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Mois : août 2024

Le Tour de l’actualité (Prise 2)

Merci aux lecteurs ayant commenté mon analyse de la dernière étape du Tour de France féminin. J’avais perdu de vue que Rooijakkers avait en effet deux secondes d’avance sur Vollering au départ de cette dernière étape, invalidant totalement mon analyse de la tactique usée durant cette course. Mea culpa! Je rediffuse aujourd’hui le même Tour de l’actualité, mais avec des corrections quant à la tactique sur cette dernière étape. Avec en prime un ajout pour couvrir cette 5e étape de la Vuelta!

Ca fait une pige qu’on n’a pas fait un petit Tour de l’actualité!

1 – 4 secondes. C’est l’écart à l’arrivée du Tour de France féminin entre Kasia Niewiadoma et Demi Vollering au terme d’une course qui aura duré une semaine complète.

Ca rappelle presque les 8 secondes entre LeMond et Fignon en 1989, sauf que cette fois-ci le scénario s’est déroulé sur les pentes de l’Alpe d’Huez.

Et sur une étape un peu rocambolesque si vous voulez mon avis, où les erreurs tactiques ont été nombreuses. La course aurait pu basculer bien autrement!

D’une part, Niewiadoma doit probablement sa victoire finale à… Lucinda Brand, gros moteur et spécialiste du cyclo-cross. Brand s’est mise à la planche du bas de la descente du Glandon jusqu’au pied de l’Alpe d’Huez, soit disant pour replacer sa leader Gaia Realini.

Sauf que Realini jouait déjà au yo-yo sur les dernières rampes du Glandon, et si elle avait eu les jambes pour la gagne, elle aurait accompagné Vollering et Rooijakkers dans l’échappée… Un peu léger comme justification.

Deuxièmement, je n’ai pas compris la tactique de Rooijakkers: tu te retrouves devant avec Vollering, les deux pouvant distancer la leader et aspirer à gagner le Tour au complet. La bonne entente était évidemment « on collabore pour distancer pour de bon Kasia, et on s’explique à la pédale par la suite« . Au lieu de ça, Rooijakkers ne collabore pas, ni dans la vallée, ni dans l’ascension de l’Alpe d’Huez. Vollering s’est plaint du manque de collaboration de sa partenaire d’échappée une fois l’arrivée franchie.

La bonne tactique était évidemment de collaborer: au moins tu as une chance de remporter l’épreuve, et au pire tu fais deux. Au lieu de cela, Rooijakkers termine 3e du général ; une place de 2 vaut mieux qu’une place de 3, non?

Ou alors, c’est que Rooijakkers n’avait vraiment aucune confiance en ses moyens du jour, son calcul étant « si je collabore et m’épuise, je prends le risque de me faire larguer complètement, voire rattrapée par Kasia derrière » ? Difficile à croire quand même à ce niveau.

Enfin, je n’ai pas compris pourquoi Muzic a fait les bonifs à Niewiadoma sur la ligne de l’Alpe d’Huez: faut qu’on m’explique là.

Plusieurs lecteurs de ce site ont pointé vers le transfert probable chez FDJ-Suez de Vollering l’an prochain… si je n’ai rien vu de signé officiellement pour le moment, alors en effet, vous avez raison: le sprint de Muzic sur Kasia aurait simplement pu être pour donner le maximum de chance à Vollering de remporter le général, cadeau de bienvenue dans l’équipe. Et cela voudrait aussi dire que la signature de Vollering chez FDJ-Suez est plus que probable voire confirmée désormais!

2 – Alaphilippe et Tudor. Surprenant quand même!

Mais les Suisses sont riches, et Alaphilippe aura probablement négocié un bon salaire, malgré qu’il ne soit probablement pas à la hauteur de ce qu’il touchait chez Soudai-Quick Step.

Sûr que chez Tudor, Alaphilippe, 32 ans, prend des risques.

En premier lieu de ne pas courir le Tour l’an prochain. Ca serait la 2e fois en deux ans. Dommageable.

Tudor doit en effet obtenir une wild card d’ASO pour participer au Tour l’an prochain. Sont en compétition avec Uno-X et… Total Énergies, l’autre formation qui était pressentie pour Olaf.

Ce n’est pas la première fois qu’un coureur de premier plan tente l’aventure d’une formation plus modeste, mais qui aspire au World Tour.

Déjà, on se rappellera l’aventure malheureuse de Stephen Roche chez Fagor en 1988. Merckx chez Fiat avant ca.

Perso, j’ai toujours pensé que l’attrait c’est aussi de préparer sa reconversion.

Chez Tudor, Alaphilippe sera un gros poisson dans un petit bocal mais avec le contrat de développer le bocal, donc beau défi sans trop de pression, car tout ne dépend pas de lui.

Et surtout, il peut aspirer, une fois la retraite venue d’ici 3-4 ans, de se reconvertir au sein d’une formation qu’il aura pu contribuer à développer.

