme sain si Riis et Bruyneel peuvent officier en toute tranquillité au coeur même du peloton? L’Affaire Armstrong pourrait également nous éclairer sur les agissements – ou les non-agissements – de l’UCI. Rappelons que cette affaire nous a déjà permis de savoir que l’UCI avait accepté, en 2005, un gros chèque de M. Armstrong… ce pour quoi Pat McQuaid a été obligé de déclarer « un geste inapproprié ».

Une telle affaire permettra aussi de déboulonner un menteur, un tricheur, qui a floué non seulement ses adversaires, mais aussi des millions d’amateurs de cyclisme, et des milliards de personnes qui ont cru en son come-back.

Bref, la question ne porte pas sur la pertinence de revenir dans le passé ou non. La question ne porte pas sur l’anti-américanisme ou non. La seule question qui soit, c’est la recherche du bien du cyclisme. Et le bien du cyclisme, c’est un cyclisme propre où chacun a une chance équitable de faire valoir ses qualités. Dans ce contexte, il faut poursuivre sans relâche tous les dopés, qu’ils soient américains, espagnols, brésiliens ou éthiopiens, et que les faits remontent à 10 mois ou 10 ans. Il faut chercher à comprendre les logiques, les façons de déjouer les contrôles, les systèmes, les réseaux. Il faut surtout se montrer d’une extrême sévérité envers ces tricheurs, pour ne pas leur laisser le moindre espoir qu’ils pourraient s’en sortir.

Il ne s’agit donc pas d’acharnement. Simplement la volonté d’avancer dans la recherche de la justice et de l’équité pour tous. Comptez sur moi pour dénoncer tous les tricheurs, quels qu’ils soient. C’est Armstrong depuis 10 ans, entre autre. Ca sera d’autres très certainement au cours des prochaines années. Je les dénoncerai tous de la même façon, jusqu’au bout.

Armstrong: il va tomber

Petite bombe ce matin dans le milieu du cyclisme. Selon le journal De Telegraaf, qui réussit là un joli scoop, les coureurs présents sur le Tour de France en ce moment George Hincapie, Christian VanDe Velde, David Zabriskie et Levi Leipheimer auraient tous confessé s’être dopé et auraient tous confessé avoir vu Lance Armstrong se doper, alors qu’il était leur équipier. Jonathan Vaughters, actuel directeur sportif de l’équipe Garmin pour laquelle court le Canadien Hesjedal, serait aussi impliqué, mais il faudra attendre une confirmation.

Cette situation expliquerait pourquoi ces quatre coureurs ont demandé à ne pas être considéré dans les choix de la Fédé américaine pour les Jeux Olympiques de Londres.

En échange de leur témoignage, les quatre coureurs recevraient une peine réduite à 6 mois de suspension, effective à la fin de l’année. Ils peuvent donc courir en 2012 et pourront reprendre rapidement en 2013.

Si cette nouvelle se confirme, cela signifie que l’USADA détient une preuve blindée à l’encontre de Lance Armstrong et de ses collaborateurs, dont Johan Bruyneel. Cela expliquerait aussi pourquoi les trois personnes du jury ont rapidement tranché en faveur du dépôt des accusations à l’endroit des personnes. Cela expliquerait enfin beaucoup de petites autres choses, notamment le silence de certaines personnes.

Lance Armstrong pourrait donc tomber prochainement. Le délai de prescription limité à 8 ans signifie que les faits reprochés ne pourront pas remonter avant 2004. Ceci étant, il existe suffisamment d’éléments, notamment à travers les enquêtes Walsh et Ballester, pour bien comprendre ce qu’il faisait avant ce moment.

En clair, l’USADA s’apprête à démontrer que toute la carrière et l’image de Lance Armstrong ont été édifiés sur le plus gros mensonge de l’histoire du sport.

Affaire Armstrong: l’indéfendable « pu capable »

Plusieurs lecteurs ont réagi à l’annonce des accusations portées par l’USADA contre Lance Armstrong et certains de ses proches par un « pu capable« . Manifestement, cela exprime un trop-plein de certains à l’encontre de la saga Armstrong face au dopage. Certains ont même exprimé le souhait de vivement retrouver des nouvelles « plus positives » (c’est bien dit!) sur ce site.

