Nouveau cette année dans le paysage Internet, le site Vélolibrius s’est montré, au cours des derniers mois, particulièrement critique envers la Fédération Québécoise des Sports Cyclistes (FQSC) ainsi que l’Association des Cyclistes Vétérans du Québec (ACVQ), notamment au sujet de la refonte, cette année, des catégories de coureurs.
D’entrée, je ne vous le cacherai pas: le ton Vélolibrius, parfois, m’irrite. Une situation très certainement liée au choix des mots. Si on veut provoquer voire susciter des réactions tranchées, c’est réussi! J’ai notamment regretté, en silence, la démission de Stéphane LeBeau de la présidence de l’ACVQ en mai dernier à la suite de malheureux événements survenus lors du GP de St-Raymond. Certains textes de Vélolibrius ont pu contribuer à envenimer la situation et Stéphane a également fait l’objet d’attaques personnelles déplacées sur certains médias sociaux. Dans ce contexte, comme j’ai compris son geste!
D’autres diront que le site a le mérite d’amorcer des réflexions. Probablement.
Dans ce contexte, Vélolibrius a récemment publié une lettre ouverte invitant les coureurs Maitres du Québec à réfléchir sur les liens qu’entretiennent l’ACVQ et la FQSC. Rappelons ici que la prochaine Assemblée générale de l’ACVQ aura lieu le 16 novembre prochain.
Je vous avouerai franchement ne pas me sentir assez informé pour poser un jugement complet sur l’ensemble des enjeux soulevés par cette lettre ouverte.
Mais je me pose quelques questions de gros bons sens.
La première, c’est à propos de la nature même du problème: c’est quoi, en fait, le problème intolérable?
Ma compréhension, c’est que les membres ACVQ serait en « surplus de contribution » par rapport à la FQSC. En clair, cela veut dire que les coureurs Maitres paieraient trop cher leur adhésion, centralisée par la FQSC.
À mon sens, si tel est le cas, le « surplus de cotisation » n’est pas très important (Vélolibrius l’a lui-même estimé à 15$ annuellement), pas assez en tout cas pour s’en formaliser de trop, surtout dans le contexte où nombre d’entre nous coureurs Maitres – j’en suis – roulent sur des vélos à 4000$ et plus et vont annuellement en camp d’entrainement printanier à l’extérieur du pays.
C’est d’autant surprenant que plus loin dans la lettre, Vélolibrius suggère comme solution d’augmenter la contribution annuelle à l’ACVQ – dans l’hypothèse qu’elle serait redevenue indépendante de la FQSC – pour combler la perte éventuelle de membres suite à l’abandon de la perception des adhésions obligatoires par la FQSC!
La deuxième question que je me pose, c’est justement à propos de l’indépendance de l’ACVQ. En clair, la proposition Vélolibrius porte essentiellement sur ce point, rendre l’ACVQ indépendante de la FQSC, car la situation actuelle serait problématique. Ainsi, on pourrait investir dans la « compétition Maitre », voire dans la relève des Maitres, ou encore dans un fonds d’aide pour les « organisateurs de courses spécifiquement pour les Maitres« .
Là, j’avoue être hésitant. Juste l’expression « organisateurs de courses spécifiquement pour les Maitres » me fait peur!
En gros, on va pouvoir, par cette indépendance, créer nos courses Maitres, nos organisations? En clair, durant les week-ends de juin prochain, les coureurs Maitres iront courir à Saint-Machin, et les autres catégories ailleurs dans la province?
Personnellement, je suis sceptique quant à l’idée de diviser les forces, surtout compte tenu de la nouvelle politique de la Sureté du Québec qui facturera dorénavant ses prestations lors d’événements, ce qui ne rendra pas leur mise sur pied plus facile, ni plus simple.
Pour moi, le cyclisme au Québec est un petit milieu et dans ce contexte, il convient de se serrer tous ensemble les coudes. Si un organisateur se décarcasse pour organiser un événement, est-il logique de n’y voir que quelques catégories y participer et pas les autres, sous prétexte que les autres relèvent d’une autre « fédé » ou « association »?
On appelle ça des économies d’échelle. Au fond, ce qui est compliqué, c’est de faire partir le premier peloton. Après, tout est en place: en faire partir 7-8 autres, c’est plus facile. Le chronométrage est en place, la sécurité est en place, tout est là. Et la communauté cycliste a plaisir à se retrouver, à se saluer lors des événements!
Pris autrement, quelles garanties avons-nous que la sécurité et les autres prestations seraient mieux assurées sur des événements exclusivement ACVQ, plutôt que sous l’égide de la FQSC, alors que les moyens seraient divisés?
