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Lionel Reynaud, ingénieur performance chez Cofidis


Ce soir, La Flamme Rouge publie cette récente entrevue avec *Lionel Reynaud*, ingénieur de la performance pour l’équipe cycliste professionnelle *Cofidis*. C’est l’occasion de vous faire découvrir un nouveau métier totalement en prise avec l’ère du temps. C’est aussi l’occasion de faire un petit clin d’oeil à la longue échappée aujourd’hui sur le Dauphiné de Nicolas Inaudi, coureur chez Cofidis. « Le site de Lionel Reynaud, très intéressant puisqu’il renferme quantité d’information pertinente pour tous les cyclistes qui cherchent à s’améliorer, est disponible ici »:http://www.lionelreynaud.com/.

*La Flamme Rouge:* Lionel, le métier de conseiller ingénierie de la performance est relativement nouveau dans une équipe cycliste. Pouvez-vous nous expliquer en quoi ce travail consiste?

*Lionel Reynaud:* J’ai un rôle double qui est premièrement de planifier avec Lionel Marie (entraîneur de l’équipe) les séances d’entraînement puis d’analyser celles-ci pour rééquilibrer le programme d’entraînement. Ce travail s’effectue principalement avec les jeunes coureurs de l’équipe à qui nous avons donné la priorité cette année. Dans un second temps, il m’arrive au cas par cas de travailler sur l’aérodynamique de certains coureurs.

*LFR:* Est-ce que chaque équipe professionnelle comporte un tel ingénieur ou Cofidis innove-t-elle ?

*LR:* Il est vrai qu’un Ingénieur dans une équipe Cycliste cela peut suprendre au premier abord même s’il est vrai que je suis un ingénieur un peu particulier puisqu’en plus de ma formation d’ingénieur, j’ai beaucoup travaillé sur la puissance et la biomécanique du cyclisme. Je n’ai pas eu beaucoup la possibilité de rencontrer les autres équipes mais je pense être un cas un peu à part. Par contre, il est à noter qu’en France, la plupart des équipes PROTOUR ont une démarche particulière (ex : recherche sur la matériel chez Bouygues Telecom, la démarche de Frédéric Grappe qui officie depuis plusieurs années à la Française de Jeux, etc…).

*LFR:* Le cyclisme est un sport ou, très souvent, le poids du passé, des « vieilles » méthodes de préparation sont tenaces. Les coureurs se montrent-ils réceptifs à votre travail?

*LR:* J’ai eu beaucoup de chance puisque avec Lionel Marie nous échangions depuis pas mal de temps avant mon arrivée dans l’équipe ce qui a beaucoup facilité les choses lors de mon arrivée. Les coureurs savaient quel allait être mon rôle et comment nous allions fonctionner ensemble. Après, pour ce qui concerne les méthodes d’entraînement, la plupart des jeunes ont été réceptifs, d’autres ont voulu « tester » la méthode par eux même. Globalement, il a fallu pas mal parler avec les coureurs et expliquer la méthode ; une fois le coureur convaincu, nous avons pu commencer à travailler plus intensément.

*LFR:* Quels sont les outils privilégiés avec lesquels vous travaillez ? SRM ? Powertap ? Cardiofréquencemètre ?

*LR:* Nous travaillons avec les cardiofréquencemètres POLAR et avec des capteurs de puissance. Les coureurs du groupe d’entraînement sont pourvus de SRM et nous avons aussi des powertaps pour effectuer des tests en stage. L’optimisation du rendement d’un coureur passe aussi par le choix d’un matériel judicieux. Testez-vous également le matériel utilisé par les coureurs ? Conseillez-vous les coureurs sur leurs choix de matériel ?

Pour ce qui est du matériel, l’équipe travaille en étroite collaboration avec ses partenaires et fournisseurs et c’est souvent l’ingénieur du partenaire qui va voir directement les coureurs et le Staff (dont je fais partie). Je peux cependant intervenir sur des points particuliers comme par exemple l’optimisation de certains points aérodynamiques des vélos.

*LFR:* Travaillez-vous en laboratoire, en soufflerie ou plutôt sur le terrain ?

*LR:* L’année dernière un certains nombres de coureurs sont passés en soufflerie puis sur piste comme Sylvain Chavanel où nous avons essayé d’optimiser sa position avant les Championnats de France de CLM (qu’il a d’ailleurs remporté de fort belle manière). Pour 2006, nous nous concentrons principalement avec Lionel sur l’entraînement et son suivi.
Concernant l’aspect physiologique et médical, les coureurs passent des tests réguliers au CHU d’Amiens.

*LFR:* Est-il impératif d’avoir un capteur de puissance sur son vélo afin de pouvoir mettre en pratique vos enseignements?

*LR:* Je préfère que le coureur que je suis soit équipé d’un capteur de puissance car cet appareil permet d’aller plus vite sur la compréhension de son comportement dans l’effort. Un tel outil permet aussi d’avoir une analyse plus approfondie. Par contre, il est tout de même possible de bien travailler avec un cardiofréquencemètre, une bonne connaissance de son organisme et une bonne perception de l’intensité de l’effort

*LFR:* Intuitivement, on pense que votre travail porte surtout sur l’amélioration des performances en contre-la-montre. Pouvez-vous optimiser également le rendement des coureurs dans les cols ? Quel genre de travail faites-vous avec un grimpeur comme Moncoutié par exemple ?

