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Les grands enjeux à l’UCI

Le 28 septembre prochain aura lieu le congrès annuel de l’UCI, instance suprême de l’organisme de gouvernance du cyclisme mondial, et qui regroupe l’ensemble des fédérations nationales qui en sont les membres.

C’est l’occasion de faire le point sur les grands enjeux actuels de l’UCI.

Rappelons d’abord que le calendrier WorldTour 2019 a déjà été établi et comporte 37 courses, contre 38 cette saison. C’est que le Tour d’Abu Dhabi et le Tour de Dubai ont été fusionnés en une seule course appelée l’UAE Tour. Les GP de Québec et Montréal auront lieu les 13 et 15 septembre 2019.

Rappelons aussi que les Mondiaux de cyclisme en 2019 auront lieu au Yorkshire, en Angleterre.

Les priorités de l’UCI s’articuleront autour du projet baptisé « Agenda 2022 » qui a déjà été approuvé par le comité directeur de l’organisation.

En gros, on vise à établir une parité hommes-femmes quant à plusieurs éléments, notamment les primes de victoires, d’ici 2022. Le développement du cyclisme féminin est discuté, notamment des enjeux tels que l’établissement d’un salaire minimum et d’une structure de grandes courses type World Tour. On n’y est pas encore!

L’UCI voudra également avancer son projet de réforme du cyclisme professionnel, qui fait du sur-place depuis des années déjà. Lappartient aimerait que plusieurs éléments de cette réforme entre en vigueur en 2020, dont une réduction du nombre de coureurs sur les épreuves WorldTour (6 coureurs par équipes sur les courses par étapes!).

Derrière cette réforme se cache un enjeu bien réel mais un peu tabou, les droits télé bien évidemment, puisque c’est là que l’argent est.

D’un côté, vous avez les organisateurs (et propriétaires!) des courses cyclistes, dont ASO toute puissante puisqu’elle a étendu son empire depuis 20 ans en rachetant nombre d’épreuves, dont des grandes classiques (Flèche Wallonne, LBL, etc.) voire même des grands tours (la Vuelta!), et de l’autre les équipes et les coureurs, qui crient pour une meilleure répartition de la richesse générée.

Et l’UCI au milieu! Beau merdier…

Les équipes et les coureurs s’opposent bien évidemment à la réduction du nombre d’équipes World Tour de 18 à 15, et la réduction du nombre de coureurs par équipe sur les courses (notamment sous prétexte d’améliorer la sécurité en course, un argument ridicule à mes yeux, les chutes ayant au moins été aussi nombreuses sur le Tour cette année). Pour le CPA, syndicats des coureurs pro (Gianni Bugno en est l’actuel président, mais une nouvelle élection aura lieu fin septembre et David Millar lui fait une chaude lutte), cette réduction entrainera un chômage accru parmi les coureurs pro, inacceptable.

Pat McQuaid est récemment intervenu pour mettre en garde l’UCI des travers de ce changement, qui joue le jeu des grands organisateurs de courses. Si seules 15 équipes faisaient partie du WorldTour, cela donne davantage de marge à ASO par exemple pour inviter qui elle veut sur ses épreuves, et donc maintenir un rapport de force avantageux sur le reste du milieu cycliste. Pour une fois, je suis assez d’accord avec McQuaid!

Ces éléments seront discutés, comme d’autres propositions, possiblement celle récente de Serge Arsenault de créer un circuit et un classement général annuel sur les courses d’un jour dans le cyclisme pro. Mouais… ce classement a déjà existé, avec un maillot distinctif, la Coupe du monde (entre 1989 et 2004). La réalité, c’est que n’importe quel coureur aura 100 fois plus d’intérêt de remporter un grand Monument comme le Tour des Flandres qu’une Coupe du monde en fin de saison, surtout si cette victoire se fait sans avoir remporté de course… (un peu comme ramener le jaune à Paris sans avoir gagné d’étape).

Tout le monde s’entend pour internationaliser et professionnaliser le cyclisme, façon Formule 1 ou Tennis ATP, afin de populariser davantage le sport, de rehausser son profil et de générer davantage de revenus, notamment publicitaires.

Je trouve qu’on évite de nombreux vrais enjeux, comme celui des oreillettes. Le public perd de l’intérêt pour les courses car on sait pertinemment, dès le départ, que les échappées sont condamnées. Personne n’y croit, personne n’est tenu en haleine, il suffit de regarder les 5 derniers kms des étapes pour voir un peu d’action.

Exit aussi les grands enjeux sur le financement de la lutte contre le dopage (physique et mécanique), fléau du sport qui mine en profondeur sa crédibilité.

Il faudrait aussi discuter d’un plafond salarial des équipes World Tour, la Sky par exemple pouvant se payer beaucoup de bons coureurs lui permettant de cadenasser les courses, façon US Postal. Ça tue le sport.

Au lieu de moins d’équipes World Tour, il en faudrait plus! Plus d’équipes au départ, plus de stratégies variées, plus d’intérêts divers (sprints, maillots distinctifs, victoire finale, etc.). Réduire le nombre de coureurs par équipe sur les courses est une bonne mesure, à condition d’admettre plus d’équipes au départ! La mixité d’équipes WorldTour et d’équipes plus régionales donnent habituellement de bons résultats… encore récemment lors des GP de Québec et Montréal ou plusieurs coureurs canadiens se sont montrés… sans les oreillettes, ca aurait été d’autres courses…

S’attaquer également au fléau des motos trop nombreuses sur les épreuves et qui, parfois, faussent les courses en favorisant souvent involontairement, parfois peut-être volontairement (intérêt national!), des coureurs échappés.

