Tous les jours, la passion du cyclisme

 

Pendant ce temps là, dans le Midi de la France.

Le cyclisme professionnel a bien changé ces deux dernières décennies. Centré sur la France, l’Italie et la Belgique, à un degré moindre l’Espagne, la Suisse, l’Allemagne et les Pays-Bas, le peloton était jusqu’à la fin des années 80 composé d’un nombre restreint d’équipes qui se retrouvaient régulièrement sur un nombre restreint de courses. Il en résultait une certaine convivialité, une certaine conscience de clan largement amenuisées depuis. La tradition portait également une forte emprise des anciens sur les jeunes.

Le mois de janvier était traditionnellement occupé par des stages sur la Côte d’Azur et la Riviera, l’une prolongeant l’autre. Les petits pelotons se croisaient sur la route, parfois dans les salons des hôtels. Puis venaient les premières courses, toujours le long de la Grande Bleue.

Les temps ont changé. Devenu obèse, le peloton professionnel s’est morcelé en catégories officialisées, tout comme les courses. S’il reste quelques équipes osant braver le trafic automobile entre Toulon et La Spezia, les stages se sont dispersés en Australie, Afrique du Sud, Argentine, dans le sud de l’Espagne, aux Iles Canaries, en Californie, au Mexique etc… De même, on assiste à une internationalisation des épreuves à un point difficilement imaginable il y a une vingtaine d’années.

Le Tour Down Under en Australie a marqué le début de saison 2009, avec le show médiatique Armstrong qui a masqué le peu d’intérêt d’une course orientée vers les sprints massifs. Gagnée par un beau coureur en la personne d’Allan Davis.

Puis vint le Tour du Qatar, où une pétromonarchie se paie un jouet avec les premiers duels Boonen – Cavendish sous les palmiers. Boulimique, elle pourrait bien aller jusqu’à s’offrir ce qu’il se fait de mieux dans le cyclisme, une étape du Tour ou un Championnat du monde, avant de passer à autre chose. Espérons que le jouet n’en sortira pas trop cassé.

Avec une histoire qui commence à bien s’étoffer (et une première victoire d’étape d’un coureur national), le Tour du Langkawi lui succède actuellement, et il est bien dommage que les télévisions des pays de tradition cycliste n’ait pas cru pas bon de retransmettre l’étape des Genting Highlands, sommet de l’épreuve malaise devenue un grand classique asiatique. Le spectacle télévisé d’une course toujours animée dans le cadre de cet empire du jeu qui émerge d’une montagne tropicale feraient le plus grand bien au cyclisme. Très belle victoire du grimpeur colombien Jose Serpa.

Enfin, le Tour de Californie qui débute aujourd’hui clôturera cette entrée exotique avec une affiche des plus alléchantes, qui naturellement occupe la une de La Flamme Rouge.

Dans cette internationalisation, les traditions de la Vieille Europe ont survécues une année de plus. Et de fort belle manière dans le sud de la France.

Soulignons d’abord une très belle innovation au Grand Prix d’Ouverture: la moyenne montagne pour débuter la saison. Remercions les organisateurs à double titre : de la preuve que c’est possible, nous devrons nous en souvenir, et de l’offre d’une course très animée. Sur 136 km de Marseille à Marseille, la première épreuve européenne empruntait rien moins que la montée des Termes, celle du Juillet, le pas de la Couelle (dit Petit Galibier), le Col de l’Espigoulier, la côte de Julhan et le Col de la Gineste pour arriver au bout de la montée à Luminy. Attrayante accumulation. On y vit la très belle victoire du régional Rémi Pauriol, qui prit en main une échappée après une trentaine de km de course seulement, la prolongea de façon très autoritaire avec Matthieu Ladagnous, dont il se débarrassa dans la Gineste pour résister au retour du duo des Bbox Yuri Trofimov et Thomas Voeckler (revenu à 10 secondes à 10 km de l’arrivée, repoussé finalement à 27 secondes par Pauriol, seul et après 100 km d’échappée, on relèvera l’exploit), Jean Eudes Desmaret réglant le premier petit groupe (6 coureurs) pour la quatrième place. Que du beau linge parmi lesquels se fit remarquer le néo-pro Brice Feillu.

