Catégorie : Le monde des pros Page 16 of 70
Le 28 septembre prochain aura lieu le congrès annuel de l’UCI, instance suprême de l’organisme de gouvernance du cyclisme mondial, et qui regroupe l’ensemble des fédérations nationales qui en sont les membres.
C’est l’occasion de faire le point sur les grands enjeux actuels de l’UCI.
Rappelons d’abord que le calendrier WorldTour 2019 a déjà été établi et comporte 37 courses, contre 38 cette saison. C’est que le Tour d’Abu Dhabi et le Tour de Dubai ont été fusionnés en une seule course appelée l’UAE Tour. Les GP de Québec et Montréal auront lieu les 13 et 15 septembre 2019.
Rappelons aussi que les Mondiaux de cyclisme en 2019 auront lieu au Yorkshire, en Angleterre.
Les priorités de l’UCI s’articuleront autour du projet baptisé « Agenda 2022 » qui a déjà été approuvé par le comité directeur de l’organisation.
En gros, on vise à établir une parité hommes-femmes quant à plusieurs éléments, notamment les primes de victoires, d’ici 2022. Le développement du cyclisme féminin est discuté, notamment des enjeux tels que l’établissement d’un salaire minimum et d’une structure de grandes courses type World Tour. On n’y est pas encore!
L’UCI voudra également avancer son projet de réforme du cyclisme professionnel, qui fait du sur-place depuis des années déjà. Lappartient aimerait que plusieurs éléments de cette réforme entre en vigueur en 2020, dont une réduction du nombre de coureurs sur les épreuves WorldTour (6 coureurs par équipes sur les courses par étapes!).
Derrière cette réforme se cache un enjeu bien réel mais un peu tabou, les droits télé bien évidemment, puisque c’est là que l’argent est.
D’un côté, vous avez les organisateurs (et propriétaires!) des courses cyclistes, dont ASO toute puissante puisqu’elle a étendu son empire depuis 20 ans en rachetant nombre d’épreuves, dont des grandes classiques (Flèche Wallonne, LBL, etc.) voire même des grands tours (la Vuelta!), et de l’autre les équipes et les coureurs, qui crient pour une meilleure répartition de la richesse générée.
Et l’UCI au milieu! Beau merdier…
Les équipes et les coureurs s’opposent bien évidemment à la réduction du nombre d’équipes World Tour de 18 à 15, et la réduction du nombre de coureurs par équipe sur les courses (notamment sous prétexte d’améliorer la sécurité en course, un argument ridicule à mes yeux, les chutes ayant au moins été aussi nombreuses sur le Tour cette année). Pour le CPA, syndicats des coureurs pro (Gianni Bugno en est l’actuel président, mais une nouvelle élection aura lieu fin septembre et David Millar lui fait une chaude lutte), cette réduction entrainera un chômage accru parmi les coureurs pro, inacceptable.
Pat McQuaid est récemment intervenu pour mettre en garde l’UCI des travers de ce changement, qui joue le jeu des grands organisateurs de courses. Si seules 15 équipes faisaient partie du WorldTour, cela donne davantage de marge à ASO par exemple pour inviter qui elle veut sur ses épreuves, et donc maintenir un rapport de force avantageux sur le reste du milieu cycliste. Pour une fois, je suis assez d’accord avec McQuaid!
Ces éléments seront discutés, comme d’autres propositions, possiblement celle récente de Serge Arsenault de créer un circuit et un classement général annuel sur les courses d’un jour dans le cyclisme pro. Mouais… ce classement a déjà existé, avec un maillot distinctif, la Coupe du monde (entre 1989 et 2004). La réalité, c’est que n’importe quel coureur aura 100 fois plus d’intérêt de remporter un grand Monument comme le Tour des Flandres qu’une Coupe du monde en fin de saison, surtout si cette victoire se fait sans avoir remporté de course… (un peu comme ramener le jaune à Paris sans avoir gagné d’étape).
Tout le monde s’entend pour internationaliser et professionnaliser le cyclisme, façon Formule 1 ou Tennis ATP, afin de populariser davantage le sport, de rehausser son profil et de générer davantage de revenus, notamment publicitaires.
Je trouve qu’on évite de nombreux vrais enjeux, comme celui des oreillettes. Le public perd de l’intérêt pour les courses car on sait pertinemment, dès le départ, que les échappées sont condamnées. Personne n’y croit, personne n’est tenu en haleine, il suffit de regarder les 5 derniers kms des étapes pour voir un peu d’action.