Il est vrai que la saga Armstrong-dopage dure depuis plus de 10 ans maintenant. Il est vrai que les récentes accusations de l’USADA ont une odeur de déjà vu, bien que des faits nouveaux y soient présents, notamment à propos de 2009 et 2010 ou de paiements de sommes importantes d’Armstrong à Ferrari.

Et chacun a droit à son opinion bien sûr. Il m’apparaît cependant intéressant de considérer cette position de « pu capable » afin de dire pourquoi elle m’apparaît indéfendable. Et pourquoi La Flamme Rouge continuera de couvrir ce genre de situation.

Pas juste le procès Armstrong

Toute sa carrière, Lance Armstrong s’est posé en authentique héros américain: vainqueur du cancer, il est revenu gagner le Tour de France 1999, l’épreuve sportive la plus difficile qui soit. Son message était clair: si je l’ai fait (vaincre le cancer et gagner le Tour après), c’est qu’on peut vaincre cette maladie et que vous pouvez le faire aussi. Le message était celui d’un espoir, et a été repris par des millions de personnes qui portent maintenant le fameux bracelet jaune. Car évidemment, le message Armstrong était aussi celui de la probité: oserait-il se doper après avoir passé à un cheveu de la mort? Bien sûr que non!

Sauf que.

Sauf que tout cela est bâti sur un mensonge, celui du dopage. Lance Armstrong a floué tous ces gens. Son retour n’est pas vrai: il était dopé. 7 de ses 14 échantillons sanguins du Tour 1999 sont positifs à l’EPO comme l’a montré le dossier L’Équipe. Le reste de sa carrière est pareil: tous les témoignages concordent. Pas facile à entendre peut-être, mais c’est la vérité.

Le bracelet jaune n’est pas celui d’un espoir, c’est celui d’un mensonge.

Je suis de ceux qui pensent que la vérité est toujours préférable au mensonge. Et c’est en premier lieu de cela qui s’agit dans le procès qui s’amorce.

Bref, la première étape est de déboulonner un menteur.

La deuxième, c’est de permettre à la lutte contre le dopage d’avancer un grand coup.

Car bien au delà du seul cas Armstrong voire Bruyneel et Ferrari, ce procès sera celui de l’actuelle lutte contre le dopage mené par les diverses institutions internationales, l’UCI en premier lieu.

Dans ce contexte, quelle occasion de changer les choses et de purger le système!

On découvrira très certainement que l’UCI a bel et bien couvert un contrôle positif d’Armstrong au début des années 2000. La preuve sera faite que l’UCI a accepté des versements monétaires d’Armstrong. D’autres choses sortiront peut-être au grand jour, qui sait? Ca a déjà commencé avec ce versement présumé de 465,000$ d’Armstrong à Ferrari…

Bref, loin d’être le seul procès de Lance Armstrong, il est probable que ce soit l’occasion d’un grand ménage dans le cyclisme et d’une réforme des institutions qui le dirige. L’Affaire Festina n’avait-elle pas amené à d’importants changements, notamment la criminalisation de la possession de produits dopants, l’accélération de la lutte contre le dopage voire, en bout de ligne, la création de nouveaux instruments comme le passeport biologique et le système ADAMS?

Enfin, on ne peut défendre une position de « pu capable » pour une dernière raison, à mes yeux la plus importante: je suis convaincu que la tenue du procès Armstrong sera un facteur de développement important pour le cyclisme des jeunes nations du sport, y compris bien sûr le cyclisme canadien. Si un tel procès débouche sur une purge du cyclisme et de ses vieilles « traditions », comment ne pas croire que cela ne servira pas l’égalité des chances dans le sport, et donc l’émergence de coureurs, notamment canadiens, que j’ose croire pas ou moins dopés que les autres?

Bref, plus que jamais, le procès Armstrong est nécessaire afin de pouvoir enfin se débarrasser de ceux qui incarnent les années sombres de ce sport et qui officient encore de près dans le cyclisme, à commencer par Bruyneel et par Riis. Pour enfin connaître les agissements (ou le laissez-faire…) de l’UCI et mettre à jour la position de conflit d’intérêt dans laquelle elle baigne depuis trop longtemps. Et pour pouvoir faire avancer d’un grand pas la lutte contre le dopage afin de donner aux jeunes coureurs, notamment canadiens, une chance plus équitable de s’illustrer au plus haut niveau.