Et enfin, s’attaquer au problème du manque d’une grande épreuve WorldTour aux États-Unis, un marché pourtant immense où la pratique cycliste a considérablement augmenté ces dernières années.

La suite sera intéressante mais je vous avoue être un peu inquiet pour notre sport…

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10 Commentaires

  1. Edgar Allan Poe

    Je partage ton inquiétude, notamment en ce qui concerne le cyclisme amateur en France, cyclisme amateur sans lequel ne peut exister à moyen terme, un cyclisme d’élite.
    Dans ma région, aux parcours cyclistes très variés, j’estime à 20% seulement le nombre de courses amateurs encore organisées par rapport à il y a 20 ans. Le nombre de clubs se réduit à peau de chagrin, les structures reposent essentiellement sur quelques bénévoles acharnés. Il n’y a plus d’argent dans les clubs, plus d’argent dans les courses. Pour 200€ à l’année, une entreprise peut avoir son logo sur la partie la plus en vue sur le maillot d’un club cycliste de plus de 150 coureurs, par exemple.
    Les engagements aux épreuves constituent un réel budget à l’année, et je ne parle même pas des cyclos, les dernières créées semblant être destinées à une élite financière. Idem pour le prix de matériel.
    Certains se détournent de ce sport pour cette dernière raison.
    Reste aussi les coûts de déplacement, exponentiels ces 5 dernières années dans l’hexagone.
    Je me demande ce que sera le cyclisme en France dans 10 ans. Et ASO, la pompe à fric, se moque royalement de tout cela. Pas concerné.
    Lappartient ? Le maire LR ? Connais pas.
    Au final, tu tiens des théories proches de celles de l’ami Tinkov !

  2. nikko

    S’il y avait eu un bouton « j’aime » en bas de ton article, Laurent, j’aurais cliqué dessus 😉

  3. thierry mtl

    Excellent texte.
    Une ligue professionnelle pour les pro.
    Ca ne réglerait pas tout, mais financièrement, cela stabiliserait le cyclisme et l’amènerait dans les ligues professionnelles majeures.

    Je ne comprend pas où s’en va l’appartient.

  4. Magicreme

    victoire de Michael Woods
    la 1ere d’une belle liste à venir…

  5. Yvon

    Je suis très content pour toi et les Québécois amoureux du vélo. Un peu d’air frais.Bravo pour toi et tout le mal pour faire bouger cette montagne de léthargie

  6. Le Bourrin Ardéchois

    Pas un mot sur le sujet à mon sens prioritaire: la sécurité des cyclistes sur la route

  7. noirvélo

    Lapartient est un pion , ce sont les lobbies (qu’on ne voit jamais) qui décident … et le président de l’UCI sourit devant les caméras en prétextant qu’il est difficile de faire évoluer les choses ! pour nous , c’est facile de dire « STOP » , on arrête les oreillettes !pour eux non , et ce serait la fin des combines. les stratégies commerciales , c’est dans les voitures où ça se passe !!! le « vrai » cyclisme se meurt , le show , lui , continue comme la F1 ou le foot au goût de fastfood
    … beaucoup de couleur , de sucre et de bruit , mais aucunes saveurs …

  8. Edgar Allan Poe

    Une des récriminations de beaucoup de lecteurs de ce blog est tombé aux oubliettes : éjecter de l’encadrement des équipes toute personne qui aurait été condamné pour dopage au cours de sa carrière.
    La mise en place d’une telle mesure serait un véritable séisme dans le milieu. Amusez vous à faire le point en 2018, il y a fort à penser que 80% à 90% de l’encadrement disparaîtrait.
    Mais il ne pourra jamais y avoir de salut sans cette mesure …sanitaire !
    Un tricheur saurait ainsi à quoi il s’expose.

  9. Plafond salarial, fin des oreillettes, moins de véhicules et de coureurs par équipes mais plus d’équipes…
    Que de mesures de bon sens dont je parlais aussi dans mon article, et dont LAPPARTIENT avais proposé certaines. Mais tout est hélas tombé aux oubliettes. Et encore, si elles étaient restées, ce n’est pas sûr qu’il en serait sorti quelque chose mis à part comme la fois où LAPPARTIENT les avaient proposées des réactions décevantes voire stupides du milieu, dont les coureurs !

  10. Edgar Allan Poe

    Je me permets de revenir sur mon post concernant le cyclisme amateur en France.
    Le 16ème tour international féminin de l’Ardèche s’est élancé hier pour 7 étapes.
    Extrait de France 3 région : « L’an dernier, la ministre des Sports, Laura Flessel, s’était déplacée pour lancer la 15ème édition, comme un symbole de la volonté du gouvernement de promouvoir le cyclisme féminin et plus largement le sport féminin.
    Un an après, la Route de France, seule autre course professionnelle féminine par étapes a disparu faute de moyens ».
    On m’aurait menti ?

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