Exit aussi les grands enjeux sur le financement de la lutte contre le dopage (physique et mécanique), fléau du sport qui mine en profondeur sa crédibilité.
Il faudrait aussi discuter d’un plafond salarial des équipes World Tour, la Sky par exemple pouvant se payer beaucoup de bons coureurs lui permettant de cadenasser les courses, façon US Postal. Ça tue le sport.
Au lieu de moins d’équipes World Tour, il en faudrait plus! Plus d’équipes au départ, plus de stratégies variées, plus d’intérêts divers (sprints, maillots distinctifs, victoire finale, etc.). Réduire le nombre de coureurs par équipe sur les courses est une bonne mesure, à condition d’admettre plus d’équipes au départ! La mixité d’équipes WorldTour et d’équipes plus régionales donnent habituellement de bons résultats… encore récemment lors des GP de Québec et Montréal ou plusieurs coureurs canadiens se sont montrés… sans les oreillettes, ca aurait été d’autres courses…
S’attaquer également au fléau des motos trop nombreuses sur les épreuves et qui, parfois, faussent les courses en favorisant souvent involontairement, parfois peut-être volontairement (intérêt national!), des coureurs échappés.
Et enfin, s’attaquer au problème du manque d’une grande épreuve WorldTour aux États-Unis, un marché pourtant immense où la pratique cycliste a considérablement augmenté ces dernières années.
La suite sera intéressante mais je vous avoue être un peu inquiet pour notre sport…
1 – GP de Montréal. Michael Matthews a rejoint son compatriote australien Simon Gerrans dans l’histoire des deux courses World Tour du Canada en faisant le doublé hier, au terme d’un sprint vraiment très serré avec Sonny Colbrelli. Impressionnant!
Matthews est venu « sauter » Colbrelli dans les derniers 50m, au terme d’un très bel effort. Parti sur la droite lors du sprint, il a fallu que Matthews revienne chercher un peu de vitesse dans l’aspiration de Colbrelli à gauche pour pouvoir s’imposer in extremis. Comme quoi un sprint n’est jamais terminé tant que la ligne n’est pas franchie!
Beau travail également de son équipe qui a roulé derrière l’échappée, encore une fois rejoints. C’est le cyclisme moderne…
2 – Des podiums pour Van Avermaet. C’est probablement le coureur le plus frustré de son week-end en sol canadien! 2e à Québec, 3e à Montréal, Van Avermaet repart encore « bredouille ». Il a toutefois prouvé qu’il est en excellente condition, de quoi donner des options au sélectionneur belge en vue des Mondiaux.
3 – Mohoric impressionnant. Si Tim Wellens a fait une grosse ascension du Mont Royal dans le dernier tour, c’est Matej Mohoric qui m’a impressionné le plus hier. Très beau coureur, beaucoup de classe sur le vélo, il a tenu en haleine le peloton pendant presque deux tours, assurant de gros relais dans une échappée à trois. Et il a trouvé encore des ressources pour venir travailler pour Colbrelli dans les tous derniers hectomètres, avant le sprint final. Attention à lui au cours du prochain mois… mais les prochains Mondiaux d’Innsbruck devraient être trop dur pour lui.
4 – Vuelta, c’est serré. Quatre coureurs sont encore à moins d’une petite minute du leader, Simon Yates, alors qu’on entame la dernière semaine de course, une semaine ponctuée de trois rendez-vous. D’abord le chrono de 32 kms mardi, ensuite l’arrivée en altitude au Balcon de Bizkaia mercredi au terme d’une étape de 157 kms, et enfin l’étape très accidentée mais courte (97 kms!) samedi prochain, la veille de l’arrivée.
Quintana et Valverde sont très bien placé, à 26 et 33 secondes du leader. Ils peuvent dynamiter la course, mais il faudra prendre des risques… Miguel Angel Lopez est le joker du petit groupe, et semble rudement costaud à l’entame de cette dernière semaine.
Perso, je mise sur le vieux briscard Valverde. Il ne voudra pas laisser échapper une telle victoire! On en saura plus sur les forces qui restent mardi soir au terme du chrono où personne ne peut tricher sur sa condition et sa fatigue.
5 – Enric Mas. C’est la révélation de la Vuelta! Espagnol, 23 ans, 6e actuellement du général, encore une autre pépite chez la Quick Step… Et il sait rouler contre le chrono, il a déjà été champion d’Espagne de la discipline chez les juniors. Ca sera intéressant de le suivre sur cette dernière semaine.
