« Lance Armstrong has no place in cycling« .
Ce sont les mots du président de l’UCI aujourd’hui, Pat McQuaid.
L’UCI a déchu Lance Armstrong de tous ses titres acquis depuis le 1er août 1998. L’UCI a donc confirmé les sanctions recommandées par l’USADA. Il est aussi banni à vie de toute compétition sanctionnée.
C’est donc une bonne partie du cyclisme et du Tour de France qu’on vient de ré-écrire aujourd’hui. Les Tours de France 1999, 2000, 2001, 2002, 2003, 2004 et 2005 resteront sans vainqueur.
De quoi également faire très mal paraître de nombreuses personnes de l’entourage d’Armstrong et qui l’ont défendu, en premier lieu Hein Verbruggen bien sûr, mais aussi des gens comme Phil Liggett par exemple, qui perd dans cette situation toute sa crédibilité de journaliste cycliste. Il a récemment déclaré: « I hate the thought that I built these people into superstars in the minds of the public when they cheated » he said. « But if you look deeper down, they all seemed to have been cheating.«
Ben voyons! Le type vivait dans le peloton 250 jours par année… Liggett est non seulement un très mauvais journaliste, mais il est aussi un menteur.
Il est également peu probable, à la lumière du verdict de l’UCI aujourd’hui, que Johan Bruyneel ait une chance de s’en sortir devant les tribunaux.
Une seule voie de rédemption pour Armstrong
On peut donc dire qu’aujourd’hui, Armstrong a presque tout perdu. Il lui reste bien quelques millions en banque, mais les poursuites qui seront engagées contre lui dans les prochains jours, notamment par SCA et ASO, risquent de le plumer davantage encore. Et un procès aux États-Unis pour parjure risque bien de lui tomber dessus, puisqu’il a déclaré sous serment en 2005 dans le cadre de son litige avec SCA qu’il ne s’était jamais dopé. Il n’est donc pas impossible qu’Armstrong fasse de la prison dans l’avenir.
Armstrong se retrouve donc très isolé, personna non grata non seulement dans le milieu du cyclisme, mais probablement dans beaucoup d’endroits. Qui en effet aux États-Unis voudra se montrer à ses côtés maintenant ?
Il lui reste donc qu’une seule chance pour se réhabiliter aux yeux du public: passer aux aveux.
Pat McQuaid a déclaré aujourd’hui en marge de l’annonce portant sur Armstrong qu’il n’avait aucune intention de démissionner et qu’il estime que l’UCI n’a rien à se reprocher. La vérité est que sans l’USADA, Lance Armstrong, ce dopé, menteur et intimidateur, serait encore la superstar du cyclisme. L’UCI a pourtant la responsabilité de la lutte contre le dopage dans le cyclisme.
Les aveux de Lance Armstrong sont donc d’une importance capitale pour faire le ménage à l’UCI. Je ne vois en effet rien d’autre pour déboulonner les intouchables de l’UCI, en premier lieu Hein Verbruggen qui y occupe encore un poste d’importance.
Lâché par ses amis de l’UCI, pourquoi Armstrong accepterait-il en effet de payer seul le prix fort?
Il pourrait très certainement nous en apprendre beaucoup également sur le travail de Michele Ferrari dans le peloton actuel. Cadel Evans vient par exemple de nous dire qu’il n’avait été testé qu’une fois par Ferrari et qu’il ne l’a plus jamais revu ensuite. Comment le croire, surtout à la lumière de sa progression jusqu’à sa victoire sur le Tour 2011? Lance Armstrong connaît très certainement qui travaille avec Ferrari aujourd’hui, ayant quitté le peloton pro il n’y a pas si longtemps. Des aveux de sa part sont donc d’un très grand intérêt.
L’avenir de l’UCI
On pourra regretter que l’annonce d’aujourd’hui à l’endroit d’Armstrong ne se soit pas accompagnée d’autres annonces visant à faire le ménage dans le cyclisme. Cela témoigne des intérêts premiers de l’UCI qui manifestement gère cette crise comme celle d’un individu seul pris pour dopage. Je l’ai déjà écrit, je le répète encore, Lance Armstrong ne doit pas morflé seul dans tout ce dossier. Ce ne serait pas juste à son égard, et ce serait une grave erreur pour l’avenir du cyclisme.
Une question simple: pourquoi l’UCI n’a-t-elle pas elle-même constitué un dossier comme l’USADA l’a fait à l’endroit de Lance Armstrong? Pourquoi n’a-t-elle jamais pris au sérieux les aveux de Floyd Landis et de Tyler Hamilton, préférant souvent les attaquer en justice plutôt que les écouter? Pourquoi n’a-t-elle pas pris au sérieux les livres de Walsh et Ballester, tout comme le dossier de L’Équipe en 2005?
Pourquoi?
Pat McQuaid a déclaré aujourd’hui « sachez que le cyclisme a un avenir« . Malheureusement Pat, cet avenir nous apparaît à tous bien incertain en ce moment. En fait, nous ne sommes convaincus que d’une chose: si avenir il y a, il est sans toi et ton pote Hein…
Chose certaine, avec la ligne de conduite actuelle de l’UCI, il est fort probable que nous nous retrouverons dans la même situation dans quelques années, soit un enchainement sans fin de gros scandales de dopage dans le cyclisme. On se tire dans le pied, c’est certain. Et on sacrifie des jeunes générations de coureurs qui n’ont aucune chance s’ils ne se dopent pas, ou qui en viendront forcément au dopage pour vivre leur rêve d’être coureur pro.
Je ne vois vraiment que des aveux de Lance Armstrong pour amener l’UCI vers une réforme profonde de son organisation.
Une réflexion pour nous tous
Enfin, cette affaire doit être l’occasion d’une grande réflexion de nous tous, coureurs cyclistes et pratiquants, autour du cyclisme professionnel et de notre admiration à l’endroit des coureurs pro. Pendant des années, dans ma propre équipe cycliste, j’ai eu d’âpres discussions pour simplement faire admettre à plusieurs équipiers et amis que leur regard sur Lance Armstrong était probablement très influencé par une majorité de médias qui le glorifiait, dont évidemment Phil Liggett. La machine Armstrong était d’une efficacité redoutable pour véhiculer de faux messages visant à détourner l’attention du public et à leur faire perdre toute rationalité. Pendant combien d’années a-t-on martelé que si Lance Armstrong gagnait, c’est qu’il était plus sérieux que les autres? On a même fait un film, devenu très populaire, Road to Paris, sur le sujet, le montrant s’entrainant sous la pluie et le froid.
Pure manipulation de l’opinion publique.
La vérité, c’est que Lance Armstrong gagnait parce qu’il avait accès à un dopage extrèmement pointu et cher qu’il avait étendu, chaque année, à certains de ses équipiers clef. Et qu’il s’était aussi organisé en coulisse pour ne pas craindre les contrôles.
Je crois sincèrement que nous les fans serviront mieux le cyclisme si nous faisons notre propre introspection suite à l’Affaire Armstrong et surtout, si nous manifestons davantage de retenue dans l’avenir devant les coureurs pro et leurs exploits.
Ne jamais être crédule.
Cette recommandation va pour moi aussi bien évidemment.
Et faire des lecteurs de La Flamme Rouge des observateurs éclairés du cyclisme restera toujours la raison d’être de ce site.