Perras8aout160H280.jpgÀ une dizaine de jours de son premier anniversaire, La Flamme Rouge a pensé vous offrir quelques petites surprises au cours des deux prochaines semaines, question de souligner l’événement qui aura lieu officiellement le 27 aoôt prochain. Question aussi de vous faire plaisir autant que de nous faire plaisir.

Nous entamons aujourd’hui cette série de surprises par une entrevue avec Dominique Perras (Ofoto Sports), récent vainqueur de la Classique Louis Garneau et un des deux seuls coureurs professionnels masculins au Québec (l’autre est Charles Dionne). Grand seigneur, Dominique a en effet gentiment accepté de répondre à nos questions et nous lui exprimons ici toute notre gratitude. Et allez, avons-le franchement, La Flamme Rouge est un fan de Dominique plus que de n’importe quel autre coureur québécois puisque ce coureur talentueux conjugue générosité dans l’effort et simplicité en dehors du vélo, deux grandes qualités selon nous.

LFRDominique, as-tu fait une préparation spécifique pour Mlt-Québec, sachant que la longueur de cette course est « exceptionnelle » ?

DP – Ce n’est pas tant une longueur exceptionnelle pour moi dans la mesure où ces dernières années j’ai assez souvent fait des courses de cette distance: ne serait-ce que les Championnats du monde d’Hamilton, ou encore les classiques européennes (les classique italiennes tel que Coppa Placci ou Tre Valle Varesine par exemple) ou encore lors des longues étapes dans des courses par étapes importantes (souvent au delà de 230km par exemple). Bref cette distance ne m’effrayait pas.

Pour ce qui est de ma préparation, j’ai participé, deux semaines avant, au Tour de Toona où j’avais une bonne forme mais ou j’ai perdu 10 minutes à cause d’une chute. Et le jeudi précédant la course, j’ai fait une sortie de 6h30, soit 240km , dont les 80 premiers km avec un ami, puis seul 2h et enfin les 2 dernières heures derrière moto avec mon « pilote » du club de Contrecoeur Jacques Barriault. Je crois que cette sortie entre autre fut payante côté vitesse.

LFRLêabsence de lêéquipe Volkswagen – Trek, une équipe qui peut contrôler le peloton, a-t-elle influencé ta course ?

DP – C’est clair que dans les épreuves locales et provinciales sans difficulté, leur surnombre important les rendent difficilement battables. Néanmoins, très peu d’entre eux sont habitués aux courses de plus de 150 km, mis à part peut-être Alexandre Lavallée. Bien sôr, on ne pourra jamais présumer ce qui serait arrivé si untel ou untel avait pris le départ. Les absents ont toujours tort, dit-on!

LFRAvais-tu un « plan de match », une stratégie établie avant le départ ou tu as plutôt agi « à lêinstinct » ?

DP – Cela peut paraître paradoxal, mais la facilité de cette course la rend très difficile à gagner. Il n’y a pas vraiment d’endroits ou l’on sait que la course va se jouer, ou encore ou l’on peut revenir sur une échappée si on a manqué un coup (une longue bosse par exemple). Et puis, je ne peux pas compter sur mon sprint qui est assez mauvais! Même la dernière côte, qui est certes raide, mais trop courte, n’est pas nécéssairement assez longue pour faire la différence si les coureurs n’ont pas fait d’efforts probants avant. Et puis, au risque d’être prétentieux, j’étais pas mal marqué ce qui fait que c’était encore plus difficile de me détacher (impossible pour moi d’attendre pour le sprint!).

Pour avoir fait assez de Québec-Montréal, je savais que le bon coup pouvait partir n’importe quand. Comme j’étais seul, je me suis dit que j’étais mieux de trop couvrir de coups et d’être un peu fatigué que de la jouer de façon patiente et risquer de manquer un coup. Je suis donc parti avec un groupe de 12 coureurs avec 80km à faire, puis avec Rover puis seul jusqu’à Neuville ou un groupe de 15 coureurs m’a rejoint. De là, j’ai ré-attaqué avec 4 autres coureurs et après plusieurs accélérations, j’ai réussi à me départir de ces derniers avec 4km à faire. Bref, j’y ai été à l’usure plutôt qu’à l’économie, dans les circonstances d’une course « facile » (150 coureurs dans le peleton à Neuville!). Cette stratégie m’apparaissait comme la seule option. Comme le dit souvent Eric Wohlberg avant les courses « Hit them with old school fury! »

LFRTu as rejoint lêéquipe américaine Ofoto en cours de saison. Comment têy sens-tu ?