6 – Campagnolo EPS 12v. C’est actuellement testé sur la Vuelta, mais on resterait avec un groupe proposant des fils. Le sans-fil devra donc attendre un peu il semble chez Campi, et je vous avoue ne pas bien comprendre la stratégie marketing pour se distinguer de la concurrence, surtout que les cassettes 12v actuellement disponibles sont mal étagées.
7 – Geraint Thomas. Le vainqueur du Tour a prolongé son contrat chez Sky jusqu’en 2021. Je suis un peu surpris, mais on ne quitte probablement pas la Sky et les « marginal gains » facilement… car c’est une équipe qui fait marcher ses coureurs comme des avions! Se posera la question de la co-existence avec Froome, qui a signé l’an dernier avec la Sky jusqu’en 2020…
8 – Nino Schurter. M’intéressant de plus en plus au vélo de montagne et ayant commencé sa pratique, je m’intéresse également aux courses Mtb sur le circuit de la Coupe du Monde. Ce week-end, le champion suisse Nino Schurter, toujours impressionnant, a remporté son… 7e titre de champion du monde de la discipline! Ouf… À noter la très belle 3e place d’un coureur également exceptionnel, Mathieu Van Der Poel qu’on verra très bientôt en action sur le circuit de la Coupe du Monde de cyclo-cross. Ca va être très intéressant, car il est en forme, et son rival Wout van Aert l’est tout autant, ayant lui-aussi marqué les esprits cette saison en cyclisme sur… route!
9 – Emily Batty. Chez les femmes, c’est l’Américaine Kate Courtney qui s’est imposée, détrônant la suissesse Yolanda Neff, une sacré pointure elle-aussi (elle a terminé 4e). À noter l’exceptionnelle performance d’une Canadienne, l’Ontarienne Emily Batty, 3e. Elle tourne autour d’une grande victoire depuis plusieurs années!
10 – Nalini. Intéressant reportage avec beaucoup de photos de l’usine Nalini en Italie, qui confectionne depuis des décennies des vêtements cyclistes, dont certains d’équipes professionnelles. Ce marché est devenu très concurrentiel ces dernières années avec l’émergence d’un nombre incalculable de petites compagnies plus marginales qui tentent de se distinguer des géants que sont Castelli, Santini, Assos, Nalini, Biemme, Giordana et Sportful.
Celle-là, c’est la meilleure de l’année!
La Sky a annoncé qu’elle suspendait son coureur Gianni Moscon jusqu’à ce que la commission de discipline de l’UCI se soit prononcé par rapport à l’agression qu’il a commise envers un autre coureur du Tour, et qui lui a valu une exclusion de l’épreuve.
Et Chris Froome lui????!!!!
La Sky n’a jamais suspendu indéfiniment son coureur de premier plan, le temps que l’UCI et l’AMA se prononcent dans l’affaire du Salbutamol.
Je suis écoeuré.
En plus, la Sky avait d’abord protesté durant le Tour quant à l’exclusion de Moscon, malgré les images qui ne laissaient aucun doute possible.
Encore une fois, du très grand n’importe quoi!
Et on aura une autre preuve du peu de jugement et d’intelligence qui règnent dans le peloton en prenant connaissance des réactions des coureurs pro face aux propositions de Lappartient quant aux choses à modifier dans le cyclisme, ce sport malade: plafond salarial pour les équipes, abolir les oreillettes, tout cela va pourtant dans le bon sens.
Désespérant.
1 – Partir trop tôt, c’est l’erreur classique en sprint et ca se voit aussi chez les pros! Hier, il est clair que Greg Van Avermaet ou Philippe Gilbert sont partis beaucoup trop tôt en vue de l’arrivée. Sagan a su attendre un peu plus longtemps, et il a la puissance pour corriger le tir en cours de route. La ligne est survenue 35m trop loin pour Colbrelli qui tourne autour… gageons qu’il en gagnera une d’ici Paris!
2 – Sagan surpuissant, il n’a même pas besoin d’équipe pour s’imposer. Pour moi c’est simple, il est la ré-incarnation d’un Sean Kelly, 25 ans plus tôt. Sans être le meilleur en vitesse pure, il s’impose dès que le sprint est compliqué, c’est à dire au terme de routes sinueuses ou dans une arrivée en faux plat ascendant.
3 – Aujourd’hui, le Mur de Bretagne, deux fois plutôt qu’une! Misez les puncheurs, Alaphilippe ou Gilbert en premier lieu, mais aussi des coureurs comme Nibali ou Valverde, de ceux qui peuvent s’imposer en haut du Mur de Huy ou sur le Tour de Lombardie. Ca sera intéressant, surtout s’il y a du vent.