Proprement, bien sûr.

Lance Armstrong dopé en 2009 et 2010?

Grosse nouvelle dans le milieu du cyclisme hier: l’United States Anti-Doping Agency (USADA) a formellement accusé Lance Armstrong et cinq autres personnes de son entourage, y compris Johan Bruyneel et Michele Ferrari, d’infractions aux lois anti-dopage dans le cyclisme et ce, pour la période de 1998 à 2011.

Le texte de 15 pages étalant les accusations est ici: armstrongcharging0613. Parmi les accusations, usage d’EPO, de testostérone, de transfusions sanguines, d’hormones de croissance, de plasma sanguin et de corticostéroïdes. Certaines personnes, dont Johan Bruyneel, sont accusées de possession, de traffic, d’administration, d’incitation et de circonstances aggravantes. Le texte mentionne aussi une conspiration chez US Postal afin d’organiser le dopage, un peu comme chez Festina ou Telekom on peut imaginer. On parle aussi de « cover-up », de procédures pour masquer ce dopage.

Très lourdes, les accusations sont donc très lourdes et comprennent une période durant laquelle Lance Armstrong a participé à 9 Tours de France, dont pas moins de 7 victorieux.

La grosse surprise vient des accusations pour les années 2009 et 2010, celles de son 2e come-back. Selon l’USADA, les échantillons sanguins prélevés chez M. Armstrong durant cette période seraient compatibles avec des manipulations incluant usage d’EPO et/ou de transfusions. Ca, c’est nouveau.

Lance Armstrong serait donc un multi-récidiviste…

Les prochaines étapes

Le dossier sera saisi par l’American Arbitration Association qui devra créer un comité de trois personnes qui prendront la décision: coupables ou non. Le choix de ces trois personnes sera donc crucial et gageons que Lance Armstrong et ses avocats manipulent déjà tout ce qu’ils peuvent pour influencer le choix. En principe, chaque camp (USADA et les accusés) auront droit à un représentant, puis ces deux représentants en choisiront un troisième. Cette troisième personne sera difficile à choisir et c’est là que des pressions seront assurément faites par le camp des accusés…

Une fois la décision rendue, il sera possible de la porter en appel auprès du Tribunal d’Arbitrage du Sport (TAS) en dernière instance. Un comité d’experts indépendants et internationaux se pencheraient alors de nouveau sur l’ensemble de la preuve pour rendre une décision.

En clair, une longue bataille judiciaire vient de s’enclencher. Elle coutera probablement très cher à M. Armstrong et aux autres accusés. Dans le cas d’Armstrong, gageons que la Fondation LiveStrong, désormais privée, épongera une partie de la facture. Car les enjeux concernant M. Armstrong dépassent désormais le simple cyclisme, ils touchent aussi la lutte contre le cancer. Et c’est là probablement la meilleure défense de M. Armstrong.

La réaction d’Armstrong

Je ne mâcherai pas mes mots: pitoyable. Un pur exercice de manipulation de l’opinion publique dans le seul but de gagner cette bataille de l’opinion publique. Loin de répondre aux accusations (une cause qu’il sait perdue d’avance), il s’attaque à tout le reste, en premier lieu au messager. Voyez un peu:

« I have been notified that USADA, an organization largely funded by taxpayer dollars but governed only by self-written rules, intends to again dredge up discredited allegations dating back more than 16 years to prevent me from competing as a triathlete and try and strip me of the seven Tour de France victories I earned. »

Voyez l’usage des mots: « financée par vos taxes mais gouvernée par ses propres règles », « allégations farfelues », « victoires que j’ai mérité »… Sans commentaires.

Il en rajoute une couche en écrivant : « USADA’s malice, its methods, its star-chamber practices, and its decision to punish first and adjudicate later all are at odds with our ideals of fairness and fair play. »

Malice? Vraiment? Fairness and fair play? Il me semble que c’est justement de cela dont il est question dans tout ca… Et voyez le subtil: il écrit « nos idéaux d’équité et de fair-play »… Quel culot!

