Tous les jours, la passion du cyclisme

 

Mois : août 2016

Rio: quelle course!!!

Que ça fait du bien! Je me suis littéralement régalé en regardant la course sur route des JO de Rio.

Quelle course!

Ca restera dans les annales du sport cycliste. Une vraie course à la pédale, très difficile, avec seulement 63 classés au final sur 144 partants.

Et sans les oreillettes…

C’est pas compliqué, dans les 30 derniers kilomètres, il y avait des coureurs partout sur la route, preuve que c’était chacun pour soi, et sauve qui peut.

Et à la clé, un bien beau champion olympique en Greg Van Avermaet, issu d’un pays qui a déjà tellement donné au sport cycliste. Récit d’une course fabuleuse…

On a d’abord eu droit à tout un numéro de Michal Kwiatlowski, un dur de dur celui là, qui a fait plus de… 230 bornes devant. Repris par un petit groupe dans le final, il trouvait encore la ressource pour quelques relais afin de placer son compatriote Rafal Majka au pied de la dernière ascension. Grandiose, et ce type-là n’a pas été champion du monde par hasard.

On a ensuite eu droit à une sacré démonstration de la science de la course de la part de l’équipe d’Italie. En trois actes: d’abord Caruso qui s’échappe dès la première ascension du circuit final, amenant avec lui quelques coureurs dont Henao et Van Avermaet. Ensuite Nibali et Aru qui reviennent à la faveur de la descente avant d’aborder le dernier tour. Enfin Caruso (ce dernier avait deux raisons de rouler avant la dernière bosse, d’une part pour son leader italien Nibali et d’autre part pour son leader d’équipe de marque – BMC – Van Avermaet aussi dans le groupe!) et Aru qui préparent l’attaque finale de Nibali, attaque qui intervient sur le haut de la dernière bosse et qui réduit la tête de course à deux seuls autres hommes, soit Henao et Majka.

La tactique des Italiens était parfaite, et ils ont pris beaucoup de monde à contre-pied, en premier lieu les Espagnols, les Français et les Néerlandais. Nibali avait le titre à portée de main avec cette dernière descente technique qui devait lui convenir. Il est malheureusement parti à la faute, entrainant avec lui un Henao très costaud lui-aussi, ruinant ainsi les espoirs italiens. La déception peut être grande ce soir pour les Transalpins. La fatigue, peut-être?

Du coup, Majka se retrouvait seul en tête avec une belle chance pour le titre. On a eu toutefois droit à tout un numéro de Greg Van Avermaet, bien épaulé par Jakob Fuglsang, qui est revenu avec seulement deux petits kilomètres à faire dans l’épreuve. Van Avermaet a fait toute une course, sortant d’abord avec Caruso dans la première ascension du circuit final, puis résistant de belle façon aux coups de butoir de ses adversaires dans les montées. Quel coureur! Quel métier! C’était inspirant de le voir ainsi évoluer et il y a là des leçons de cyclisme à tirer…

Aux 300m, l’affaire était pliée, Van Avermaet n’ayant aucun mal à prendre de vitesse un Majka sur le bord des crampes et un Fuglsang qu’on savait moins rapide.

Un bien beau champion olympique si vous voulez mon avis, et un coureur qui présente une saison d’enfer cette année: déjà vainqueur du Het Nieuwsblad et de Tirreno-Adriatico au printemps dernier, il terminait 5e de Milan San Remo, puis 3e du Championnat de Belgique avant de remporter une étape du Tour de France et de passer quelques jours en jaune. Le voilà champion olympique! Assurément de quoi changer cette image de « serial loser » qui lui collait au train depuis quelques années, étant abonné aux places d’honneur plutôt qu’aux victoires jusque l’an dernier.

Et Van Avermaet est bien connu au Québec, il est déjà monté deux fois sur le podium du Grand Prix cycliste de Québec (2012 et 2013).

Les coureurs en vue sur cette course de Rio

Sergio Henao. Il était assurément l’un des tous meilleurs hier. La chute de Nibali devant lui vient ruiner les espoirs colombiens. Dommage.

Vicenzo Nibali. Probablement l’homme fort de cette course sur route. Son attaque dans le final ne laissait aucun doute. Vraiment dommage de perdre le titre olympique sur une chute dans une descente, lui l’excellent descendeur.

Julian Alaphilippe. La façon dont il est revenu sur l’avant de la course dans la dernière ascension laisse peu de doutes sur les ressources physiques et mentales de ce coureur exceptionnel. Je suis admiratif de son numéro dans les 25 derniers kilomètres. Il termine finalement 4e en faisant selon moi une erreur dans les derniers hectomètres en n’accompagnant pas Van Avermaet et Fuglsang à la poursuite de Majka devant. Là encore, dommage. Il déclare à l’arrivée « encore une place de con« , ce qui en dit long sur sa volonté de gagner!

