Comme la plupart d’entre vous très certainement, ma première réaction fut enthousiaste: Greg LeMond, président de l’UCI? Bien sûr que oui!
Greg LeMond jouit en effet d’une excellente réputation au niveau de sa probité d’athlète d’abord (je vous rappelle qu’il est le seul coureur américain à avoir remporté le Tour de France…), de son engagement à l’égard de la lutte contre le dopage ensuite. Même des experts reconnus du dopage dans le sport, et particulièrement dans le cyclisme comme Jean-Pierre de Mondenard, ne trouvent que très peu de choses à redire sur Greg LeMond qui est très certainement le dernier vainqueur « à l’eau claire » du Tour de France (voir l’ouvrage « 33 vainqueurs face au dopage – Jean-Pierre de Mondenard – éditions Hugo et Compagnie, 2011).
Mais avec un peu de recul, ce n’est peut-être pas si simple que ca.
D’une part, l’option sous-entend la poursuite de l’existence même de l’UCI dans sa forme actuelle. Il y aurait peut-être lieu de revoir cela, non?
D’autre part, Greg LeMond a été un des tous meilleurs cyclistes de l’histoire du vélo certes, et un habile homme d’affaire présentant un discours articulé, sincère, droit au but. Mais on peut penser qu’il manque d’expérience « politique » pour oeuvrer à ce niveau, entre nécessité de connaître les cadres légaux et la gestion d’une organisation qui emploie environ 60 employés à temps plein chaque année.
Enfin, le processus d’élection du président de l’UCI est lui-même compliqué. Le président est en effet élu par une sorte de collège électoral découlant du Congrès de l’UCI, l’instance suprême de l’organisation. Ce Congrès est composé de représentants d’une foule de Fédérations nationales, en premier lieu leur président. Pour le Canada par exemple, il s’agit du président de l’Association cycliste canadienne, John Tolkamp. Certaines fédérations de pays centraux du cyclisme, comme la France ou l’Italie, ont droit à plusieurs représentants au Congrès de l’UCI.
Greg LeMond devra donc s’assurer du vote de nombreux membres du Congrès de l’UCI s’il veut être élu président. Si cela ne devrait pas être un problème aux États-Unis et au Canada (du moins on espère), pas évident pour les autres fédérations nationales réparties à travers le monde. Chacune a en effet ses propres intérêts, et ses propres limites financières.
À moins que Pat McQuaid ne démissionne et que son successeur soit désigné rapidement. Évidemment, la démission de Pat McQuaid serait un grand pas en avant pour le cyclisme tout en représentant la seule façon qu’il reste à ce Monsieur de nous prouver qu’il aime vraiment le vélo…
Quoi qu’il en soit, et à bien y réfléchir, je crois qu’il serait plus réaliste de considérer une candidature comme celle de Dick Pound par exemple, un homme nettement plus rompu aux rouages de ce genre d’institutions internationales. Greg LeMond pourrait certes agir à titre de conseiller dans la lutte contre le dopage, mais je doute que ce soit à la présidence de l’UCI qu’il serait le plus efficace.
Greg LeMond lui-même a évoqué Dick Pound dans une entrevue hier au journal français Le Monde, preuve qu’il connaît lui-aussi ses limites et là où il pourrait être le plus utile. J’y vois une raison de plus d’avoir confiance en Greg LeMond, un homme qui de toute évidence adore le cyclisme et est déchiré par la situation actuelle de son sport.