Et il termine évidemment en rappelant son argument béton pour tout ceux qui ne connaissent rien au cyclisme, c’est à dire la majorité des gens: « I have never doped, and, unlike many of my accusers, I have competed as an endurance athlete for 25 years with no spike in performance, passed more than 500 drug tests and never failed one. »

Marion Jones, Alejandro Valverde et de nombreux autres (dois-je les ajouter?) n’ont eux non plus jamais échoué de tests antidopage… C’est oublier un peu vite des dossiers comme ceux de L’Équipe à propos des échantillons d’Armstrong sur le Tour 1999 (son premier victorieux) positifs à l’EPO, comme ceux de Walsh et Ballester, ainsi que les dépositions de son entourage immédiat, en premier lieu les Andreu, Floyd Landis et Tyler Hamilton.

Enfin bref, j’arrête, vous savez déjà ce que j’en pense!

La réaction de l’USADA suite aux déclarations d’Armstrong

Dans un communiqué teinté de professionnalisme, l’USADA rappelle qu’elle loge ces accusations car elle estime avoir suffisamment de preuves pour le faire. Elle rappelle également qu’elle ne considère jamais les pressions extérieures, l’intimidation ou tout autre élément avant de prendre la décision de loger des accusations: seules les preuves dictent sa conduite. Elle dit agir au nom de tous les athlètes propres et au nom de l’égalité des chances dans le sport. Elle rappelle aussi que les personnes accusées demeurent pour le moment innocentes, jusqu’à preuve du contraire. Enfin, elle souligne que la décision de culpabilité ou non ne sera pas rendue par l’USADA, mais bien par un panel indépendant.

J’ai trouvé ce communiqué excellent, nuancé et contribuant à rehausser la crédibilité de l’agence de même que du processus qui vient de s’amorcer. Et pas une fois le communiqué ne cite le nom d’Armstrong. Bravo. L’agence a un travail à faire, elle le fait du mieux possible.

Ce qu’on doit penser de tout ça

En premier lieu, je pense que l’USADA aura bien fait son travail et estimé que les preuves étaient suffisamment solides pour aller de l’avant. Les prochains mois seront donc intéressants et M. Armstrong et ses acolytes ont un peu de souci à se faire selon moi. L’USADA a évidemment récupéré l’essentiel du dossier Novitsky qui, rappelons-le, avait débouché sur un abandon surprenant et inattendu des procédures il y a quelques mois. Devant le manque de justification de cet abandon et le silence des principaux intéressés, il est raisonnable de croire qu’un important traffic d’influence avait permis d’en arriver là.

Rappelons aussi que la procédure Novitsky visait des accusations criminelles envers Armstrong et l’US Postal. Le dossier déposé par l’USADA ne peut porter d’accusations criminelles, mais peut radier les victoires de Lance Armstrong comme le sanctionner sur le plan sportif. Sa suspension est d’ailleurs immédiate et il ne pourra participer aux Mondiaux de triathlon à Nice à la fin du mois.

Autre élément non-négligeable, l’absence totale de l’UCI dans ce dossier. C’en est ridicule. Rappelons que l’UCI a la responsabilité de la lutte contre le dopage dans le cyclisme. Elle ne s’est jamais mobilisée pour enquêter sur Lance Armstrong et ses proches collaborateurs malgré les soupçons qui s’accumulaient depuis au moins 10 ans. En ce sens, l’action hier de l’USADA vient mettre en évidence toute l’inaction de l’UCI voire son souci premier, celui de préserver l’image du cyclisme, quitte à fermer les yeux sur certains dossiers moins intéressants à cet égard. Comment cela peut-il fonctionner? Le conflit d’intérêt est évident!

Dernière heure à propos de la crédibilité de l’UCI. (Évidemment, il est à prévoir que McQuaid réagisse vivement en niant tout laissez-faire…).

Si l’UCI est conséquente avec elle-même, elle devrait immédiatement interdire la présence de Johan Bruyneel sur les courses cyclistes UCI puisqu’il est soupçonné d’avoir favorisé le dopage au sein de son équipe et qu’il fait l’objet d’une procédure à cet égard. Il risque une suspension à vie du sport cycliste. Tant que cette histoire n’est pas tirée au clair, comment faire autrement?

