Départ de la cyclosportive La Montréalaise samedi matin, 8h30 sur la ligne.
« Ce n’est pas une course. »
Dixit Madame la commissaire FQSC, une phrase qui est désormais devenue célèbre (!) auprès des habitués de ce genre d’épreuve.
Malheureusement Madame, et je suis le premier à le regretter, c’est raté. Ce n’est évidemment pas votre faute!
Lorsque je vois des articles comme celui-ci, paru sur le site Internet de TVA Sport (avec photo en plus!!!), je suis réellement fâché, comme vous devez l’être vous aussi très certainement.
Je ne me souviens pas d’avoir vu un pareil article pour l’une des courses sanctionnées Maîtres des Championnats canadiens en juin dernier à Lac Mégantic, LA plus importante course de la saison…
L’article pousse même le bouchon à parler du « chrono » du vainqueur: « Jérémie Fontanaud a été le premier à franchir la ligne d’arrivée avec un chrono de 4 h 49 min. » Complètement débile, la vitesse du peloton était régulée!!!
Comment distinguer les cyclosportives des courses FQSC dans un tel contexte? Comment assurer la sécurité sur les cyclosportives, par définition des épreuves de masse regroupant des cyclistes avec des expériences très variées de la conduite en peloton?
L’inévitable est encore arrivé sur La Montréalaise à 100m de la ligne d’arrivée: une grave chute, et un coureur gisant apparemment inanimé sur la route lorsque je suis passé près de lui, quelques 20 secondes après les premiers.
Moments d’effroi, et qui viennent assombrir une belle journée jusque là.
Moins de 10 minutes plus tôt, discutant avec un coureur régulier du circuit de courses FQSC, derrière le peloton pour ne prendre aucun risque, nous étions tous deux d’accord: une grave chute était assurée à 100%.
Et ça n’a pas loupé. Malheureusement, nous avions encore raison, une fois de plus.
Après le 3e ravito, la nervosité du peloton était incroyable: coups de frein intempestifs, hurlements fréquents, vagues, c’était très dangereux, qui plus est sur des routes un peu moins belles à ce moment. Ca ne prenait pas la tête à Papineau pour savoir qu’un drame était imminent.
Ajoutons également que la très vaste majorité des cyclistes bataillant ferme pour une place devant, parfois au prix de risques insensés, avaient été largués solide dans la seule bosse du jour, Covey Hill. Je le sais, j’étais environ 10e en haut, 100m derrière un petit groupe d’une dizaine de coureurs devant. En course, j’aurais bien mis quelques kilomètres à rentrer (non sans un effort violent), avec l’aide de quelques coureurs juste derrière moi dont mon ami Serge, solide rouleur.
Le reste de la meute? Serait jamais rentré. On aurait terminé à 20 devant, pas plus.
Bref, la vaste majorité des gens présents dans le dernier kilomètre n’avait pas leur place à cet endroit, car ils étaient « hors jeu » à la pédale.
Comment faire alors?
Je vais faire une suggestion aux organisateurs de cyclosportives: faites exactement l’inverse de la stratégie mise en place sur La Québécoise et La Montréalaise, voire sur le récent GranFondo Mont Tremblant.
Je suis convaincu que c’est une erreur que de brider un peloton de 200 coureurs « qui en veulent » pendant 150 kms, puis de les laisser s’expliquer dans les 5 derniers kms comme dans une vraie course.
Il ne viendrait à personne l’idée de contrôler la vitesse des coureurs lors d’un marathon, également une épreuve de masse, puis de les laisser sprinter dans les 100 derniers mètres… Imaginez le bordel!
C’est une erreur car ca ne sert à rien si c’est suivi d’une « course open » dans les 5 derniers kilomètres. À la limite, gommez les 150 premiers kilomètres et vous aurez le même résultat, mais en plus court!
En plus d’en frustrer plusieurs (beaucoup de participants sont venus me trouver durant les deux épreuves pour me témoigner de leur frustration d’une vitesse bridée, notamment en descente. C’est vrai que c’était quelque peu pénible d’être constamment sur les freins!), une vitesse contrôlée jusqu’à quelques kilomètres de la fin garantit que tout le monde va être présent pour l’emballage final. Ca se plante régulièrement dans les sprints chez les pros, des mecs qui font 40 000 bornes par année sur leur vélo: imaginez dans un peloton de cyclistes de tout horizon! Carambolage garanti à tout coup.
Faites l’inverse: ne bridez pas la vitesse du peloton sur le parcours, laissez un écrémage naturel s’opérer. Vous limiterez ainsi les risques de chute (le peloton se fragmentant en petit groupe rapidement) et assurerez le succès populaire de vos événements. Assurez-vous simplement, comme sur la Haute Route, d’avoir suffisamment de motos de police pour prendre en charge les groupes significatifs qui se formeront très rapidement durant la cyclosportive. Pour les coureurs isolés ou les groupes peu nombreux, ils devront respecter le code de la route tout en bénéficiant des intersections sécurisées.