4 – Dimanche, les pavés de Paris-Roubaix! Ne manquez pas ca!
5 – Plus sécuritaire, un peloton composé de 176 coureurs plutôt que 198? Les articles commencent à fuser de toute part pour encore une fois dénoncer le fait qu’on nous prend vraiment pour des cons…
6 – Un maillot sans fermeture centrale pour UAE Team Emirates. Pas sûr du tout!
7 – La position de descente assis sur le tube horizontal, un must? J’ai souvent exprimé mes réserves sur cette technique ici… estimant que les gains en aérodynamisme ne valaient pas la prise de risque au niveau de la direction du vélo. On voit encore cette position dans le peloton pro, avec parfois des chutes comme hier durant l’étape. Vraiment, je ne la recommande à personne, surtout pas notre communauté de pratiquants qui évolue sur des routes ouvertes à la circulation!
8 – Intéressante analyse de l’effet d’aspiration dans un peloton, effet souvent sous-estimé. C’est fou!
9 – Tous les vélos du Tour, équipe par équipe. Nice! J’ai un petit faible pour Canyon.
10 – Matos: analyse des meilleures crèmes pour chamois. Intéressant! J’utilise pour ma part la crème Assos depuis des années, avec satisfaction. Mais rien de vaut le Assos Skin Repair selon moi. Tout simplement miraculeux!
Je sais pas vous, mais moi j’ai bien l’impression que ce Tour de France va être « lourd » pour Chris Froome en raison du public sur le bord des routes.
J’ai l’impression que Froome se fera copieusement hué sur ce Tour de France, partout où il passera.
Espérons qu’un geste malheureux à son endroit sera évité, mais je n’en suis pas sûr. Beaucoup de fans de vélo ont été excédés par la récente décision de l’UCI d’abandonner la procédure à l’endroit de Froome dans l’affaire du Salbutamol.
Le sport cycliste est un sport où la proximité du public est très présente, car on ne peut pas mettre 200 bornes de barrières sur les étapes. L’ambiance sera lourde pour les Sky, surtout qu’un Français (Bardet) peut nourrir des ambitions sur ce Tour de France.
La réaction du public à l’égard de Froome a déjà été très négative hier lors de la présentation des coureurs. Et déjà, par les années passées, Froome n’était pas le coureur le plus populaire en France auprès du public massé sur les bords de route…
Ca finira par peser dans l’équation je pense…
Après une absence de plusieurs jours à l’extérieur du pays avec connexion Internet limitée, La Flamme Rouge revient progressivement au service normal.
Et comme vous, j’ai été choqué d’apprendre que l’UCI abandonnait l’affaire du Salbutamol de Chris Froome, et donc le blanchissait de tout soupçon.
Cinq jours avant le début du Tour de France… Orchestré vous dites?
Surtout, je suis outré d’un chiffre, celui avancé par de nombreux sites d’information: 7 millions d’euros.
C’est ce que l’équipe Sky aurait dépensé pour assurer la défense de Chris Froome dans cette affaire, engageant les meilleurs avocats (Mike Morgan) et produisant apparemment 1500 pages d’un dossier étoffé, à grand renfort « d’études scientifiques » commandées depuis 8 mois.
7 millions d’euros!
En 2015, le coureur moldave Alexandr Pliuschin n’a pas eu cette chance: controlé lui aussi avec un niveau de Salbutamol trop élevé, il a été suspendu de son équipe puis sanctionné 9 mois par l’UCI. Sa carrière est aujourd’hui terminée… Sans oublier les cas de Diego Ulissi (2014) et Alessandro Petacchi (2007), eux aussi suspendu par l’UCI pour des niveaux excessifs de la même substance…
Froome n’a non seulement pas été suspendu par son équipe, mais il s’en sort en soulevant un « doute raisonnable », c’est à dire que les niveaux très élevés de Salbutamol trouvés dans son organisme peuvent découler d’une prise de ce médicament « dans les limites acceptées ». En d’autres mots, selon le rapport soumis par la Sky, on ne peut pas dire que Froome a essayé de tricher.
Le dossier élaboré par la Sky montrerait que Chris Froome est un cas particulier, et qu’il stockerait dans ses reins ces substances, plutôt que de les éliminer. L’AMA a parlé d’un cas « extrêmement complexe ».