Si ça ne vient pas de l’UCI, espérons que ça viendra d’ASO…

Et comment suspendre à vie Bruyneel et permettre à Riis de continuer? On peut se poser la question!

Enfin, concernant Lance Armstrong lui-même, la grosse nouvelle est évidemment ces échantillons sanguins possiblement dopés en 2009 et 2010. Ca, c’est nouveau et ça risque d’être très intéressant puisque cela prouverait que son retour n’était pas aussi clean qu’il ne l’a dit. Rappelons d’ailleurs au passage qu’Armstrong avait d’abord annoncé que ce retour se ferait sous stricte supervision médicale indépendante, avec résultats publics de ses tests sanguins, question de s’affranchir de tout soupçon. Il n’avait évidemment rapidement mis un terme à cette initiative après quelques semaines seulement…

Chose certaine, les récentes accusations l’auront surement mis très en colère. Je pense qu’il devait penser en avoir définitivement terminé avec tout ça suite à l’abandon du dossier Novitsky. Voilà que ça repart pour un tour (sans jeu de mots!) et voilà que ça contrecarre aussi ses projets sportifs immédiats. Gageons qu’il sera très actif au cours des prochains jours pour influencer tout cela en arrière-scène, quitte à user de n’importe quel moyen pour se libérer de cette affaire. Armstrong est très puissant puisque outre le champion cycliste, il a réussi à se poser comme un authentique « héros américain » en utilisant le meilleur moyen qui soit, l’adoption d’une juste cause envers laquelle tout le monde a de la compassion: le cancer.

Probablement sa meilleure défense je vous dis.

De la culture du conflit d’intérêt

De nos jours, le conflit d’intérêt est présent partout.

De toute évidence, nombreuses sont les personnes pourtant chargées de lourdes responsabilités, parfois publiques, qui font preuve de peu de jugement dans la conduite de leurs affaires.

On en a un exemple éloquent dans le cyclisme avec la nouvelle affaire Galimzyanov, ce coureur russe de l’équipe Katusha qui a été contrôlé positif à l’EPO lors d’un test hors-compétition le 22 mars dernier. Rappelons que Galimzyanov s’est adjugé, cette année, la 1ere étape du récent Circuit de la Sarthe.

Le dossier est désormais devant la Fédération de cyclisme russe. Cette fédération est présidée par Igor Makarov, qui est par ailleurs, ô hasard, le propriétaire de l’équipe Katusha. Cette même équipe Katusha a évidemment rapidement émis un communiqué se dissociant totalement des agissements de son coureur qui aurait, comme d’habitude, agit seul.

Gros malaise donc. D’un côté, on peut penser que Makarov aura à coeur de préserver l’image de son équipe Katusha et de minimiser l’affaire. Comment penser qu’il pourrait aller au fond des choses? La situation l’exigerait peut-être: ce n’est pas le premier cas de dopage au sein de l’équipe Katusha au cours des 18 derniers mois…

De l’autre, Makarov doit agir comme le législateur, enquêter sur l’affaire avec crédibilité et éventuellement punir Galimzyanov pour son contrôle positif.

Une telle proximité des rôles engendre forcément des problèmes.

Tant que ce genre de position ambiguë sera tolérée dans le cyclisme, je crois qu’il s’agira d’un frein à la lutte contre le dopage. Et la garantie qu’une rupture avec le passé, notamment auprès des jeunes coureurs débarquant dans le milieu professionnel, n’est pas possible.

Rationaliser le dopage

Pour tous ceux voulant mieux comprendre la logique de l'athlète lorsqu'il se dope, il faut absolument lire ce court article publié sur un blog du journal Le Monde ainsi que le texte scientifique complet disponible ici.

On y présente une analyse psychologique et sociologique du dopage, ou comment les athlètes parviennent à "rationaliser" la prise de produits dopants. De ce fait, cet article permet de mieux comprendre leurs comportements en cas de contrôle positif.

L'article est intéressant puisqu'on y comprend comment et pourquoi l'athlète, dans sa logique, se perçoit comme une victime, et non comme une personne ayant commis un acte répréhensible. 

L'étude présente le cas d'un ex-cycliste, "Philiipe" (Gaumont?), pour qui le dopage présente une "justification thérapeutique". Cette rationalisation l'empêche ensuite d'avoir des états d'âme face aux actes répréhensibles qu'il a commis. Il se croit "dans le vrai" et devient donc une victime d'un système qu'il percevra comme injuste s'il est piqué au contrôle.