Par ailleurs, Vélolibrius justifie cette indépendance notamment pour « préparer la relève Maitre ».
J’avoue ne pas très bien comprendre. Je vois mal comment on pourra « préparer la relève » pour les Maitres de 50 à 59 ans. La simple juxtaposition des mots « Maitres » et « relève » apparait incongrue!
La vaste majorité de ces coureurs de 50 à 59 ans ne sont-ils pas d’ex Maitres 40-49 ans, eux mêmes pour un bon nombre d’ex Maitres 30-39 ans, plusieurs d’entre eux d’ex coureurs séniors?
Pour moi, le cyclisme est une pyramide et un des moyens les plus efficaces pour préparer la « relève Maitre », c’est probablement de s’assurer que la masse critique de coureurs cadets, juniors, séniors 1-2 et 3-4, est là. Ces coureurs séniors ne passeront pas tous pro! Plusieurs continueront d’assouvir leur passion en devenant des coureurs Maitres, et les exemples sont nombreux dans le passé (j’en suis). Que ma cotisation annuelle FQSC-ACVQ soit un peu plus importante (on parle de 15$, c’est ca?) pour moi coureur Maitre afin de donner plus de moyens à la FQSC dans la réalisation de son mandat, j’y vois une forme de contribution à la vitalité et au développement de tout le cyclisme au Québec. Et une certaine garantie de voir encore du monde dans mon peloton Maitre au cours des prochaines années!
Les tarifs de nos courses régionales en Outaouais, notamment du côté d’Ottawa, servent justement aussi à soutenir, via des bourses, les jeunes talents émergents, outre de développer la condition des coureurs de la région, coureurs Maitres compris. Mes frais de courses sont légèrement majorés pour cela: la belle affaire! Je les paie avec enthousiasme, fier des prestations nationales de coureurs comme Jean-Sébastien Perron, Matteo Dal-Cin ou encore Mike Woods qui ont bénéficié de ces bourses découlant directement de la communauté des coureurs cyclistes d’Ottawa-Gatineau.
Le développement du cyclosport est également un probable bon vecteur de développement du peloton Maitre, certains voulant poursuivre leurs nouvelles expériences sur les cyclosportives dans des courses formelles (j’en ai chaque année la preuve, mon équipe cycliste recevant de telles demandes de la part de cyclosportifs). La FQSC a fait des efforts louables dans ce sens au cours des dernières années.
Bref, pour conclure, la lettre ouverte de Vélolibrius présente clairement une option: le droit à la libre concurrence auprès de la FQSC. Je ne suis pas convaincu que dans le contexte actuel, le développement du cyclisme sur route au Québec sortirait gagnant en poursuivant une telle voie suggérant la division. Et non, je ne suis pas fédéraliste!
Je termine en regrettant amèrement la présence, dans la lettre ouverte de Vélolibrius, d’une citation d’Alexis Carrel portant sur la « qualité des hommes ». Démographe ayant travaillé à l’INED à Paris dans le passé, je suis bien placé pour savoir que le leg de M. Carrel est particulièrement controversé, ayant notamment adhéré au parti fasciste Parti Populaire Français durant les années de la Deuxième guerre mondiale, et étant connu pour ses positions en faveur de l’eugénisme qui, à l’époque comme aujourd’hui, demeure difficile à cautionner.
J’ai plutôt tendance à me dissocier avec vigueur d’un tel individu et de ses thèses pour le peu condamnables. La citation est malheureuse selon moi.
Si la vigueur d’une association ne peut être réduite au simple nombre de ses membres on est d’accord, une association bien née ne saurait non plus « choisir » ses membres sur la base de leur « qualité ».
Velolibrius
Laurent,
Je voudrais apporter quelques commentaires sur votre billet, le plus succinctement possible.
D’abord, oui, il est exact de dire que Velolibrius aime amorcer et stimuler la réflexion. Le site a été conçu dans cette intention. Dépendant de sujet, les propos d’un billet peuvent parfois –pas toujours- être sévères à l’endroit de certaines instances et certains personnages dans l’exercice de leurs fonctions, sans jamais attaquer l’intégrité physique ou psychologique des individus.
Sur ce que vous appelez les «malheureux évènements » du GP de Saint-Raymond, les deux billets de Velolibrius ont rapporté la nouvelle. Sans la présence sur place de Velolibrius, qui, croyez-vous, aurait dénoncé la situation? Personne, probablement… À ce titre-là, je crois que la dénonciation par Velolibrius n’a pas servi, comme vous dites, à « envenimer la situation », mais, au contraire, a et continuera d’avoir un effet bénéfique pour la sécurité dans l’avenir. Au final, « l’affaire Saint-Raymond » aura sans doute été le point marquant de la saison dans le cyclisme amateur au Québec, la grande vedette étant le DG de la FQSC.