C’est très intéressant: Froome serait en fait un très grand malade. Voyez un peu:
- atteint de bilharziose
- souffre d’asthme sévère (très pratique pour les AUT)
- souffre d’urticaire
- atteint de blastocystose (très pratique pour expliquer l’extrême maigreur…)
- atteint de fièvre thyphoide
Avec de nombreuses voies qui s’élèvent pour affirmer qu’on assiste actuellement dans le peloton au retour d’un dopage plus « classique » et utilisé grâce notamment aux AUT et autres justifications médicales, je pense que c’est ca la stratégie actuelle: passer pour un grand malade! Un petit coup (donc autorisé) de ceci pour maigrir et donc atteindre un rapport poids-puissance exceptionnel, un petit coup de ceci pour la respiration, un petit coup de cela pour la récupération (en plus de tout le reste, cryothérapie et autre), et vous avez les ingrédients actuels du super-champion. Sans oublier bien sûr les stages à Ténérife pour faire des globules…
Le grand malade Chris Froome sera donc présent sur le Tour, blanc comme neige (et blanc comme un drap). Reste à voir l’accueil du public… je crois personnellement que ca risque de mal se passer. Les huées seront plus nombreuses que jamais selon moi.
Froome sort indemne de tout ce scandale. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant du cyclisme…
Après une 10aine de jours perturbés en raison d’une charge de travail exceptionnelle, le service normal reprend sur La Flamme Rouge avec un petit Tour de l’actualité, à trois semaines du départ du Tour de France.
1 – Movistar. C’est confirmé, Valverde, Quintana et Landa seront au départ du Tour… abondance de bien nuit? Valverde atomise sur la Route d’Occitanie, Quintana était devant au Tour de Suisse, Landa s’est préparé pour le Tour tout particulièrement, aie. Toute une équipe!
2 – AG2R – La Mondiale. Tout pour Bardet sur le Tour, et c’est sans surprise.
3 – Lotto-Jumbo. Roglic, Kruijswijk, Gesink au sein de l’équipe du Tour. Ca a de la gueule. LA question demeure jusqu’où Roglic pourra-t-il aller?
4 – Groupama – FDJ. C’est plutôt la merde de ce côté-là, Thibault Pinot ayant déclaré forfait pour le Tour, s’estimant insuffisamment remis de son infection respiratoire sur les derniers jours du Giro. Quand je vous disais qu’il aurait été plus sage de l’arrêter pour des raisons de santé… Pinot s’est vraiment esquinté et il en paye le prix. Dommage!
5 – SunWeb. Par contre, Tom Dumoulin sera bien présent sur le Tour, et estime qu’il a pleinement récupéré de son Giro. C’est formidable car c’est peut-être le candidat le plus sérieux pour détrôner Chris Froome…
6 – Astana. On attend impatiemment la liste des engagés pour cette équipe, le Québécois Hugo Houle ayant une chance de faire l’équipe!
7 – Tour de Suisse. Victoire finale de Richie Porte, qui arrive donc au bon moment en grande condition en vue du Tour. Pourra-t-il éviter le jour sans sur une course de trois semaines?
8 – Dopage. Récent rapport de l’Agence Mondiale Antidopage sur les substances non interdites, mais dont l’usage est surveillé. Le cyclisme est encore montré du doigt, avec un usage supérieur aux autres sports de ces substances. Plus que jamais, restons lucides!
9 – Radio Bidon. C’est excellent, je suis chaque épisode avec intérêt. L’opus #7 est ici, spécial Tour.
10 – Matos. À l’heure des départs en vacances et des grandes cyclosportives, les meilleures boites de transport pour votre vélo. Privilégiez le rigide!
11 – Matos bis. Mavic Cosmic Tubeless, full carbon. C’est désormais chose faite. 1310 grammes la paire de roues, c’est du léger.
Je publie aujourd’hui cet excellent article que m’a fait parvenir mon ami Marc Kluszczynski à propos du récent Giro. À noter que j’ai écrit mon article d’hier sans avoir pris connaissance du sien, même s’il m’était parvenu avant-hier. Marc et moi nous posons les mêmes questions à propos de ce Giro, et Marc en pose quelques unes de plus qui sont très intéressantes, notamment à propos de la Bahrain et de Michelton-Scott.
