La suite de notre passionnante interview avec Antoine Vayer « est disponible ici »:http://www.velochronique.com/chroniques/article.php3?id_article=601, sur le site de notre collègue de VeloChronique. Vayer nous parle notamment de son passage dans l’équipe Festina en tant qu’entraîneur… À lire absolument!
Extrait : « _Certains (coureurs) progressaient en dormant grâce à l’activité des produits et molécules ingérées le soir… D’autres consommaient 1500 Kcal par jour rien qu’à métaboliser d’autres produits. Altius, Fortius, Citius ! (plus haut, plus fort, plus vite) Les références en matière d’entraînement et d’effort pour eux ne voulaient plus rien dire du tout. Des V02 max à 96!!! Pour des gars à 65 en octobre, vous vous rendez compte! Sur le Cybex, des progressions musculaires extraordinaires pour des plus que trentenaires! La jouvence!_ »
La Flamme Rouge tient également à remercier tous les lecteurs ayant laissé des commentaires récemment. Une réponse s’impose à quelques uns d’entre eux et nous terminerons en couvrant quelques points de l’actualité cycliste de la semaine.
1 – Certains sont visiblement frustrés qu’on parle dopage si fréquemment. Malheureusement, l’actualité cycliste impose d’elle même ce sujet. On fait quoi pour que la situation s’améliore? Et bien justement, on en parle dans le but de faire de nos lecteurs des observateurs éclairés de ce sport, convaincu que cela aura un effet positif à long terme, l’éducation étant la clef du changement. Croyez-nous, c’est parfois difficile d’étendre ainsi les problèmes du vélo, mais un sport doit peut-être savoir mourir pour mieux renaître… D’autre part, attendez de voir la suite de l’entrevue, vous serez servi.
Comprenez-nous bien, nous sommes conscients que c’est bien mince comme effort pour que la situation s’améliore, mais c’est à peu près tout ce qu’on peut faire avec nos modestes moyens, hormis de ne plus acheter d’articles promotionnels et certaines revues en cyclisme.
Et vous, cher ami lecteur, que faites-vous concrètement pour changer les choses?
Il est par ailleurs évident que le problème est important, très important dans les autres sports et nous ne manquont pas une occasion de le rappeler car on ne peut taper que sur le cyclisme à ce propos. Mais l’occasion n’est-elle pas superbe pour que le cyclisme s’éleve pendant quelques temps au-dessus des autres sports en faisant d’une part preuve de lucidité face à ce fléau et, d’autre part, en posant des actions concrètes pour ainsi donner l’exemple en ouvrant la voie à l’assainissement du sport en général ? Ce serait une façon intelligente selon nous de redorer le blason de ce sport magnifique…
2 – La critique classique. Certains lecteurs, avançant quelques calculs simples de leur cru qui constituent toutefois un bon point de départ nous l’admettons tout à fait, remettent en doute les calculs de puissance d’Antoine Vayer et de Frédéric Portoleau qui sont des habitués de ce genre de critique. Comme Vayer l’expliquait pourtant dans notre introduction, ses travaux n’ont jamais été remis en question pour celui qui entreprenait de les lire et de les évaluer sérieusement. Il ajoutait même que ses travaux avaient été « _validés par tous ceux qui s’intéressent à la chose_ ». On rappelle donc à nos lecteurs qu’on ne doit pas remettre en question des travaux simplement parce qu’on ne les connaît pas et le but de notre entrevue n’était certainement pas de vous présenter les calculs de ces puissances. Ceux-ci sont infiniment plus complexes que ce qu’on peut croire à premier abord et tiennent compte, outres des paramètres « classiques » nécessaires, de la position sur le vélo, du rendement du revêtement de la route, de l’altitude et du type d’équipement utilisé par le coureur (roues aérodynamiques, casque, cadre profilé, etc.). Le minimum est de lire quelques ouvrages de ces auteurs, notamment « Pouvez vous gagner le Tour? », avant d’oser une critique nous semble-t-il.