Sur ma proposition.
Vous faites porter votre questionnement sur l’adhésion obligatoire à l’ACVQ en en ramenant la nature au niveau de la simple cotisation à 15$ et en mettant en lumière la futilité de débattre sur des montants aussi dérisoires. Vous savez très bien, j’en suis persuadé, que là n’est pas la vraie question.
Il s’agit d’une question de principe : l’adhésion à l’ACVQ (vous le dites) est OBLIGATOIRE. Je vous réfère, Laurent, à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme (1948), article 20.2 : « Nul ne peut être obligé de faire partie d’une association ». Nos deux Chartes, canadienne et québécoise, stipule la même chose. Ce qui est intolérable, Laurent, c’est que nous soyons en train de débattre de ce sujet… entre démocrates, en 2014!
Deuxièmement, l’ACVQ jouit du privilège de l’exclusivité que lui accorde la Fédération. Aucune concurrence. Et aucune possibilité pour un individu d’y échapper : pas d’ACVQ, pas de licence ACC/UCI (on m’a personnellement refusé ma licence pour ce motif). Nul ne peut non plus quitter l’ACVQ en cours de saison sans voir sa licence révoquée : M. Barbeau de la FQSC m’a confirmé, par écrit, qu’il est impossible d’avoir une licence sans être membre de l’ACVQ…
Troisièmement, la reconnaissance de l’ACVQ pour ce privilège s’exprime par sa ‘générosité’, lorsqu’elle lui verse des « commandites » au fil des ans. Pensez-y.
Laurent, j’ai déjà lu quelques-uns de vos textes; je ne partage pas toujours votre point de vue, mais je le respecte toujours, parce que j’ai toujours senti que nous avions en commun les mêmes valeurs fondamentales que sont la démocratie et la justice. Je comprendrais mal que vous essayiez de justifier une telle situation.
Votre second questionnement porte sur l’indépendance de l’ACVQ par rapport à la Fédération. Cette indépendance, ou souveraineté, est l’essence-même de ma proposition. Il est manifeste que l’ACVQ est parfaitement dépendante du bon vouloir de la FQSC à cause de la relation dont nous venons de parler. Personne ne peut ne pas voir cela comme une situation flagrante de conflit d’intérêt : comment l’ACVQ peut-elle décemment espérer représenter ses membres efficacement auprès de la FQSC quand celle-ci la fait manger dans sa main (c’est une image!).
Ma proposition n’a rien de malsain, elle ne fait que suggérer que chacune des deux instances reprennent leur place respective : Que la Fédé organise des courses et que l’Association des vétérans représente les vétérans! C’est simple, et ça marche comme ça partout ailleurs!
Ça ne causerait pas une division des forces, comme vous dites; au contraire, ça renforcerait chacune des divisions.
Concernant la relève, je vous suggère de lire un billet de Velolibrius sur la Relance du cyclisme, dans lequel il est expliqué que la catégorie Senior 3 est mal en point, agonisante presque. Dans quelques années, il risque fort de manquer de monde dans les catégories maîtres parce qu’il n’y a pas de relève suffisante chez les Seniors 3. Le problème est complexe, il faudrait s’y attaquer dès maintenant, mais la FQSC fait la sourde oreille… préférant garder la catégorie Maître A intacte, pour le bénéfice de l’ACVQ. Il y a là, à mon avis, un manque de vision flagrant.
Je termine sur le reproche que vous me faites d’avoir utilisé une phrase d’Alexis Carrel hors de son contexte. C’est bien hors de son contexte que j’ai utilisé cette phrase; il faut donc prendre la phrase pour la phrase, pas pour le contexte qui n’y est pas évoqué d’ailleurs et dont je me dissocie autant que vous pouvez le faire. Croyez bien que je ne suis pas plus faciste que vous, Laurent.
Martin Desbiens
…de la belle pub pour ce blog, qu’est Vélolibrius, garde tes énergies pour ta présence à la prochaine Assemblée générale de l’ACVQ qui aura lieu le 16 novembre prochain.
Julien
Totalement d’accord avec toi Laurent. S’il y a un problème ponctuel au niveau du leadership de la FQSC, ce n’est pas en s’excluant qu’on le règlera. À court terme on pourra avoir l’impression que les choses bougent mais on y perdra beaucoup par la suite.
