Tous les jours, la passion du cyclisme

 

Mois : mars 2021

La résilience de Primoz Roglic

Résilience: capacité à vivre, à réussir, à se développer en dépit de l’adversité.

Ce terme est à la mode depuis une vingtaine d’années et l’a certainement été depuis un an avec la pandémie.

En cyclisme, ce mot va bien à Primoz Roglic, qui n’a pas été épargné par les déconfitures au cours des 12 derniers mois.

Et encore ce dimanche dans la 8e étape de Paris-Nice où, solide leader au départ, il n’était même plus dans le top-10 à l’arrivée un peu plus de deux heures plus tard, et après un petit 93 bornes d’une étape qui s’annonçait pourtant simple pour la formation Jumbo-Visma.

Sitôt la ligne franchie, Roglic est allé féliciter le vainqueur, Maximilian Schachmann. Beau geste sportif alors qu’il était encore « à chaud ». Quelques minutes plus tard, dans son entrevue d’après course, on sentait toute la résilience de Roglic:

J’ai tout donné, mais voilà… Le monde ne va pas s’arrêter. Je n’en veux pas à Maximilian (Schachmann), c’est une course de vélo, on n’est pas là pour se faire des politesses. C’est le sport. Je reviendrai.

Primoz roglic

L’an passé sur le Tour, ce fut pareil: il était allé rapidement féliciter Tadej Pogacar à la Planche des Belles Filles, et était souriant le lendemain au départ de la dernière étape.

Deux semaines plus tard, il remportait Liège-Bastogne-Liège puis la Vuelta.

Il s’était également relevé d’une lourde chute quelques semaines avant le Tour, sur le Dauphiné.

Une étape folle que je comprends mal

Cette 8e étape de Paris-Nice aura été folle de bout en bout. Pourtant, 93 petits kilomètres à parcourir seulement sur un parcours certes casse-pattes.

La deuxième chute de Roglic à 25 kms de l’arrivée a été l’événement déclencheur d’une course très chaotique par la suite.

Va pour l’attitude devant des Bora-Hansgrohe et d’Astana, qui avaient Schachmann et Vlasov pour le général. C’est la course. C’est plutôt derrière que je n’ai pas compris.

Il est évident que la Jumbo-Visma n’a pas été assez rapide à s’organiser une fois Roglic derrière suite à sa 2e chute. Il avait notamment des coéquipiers devant qui ont tardé à se relever pour l’attendre.

Bennett, Oomen et Kruijswijk étaient-ils usés de l’étape de la veille? Pas impossible, car ils avaient travaillé dans le final. Il faut savoir tirer les leçons: la victoire de Roglic sur la 7e étape n’était peut-être pas nécessaire si c’est le général qu’on visait… surtout qu’on avait déjà deux victoires d’étape dans l’escarcelle à ce moment.

Surtout, je n’ai pas compris pourquoi la FDJ, Campenaerts ou encore Van Poppel et Bouhanni ont aidé Roglic dans le final de la dernière étape? Van Poppel ou Bouhanni croyaient-ils vraiment pouvoir remporter l’étape au sprint? Pourquoi relayer Roglic alors?

La FDJ voulait-elle ramener Demare? Dans quel but?

Bref, l’histoire se répète chez Jumbo-Visma: archi-forte, l’équipe continue de pêcher par manque de sens tactique selon moi… ou par excès de confiance!

Deux chutes, vraiment?

Je me pose aussi la question: deux chutes pour Roglic, vraiment? Ça fait beaucoup. Il n’a peut-être été que malchanceux. D’autres raisons possibles? Sa deuxième chute, en particulier, semble être survenue au bas d’une descente. L’équipe Jumbo-Visma utilise cette saison des roues Shimano, montées sur pneumatiques Vittoria. Et des freins à disque.

Milan SanRemo: ca s’annonce dantesque!

Quel début de saison!

En plus de 30 ans, je ne me souviens pas d’avoir connu pareil début de saison, avec des vainqueurs du Tour déjà pleinement opérationnels (Bernal, Pogacar, Thomas).

Je ne me souviens pas d’avoir vu le récent champion du monde de cyclo-cross détruire l’opposition sur les grandes courses sur route de février et de mars. D’ordinaire, ce sont les vacances pour les cyclocross men.

Je ne me souviens plus quand nous avons vu un champion du monde aussi affuté et devant, si tôt dans la saison.

Bref, ils sont tous là, et répondent présents du tac au tac. Y’a peut-être juste Chris Froome – si jamais vous le considérez encore comme un vainqueur potentiel du prochain Tour! – qui traine solo (ou presque) du côté de Ténérife ces jours-ci.

Que du VDP

Et du lot, un coureur se distingue tout spécialement, loin d’être un inconnu: Mathieu Van Der Poel.