Ce défi n’était pas évident chez Total Énergies et Bernaudeau, une équipe déjà très mature.

Et en Suisse, il aura moins de pression côté résultats qu’au sein d’une équipe française.

3 – Tour de l’Avenir. Incroyable mais vrai, le Canada y a une équipe! On doit le saluer. Et en son rang, un certain Michael Leonard, 20 ans seulement, et déjà vainqueur de la première étape contre-la-montre autour de Sarrebourg. Après de grâves pépins santé cette année, Léonard a déjà justifié, sur ce Tour de l’Avenir, pourquoi il est déjà chez Ineos.

4 – Vuelta. Wout Van Aert vainqueur au sprint hier, il a finalement retrouvé ses bonnes jambes. Maillot de leader en bonus.

Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il y a du beau monde sur cette Vuelta.

Sepp Kuss (le vainqueur sortant) et Cian Uijtdebroeks chez Jumbo. Joao Almeida, Pavel Sivakov, Adam Yates et Brandon McNulty chez UAE. Carlos Rodriguez chez Ineos. Mikel Landa chez Soudai-Quick Step. Ben O’Connor chez AG2R-Decathlon. Primoz Roglic chez Bora-RedBull. Mike Woods chez Israel-Premier Tech. Richard Carapaz chez EF Education First. Enric Mas chez Movistar. David Gaudu pour la Groupama-FDJ. Antonio Tiberi chez Bahrain. Guillaume Martin chez Cofidis.

Gageons que Jumbo-Lease a Bike a la pression après avoir été mouchée sur les deux premiers grands tours cette saison, alors que l’équipe avait remporté les trois grands tours la saison dernière. Gros contrat pour Kuss à la lumière de l’opposition.

Pour la gagne, difficile de dire mais j’aime bien la condition actuelle d’un Joao Almeida et la puissance de son équipe UAE.

5 – Vuelta bis. Victoire hier de Primoz Roglic sur les pentes très inégales et pentues du Pico Villuercas au terme d’une étape accidentée qui a vu un petit groupe regroupant les principaux favoris se disputer la gagne. Coup double également: victoire d’étape et maillot de leader!

Il faisait chaud sur la Vuelta hier, et ces 170 kilomètres ont mis les coureurs à rude épreuve. Une étape qui laissera des traces dans les organismes.

Roglic rassure donc sur cette Vuelta, après son abandon sur chute lors du Tour de France en juillet dernier. Il faudra compter sur lui.

Il faudra aussi compter sur Joao Almeida, je l’écrivais hier dans la première version de ce Tour de l’actualité. Le coureur portugais est bien, très bien même, et pointe désormais à huit petites secondes de Roglic au général.

Mais la Vuelta est encore longue, alors les enseignements du jour viennent probablement davantage de ceux qui n’ont pas réussi à résister hier sur la dernière ascension.

Je pense à Sepp Kuss, qui perd 28 secondes. Pas grand chose certes, espérons que sa condition est croissante pour la suite.

McNulty, O’Connor, Yates, Carapaz, Uijtdebroeks et Martin terminent à une minute ou plus, ils sont ceux qui perdent le plus hier. Si certains d’entre eux ne jouent peut-être pas le général mais plutôt les lieutenants de luxe, le débours est important si tôt dans la course.

Terminant avec plus de 3min30 de retard, Woods a quant à lui clairement indiqué hier que ce seront les victoires d’étape qu’il visera. Et ca ne surprendra personne.

Parmi les surprises du jour, mais en est-ce vraiment une, la très belle perf du jeune coureur américain Matthew Rittitello, 22 ans et 6e de l’étape. À ce niveau, c’est très bien pour Israel-Premier Tech.

Ce Lennert Van Eetvelt est également surprenant à 23 ans. Déjà vainqueur en début de saison du UAE Tour, il confirme sur cette Vuelta de belles qualités de grimpeur.

Et chose certaine, c’est Vincent Lavenu qui doit se féliciter d’avoir recruté un certain Félix Gall en 2022, c’est lui qui obtient actuellement les meilleurs résultats cette saison sur les grands tours pour AG2R-Décathlon. Rappelons aussi que Ben O’Connor quittera l’équipe en fin de saison pour rejoindre les Australiens de Jayco-AlUla.

Cyclisme aux JO: « tout le monde y a droit et ça, c’est chouette »

Des JO exceptionnels.

La France peut aujourd’hui être très fière des JO qu’elle a livré au monde entier.

En un mot, ces JO nous ont fait vibrer. De A à Z. C’est à dire de la cérémonie d’ouverture, exceptionnelle dans son originalité selon moi, à la cérémonie de clôture, elle aussi nous réservant quelques surprises.