Je comprend qu’on puisse être choqué de ce qui s’est passé à St-Raymond et à Pont-rouge l’an dernier. Cependant, il ne faut pas oublier que c’est de moins en moins attrayant d’organiser des courses cyclistes par rapport aux Grand Fondo très lucratifs. Si on fait seulement critiquer, et vertement en plus, ceux qui s’investissent pour le circuit, on frappera le mur bientôt. On en a déjà eu un avant goût cette année. Et il faut s’attendre à faire une croix sur de plus en plus de courses au profit de cyclos à 150$. Selon moi, c’est plutôt l’heure de s’unir et de s’impliquer tous un peu plus pour sauver notre sport (les courses).
David De Grandpré
Excellente analyse! Les gens de Vélolibrius n’ont certainement 1) Aucune expérience en organisation (financière) d’une course 2) Aucune expérience de la gestion d’une fédération sportive 3) Un égocentrisme ma foi démesuré envers la pratique cycliste en général 😉
Vincent C
Pour quelqu’un qui se dit mal informé pour faire un jugement, je trouve que tu en fais pas mal! 😉
PILOTTE
Très bon article Laurent,
Je sais pas pourquoi au quebec quand les gens font faces a des difficultées faut toujours que la séparation soi la solution, le pays, les couples, la politique, même les fédérations de cyclisme, Le besoin de toujours chialer, blâmer les autres sans jamais prendre le temps de se faire sa propre rétrospective et voir le problème d’un autre angles avant de mettre le feu partout avec les émotions hors de contrôle …. La sagesse, le calme, le respect, le contrôle de soi, bref quand on fait face au tempêtes ensembles ont devient fort ensemble..! Je ni
Zut
Autant pour le billet de Laurent que celui de Vélolibrius, quel niveau d’écriture, c’est de très haut niveau. Merci messieurs de provoquer cette discussion.
On passe aux choses sérieuses et on prend notre avenir en mains maintenant?
On se donne rendez-vous à l’AGA de l’ACVQ et on relance tout ça, calmement et avec maturité?
Luc
J’ai lu le commentaire de Velolibrius et le commentaire de Laurent. J’avoue être abasourdi par le fait de vouloir se dissocier de la FQSC. En agissant ainsi, on fragilise la FQSC et le cyclisme compétitif en général. Vaut mieux travailler ensemble afin de trouver des solutions versus vouloir se séparer et faire ses propres courses.
Étant impliqué auprès des jeunes, j’ai toujours pensé que les plus vieux devrait contribuer au plus jeunes. Bref, en fragilisant la FQSC n’aidera en rien aux jeunes, ce qui, avec le poids des années, diminuera l’apport des cyclistes compétitifs au niveau des maîtres.
En terminant, je regarde le ton général de Vélolibrius et je ne comprends pas trop pourquoi vouloir créer un site si revendicateur. Si vous regardez à l’extérieur du Québec, le cyclisme est beaucoup moins développé au Canada, surtout pour les plus jeunes. Je ne pense pas que tout est parfait, mais nous sommes toujours plus fort unis que divisés.
Johnny
Merci, Merci et encore merci Laurent ! Je suis de ceux qui s’implique hardement dans une politique de sport de vie avec une présence marquée dans le développement élite chez les jeunes. Père de 4 enfants et coureur maître à mes heures, je ne peux que me désoler de ce vide possible que Velolibrius crée avec une énergie que je verrais si bien appliquée dans le développement. Je comprends cette attitude, elle est provient d’une certain manque dans nos fédérations, particulièrement dans la culture velo compétitif au Quebec. C’est malheureux, on trouvera toujours pour faire mieux mais on exécute rarement. J’ai eu la chance de courir maître cette année et j’ai adoré mes partenaires mais j’y ai aussi vu certains coureurs encore croire à la domination testostérique du maillot jaune de la cinquantaine. Pendant ce temps, les jeunes espoirs pennent à se financer, les courses rapportent très peu, la relève feminine est presqu’annéantit… Et on trouve encore le temps des complaintes jucher sur le toit de nos voitures allemandes… Encore aujourd’hui lors d’un événement, entendu de mes oreilles le fait qu’un athlete tournait la 60aine et pourra se réinscrire en course pour finalement espérer une médaille. Bon dieu, n’atteignez vous pas satisfaction à chaque présence lorsque vous rencontrez vos objectifs depuis des décénies ? Pendant ce temps, des douzaines et des douzaines de jeunes filles passeront à l’athlétisme, l’aviron et le patin de vitesse après avoir vendu leur velo. C’est ça la relève maitre.