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Statistiques sur le dopage: l’heure juste

Vous êtes nombreux à me faire part de la publication d’un article présentant non pas le cyclisme mais bien le rugby comme étant le sport le plus touché par le dopage en 2012, selon les statistiques compilées par l’Agence Française de Lutte contre le Dopage (AFLD).

D’entrée, je suis d’accord avec vous: présentée comme ca, la nouvelle a tout d’un bon scoop!

Le rugby est en effet apparu comme étant le sport le plus touché par le dopage sur la base d’un indicateur statistique, tout simplement la proportion d’échantillons positifs sur l’ensemble des échantillons prélevés en 2012 par l’AFLD. Ont été comparés tous les sports ayant fait l’objet d’au moins 400 prélèvements d’échantillons.

Évidemment, le milieu cycliste y voit une excellente occasion de redorer rapidement l’image du vélo. Christian Prudhomme a ainsi sauté sur la nouvelle pour défendre le cyclisme et le Tour de France.

Alors, y-a-t-il vraiment matière à se réjouir pour nous amateurs de cyclisme?

Pas vraiment selon moi. L’interprétation de telles statistiques fait appel au jugement, par delà les chiffres bruts, ce qu’a d’ailleurs évoqué Bruno Genevois, directeur de l’AFLD: « Il est difficile, sur une seule d’année, de tirer des conclusions à partir du ratio entre le nombre de cas positifs et celui des contrôles effectués, et d’établir des corrélations entre un dopage lourd, comme le recours à l’EPO dans le cyclisme, par exemple, et les cas réellement observés. »

Il a entièrement raison, tant les gros scandales de dopage, dont certains révélaient un dopage institutionnalisé, organisé dans les équipes, ont été nombreux depuis maintenant 15 ans et l’Affaire Festina de 1998. Mais il y a plus à dire!

Voyons quelques bémols qu’on peut émettre sur cette nouvelle.

1 – le premier élément à considérer, c’est que le cyclisme est le sport pour lequel on a observé (chiffres bruts) le plus grand nombre de cas positifs. Évidemment, plus il y a de tests, plus il y a de chance de trouver des cas positifs. Les échantillons étant petits, il convient de se rappeler que les proportions en découlant ont une variabilité élevée. L’an prochain, la situation sera très probablement bien différente!

2 – il convient de prendre en compte les substances trouvées: pour moi, un test positif à l’EPO, à l’AICAR (on trouvera ici un intéressant article détaillant ce qu’est le GW1516), ou aux hormones de croissance n’a pas le même poids, ni la même signification, qu’un test positif à la caféine ou à la morphine. Cela reste évidemment du dopage dans les deux cas, mais nous sommes assez intelligents pour voir les nuances en terme de gravité.

3 – il convient surtout de se rappeler que la lutte contre le dopage n’a qu’un succès bien relatif dans le cyclisme, les coureurs et médecins ayant trouvé depuis fort longtemps des moyens rudement efficaces de déjouer les contrôles. Le micro-dosage et les auto-transfusions font évidemment partie intégrante de ces techniques pour masquer le dopage. L’Affaire Armstrong est là pour nous le prouver: l’Américain n’a jamais été testé positif, alors qu’il a avoué avoir fait usage de produits dopants lourds pendant chacun de ses 7 Tours de France victorieux, voire toute sa carrière cycliste!!

Donc attention, à différents sports correspondent différents types de dopage, selon les besoins physiques de la discipline. Et en cyclisme, le dopage requis, sanguin, est au point: on sait comment déjouer les contrôles. Il est peut-être plus difficile de masquer certains autres produits, moins « lourds » et davantage en usage dans d’autres sports…

En terminant, si matière il y a de se réjouir, c’est plutôt quant à la quantité de contrôles pratiqués dans le sport cycliste, de loin le sport le plus contrôlé par l’AFLD en 2012 (1812 échantillons prélevés en cyclisme, contre 1164 en athlétisme, 588 au rugby, 548 au football, 452 au handball, 433 en triathlon, 418 en natation et 394 au basket-ball). Voilà une bonne nouvelle susceptible de contribuer à lentement rétablir la crédibilité du cyclisme aux yeux du grand public en montrant bien qu’on ne relâche pas la pression contre le milieu cycliste.

Et je rappelle à tous qu’au Québec également, un des sports les plus touchés par le dopage est en fait le… football universitaire, du moins selon le nombre de cas révélés par le Centre Canadien pour l’Éthique dans le Sport (CCES). Les dirigeants de ce sport proche du rugby en Europe se font discrets sur ce côté sombre de leur discipline, mais les cas de dopage ont été nombreux ces dernières années.