3 – Un lecteur évoque la perte de poids entre le Dauphiné et le Tour pour expliquer les gains en performance de certains coureurs. D’une part, ces deux épreuves sont assez rapprochées (un mois tout au plus) limitant les kilos pouvant être perdus, d’autre part on parle ici de coureurs professionnels qui sont « affutés » 90% de l’année et surtout en juin et juillet (sauf peut-être Jan Ullrich en juin!!!). L’explication est un peu mince (l’occasion était trop belle…) nous semble-t-il pour expliquer des gains de puissance si importants entre les deux épreuves.
4 – Simeoni a depuis longtemps mis fin à ses relations avec Ferrari. Et son manque de victoires même lorsqu’il était chez Ferrari s’explique probablement par le fait qu’il n’y a pas un dopage mais bien des dopages, proportionnels à la taille du porte-feuille. Le dopage de haut niveau est en effet très cher (la lecture du livre de Willy Voet, Massacre à la chaîne, vous en convaincra) et tous n’ont pas accès dans la même mesure aux mêmes produits. C’est d’ailleurs l’argument qu’il faut reprendre lorsqu’on entend certains nous servir le classique « _de toute façon, ils sont tous dopés alors ca revient au même, le meilleur gagne quand même_ ». Pas forcément, car s’ils sont presque tous dopés peut-être, ils ne sont pas tous dopés pareil… et c’est aussi ca le problème!
5 – Concernant les « exploits sportifs » qui auraient démenti les calculs scientifiques, il y a en effet des exceptions et c’est bien tant mieux car la beauté du sport, c’est aussi de repousser les limites humaines. Dans un autre domaine, la Française Jeanne Calmant a bien vécu jusque l’âge confirmé de… 122 ans! Ceci étant, le but des travaux scientifiques en cyclisme n’est pas de démasquer du cas par cas mais plutôt de mettre en perspective de grandes généralités. Et c’est ce que font Vayer et Portoleau car il n’est effectivement pas normal de retrouver aujourd’hui sur le Tour 50 coureurs en haut du Ballon d’Alsace pourtant grimpé à un train d’enfer derrière un coureur en échappée solitaire à qui ils n’ont rien repris!
L’actualité cycliste maintenant :
6 – « Boonen est le Vélo d’Or mondial 2005 »:http://www.lequipe.com/Cyclisme/BOONEN_VELO_2005.html et c’est une bonne nouvelle. Vainqueur du Ronde, de Paris-Roubaix, d’étapes sur le Tour de France et des Championnats du monde, tout cela à 25 ans, c’était le choix logique et raisonnable.
7 – « L’équipe française Ag2R a été intégrée pour 4 ans au ProTour »:http://www.lequipe.com/Cyclisme/20051128_181108Dev.html. Cette équipe récupère la licence laissée par la Fassa Bortolo qui a arrêté ses activités. Voilà une bonne nouvelle pour le cyclisme français et ses coureurs qui auront ainsi accès aux plus grandes épreuves. Rappelons que « Francisco Mancebo »:http://www.procycling.com/news.aspx?ID=1762 et Christophe Moreau ont rejoint cette formation cet hiver.
8 – « Défense d’Heras et de son avocat »:http://www.cyclingnews.com/news.php?id=news/2005/nov05/nov28news suite à son contrôle positif à l’EPO : « _nous voulons savoir ce qu’il est advenu des échantillons durant le transport au laboratoire puisqu’ils ont été prélevés le samedi et n’y sont arrivés que le lundi_ ». Vous les voyez venir, comme nous : on vise sans le cacher le vice de procédure, toujours très pratique et de loin plus sûr comme défense que de tenter de prouver que le test n’est pas valide…
Raf
Donc la sainte parole vayérienne ne saurait être remise en cause. L’ex-entraîneur d’une des pires mafias de l’histoire du cyclisme vient nous donner de (scientifiques ?) leçons de morale et à nous de gober. Question au webmaster. Comment pouvez-vous évaluer sérieusement des assertions calculées à partir d’images télévisées (Luz Ardiden 2003). N’importe quel scientifique préfèrera en rigoler. Comme il rigolera devant des VO2 Max à 96. N’importe quoi. Même Armstrong (dixit le Dr Ferrari voir article sur le site 53×12) n’a jamais dépassé 82 !