Les questions du Giro, par Marc Kluszczynski
Chris Froome (Sky) a accumulé des milliers de kilomètres cet hiver en Afrique du Sud (on parle de 8000 km). L’anglais base sa saison sur le doublé Giro-TdF, alors que les juristes palabrent pour résoudre son cas positif au salbutamol lors de la 18èmeétape de la Vuelta 2017. Le salbutamol étant classé substance spécifiée, le code mondial antidopage ne lui impose pas une suspension immédiate : on ne remettra pas ce point en cause. David Lappartient, président de l’UCI, lui, l’a fait maladroitement et doutait fin mai que le cas Froome ne soit résolu avant le départ du TdF le 7 juillet. On voit mal Christian Prudhomme, directeur du TdF, interdire le départ à l’anglais, comme il l’avait fait pour Tom Boonen, positif à la cocaïne en 2008. Prudhomme s’exposerait à la lourde machine judiciaire de l’équipe Sky, qui actuellement n’hésite pas à remettre en cause le dosage du salbutamol et les procédures de l’AMA. Si l’AMA plie, c’est la honte pour elle. On se dirige vers l’intervention du TAS… à l’automne?
Froome a donc commencé sa saison mollement : trois compétitions de préparation aux résultats ternes : 10èmeà la Ruta del Sol ou Tour de l’Andalousie, 34èmeà Tirreno-Adriatico et 4èmeau Tour des Alpes remporté par Thibaut Pinot (en forme trop tôt). Au bout des deux premières semaines du Giro, nombreux sont ceux qui pensaient que Froome n’était plus en mesure de l’emporter. Il s’était fait distancer d’une 1 min 07 dans les deux derniers kilomètres de l’ascension du Grand Sasso (9èmeétape du 13 mai) par Simon Yates et Esteban Chaves (Mitchelton-Scott). Il ne sera que 5èmedu CLM du 22 mai (16èmeétape) à 35 sec de Rohann Dennis. Mais il avait remporté l’étape du Zoncolan (14èmeétape du 19 mai) où sa puissance avait été estimée à 6 W/kg (rien d’extraordinaire), avant de perdre 1 min 32 sur Yates le lendemain dans la 15èmeétape de la Sappada. Froome cumulait 3 min 50 de retard sur Yates avant la 3èmesemaine décisive avec ses trois étapes de montagne.
Suite à ses performances en dent de scie lors des deux premières semaines, et son explosivité perdue, on ne donnait pas cher de sa peau pour la victoire finale. A la question des journalistes s’il prenait encore du salbutamol, il expliquera que son dossier médical ne regardait que lui. Mais Eusebio Unzué, DS de la Movistar, avait pourtant prévenu : Froome sera présent en 3èmesemaine. Lors de la 19èmeétape de Bardonèche le 25 mai, Chris Froome démarre à 80 km de l’arrivée dans le 2èmetronçon non goudronné du Colle del Finestre, mais nettoyé et nivelé par les services de l’équipement italiens. Yates craquait et se prenait 38 min à Jafferau. Il endossera le maillot rose à Jafferau. Nombreux sont ceux qui comparait le démarrage de Froome à celui de Floyd Landis dans le TdF 2006.
Landis, dans l’étape de Morzine comportant 5 cols, s’était échappé dès le départ et avait effectué 150 km en tête. Il se replaçait au général, gagnant 6 minutes sur ses rivaux, alors qu’il en avait perdu 10 la veille. Mais il sera contrôlé positif à la testostérone, ayant peut-être bénéficié d’une transfusion de sang contaminé par un ancien dopage hivernal. On comparait encore Froome à Pantani dans le Galibier en 1998, ou à Michael Rasmussen dans l’étape de Tignes en 2007. L’échappée de Froome ne comptait que 34 km de montée. La montée de Sestrières s’est effectuée par vent arrière. Le tronçon Cesana-Oulx, par vent de face, mais c’est descendant. Un bon vent arrière souffle d’Oulx à Bardonèche. L’équipe Sky est équipée d’une voiture station météo (si, si, demandez à Dave Brailsford !) qui renseigne le coureur sur la faisabilité des échappées et la qualité du goudron. La performance de Froome, coureur le plus expérimenté sur ce Giro avec 9 podiums sur les grands Tours, paraît crédible, surtout qu’à l’arrière les poursuivants attendaient le suisse de la FdJ (Sébastien Reichenbach) qui descendait comme une vieille dans le Finestre, et les deux sud-américains Miguel Angel Lopez (Astana) et Richard Carapaz (Movistar) ne voulant pas collaborer. Froome a d’ailleurs pris des risques dans cette descente du Finestre. Durant ses 80 km d’échappée, il gagnera du temps en descente, et se fera rattraper en montée.
On notera plusieurs défaillances sur ce Giro ; en premier lieu celle de Simon Yates lors de cette 19èmeétape. Yates, qui ne compte qu’une 6èmeplace à la Vuelta 2016 et une 7èmeau TdF 2017 ; puis celle de Domenico Pozzovivo qui pointera à 8 min 27 à Jafferau. Thibaut Pinot abandonnera le lendemain, épuisé. Seul Tom Dumoulin, second au général, se bonifiera au cours du Giro, comme Froome. Dumoulin a calqué sa saison sur Froome, caractérisée par une absence des classements.
