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Mois : septembre 2024

Pogacar: un grand exploit!

Tadej Pogacar est entré dans l’histoire du cyclisme hier, remportant durant la même saison le Giro, le Tour, et les Championnats du monde sur route.

Un exploit accompli jusqu’ici que par deux hommes et une femme: Eddy Merckx en 1974, Stephen Roche en 1987, et Annemiek van Vleuten en 2022.

Pogi est aujourd’hui le meilleur cycliste au monde, dans une catégorie à part qui semble même supérieure à celle dans laquelle évolue Mathieu Van Der Poel et Remco Evenepoel, réduit hier à des simples cadets. Evenepoel, quand même, double champion olympique à Paris en août, n’a jamais pu faire jeu égal avec Pogi hier.

Outre la victoire du Slovène hier, c’est la manière qui passera à l’histoire. C’est pas compliqué, pour moi ce fut le plus grand exploit dans le cyclisme depuis 25 ans, et la meilleure course cycliste depuis… le Tour de France 1989 et ce duel LeMond-Fignon!

C’est pas compliqué, on a été sur le bout de notre chaise pendant les 100 derniers kilomètres, soit le moment ou Pogi a décidé de prendre les choses en main.

Un coup de folie! Démarrer avec 100 kms à faire, sur un Championnat du Monde alors que plusieurs équipes, dont les Belges, les Néerlandais, les Australiens, les Danois, les Italiens, étaient encore bien représentées…

Tous ses adversaires n’y croyaient pas, et Pogi lui-même a avoué à l’arrivée que c’était un peu stupide d’attaquer aussi loin de l’arrivée.

Mais il l’a fait.

La marque d’un grand.

Un authentique exploit athlétique, un exploit qui caractérisera durablement la pointure du bonhomme, et qui marquera l’histoire du sport.

Il y a eu quelques grands exploits « solo » dans le vélo, qui ont créé la légende des coureurs qui les ont réalisé car c’est ainsi que le monde a compris que c’était là des extra-terrestres. Avec sa perf hier, Pogi se hisse à leur niveau selon moi.

1 – Coppi et l’étape Cuneo-Pinerolo sur le Giro 1949. 254kms et plus de 5000m de dénivelé. Coppi part solo à 192km de l’arrivée, escalade Vars, Izoard, Monginevro et Sestrière, crève cinq fois et malgré tout, s’impose à Pinerolo avec près de 12min d’avance sur un certain Gino Bartali. Dément.

2 – Charly Gaul sur la 21e étape du Tour 1958. Briançon – Aix les Bains, les cols de la Chartreuse. Gaul part solo dans le Luitel, on ne le reverra jamais, malgré une pluie glaciale ce jour-là. Le petit grimpeur s’impose avec presque huit minutes d’avance, et jette les bases de sa victoire finale sur l’épreuve.

3 – Le doublé Dauphiné – BordeauxParis de Jacques Anquetil en 1965. Le gus gagne un Dauphiné-Libéré – course d’une semaine – le dimanche après un âpre duel contre Raymond Poulidor et par une météo exécrable toute la semaine en montagne, prend un avion nolisé par le Général De Gaulle pour rejoindre Bordeaux à minuit, prend le départ de « la course qui tue » Bordeaux-Paris, 600km, à 2h du matin, passe derrière derny vers 6h du matin après avoir roulé toute la nuit, et gagne à Paris quelques heures plus tard. Un exploit jamais renouvelé par quiconque.

4 – Merckx à Mourenx sur le Tour 1969. Merckx devance au Tourmalet son équipier Van Den Bossche pour lui signifier son agacement que ce dernier ait signé pour une autre équipe en vue de la saison suivante, ne se relève pas, et part solo pour 140km dans les Pyrénées, un coup d’orgueil. Merckx s’impose avec plus de huit minutes d’avance sur ses plus proches poursuivants, et assomme le Tour. Le champion belge a toujours dit que ce fut là son plus grand exploit sur un vélo.

