Tout le monde s’entendait, à la lumière des prévisions météo, pour dire que ça serait épique.
Ben ca n’a pas loupé! Épique et… imprévisible!
46.
Ils sont 46 sur 197 coureurs à avoir complété l’épreuve, raccourcie de 24 kilomètres pour tenir compte des éléments climatiques. Une décision de l’UCI qui est loin de faire l’unanimité, et avec laquelle je ne suis moi-même pas d’accord. Passons sur ce point.
Pour Julian Alaphilippe, 28e hier, ce fut la course la plus dure de sa carrière. La tronche des survivants dans les 15 derniers kilomètres en disait long sur la difficulté de la course, qui nous reconnectait de ce fait avec les racines même du sport cycliste.
Une course sans oreillettes non plus, et on s’est régalé de la dynamique que ca a créé dans le final.
Et deux équipes ont dominé les débats dans le final, celles du Danemark et de l’Italie, qui placent trois coureurs chacune dans les 12 premiers.
Trois coureurs précis étaient selon moi hier au dessus du lot: Pedersen le vainqueur bien sûr, mais aussi Van Der Poel et Sagan.
Le fait de course marquant, c’est la défaillance imprévisible de Van Der Poel à 12,5km de l’arrivée, à l’entrée du dernier tour. Il avait fait jusque là course parfaite, et probablement le plus dur en attaquant à 33 kilomètres de l’arrivée, sans que personne ne puisse le suivre, exception faite de Trentin. Échappé avec quatre autres coureurs par la suite, il lui suffisait d’accélérer dans la dernière bosse pour finir seul.
Au lieu de cela, la fringale complète, soudaine et inattendue. En regardant bien les images, on voit bien qu’une fois échappé dans son petit groupe, Van Der Poel prenait de gros relais, sûr de sa force. Il a probablement péché par excès de confiance hier, en faisant un peu trop, un peu trop tôt dans ces conditions climatiques exécrables.
Van Der Poel out, c’était course gagnée pour Matteo Trentin, le meilleur sprinter de l’échappée. Moscon son compatriote s’est logiquement sacrifié, et à la flamme rouge l’italien d’expérience ne pouvait plus perdre.
Et ben non. Lui-aussi aura payé les éléments apocalyptiques, tétanisé dans le dernier tour après avoir retiré sa veste de pluie. Son sprint n’aura duré que quelques secondes. Trentin et toute la Squadra Azzura auront bien du mal à s’en remettre de celle-là, c’est une chance unique dans une carrière et rarement avons-nous vu un archi-favori du sprint perdre de la sorte. Les Italiens devront attendre au moins un an de plus pour succéder à Alessandro Ballan…
Pedersen s’impose donc à 23 ans, et deux ans après avoir terminé 2e du Tour des Flandres. C’est un homme qui marche mal dans la chaleur – dixit Alain Gallopin – et qui affectionne donc les conditions climatiques difficiles. Un vrai flahute ! Parfaitement opérationnel hier, passant toujours ses relais, il n’aura eu qu’une faiblesse dans le dernier tour, alors que Kung faisait le forcing pour évincer Moscon dans une bosse. Revenu à la pédale, il reprenait ses relais en tête de groupe aussitôt, rien à dire sur sa loyauté à l’échappée sinon chapeau, une course réglo, limpide, parfaitement maitrisée. Et quel sprint!
On a enfin vu Sagan faire un baroud d’honneur dans les derniers hectomètres de la course, bien marqué cependant par un autre Danois, Michael Valgren, qui couvrait pour Pedersen devant. Un sans faute des Danois! Pour Sagan, c’était trop peu, trop tard.
Les Belges auront couru à contre-pied toute la course, comme les Australiens et les Français, ces derniers étant tous lâchés dans le final. Idem pour le Canada: aucun coureur à l’arrivée. Ceci étant, loin de moi l’idée de les critiquer, c’était une course dantesque hier, dans des conditions tout à fait exceptionnelles. La majorité des coureurs ont souffert du froid surtout. Mention bien à Hugo Houle, dans l’échappée matinale. Il a eu raison, au moins il s’est tenu chaud pendant un moment!
Parmi les autres informations du jour, quelques problèmes avec les transmissions électroniques, à l’instar d’Esteban Chaves. Ce type de transmission continue de ne pas apprécier les longues sorties dans l’humidité. Les batteries souffrent probablement, comme l’étanchéité.
L’année des jeunes
Vous êtes nombreux à vous questionner sur ce site du succès des jeunes coureurs cette saison. À 23 ans, Pedersen en rajoute une couche à ce niveau, les coureurs de moins de 25 ans ayant multiplié les victoires de prestige cette saison, faisant presque oublier les plus vieilles générations. Hasard? Autre chose? Il faudra probablement attendre la confirmation de tous ces jeunes en 2020 avant de tirer des conclusions!
Les autres résultats
On attendait le néerlandais Van Der Poel sur ces Mondiaux, ce fut finalement la néerlandaise Van Vleuten qui s’est illustrée en remportant la course des femmes chez les élites. Après une échappée solitaire de 100 bornes, excusez-du-peu!
Sinon, j’ai été impressionné du succès de l’équipe américaine sur ces Mondiaux. Quinn Simmons qui remporte le titre sur route chez les juniors après avoir terminé 4e du chrono, son co-équipier Magnus Sheffield 3e de la même course, Chloe Dygert 4e sur route chez les élites après avoir gagné par plus d’une minute le chrono, Amber Neben 4e du même chrono, Leah Thomas 7e, Megan Jastrab qui remporte le titre sur route chez les femmes junior, wow, que de résultats! Un nouvel âge d’or du cyclisme américain au plus haut niveau serait-il pour bientôt?
La suite
La suite, c’est essentiellement en Italie que ca se passera, avec quelques semi-classiques et surtout, surtout, le Tour de Lombardie le 12 octobre prochain, une course vraiment très difficile dans des paysages vraiment très beaux. Une autre course à ne pas manquer, un vrai monument du cyclisme qui couronne habituellement un grand champion. Après les Mondiaux hier, ils sont nombreux à vouloir profiter d’une bonne condition pour aller chercher un dernier grand résultat, y compris… le Canadien Mike Woods.