Question aux amateurs de cyclisme pro. Lorsque Coppi, Bobet etc. roulent derrière Koblet (blindé à la cocaïne…) pendant 140 kilomètres lors de l’étape Brive Agen en 1951, on évoque la “légende du cyclisme”. Lorsque Rasmussen fait la même chose, c’est un délinquant !
Il n’y a jamais eu de cyclisme propre, ça n’empêchera jamais les amateurs de vélo de prendre du plaisir en pratiquant leur sport. D’ailleurs je vous laisse, je vais faire 100 bornes…
toutouille26
plus on connait leurs puissance , leurs vitesses , plus les amateurs peuvent se comparer aux pros ;
et un amateur qui va monter un col à 20 à l’heure et qui saura qu’un pro l’a monté à 25 ou 28 se sentira très éloigné de ce monde, encore plus que lorsqu’on ne savait pas; les puissances divulguées et leurs commentaires vont de plus en plus isoler les pros dans les mentalités , et tout ça apparaitra comme un cirque (ça l’est déjà).Alors les pros n’auront plus aucune crédibilité et n’attireront que des spectateurs avertis (de la fumisterie); l’image du vélo , sport si extraordinaire et si supérieur aux autres sports dans les émotions et les sensations(c’est mon avis) , sera définitivement ternie.
Continuez à combattre le dopage comme vous le faites , avec les moyens que vous avez; vous aurez toujours un supporter : toutouille26 (je ne citerai pas antoine vayer comme le second même si je suis sur qu’il n’a pas choisi ce site au hasard : vos propos sonnent souvent très juste)
Laurent Martel
Pas question de sainte parole vayérienne ici, mais seulement la reconnaissance que c’est un des seuls qui parle vrai dans ce monde ou la langue de bois est religion… Comment en effet accorder une quelconque confiance au monde du cyclisme actuel, notamment à un Heras à 56 de moyenne sur le dernier clm de la Vuelta et… positif à l’EPO un mois plus tard? Ou à la plupart des directeurs sportifs ou membres de comité de l’UCI, toujours prompt à protéger l’image du cyclisme?
Comment calculer les performances avec précision? Pas en regardant les images télé, en effet. Mais en calculant leur temps précis sur une montée. De cette montée, les atlas des cols nous donnent les pourcentages très détaillés. On peut estimer les autres paramètres avec beaucoup de précision, notamment le poids des coureurs et des vélos, notamment grâce aux tonnes d’info qui circulent sur internet et aux limites UCI.
Quand aux allusions aux articles du Dr. Ferrari dans 53×12, vous préfèrez donner votre crédibilité à ce médecin condamné plutôt qu’à Vayer? Libre à vous, mais n’importe quel connaisseur sait que les grands champions ont une VO2max bien supérieure à 82. Dans l’article scientifique de Coyle dont nous avons déjà parlé sur ce site, on évoque une VO2m en 1999 de 83, et on sait qu’Armstrong développait en 2005 davantage encore pour réaliser les perfs qu’il a offert…
Quant à Koblet, Coppi, Merckx, Bartali, Bobet et la légende du cyclisme, disons que ces coureurs avaient au même âge d’autres faits d’arme que Rasmussen, sorti de nul part cette année (en cyclisme sur route du moins) et ayant offert une perf surprenante sur un terrain à priori peu adapté à ses qualités. Car pour les exploits de la légende, comme vous disez, ils correspondent bien : Koblet était un bon rouleur, comme Coppi et Merckx. Gaul a fait ses exploits en montagne, comme Bahamontes. Anquetil dans les clm. Mais aujourd’hui, Rasmussen gagne après 50 bornes de plat en tenant tête à deux des meilleurs rouleurs du monde et Hincapie s’impose dans l’étape de montagne la plus difficile du Tour…
Etienne
En passant bravo et merci pour les entrevues, elles sont très interessantes! (et génèrent beaucoup de discutions!!)
Pour terminer (répliquer) sur les puissances..
Je vous cite: “Certains lecteurs, avançant quelques calculs simples de leur cru…”
Vous etes gentil, mais ces formules ne sont pas de mon cru:
F=m*a => force(newton) = masse * accleration (gravitationelle dans notre cas)
W=f*d => work(joules) = force * distance
P = w/t => Puissance(watts) = work / temps
Si c’est bon pour les turbines d’hydro quebec (et le reste de l’univers..) je crois que c’est bon pour le vélo.