5 – Hinault sur Liège-Bastogne-Liège 1980. Tempête de neige, ils ne seront que 21 à l’arrivée. Un journée en enfer, prise 2 cette année-là. Hinault gagne par plus de neuf minutes d’avance après 80 bornes solo, et perd de façon permanente la motricité fine de deux doigts, gelés ce jour-là sur le vélo. Animal.

6 – Indurain à Luxembourg sur le Tour 1992. 63km chrono, seul contre la montre. Indurain met son coéquipier De Las Cuevas à plus de trois minutes, et tous les autres à plus de quatre minutes, Bugno et LeMond compris. De mémoire d’homme, on n’avait jamais vu pareil écart sur 63km contre la montre, Anquetil « maitre Jacques » ou « la Caravelle » compris.

7 – Pantani aux Deux Alpes sur le Tour 1998. En 50km, Pantani renverse le Tour de France 1998 sur une seule étape, se détachant solo dans le Galibier par un temps de chien, et terminant seul aux Deux Alpes avec plus de 9min d’avance sur le maillot jaune, l’Allemand Jan Ullrich, vainqueur l’année précédente. Personne n’avait encore grimpé les 7 derniers kms du Galibier aussi vite.

La course hier

Pogi aura réalisé un authentique exploit certes, mais le parcours l’aura favorisé: pas de sections « roulantes » ou un homme seul devant est désavantagé, c’était du « up and down » tout le temps. Lucide, Pogi avait compris qu’avec un tel parcours, c’était possible de rouler devant aussi vite que derrière dans un paquet.

Justement derrière, on aura rapidement compris que c’était assez décousu et désorganisé, aucune équipe à l’exception des Belges et des Néerlandais un court laps de temps ne parvenant à s’organiser efficacement. L’erreur de Remco et de Mathieu aura probablement été de ne pas utiliser leur équipe assez longtemps, faute d’organisation efficace et sur un parcours trop sélectif, provoquant une impitoyable sélection par l’arrière. Rapidement isolés, ces deux coureurs ont dû jouer « mano à mano » sur les derniers 50 kilomètres, et à ce jeu Pogi a été le plus fort.

Mention très bien à Tom Skujiņš, pour moi hier le 2e homme le plus fort derrière Pogi. Au pied du podium (4e), c’est lui qui peut nourrir aujourd’hui le plus de regret. Pour la petite histoire, Skujiņš avait terminé 6e du récent GP de Montréal, avec son gabarit les connaisseurs apprécieront.

GP de Montréal: Pogi, logiquement

La photo est une fois de plus de mon ami Grégoire Crevier, photographe qui diffuse ses photos sur « On the rivet.photo ». Merci Greg!

Auteur d’une bévue aux 800m vendredi dernier sur le GP de Québec, il est clair que Tadej Pogacar et son équipe UAE Emirates ne débarquaient pas sur le GP de Montréal pour faire de la figuration.

Et ce fut une course parfaitement maîtrisée par toute l’équipe. Cyclisme 101 ici.

UAE a controlé les échappés du jour qui n’ont jamais eu beaucoup plus que 5min d’avance. Mieux, ils ont « joué » avec l’échappée, un coup à 2min, puis leur laissant de nouveau prendre 3min30, comme si on ne voulait pas rentrer trop vite. C’est qu’il faisait chaud sur le circuit du Mont Royal, pas la peine de s’affoler. Les autres équipes étaient trop contentes de pouvoir compter sur pareille bonté de l’équipe du patron.

Car le patron du peloton, c’est bel et bien Pogacar lorsqu’il est au départ. Cela ne fait plus l’ombre d’un doute.

À trois tours de la fin, les choses sérieuses. On accélère. Avant-dernière ascension, tu vois Majka à l’effort devant, Pogi derrière en 2e place, tu sais que dans moins de deux minutes, c’est parti.

Et ca n’a pas loupé.

Sur la 16e ascension (sur 17) de la voie Camilien Houde hier, Pogi a établi le nouveau KOM, jusque là détenu par James Piccoli: 3min27 contre 3min31 pour le Canadien. 28,5 km/h de moyenne sur les 1,64 km d’ascension. Si vous n’avez rien à faire ce matin, tentez votre chance! Je vous dispense des 180 bornes que Pogi s’est tapé avant de produire son effort.