Fabian Cancellara. Il était encore présent devant à tirer le groupe de chasse juste avant la dernière bosse. Il a donc passé les deux premiers tours du circuit final avec les meilleurs. Un signe qui ne trompe pas sur sa condition physique. Il sera à surveiller sur le chrono plus tard cette semaine, et j’aimerais bien qu’il le remporte: ce serait une bien belle sortie pour Spartacus!

Joaquim Rodriguez. Avec Alaphilippe, l’autre auteur du plus beau rapproché dans la dernière ascension, au métier. Wow!

Les coureurs qui ont été courts

Chris Froome. Un figurant durant toute la course. Sa sortie dans la dernière ascension n’a été qu’un faible pétard mouillé.

Romain Bardet. Pas bien hier.

Alejandro Valverde. Pas dans un grand jour, il a eu le professionnalisme de se mettre au service de son compatriote Joaquim Rodriguez avant la dernière ascension. Ces deux-là ne se sont pas toujours aussi bien entendus dans le passé lors de Mondiaux…

Rui Costa. On attendait plus de ce coureur qui affectionne tout particulièrement les courses en circuit.

Bauke Mollema (et tous les Néerlandais). Victimes de malchance, les coureurs du plat pays n’ont pas été très visibles hier. Mollema n’a pu être un acteur du final.

Dan Martin. On attendait sa giclette dans la dernière ascension, mais on n’a rien vu. Il est disparu tout simplement du traffic.

Philippe Gilbert. Lâché dès les premières rampes de la première ascension des trois tours du circuit final, ça ne s’améliore pas pour le coureur belge ces temps-ci. Par chance, la victoire de son compatriote Van Avermaet fera passer sous silence ce mauvais état de forme.

Les Canadiens

Antoine Duchesne et Hugo Houle ont très bien faits leur travail hier, soit de placer Mike Woods en bonne position au pied de la première ascension des trois tours du circuit final. Irréprochables. Mike Woods s’est fait lâché dans la deuxième ascension, mais a tenu à terminer l’épreuve (en 55e position, à 20min du vainqueur). C’est une déception et je persiste à croire que Woods a payé son manque de compétition au cours des dernières semaines.

Rio: une course sur route compliquée!

On y est: samedi, l’épreuve de cyclisme sur route chez les hommes sera disputée à Rio, dans le cadre des Jeux Olympiques.

Pour les coureurs, dont les pros depuis les JO de 1996, c’est un événement majeur de la saison: tous les athlètes rêvent d’une médaille olympique, et le titre est bon pour quatre ans!

Ca sera toutefois très compliqué samedi.

D’une part, en raison du parcours, assez sélectif: 256,4 kms tout de même, une sacré plombe digne des plus grandes classiques de la saison. Le parcours inclut quatre tours du circuit « Grumari », avec deux belles ascensions chaque fois: la Grumari elle-même, 1,2 kilomètres à 7% de moyenne, et des passages à 13%. La Grota Fonda ensuite, 2,1 kilomètres, 4,5% de moyenne mais des passages à 6-7%.

Une fois cette « mise en jambe », on attaquera la deuxième partie de la course, soit un autre circuit à parcourir trois fois et qui comporte la patate sélective du jour, l’ascension de la Canoas-Vista Chinesa, une belle bosse de presque 9 kilomètres avec de bons pourcentages. La course se décidera là, bien que le sommet du dernier passage de la bosse se situe à environ 22 kilomètres de l’arrivée, dont une descente de six kilomètres suivi de 16kms de plat: de quoi possiblement favoriser les regroupements.

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D’autre part, parce que justement, en raison d’un parcours sélectif mais un final roulant, contrôler la course sera très compliqué pour un peloton totalement différent de celui qu’on retrouve sur les courses professionnelles. Pensez-y: beaucoup de pays représentés (60!!!, et qui sait que l’équipe iranienne prend le départ avec trois coureurs?), beaucoup de coureurs peu ou pas connus, peu de coureurs par équipe nationale (cinq maxi pour certains pays seulement), et beaucoup d’électrons libres… Mettez en toile de fond l’appartenance aux équipes de marque, et vous aurez probablement une course où il sera difficile de s’y retrouver!