C’est tout simplement impressionnant. Une classe à part.

Elles sont où, ses limites?!

Son récital sans bavure sur les Strade Bianche a été grandiose de maîtrise, de confiance et de puissance. Il était évident à l’approche de la dernière rampe que VDP savait qu’il lâcherait là et quand il voudrait Alaphilippe et Bernal. Et dès qu’il a accéléré (plus de 1300 watts!), les deux autres ont cédé illico. Fort.

Il nous a remis ca depuis sur Tirreno. Son étape d’hier, 60 bornes solo devant dans la pluie et le froid, force l’admiration. S’il a beaucoup souffert dans les derniers 15 et a fini complètement détruit, ce genre de truc nous interpelle forcément. Quelle énergie! Et après une belle saison de cyclocross, un sport pas tout à fait reposant…

La Primavera

Du coup, le spectacle sera certainement grandiose sur Milan SanRemo samedi prochain, la 112e édition de cette course à part, longue (299 kms), tactique, et qui, depuis 20 ans, se termine souvent par un sprint, ou par le coup du kilomètre de préférence en petit comité.

Et que dire de la plongée sur la Via Roma depuis le haut du Poggio, prise de risques maximale… et avec la fatigue en plus, c’est aussi à celui qui sait bien garder son sang-froid à ces vitesses. Et rappelons que la position couchée sur le tube horizontal sera interdite.

Un favori: Mathieu Van Der Poel. Comme on dit dans le milieu, il aura la pancarte – une grosse pancarte – dans le dos.

Derrière lui, Alaphilippe le puncheur bien sûr, Van Aert, Pogacar, Yates, selon la startlist. Roglic, un autre homme en forme actuellement, s’est disloqué l’épaule sur Paris-Nice et ne fera sa prochaine course qu’au début avril afin de préparer la suite de sa saison. Deux chutes dans le final de l’épreuve auront couté à Roglic le classement général de ce Paris-Nice, au profit de Maximilian Schachmann.

Quelque chose me dit que ca n’arrivera pas au sprint cette année à SanRemo. Si ca devait, il faudra faire attention à des coureurs comme Mads Pedersen, Michael Matthews, Arnaud Demare ou Davide Ballerini, qui pourraient passer le Poggio avec un peu de chance. Sam Bennett? Je n’y crois pas une seconde.

Un coup intelligent serait de partir pour surprendre dès la Cipressa: ca fait un moment qu’on n’a pas vu ca. Avec une échappée royale composée des leaders d’équipe, ca peut le faire. C’est pas impossible, c’est un peu ce qu’on a vu sur les Strade Bianche. Surtout si Julian amène avec lui un certain Rémi Cavagna!

Hugo Houle

Le Québécois chez Astana occupe actuellement la… 13e place du général de Tirreno-Adriatico, une performance que je juge remarquable étant donné le plateau relevé qui est présent sur cette course.

Hier, dans des conditions climatiques difficiles, il a terminé 16e de l’étape, et 2e de son équipe derrière Fabio Felline, 4e. Et devant Nibali, Yates, ou Quintana.

J’y vois le signe qu’Hugo est assurément en train de confirmer les progrès de l’an dernier. Je serais Astana que je commencerais à lui donner un statut un peu différent au sein de l’équipe, par exemple comme coureur protégé sur certaines épreuves d’un jour pouvant lui convenir.

Chose certaine, c’est bien parti pour une grande saison!

Bouc émissaire

Un mot en terminant sur l’affaire Richard Freeman chez Sky (aujourd’hui Ineos), ce médecin récemment condamné pour avoir commandé de la testostérone qui était clairement destinée à des coureurs de l’équipe.

Il est évident pour moi que Freeman est le bouc émissaire de pratiques très douteuses chez Sky au début des années 2010. On comprends mieux aujourd’hui comment les Bradley Wiggins et Chris Froome ainsi que leur armada ont pu dominer le Tour de France et d’autres épreuves, posant la Sky comme la meilleure équipe du monde.

Voilà qui nous rappelle que toute domination outrancière d’une seule équipe à ce niveau de professionnalisme que celui du WorldTour est suspecte, que les pratiques dopantes étaient et sont probablement toujours bien en usage au sein du peloton pro, tout en étant plus cachées via des intermédiaires et autres prête-noms. On a appris: c’est comme en économie et en fiscalité, avec les compagnies à numéro et les montages off-shore, vous permettant de compliquer tellement la situation que plus personne ne peut comprendre les ramifications d’une grande entreprise.

Et qu’on cherche évidemment à protéger Dave Brailsford dans l’affaire, le grand manager de l’équipe Ineos, qui cautionnait certainement tout cela. Pratique les bouc émissaires, t’es en 2e ligne à l’abri même si c’est toi qui tire les ficelles!

Page 2 of 2