Froome, devenu la bête noire en France, focalise toutes les critiques, de plus en plus agressives.
On se posera d’autres questions sur d’autres équipes.
Chez Bahraïn-Merida, il se passe des choses curieuses. Pozzovivo, chez AG2R-La Mondiale de 2013 à 2017 où il n’avait pas connu de grande réussite, se remet à marcher. Lors du CLM inaugural à Jérusalem, le petit grimpeur se classe 10èmedans le même temps que Tony Martin ! Toujours bien placé dans les 15 premiers jours de compétition, il coincera dans la 19èmeétape. Le slovène de l’équipe, Matej Mohoric (CM junior à Valkenburg en 2012), gagne la 10èmeétape le 15 mai. Après Tadej Valjavec, suspendu 2 ans en 2011 pour anomalies de son PS, revoilà le cyclisme slovène ! Primoz Roglic (Lotto Soudal) a gagné les Tours de Romandie et du Pays Basque cette année.
La grande question, c’est à l’équipe Mitchelton-Scott qu’on la posera. Esteban Chaves (1erlors de l’ascension de l’Etna et 3èmeau Grand Sasso) se prendra 25 min lors de la 10èmeétape. Que s’est-il passé lors du 2èmejour de repos le 14 mai ? Son DS, Matt White, n’a pas d’explication à fournir. Chaves, bloqué, a roulé comme un boxeur qui accepte le KO d’entrée lors d’un combat truqué. Et les frères Yates carburent tous les deux en même temps. Simon était imbattable durant deux semaines sur ce Giro et Adam rivalisait avec Egan Bernal sur le Tour de Californie. Simon Yates avait été suspendu 4 mois en 2016 pour contrôle positif à la terbutaline, un bronchodilatateur interdit, mais on en parle plus. Matt White, ancien dopé de l’US Postal et suivi par le Dr Luis Garcia del Moral, ne nous a pas convaincu avec l’hypothèse de maux de gorge et d’allergie chez Chaves.
Et comme d’habitude, les chaudières de Giani Savio étaient bien présentes aux avant-postes lors de ce Giro.
On a jamais eu autant l’impression cette année que le Giro se jouait en coulisses.
Le cyclisme est un sport dur, où on n’improvise habituellement pas. On voit venir les grands champions de loin, comme on voit venir les hommes en forme.
Et pourtant, sur ce Giro, j’ai bien du mal à comprendre ce que j’y ai vu. Et encore moins vous l’expliquer!
Par exemple la performance de Fabio Aru sur le chrono, le lendemain du… jour de repos. Un grimpeur qui bat des gros rouleurs et qui termine à une poignée de secondes de Dumoulin – le champion du monde en titre – sur un chrono de 35 bornes tout plat, je ne comprends pas. Et je comprends encore moins comment il a pu être si mal juste après pour être contraint à l’abandon…
Je m’explique mal le regain d’énergie de Chris Froome en troisième semaine, lui qui n’était nulle part en première semaine, ayant même été distancé par les autres favoris sur les pentes du GranSasso. À partir du Zoncolan, tout a changé… y’a pas à dire, Froome récupère vraiment très, très bien de ses efforts.
Je n’explique pas la défaillance soudaine de Simon Yates, intouchable durant deux semaines et qui perd tout en une seule ascension. On avait peut-être pas vu ca depuis un coureur comme Bugno au début des années 1990.
Je n’explique pas la soudaine défaillance d’Esteban Chaves. Ou de Domenico Pozzovivo.
Et je ne mets pas dans ce panier celle de Thibault Pinot, car cette défaillance-là est explicable: il était fiévreux et déshydraté, la faute à une infection aux poumons diagnostiquée plus tard à l’hôpital. Là, je comprend.
Évidemment, on ne peut exclure des hypothèses comme les auto-transfusions lors des jours de repos, et qui pourraient expliquer les soudains regains de forme incroyables auxquels nous avons assisté. Le cyclisme nous a malheureusement prouvé depuis 20 ans qu’il faut toujours se garder une petite gêne…
La meilleure? C’est qu’on n’est même pas sûr du vainqueur de ce Giro! Si Froome devait être suspendu rétroactivement suite à son contrôle positif au Salbutamol lors de la dernière Vuelta, il pourrait bien perdre son titre sur ce Giro, au profit de Dumoulin.