En gros, la tactique des équipes se résume à peu de chose: essayer de placer un ou deux coureurs protégés au pied de la dernière ascension de la Canoas, puis laisser l’explication se faire entre cadors à ce moment. Pour cela, il faudra d’abord contrôler l’échappée matinale qui sera assurément composée de plusieurs coureurs inconnus voulant montrer leur maillot d’équipe nationale, et donc inconnus des coureurs derrière: il faudra se méfier!

À ce petit jeu, les puncheurs capables de se débrouiller seuls et qui peuvent aller vite au sprint sont probablement les grands favoris: un coureur comme Alejandro Valverde sera redoutable dans une telle course. Je pense aussi à Joaquim Rodriguez (s’il parvient à s’entendre de façon cohérente avec Valverde!), à Richie Porte bien évidemment, à Greg Van Avermaet qui a une belle carte à jouer compte tenu que Philippe Gilbert ne paraisse pas en grande forme, à Jarlinson Pantano en grande condition et possédant une belle pointe de vitesse, à un Petr Vakoc pourquoi pas, à Julian Alaphilippe on en rêve, à Daniel Martin qui possède un sacré punch, à Edvald Boassom Hagen, à Michal Kwiatlowski, à Rui Costa, ou encore à Michael Albasini.

Outre tous ces favoris, trois équipes font figure d’épouvantails: l’équipe britannique (Froome, Yates, Thomas, Cummings, Stannard), l’équipe d’Italie (Nibali, Aru, Rosa, Caruso, De Marchi) et l’équipe néerlandaise (Dumoulin, Poels, Mollema, Kruijswijk). Ces équipes ont chacune plusieurs coureurs capables de gagner, et devront assumer le poids de la course. Une bonne stratégie serait d’assumer un bon tempo dès le départ de la course, pour en faire une course d’usure et ainsi écrémer rapidement le peloton. Cela leur permettrait d’éviter les risques de chutes, et de laisser l’explication finale parmi un petit nombre de coureurs plutôt qu’un gros peloton massif et forcément nerveux.

L’équipe canadienne sera composée de Mike Woods, Hugo Houle et Antoine Duchesne. La stratégie est simple pour les Canadiens: protéger Woods jusqu’au pied de la dernière ascension pour espérer qu’il puisse accompagner les meilleurs jusqu’en haut. S’il réussit, tout sera possible sur les 22 derniers kilomètres. Chose certaine, les Canadiens n’ont pas à assumer le poids de la course, ils peuvent se contenter de suivre jusqu’au final.

La liste de départ est ici.

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La question qui me reste: les oreillettes seront-elles permises sur une telle course? Je n’ai pas pu trouver la réponse pour vous, et si quelqu’un la connait, je suis preneur!

Les cas Armitstead et russe 

Comme plusieurs d’entre vous, j’ai été choqué d’apprendre que Lizzie Armitstead avait échoué à se présenter à pas moins de trois contrôles anti-dopage au cours des derniers mois. Voilà qui est très non-professionnel, et qui place un doute sur ses résultats de la saison, excellents il ne va s’en dire.

J’ai été encore plus choqué d’apprendre qu’elle ne fera l’objet d’aucune suspension suite à son appel fructueux devant le Tribunal d’Arbitrage du Sport pour lever la sanction initiale de l’agence britannique anti-dopage qui voulait la suspendre quatre ans, conformément aux règlements. Comme l’a écrit CyclingNews, voilà qui soulève davantage de questions que procure des réponses, et c’est une fois bien dommage pour la crédibilité du sport cycliste. Mais pourquoi diable Amitstead n’a-t-elle pas contesté les deux premières absences au contrôle, et a attendu la troisième? C’est louche.

C’est encore le foutoir sur la scène du dopage, avec un CIO plus que mou dans le cas de la Russie: le CIO a manqué une occasion historique d’affirmer haut et fort sa tolérance zéro pour le dopage dans le sport, en excluant purement et simplement la Russie des JO de Rio.

Ce faisant, le CIO aurait aussi rappeler au monde entier que son seul principe directeur, c’est celui du sport, du sport propre et net: « que le meilleur gagne ».

Au lieu de ça, le CIO a pris une décision (laisser à chaque fédé le soin de décider d’exclure ou non les athlètes russes des JO) qui n’a créé que confusion et conflit, en plus de montrer au monde entier que le CIO est aujourd’hui régenté par les intérêts politiques et financiers, et non sportifs. C’est ridicule, et les premiers à trinquer seront encore une fois les athlètes propres.

Tout cela m’écoeure!

Pour un bon article sur le dopage dans le cadre des Jeux Olympiques, y compris un palmarès des sports les plus touchés (le cyclisme en troisième position) et les substances les plus prisées, c’est ici dans Le Monde.

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