Dans son profil et son déroulement, cette course rappelle les semi-classiques italiennes regroupées dans une coupe d’Italie qui rythme la saison transalpine de février à septembre. Je me permet d’inciter les organisateurs français à suivre cette exemple afin de sortir du marasme une Coupe de France dont la trop grande platitude des épreuves privilégie par trop le vice et le hasard au détriment de la valeur physique.

L’Etoile de Bessèges donna ensuite et comme souvent lieu à de bonnes empoignades, grâce notamment à la traditionnelle étape reine Branoux les Taillades – La Grand Combe, bien que ramenée à 51 km des faits d’une grogne du peloton suite à une erreur de parcours et surtout d’une tempête (un fameux « épisode cévenol » pour reprendre le terme météorologique). On n’a pas assez insisté sur l’épisode clé de course. Sur la fin de cette étape, le tenant du titre Yuri Trofimov réussit à s’extraire dans le Col de la Baraque, emmenant le néo-pro slovène Jure Kocjan qui lui refusa tout relais. Jusqu’à venir le griller au sprint qu’il couronna d’un superbe bras d’honneur, tel qu’on le voit si on fait preuve d’attention sur cette vidéo déjà proposée par Laurent.

Par cette victoire et la prise du maillot de leader, Kocjan croyait bien avoir fait main basse sur l’Etoile de Bessèges. Méconnaissance du milieu! Son geste provocateur et la force de l’équipe Bbox la lui firent perdre. Dès le lendemain, le harcèlement ostentatoire des excellents Trofimov, Voeckler, Fedrigo et Rolland, soutenu par un peloton complice, allait déboucher sur une échappée qui plaça définitivement Thomas Voeckler en tête du classement. Encore une très belle course, autour des Fumades, pour un début de saison très prometteur pour le cyclisme français.

Avec les confirmations de Rémi Pauriol, Pierre Roland et Clément Lhotellerie déjà auteurs l’an passé de performance au plus haut niveau, les arrivées de Jean-Eudes Desmarets et Brice Feillu, la très belle tenue de Thomas Voeckler, Matthieu Ladagnous et Pierrick Fedrigo, et le retour en pleine possession de ses moyens de Sébastien Joly, le cyclisme français est bien vivant dans un sport en cours de mondialisation.

Avant sa première confrontation au gratin mondial lors du prochain Paris-Nice, un nouveau palier sera franchi dès demain avec l’arrivée au sommet du Mont Faron. Mais la grosse armada espagnole de la Caisse d’Epargne a déjà fait le ménage par une démonstration de force sur le plat au service d’un Luis-Léon Sanchez qui sera bien difficile à déboulonner. Ses derniers concurrents, le finlandais Jussi Veikkanen à 36 secondes et l’irlandais Daniel Martin à 50 secondes, semblent trop loin, même si les qualités de grimpeur du tout jeune (22 ans) neveu de Stephen Roche font déjà peur. D’autant qu’elles pourraient être galvanisées par son statut de régional immigré, puisqu’il fut comme Rémi Pauriol formé au Vélo-Club La Pomme, LE club marseillais de LA ville de l’immigration. Pour cette étape, on notera encore Rémi Di Gregorio, ex de la Pomme et minot de la Cannebière dont on peut imaginer combien une victoire au Faron doit le faire rêver, et Mauricio Soler, certainement très motivé après une saison noire marquée de nombreuses chutes et qu’on aurait tort d’oublier à l’heure des dernières retouches des équipes du Pool (Valverde, on le garde ou pas dans son team? Et Contador?).

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De eux à nous

  1. Tiphaine

    Mais c’est notre Patrick B ?! 🙂
    Moi qui me demandait justement comment il se faisait qu’on ne l’ait pas encore vu !

    Un article-synthèse comme je les aime…

  2. colt seevers

    le neveu roche, l’obama du cyclisme… on croit rêver! il est tout pâle cet immigré.

  3. cavanna

    colt seevers
    est ce que les immigrés doivent tous etres de couleur foncée?

  4. Vincent

    tiens pour suivre le Tour de Californie encore :
    http://www.amgentourofcalifornia.com/docroot/tourtracker2008/AdobeTourTracker.html (Le serveur est souvent saturé cependant)

    Sur Cycling.tv sur le free channel aussi

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