Chose certaine, on ne reverrait pas Pogi une fois son attaque placée. C’est que le gus a de l’orgueil. Le patron, c’est lui je vous dis.

Deux tours solo devant, avec une insolente facilité, et c’était plié. Il avait presque l’air de se balader mode « zone 3 ».

En tout cas, c’est le meilleur coureur du monde en 2024. Pas compliqué, il a gagné toutes les courses auxquelles il a participé cette saison, sauf deux: Milan SanRemo (3e) et le GP de Québec vendredi (7e). Autrement, il a gagné les Strade Bianche, le Tour de Catalogne, Liège-Bastogne-Liège, le Giro (6 victoires d’étape, le rose, le maillot de meilleur grimpeur), le Tour (6 victoires d’étape), et maintenant le GP de Montréal pour la 2e fois de sa carrière, après sa victoire de 2022.

C’est un fuoriclasse, un coureur totalement hors norme, et probablement un coureur de la dimension d’Eddy Merckx, qu’on ne voit qu’une fois tous les 50 ans.

Sa victoire hier a toutefois été favorisée par un manque d’organisation derrière lui pour la chasse. J’ai compté sur le boulevard Édouard Montpetit à l’approche du dernier tour pas moins de 4 coureurs Jumbo-Lease a Bike, dont les excellents Matteo Jorgenson et Tiesj Benoot. Pourquoi diable ne s’est-on pas organisé au sein de cette équipe et demandé à Kilderman et Lemmen de mener la chasse? Idem pour Israel-Premier Tech, qui n’a pas su se regrouper à ce moment pourtant crucial de la course: Gee aurait pu se mettre davantage au service de Woods. Carton rouge également aux Lidl-Trek, eux aussi en surnombre devant à l’approche du dernier tour. Je demeure toujours surpris de ce manque de lucidité à ce niveau de professionnalisme.

Chose certaine, Pogi n’a pas donné l’impression de forcer son talent hier, et sa victoire le propulse archi-favori des prochains Mondiaux dans deux semaines à Zurich.

Terminons ce petit compte-rendu en soulignant la belle 3e place d’un Alaphilippe volontaire hier dans les deux derniers tours, et qui mérite donc cette place sur le podium. Après deux saisons très compliquées, ca fait plaisir de revoir le bonhomme sur un podium, et c’est de bonne augure pour la saison 2025 au sein de sa nouvelle équipe Tudor.

La Slovénie, épouvantails de ces Mondiaux

Petit pays d’Europe, 2 millions d’habitants soit… 4 fois moins que le Québec (!!!), la Slovénie domine actuellement – et de façon surprenante? – le cyclisme mondial.

Les Slovènes seront les épouvantails de ces prochains Mondiaux, avec 7 coureurs au départ: outre le patron Tadej Pogacar, ils pourront compter, imaginez-vous donc, sur le récent vainqueur de la Vuelta, Primoz Roglic, mais aussi sur Matej Mohoric, Jan Tratnik bien en vue sur les GP de Québec et Montréal, Luca Mezgec, Domen Novak, et Matevž Govekar, moins connu mais récent vainqueur d’une étape du Tour de Grande-Bretagne en août. Ouch! Aucune nation ne peut dire mieux sur le papier.

Bien sûr, les Slovènes auront sur leur route les Mathieu Van Der Poel, Remco Evenepoel et une armada espagnole qui fait belle figure, mais disons que sur papier, c’est du costaud, pour ne pas dire du très très lourd.

Que du UAE Emirates!

Ou presque ces derniers jours, puisque Marc Hirschi fait un carton actuellement en Europe pour l’équipe de Tadej Pogacar. Le Suisse a remporté coup sur coup le Memorial Marco Pantani et, quelques jours avant, la Coppa Sabatini. Chez les Émiratis, on est sur tous les fronts!