*LR:* Nous travaillons bien sûr la montagne avec le coureur ; certains coureurs d’ailleurs ont eu en plus des stages de montagne de l’équipe des stages individuels avec un programme d’entraînement spécifique. Concernant David, il a l’expérience pour lui et a ses habitudes, comme je vous l’ai dit, nous travaillons principalement avec les jeunes ; après si David nous demande des conseils il sera bien sûr très bien reçu.

*LFR:* Pouvez-vous nous parler du suivi que vous faites avec les coureurs de Cofidis? Les rencontrez-vous souvent durant la saison ?

*LR:* Tout commence à l’intersaison où nous faisons un bilan avec le coureur par le biais d’un questionnaire et d’un entretien individuel : comment s’entraîne-t-il ? Quelle analyse est-il capable d’avoir sur ses prestations en course ? Comment se juge-t-il ? Qu’est ce qu’il croit capable de réaliser à l’entraînement ? Est-il prêt à changer sa méthode de préparation etc…

La première chose que retiennent les coureurs pour notre premier contact : c’est la longueur du questionnaire (mais c’est la base du travail)! Ensuite et en fonction du programme du coureur, nous planifions les cycles d’entraînement et les séances ; nous faisons un pt hebdomadaire avec le coureur. Lui de son côté à sa perception des choses ; Lionel Marie a lui sa vision de la course (puisqu’il est Directeur Sportif) et de l’entraînement ; pour ma part j’ai eu le temps d’analyser et de décortiquer les entraînements du coureur (les coureurs nous font parvenir leurs fichiers d’entraînement via Internet). A partir de là, nous essayons de proposer la meilleure option pour le coureur.

*LFR:* Votre travail se fait essentiellement sur les courses ou lors des périodes d’entraînement?

*LR:* Le gros du travail se fait pendant les périodes d’entraînement ; j’essaye de pouvoir me dégager de mon travail pour pouvoir venir sur les stages ; ils m’arrivent aussi de venir sur les courses pour les rencontrer.

*LFR:* Souvent, de belles performances peuvent passer inaperçues aux yeux du public, même le plus connaisseur. Quelles sont selon vous les révélations de la saison 2006 chez Cofidis ?

*LR:* Concernant, les jeunes coureurs de Cofidis, la révélation en terme de résultats c’est bien sûr Chris Sutton qui remporte Cholet Pays de Loire pour son premier mois de course chez les professionnels ; après je vous parlerai de la confirmation d’Arnaud Coyot avec sa victoire au Trophée Haribo et aussi des belles places au sprint de Leonardo Duque. Au niveau des belles performances qui n’ont peut être pas eu l’éclairage médiatique qu’il aurait du avoir, Maxime Monfort qui vient de terminer son premier Grand Tour après s’être fracturé la clavicule au Tour du Pays Basque. Cela a été un sacré compte à rebours pour être au départ du Giro, il lui a fallu beaucoup de courage de volonté pour surmonter les effets de l’opération mais aussi pour supporter les séances d’entraînement qu’il a eu à faire.

*LFR:* Quel est l’exploit athlétique de l’année à ce jour chez Cofidis?

*LR:* Pour moi, l’exploit athlétique de ce début d’année, c’est le retour de Geoffroy Lequatre à son niveau. Comme vous devez le savoir, Geoffroy s’est sérieusement blessé l’année dernière et il a beaucoup travaillé pour revenir à son niveau en 2006. Personnellement, je suis très heureux de travailler avec Geoffroy, notre entente se passe très bien et je suis encore plus heureux de le voir avec de bonnes sensations.

*LFR:* L’équipe Cofidis compte quelques coureurs étrangers (Duque, Verbrugghe, Wiggins, Bertagnolli, Parra) qui ont plutôt eu de bons résultats récemment (victoire d’étape au Giro pour Verbrugghe, etc). Existe-t-il selon vous dans l’équipe Cofidis une différence de mentalité ou d’approche de l’entraînement entre les coureurs français et étrangers ?

*LR:* Tout comme il y a des différences culturelles entre les pays, il y a bien sûr une approche différente de l’entraînement. Les anglo-saxons se focalisent beaucoup sur les chiffres par exemples. Il a été aussi de partager l’entraînement d’Ivan Parra qui lui passe sa préparation hivernale par de longues marches à pied en montagne.

*LFR:* Le Tour de France approche. Faites-vous une préparation spéciale avec vos coureurs en vue de cet important objectif pour une équipe française ?

*LR:* La sélection n’est pas encore terminée mais nous travaillons bien sûr avec certains sélectionnables en vue de ce grand rendez-vous.

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2 Commentaires

  1. Redg

    Salut,
    En quoi consiste la démarche de Frédéric Grappe qui officie depuis plusieurs années à la Française des Jeux?

  2. StefToup

    Super article questions réponses.
    Bravo à LR ainsi qu’à LFR.
    C’est bien de faire un tour au cœur des équipes. Il est vrai que nous ne sommes pas toujours au courant des efforts que font les coureurs pour revenir au niveau. Grand courage de la part de Geoffroy Lequatre.

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