Quiconque a côtoyé des athlètes ayant eu recours au dopage retrouveront là des traits communs.

L'étude présente surtout l'univers du sport professionnel, un monde où seul le résultat compte. Dans ce contexte, pas de place pour les blessés, les convalescents, ou même seulement les coureurs qui passent une période creuse. L'entourage du cycliste, l'entourage de l'équipe, les médecins, les directeurs sportifs ont donc bien tous une responsabilité envers l'athlète qui se dope. Il convient de ne jamais l'oublier, surtout lorsqu'un athlète, piqué au contrôle lors d'une course importante, devient la brebis galeuse dont tout le monde – y compris son équipe – veut se débarrasser au plus vite.

Tests anti-dopage sur les courses ACVQ: des précisions

Vous êtes nombreux à réagir au texte publié plus tôt cette semaine annonçant que l'Association des cyclistes vétérans du Québec (ACVQ) a décidé d'effectuer des contrôles anti-dopage inopinés sur quelques unes de ses courses en 2012.

Globalement, la nouvelle est bien accueillie par les coureurs et c'est une source de satisfaction. Vous êtes en effet très nombreux à être bien informés des dérives du dopage et vous êtes prêts à faire votre part pour lutter contre ce fléau. 

Il faut dire que les récents événements sur la scène du cyclisme au Québec nous ont prouvé que des coureurs maîtres se dopent aussi. C'est donc une question d'équité des chances.

Vous êtes également nombreux à manifester vos inquiétudes, légitimes d'ailleurs, quant aux risques de tester "positif" suite à la consommation de produits et suppléments alimentaires. Nous sommes en effet très nombreux – c'est mon cas – à consommer des "produits de l'effort" ou des suppléments, qu'ils soient sous forme de boissons, de gels, de poudres, ou autres.

Voici quelques éléments qu'il vous faudra désormais considérer. 

1 – vous êtes seuls responsables des produits que vous consommez. Autrement dit, la consommation de produits et suppléments est "à vos risques et périls" et vous êtes entièrement responsables de toute substance interdite qui pourrait se retrouver dans votre organisme. 

2 – le Centre canadien pour l'éthique dans le sport (CCES) considère que la plupart des suppléments et produits de santé naturels comporte un risque inacceptable pour les athlètes et leur carrière sportive. Ce risque inacceptable découle essentiellement de l'absence de règlementation gouvernementale en matière de production de tels suppléments et produits. C'est donc le "free for all" et les fabricants peuvent écrire à peu près n'importe quoi sur les emballages. Ou pire, ne pas écrire tous les ingrédients que ces produits renferment… sans oublier que bien des compagnies ne sont pas canadiennes…

3 –  le CCES vous donne accès à certaines ressources documentaires afin de mieux connaître les risques que vous pourriez prendre en consommant certains produits et suppléments. Une foire aux questions (très utile) sur les suppléments est disponible ici. Cet autre site, canadien, vous permet d'effectuer une recherche sur les produits les plus communs et vérifier leur statut à l'égard du dopage. Enfin, le livret de classification des substances autorisées et interdites par le CCES est disponible ici. J'ajoute qu'en cas de doute, je vous invite à écrire sans hésiter au CCES (conservez votre courriel et leur réponse!). Cela peut montrer votre transparence et votre souci d'honnêteté en cas de pépin.

En terminant, je crois qu'il ne faut pas avoir peur des contrôles anti-dopage. Il faut simplement être attentif aux produits et suppléments que nous consommons afin de s'assurer, dans la mesure du possible, de leur composition. C'est aussi une question de santé! En cas de problème, il faudra pouvoir documenter quel produit ou supplément a été ingéré et quand, permettant de défendre son cas face au CCES qui, je pense, fait preuve de discernement dans une telle situation.

Les Guignols se payent les sportifs espagnols

Excellent petit clip (ça débute à environ 3min30 de l'ensemble du vidéo) sur les sportifs espagnols… qui "carburent" fort depuis quelques années, il faut le reconnaître! Et le vidéo arrive au moment même ou Nadal se fait contrôler par surprise au petit matin!

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