En passsant, si Heras balance un bidon de 500ml au bas du col (ou vide ca vessie par exemple), ca enlève 3 watts dans le calcul.. Donc je me répète comment M. Vayez peut stipuler des puissances arrondis au watts près (ex: 444,416), c’est impossible, je ne trouve pas ca tres crédible!
Peu importe! M. Vayez a raison, 400 watts pour 60kg au jus de carrottes..ne soyez pas dupe!
Bonne journée!
nick
Une petite anecdote sur les VO2 max de deux sportifs américains bien connus. Extrait d’une conversation téléphonique entre Lance Armstrong et Greg LeMond (Cité par Ballester/Walsh, LA Confidentiel, pp. 264-5) :
LeMond : “Ecoute Lance, j’ai gagné le Tour avant que l’EPO n’apparaisse dans le cyclisme. (…) Ce n’est pas grâce à l’EPO que j’ai gagné le Tour d’autant que mon taux d’hématocrite n’a jamais dépassé 45, mais parce que j’avais un VO2 max de 95 alors que le tien est de 82. Donne-moi le nom d’une seule personne qui dit que j’ai pris de l’EPO.”
Lance : “Tout le monde sait ça.”
Greg : “Tu me menaces ?”
Lance : “Si tu veux la guerre, tu l’auras !”
Greg : “Donc, tu es en train de me menacer ? Ecoute Lance, je ne connais bien la physiologie : aucune charge d’entraînement ne peut transformer un sportif dont le VO2 max est de 82 en un sportif doté d’un VO2 max de 95, d’autant que tu as roulé plus vite que moi.”
Lance : “Je trouverai au moins dix personnes pour dire que tu as pris de l’EPO. Dix personnes qui témoigneront.”
etc.
Paraît que, après cet entretien, sur son site internet, Lance a fait modifier un de ses paramètres : son VO2 max serait passé de 82 à 83,9 ml.
Régis
Salut Nick,
j’allais justement le dire aux vus du premier post.
82 comme VO2max voir 84 ça n’a rien de très exceptionnel…
a+
Raf
Effectivement 82 ou 83, ça n’a rien d’exceptionnel. Mais la VO2 Max n’est qu’un paramètre parmi d’autres. D’abord les différents protocoles utilisés donnent des résultats variables. Ensuite il existe des athlètes exceptionnels dotés de V02 Max très moyennes. L’ancien recordman du monde du marathon Derek Clayton avait une VO2 Max de 69 et il courait en 2 h 09 ! (C’était il y a trente ans. Le record n’a progressé, malgré l’EPO ?, que de quatre minutes depuis. Comme quoi…)
Ce qui compte, c’est surtout le pourcentage de cette VO2 Max dont l’athlète va réélement disposer pendant l’effort. En d’autres termes on peut battre Greg Le Mond quand on a les moyens de Lance Armstrong sans forcément recourir à l’EPO (et a fortiori en le faisant…). L’étude de Coyle mentionnée par l’excellent Laurent Martel donne une autre explication : la concentration d’acide lactique très faible d’Armstrong lorsqu’il travaille “au seuil” (voir aussi l’article de Frédéric Grappe dans Vélo magazine du mois de septembre).
Enfin autre donnée : n’oublions pas que les cyclistes, et même ceux (Rasmussen ?), qui ont l’air de pharmacopée ambulante, ne sont pas des rats de laboratoire. Les conditions de course, le mental, le sens tactique, la résistance au chaud ou au froid (Ulle !), la présence ou non d’un équipier… peuvent radicalement modifier la physionomie d’une course.
PS : Hincapie n’est pas le premier routier-sprinter à passer les bosses. Rappelez-vous un certain Laurent Jalabert qui troqua, en d’autres temps, la tunique verte pour celle à poix rouges sous la houlette de Bjarne “My Man” Riis ! Le même Jalabert qui s’étonnait en juillet et en direct sur France 2 de voir Hincapie en tête du peloton au Galibier…
Cela dit, François Faber était un grand grimpeur et il pesait 80 kilos. Et souvenez-vous de Duclos vers Luz-Ardiden ! Alors… Honni soit qui mal y pense ?