Championnats d’Europe

Ca n’a que peu d’intérêt jusqu’ici dans l’histoire du vélo, mais on disputait hier en Europe les Championnats du continent. Christophe Laporte défendait son titre et son maillot de champion d’Europe.

Le parcours, relativement plat mais ponctué de quelques secteurs de chemins de terre, n’était pas très sélectif.

Au final, couronnement au sprint en petit comité du Belge Tim Merlier, une information quand même car il aligne au sprint les Olav Kooij, Jasper Philipsen, Mads Pedersen et j’en passe. Favori sur le papier avant le départ, l’Italien Jonathan Milan n’est que 13e et dernier du petit groupe qui s’est disputé la victoire.

À noter également qu’on aura vu Mathieu Van Der Poel actif durant la course, tentant notamment sa chance avec 85km à faire dans la course, mais sans succès. Sur un parcours aussi roulant, il était difficile de résister au paquet derrière.

Certains auront noté que MDVP n’a jamais semblé aussi maigre qu’actuellement. Pas un pet de graisse… affuté comme une dague, le Mathieu. On prépare ses Mondiaux…

GP de Québec: course classique, vainqueur classique…

La photo est de mon ami Grégoire Crevier, excellent photographe qui diffuse ses photos sur « On the rivet.photo« . Merci Greg!

Les Lotto-Destiny peuvent nourrir des regrets aux lendemains du Grand Prix Cycliste de Québec.

Imaginez, à 800m de la ligne, ils étaient trois devant dont le vainqueur sortant, Arnaud DeLie, avec comme seul os – mais quel os – Tadej Pogacar à contrôler.

Perso, face à un sprinter de la trempe de DeLie et sur une course qui fait 60 bornes de moins que les grandes classiques du calendrier, je ne donnais pas cher de la peau de Pogi au sprint.

Et puis non! Les deux coéquipiers de DeLie ont explosé, regroupement général aux 800m, et à partir de là ce fut le bordel complet. Connaissant parfaitement l’arrivée, le double-vainqueur de l’épreuve Michael Matthews n’a pas raté sa chance, en vieux briscard: il a lancé le sprint de loin, quoi de mieux quand, avec l’âge, on se fait moins explosif… Du coup il contrôlait Girmay et un surprenant Tisj Benoot qui prouve qu’à Québec, le sprint, c’est très particulier (et ca fait longtemps que je l’écris).

https://www.youtube.com/watch?v=MwPMpXHa4PI

Jusqu’aux 800m, les Lotto-Destiny avait fait course parfaite, dépêchant longtemps un homme en tête du peloton pour contrôler les échappées devant.

Sacré rouleur ce Frank van den Broek, 23 ans, qui a tenu en respect à lui (presque) tout seul le peloton pendant un bon bout de temps!

Pour le reste, on aura appris qu’Olaf a de bonnes jambes, étant acteur dans le final à quelques hectomètres de l’arrivée.

On aura appris également que Pogi est aussi très bien, lui qui faisait sur ce GP de Québec sa rentrée après une coupure depuis la fin du Tour de France. Honnête, il a avoué à la presse avoir commis une erreur en y allant pas après que les deux coéquipiers de DeLie se soient éteints, une erreur évidente pour le reste car l’arrivée lui convenait. S’il avait décollé aux 800m, pas sûr que le peloton revenait sur lui…

Bref, une course classique pour Québec: une échappée matinale, la chasse qui s’installe solidement vers la mi-course, une franche accélération de l’allure avec trois tours à faire, et les deux derniers tours débridés. Ca devient un classique.

Et ce n’est pas pour déplaire à Michael Matthews!

Pogi, l’homme à battre sur le GP de Montréal

Difficile de trouver un favori plus important que Tadej Pogacar pour le GP de Montréal dimanche. Les 17 ascensions de la voie Camilien Houde lamineront le peloton, provoquant l’habituelle sélection par l’arrière, surtout dans les derniers cinq tours. En s’appuyant bien sur Ayuso et Majka, Pogi a les cartes en main pour dominer dimanche.

Mike Woods? Il est la meilleure carte canadienne! Au moins, il sait quelle roue suivre…