Placez ensuite un ravito significatif à 20 bornes de l’arrivée (15, c’est trop près). Et là, arrêtez tout le monde et laissez une partie du peloton se reformer, ceci afin de TERMINER l’épreuve à vitesse contrôlée (les premiers n’auront qu’à attendre un peu les autres, c’est tout… comme ce n’est pas une course, voilà qui leur donnera à réfléchir quant à l’allure à conduite en tête!). Vous éviterez ainsi beaucoup d’accidents, aurez un beau final ou tout le peloton passera la ligne dans le calme, en toute convivialité et sous les applaudissements de la foule présente. De belles images en perspective pour finir le tout en beauté!
Et surtout, n’organisez aucun podium, rien. Une cyclosportive n’est pas une course! Ceux qui veulent vraiment en découdre n’ont qu’à prendre une licence FQSC comme moi, et venir vraiment se mesurer aux meilleurs cyclistes du Québec. C’est là, et seulement là, qu’on peut prouver sa force, sa valeur comme cycliste. Pas sur un sprint dans une cyclosportive où M. Tout le monde côtoie le coureur d’expérience !
Ha oui! Le fameux chronométrage. Si vous en maintenez un (ce n’est pas indispensable… mais c’est utile puisque les cyclosportives sont, pour beaucoup, l’occasion de se mesurer à soi-même), je vous suggère de placer l’arrivée en haut d’une difficulté, près du dernier ravito. Le but est d’éviter un sprint. Par exemple, à Québec, lors de La Québécoise, ma préférence aurait été de placer l’arrivée en haut de la bosse à la sortie de Ste-Brigitte de Laval. Voilà qui aurait donné de quoi à ceux qui veulent faire une belle place ou un « personal best » façon Strava de bien se faire péter les varices, et le reste de la cyclo aurait pu être contrôlée, question de rentrer à Québec – en pleine ville – de façon sécuritaire et tout le monde ensemble, créant un beau moment de convivialité entre cyclistes. Le fait cependant que l’arrivée était celle du GP cycliste de Québec, en haut de Grande Allée, était bien aussi, et sécuritaire puisqu’un écrémage important – même moi! – s’opérait dans les derniers 1500 mètres, tout en montée.
À La Montréalaise, l’arrivée du chronométrage aurait pu être placée au terme d’un long faux-plat ascendant, près du 3e ravito. Le premier groupe – très réduit par Covey Hill – s’y présentant aurait pu s’expliquer sans grand danger, étant bien sûr évident que le risque zéro n’existe pas. Pour ceux étant derrière, ils auraient pu mesurer, avec le chronométrage, la différence existant entre leur performance et celle de coureurs de premier plan au Québec.
Bref, il y a moyen, je pense, d’assurer la popularité et une meilleure sécurité sur les cyclosportives tout en les distinguant davantage des courses FQSC. Contrôler la vitesse d’un peloton de cyclosportifs pendant 150 bornes puis les laisser s’expliquer comme dans une vraie course dans les tous derniers kilomètres m’apparaît une moins bonne idée, compte tenu des risques. En ne limitant pas la vitesse sauf à la toute fin, en situant l’arrêt du chronométrage loin de l’arrivée, au terme d’une difficulté, et en reformant le peloton pour les derniers kilomètres – ceux là sous forte escorte des encadreurs – je pense que le succès serait accru. C’est la formule retenue sur la dernière étape de la Haute Route, avec beaucoup de succès.
Et que ceux qui veulent parfois en découdre – comme moi – prennent une licence et viennent sur les courses sanctionnées de la FQSC. Nous serons ainsi davantage de coureurs, et l’offre de courses augmentera progressivement, fort du succès populaire.
Une organisation irréprochable
Je tiens à terminer en félicitant les organisateurs des cyclos La Québécoise et La Montréalaise pour une organisation m’ayant apparu irréprochable sur tous les autres aspects. La gestion des inscriptions a été efficace, les ravitos étaient bien organisés, la sécurité assurée, notamment aux intersections, et l’ambiance était très bonne, notamment grâce à la présence de speakers faisant une certaine animation sur les sites départ/arrivée. Je souligne également l’excellent travail des encadreurs, notamment Pierre Boilard dans le peloton le plus rapide, qui a su assurer une certaine cohésion, et prodiguant conseils durant l’épreuve, notamment quant à la gestion de l’alimentation. Du bon boulot, vraiment.
À la comparaison, j’ai préféré La Québécoise puisque bénéficiant des infrastructures – et du dernier kilomètre, permettant de se rendre compte de ce que vivent les coureurs pros pendant 16 tours – du GP cycliste de Québec, donnant une touche un peu différente à cette cyclosportive. Le parcours, plus difficile, de La Québécoise m’a également paru plus intéressant, et plus beau. Ce qui serait formidable, pour La Montréalaise, serait de proposer un parcours d’environ 140 bornes (le grand tour de l’île de Montréal?) se terminant par une boucle du circuit du GP cycliste de Montréal, comme les pros. Le succès serait garanti. L’arrêt du chronométrage pourrait se faire en haut de Camilien Houde, évitant ainsi un emballage massif et assurant ainsi la sécurité de tous.