Surtout, ces JO de Paris ont montré qu’il était possible de faire différent: la mise en valeur de sites exceptionnels (le Grand Palais, Versailles, le Champ de Mars, Montmartre, etc.), des stades mais pas que, une ambiance du tonnerre, l’efficacité, tout a été parfait. La France en a mis plein la gueule, et aux Français d’abord.

Divisée ces derniers mois la France, déchirée même, entre crises politiques, crises économiques, crises sociales, on a l’impression que la France ressort de ces JO comme un pays conquérant, ayant montré aux yeux du monde ce qu’elle peut faire de mieux. Exit le Front populaire, exit les réformes des retraites, le pouvoir d’achat, l’immigration, pour deux semaines la France a fait vibrer le monde, Léon Marchand en tête de liste. La France a ses problèmes comme tout le monde, mais dans l’art de vivre, l’art d’émouvoir, on fait difficilement mieux.

Et pour moi, c’est l’épreuve de cyclisme sur route qui a été l’apothéose de ces JO enivrants d’un bout à l’autre.

Un succès populaire ahurissant, surtout dans Belleville autour de Montmartre, où de mémoire d’homme on n’avait pas vu pareille ambiance. Le cyclisme a ceci de particulier qu’il demeure, par sa nature, proche de ses athlètes et héros, qui sont au contact de la foule en tout temps. Que voulez-vous, on ne peut pas installer des barrières sur 270 kilomètres de course…

Je me souviendrai longtemps de ces épreuves de cyclisme sur route, de cette arrivée au Trocadero, Remco triomphant avec en arrière-plan la Tour Eiffel dans toute sa splendeur. Remarquable. Le passage dans Belleville, sur cette butte Montmartre, était quelque chose. Unique. Le cyclisme professionnel serait bien avisé d’y retourner chaque année, pour une grande fête populaire déjà garantie; pourquoi ne pas ressusciter ce magnifique « Trophée des grimpeurs », édition Montmartre, dès l’an prochain?

Quoi qu’il advienne, ce n’est pas compliqué: il restera un « avant » les JO de Paris, et un « après » les JO de Paris. Bonne chance à ceux qui suivent pour faire mieux…

Aujourd’hui, alors que le monde retrouve une certaine normalité et que les enjeux désolants seront remis au premier plan, alors que les ténèbres reviendront assurément, la France peut être très fière d’avoir offert au monde entier ce qui demeure sa signature: ses Lumières, tout simplement.

Jumbo-Lease a Bike: A True Renaissance

Intéressant vidéo sur l’expérience de l’équipe Jumbo-Lease a Bike sur le récent Tour de France.

Phil Liggett: bon débarras

J’ai beaucoup aimé Phil Liggett comme animateur des courses cyclistes professionnelles dans les années 1980 et 1990.

Ses propos, parfois teintés de lyrisme et faisant souvent référence à l’histoire du sport, étaient justes, informés, et pertinents. Il m’a fait vibrer alors que je découvrais le cyclisme professionnel.

Puis tout a dérapé avec Lance Armstrong.

Phil Liggett a alors perdu toute objectivité, toute éthique de travail, pour devenir un laudateur naïf des exploits pourtant suspects – c’était documenté – de l’Américain.

N »hésitant pas à accepter de voyager dans le jet privé d’Armstrong, il s’est fait avoir par ce dernier qui avait besoin de la voix de Liggett pour magnifier son culte, et engranger des millions en pub. Le système Armstrong.

Plutôt que de rester un observateur éclairé du cyclisme comme d’autres animateurs comme Bertrand Duboux, Liggett est devenu un pion du système, manipulé et manipulant les foules.

J’ai totalement décroché. Phil Liggett a très mal fait son travail. Pire, il ne l’a jamais vraiment avoué, au contraire d’autres comme Pierre Foglia.

Alors qu’il annonce sa retraite prochaine et que les JO de Paris sont ses derniers, je ne m’ennuierai pas de cet animateur partial, biaisé et manquant d’éthique de travail. Bon vent.

Gee, le récit sur le Tour

Le Canadien Derek Gee, tout juste 27 ans, a réalisé un Tour de France remarquable, terminant 9e du général et ratant la victoire d’étape de très peu sur la 9e étape autour de Troyes et ses chemins blancs.

Beau vidéo de l’équipe Israel-Premier Tech relatant l’expérience de Gee sur ce Tour de France.

Je souligne également le très beau maillot de champion canadien que portera Michael Woods sur les prochains mois en WorldTour. Woods a lui-même contribué au design du maillot original, s’inspirant des maillots de… Donavan Bailey et de l’équipe canadienne de hockey en 1987 lors de ses matchs contre la Russie.

Ca change un peu du traditionalisme, et on souhaite que Cyclisme Canada s’en inspire car après des décennies du design classique du maillot de l’équipe nationale, il est probablement temps de se renouveler un peu… beaucoup d’équipes nationales proposant des maillots originaux à chaque Mondiaux ou chaque Jeux Olympiques.