Le sport cycliste en est rendu là: un vrai cirque. On a peut-être couronné dimanche à Rome un coureur qui sera très bientôt suspendu pour dopage… et qui perdra son titre. Du coup, on aura aussi volé Tom Dumoulin d’une victoire à Rome dimanche dernier. On rit jaune… mais certainement pas rose!
J’aime le cyclisme parce que c’est un sport assez prévisible, et c’est une partie de son charme.
Dans un sport aussi dur, on voit souvent venir les résultats de loin, comme les grands champions.
L’Etna l’a encore prouvé hier: on savait depuis le prologue que Simon Yates était en grande condition. Un grimpeur ne devance pas un Tony Martin sur un chrono de 10 bornes sans avoir des jambes exceptionnelles.
Yates a confirmé hier sur l’Etna, et on l’attendait précisément là. Beau joueur, il a laissé la victoire à son coéquipier Esteban Chaves, échappé durant l’étape, se « contentant » de ravir le maillot rose à un Rohan Dennis certes valeureux, mais malheureux.
Vous allez maintenant voir: j’ai l’impression que Yates a signé un bail avec le maillot rose et qu’il pourrait bien le garder un moment. À moins que l’équipe ne décide de le laisser quelques jours à un coureur qui s’échapperait et qui ne serait aucunement une menace au général?
Chose certaine, Yates risque fort de confirmer au GranSasso dans trois jours. Je pense que ce sera l’homme à battre sur ce Giro.
Le chrono de la 16e étape vient de prendre une importance capitale pour Dumoulin ou Froome: c’est leur seule chance selon moi de reprendre du temps à Yates, car ils auront du mal en montagne.
Yates pourra de surcroit compter sur son coéquipier Chaves pour l’aider, un allier précieux.
Bien évidemment, personne n’a encore gagné ce Giro. Pinot, Dumoulin, Froome, Aru ne sont pas encore battus. En revanche, certains l’ont déjà perdu, par exemple Meintjes ou encore Gesink ou Lopez.
LA question: Chaves et Yates sauront-ils bien cohabiter chez Michelson-Scott durant cette épreuve? Le Giro a parfois exacerbé les tensions entre co-équipiers… je me rappelle de Simoni-Cunego ou encore Garzelli-Pantani dans les années 2000, voire Roche-Visentini en 1987!
Un mot sur le Canadien Mike Woods: il limite pour l’instant bien les dégâts, ayant terminé à une petite minute de Chaves hier sur l’Etna et pointant à la 14e place du général, avec 1min39 de retard sur le maillot rose. C’est très bien! Beaucoup de coureurs devant lui « sauteront » au cours des deux prochaines semaines.
Ca y est, on commence à comprendre un peu mieux la ligne de défense de Chris Froome, Dave Brailsford et la Sky dans l’affaire du Salbutamol.
On voyait venir cette conclusion!
En clair, le contrôle urinaire de Chris Froome a révélé des concentrations très élevées de salbutamol, mais il y a trop de variabilité pour en tirer des conclusions, encore moins pour baser des sanctions sportives sur cette analyse…
Le principal auteur de l’étude est Jules Heuberger, qui avait l’an dernier fait parler de lui en affirmant que l’EPO n’avait aucun effet sur les performances sportives… Demandez à Bjarne Riis, pour voir!!!
Pour en arriver à leurs récentes conclusions, les auteurs se sont basés sur des simulations (au nombre de 1000) ainsi que sur la littérature existante. Évidemment, pas de tests grandeur réelle…
La situation me fait flipper: c’est tellement cousu de fils blancs! Mais c’est certain que la Sky n’attendait que cette étude pour aller de l’avant, et qu’il s’agira là d’un argument dont elle usera en cour pour la défense de Chris Froome.
Ce qui m’inquiète le plus, c’est l’avenir de la science dans tout ça. De tels torchons contribuent à décrédibiliser la science aux yeux du grand public, alors que la science devrait permettre de trancher les débats hors de tout doute, sur des bases factuelles, vérifiables et constantes. C’est désespérant.
Quelle crédibilité a un type qui affirme que l’EPO n’a pas d’effet sur les performances sportives? Soyons sérieux…
On se dirige donc vers une bataille « scientifique », entre l’AMA qui devra prouver la valeur scientifique de ses tests, et le camp Froome qui voudra montrer que ces tests sont trop incertains pour qu’on puisse en tirer quelle conclusion que ce soit.
Reste plus qu’à espérer qu’une chose: que le juge dans l’histoire ne soit pas britannique ou kenyan!!! Y’a de quoi être cynique…