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4 Commentaires

  1. BP

    Il n’y aurait pas « matière à se réjouir » que le cyclisme, puisque c’est de cela qu’il s’agit, aurait (proportionnellement) moins de cas positifs et même de dopage que les autres.
    Il y a là juste certains chiffres dont la réalité étaient à l’évidence cachée. En ce sens, ils sont utiles. Rien de plus.
    Quand Bruno Genevois affirme « Il est difficile … d‘établir des corrélations entre un dopage lourd, comme le recours à l’EPO dans le cyclisme, par exemple, et les cas réellement observés.”, il se base sur quoi pour centrer le recours à l’EPO sur le cyclisme? Sur des « évidences »? Il retombe dans le panneau (réflexe) dopage lourd = cyclisme d’abord. Dans une lutte pour les droits télés où l’image est essentielle, une lutte pour le fric, il est juste clair que les fédérations ont naturellement des intérêts à cacher le dopage de leur sport, d’en détourner l’attention en montrant du doigt celui du sport d’à côté. Ces chiffres attestent qu’à cette fin, une évidente saisie de l’opportunité de la sale réputation du cyclisme existe bel et bien et de toutes parts, et que Bruno Genevois participe à l’entretenir.
    On peut ensuite dire que les chiffres ne disent pas tout, il me semble Laurent que tu as en l’occurrence plutôt tendance à écrire qu’ils ne disent rien, voire le contraire!
    PS: le dopage reste un problème accessoire.

  2. mikael

    Je ne comprends pas ton article.

    On ment au grand public depuis des années, a faire croire que le dopage est un problème lié au sport d’endurance, et particulièrement le cyclisme.

    Ce qui est faux.

    Cet article ne blanchit en rien le cyclisme, il incrimine les autres sports, le rugby en particulier.

    1. « le premier élément à considérer, c’est que le cyclisme est le sport pour lequel on a observé (chiffres bruts) le plus grand nombre de cas positifs. Évidemment, plus il y a de tests, plus il y a de chance de trouver des cas positifs.  » => effectivement, et proportionnellement au nombre de tests, le rugby est le sport le plus touché par le dopage, au moins sur une année. Si le cyclisme à un problème avec le dopage, le rugby et les autres sports aussi, forcément.

    2. « il convient de prendre en compte les substances trouvées: pour moi, un test positif à l’EPO, à l’AICAR (on trouvera ici un intéressant article détaillant ce qu’est le GW1516), ou aux hormones de croissance n’a pas le même poids, ni la même signification, qu’un test positif à la caféine ou à la morphine » => non. Se doper, c’est se doper. Ce qui est aggravant, c’est l’institutionnalisation du dopage. Prouvé dans le cyclisme, mais également dans d’autre sport (football, RFA de Beckenbauer http://fr.wikipedia.org/wiki/Franz_Beckenbauer#Dopage)

    3. »il convient surtout de se rappeler que la lutte contre le dopage n’a qu’un succès bien relatif dans le cyclisme » => le cyclisme a au moins le mérite de lutter contre le dopage. Le succès est alors toujours forcément meilleur que dans les autres sports.

    Il convient maintenant de faire pour les autres sports comme pour le cyclisme, c’est-à-dire une instruction judiciaire sur chaque cas de dopage afin de remonter les filières, et dénoncer des pratiques dopantes généralisées au sein des clubs ou fédérations.

    A ce moment la seulement on pourra éventuellement comparer, pour peu que cela ait un intérêt.

  3. Vinnnch

    Pour ma part je suis assez d’accord avec Laurent, je continue de penser qu’il y a bien deux types de dopage, quand même, le petit et le gros. Mais bon.
    J’ai lu un article en 2009 de quelqu’un de très sérieux mais je ne sais plus qui maljeureusement. en tout cas il affirmait assez catégoriquement qu’à la découverte de l’EPO, trois sports se sont précipités dans la brèche : Athlétisme, football et ski de fond. Les cyclistes n’étaient arrivés qu’après sur ce « marché »…

  4. Jean-Luc

    Comme il est facile de taper sur le cyclisme en permanance, jamais je n’irais excuser un tricheur, mais il faudrais aussi dénoncer et poursuivre les journalistes et organisateurs crétins qui font leur beurre en s’émerveillant des explois de certains. Je garde en mémoire les commentaires de Bernard Thevenet lors des explois de Bjorn Riss (et de la découverte de l’EPO quelques années après alors que ce produit étais déjà connu) tout comme ceux de Amstrong. Si le second a été plus discret dans le dévellopement des ses efforts, il ne faut tout de même pas nous faire croire qu’après avoir subit un cancer, un homme revient encors plus fort. Mais là n’est pas le problème. Si l’on veux parler dopage, il serais bon d’établir un réglement pour tous, des conditions de contrôle identiques pour tous, et ensuite nous discuterons. Enfin, qu’en est il des contrôles dans certains milieu ou sois disant cela n’existe pas ou est très marginal comme le foot, le tennis, le golf, l’équitation ou les cheveaux ne sont pas les seuls concernés, mais à qui l’on ne reprend pas les gains ce qui permet largement au proprio d’entretenir l’animal durant la période de suspenssion. Et je n’oublie pas les sports motorisés ou il n’y a rien à craindre avec un Red Bul avant le départ. Essayer donc avant une course cycliste.
    Ma conclusion, un suivi et des contrôles identiques, ensuite, ont fait les comptes.

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