DP – Dans les circonstances de l’inter-saison l’an dernier (mon équipe qui s’est dissoute), je suis très content d’avoir trouvé une équipe aux États-Unis. Il y a une très bonne ambiance au sein de l’équipe, les coureurs ont une super attitude de guerrier. J’apprécie de plus le fait que je puisse revenir au Québec fréquemment. Néanmoins, c’est un peu un renouveau pour moi après quelques années en Europe, et parfois difficile de me rendre aux plus petites courses avec peu de soutien (parfois sans soigneur ou mécano), mais je savais dès le début dans quoi je m’embarquais et donc dans l’ensemble je suis très content.

LFRVerra-t-on Dominique Perras sous les mêmes couleurs en 2005 ? Dans une précédente entrevue, tu nous disais songer à la retraite…

DP – Il est fort probable que je demeure au sein de la même équipe même si bien sôr je suis ouvert à toute proposition ! Mais dans tous les cas je crois bien poursuivre l’an prochain. J’ai encore une bonne motivation, et physiquement, je progresse encore.

LFRTu as fait une belle saison 2004 : beaucoup de places parmi les 20 premiers dans des courses à étape américaines, premier Canadien au GP de Beauce, retiens-tu un moment fort ?

DP – C’est drôle parce que ma saison 2004 est assez différente de la précédente: en 2003, j’ai eu de très durs moments mais j’ai savouré 2 belles victoires à mon avis, soit le titre canadien et une étape au Sun Tour. Cette année, je suis beaucoup plus constant, mais sans grande victoire UCI. Je n’arrive donc pas à trouver une seule journée déterminante: j’ai eu de bonnes journées à Sea Otter, en Georgie, au Tour du Connecticut, dans les premières étapes du GP de Beauce, etc. mais je n’en trouve aucune qui domine. Je peux peut-être dire la 2e étape du GP de Beauce où je me sentais très bien et j’étais de l’échappée décisive qui est partie dans la côte de Beauceville. Selon moi, ma 9e place ce jour là ne me fait pas tout à fait justice par rapport à la qualité de mes jambes à ce moment.

Enfin, je trouve une satisfaction dans cette victoire sur la Classique Louis Garneau!

LFRCourir contre Armstrong au Tour de Georgie et terminer 17e du général, comment était-ce ? Tu as notamment brillament fait lors des CLM, un domaine qui nêest pourtant pas ta spécialité.

DP – J’ai eu la chance ces dernières années, chez Post Swiss Team, Phonak et Flanders-IteamNova de courir assez souvent dans des pelotons autant, voire encore plus relevés, ainsi qu’avec les stars. Bref, je ne souffre plus d’intimidation.

Maintenant, aux États-Unis, c’était vraiment LA (pas de jeux de mots avec ces deux lettres!!!) course cette saison, et pour moi ma rentrée avec ma nouvelle équipe Ofoto. Après un camp d’entrainement avec mon copain Mathieu Toulouse au sein du groupe Centrifuge en Virginie – sur un terrain similaire à la Georgie – et une période sans course depuis près de deux mois (depuis la Malaisie), je me suis surpris. Probablement à cause de mon état de fraîcheur mais aussi bénéficiant de mes entrainements spécifiques. Trop souvent ces dernières années ai-je en effet dô courir à gauche et à droite plutôt que de m’entraîner de façon spécifique.

Pour le CLM, oui, j’en étais bien satisfait. C’était un parcours de 31km valloné avec une côte, et malgré le fait que j’ai fait un tout-droit dans un virage en descente, j’y ai terminé parmi les 20 premiers à moins de 3 minutes d’Armstrong.

Mon plus gros regret reste celui de n’avoir eu qu’une 25 à l’arrière lors de l’arrivée à Brasstown Bald Mountain alors que des coureurs comme Horner et Armstrong avaient des 29. J’étais encore avec eux à 3km de la ligne alors que l’on était moins de 10, mais j’ai explosé complètement dans les dernières portions abruptes. Sans cela, je crois que j’aurais pu terminer dans les 10 premiers au général.

LFRUn mot sur ce qui sêest passé à Kamloops ? Tu y défendais ton titre de champion canadien, et tu as dô abandonner la course. Peux-tu nous dire comment ca sêest passé pour toi cette journée-là ?

DP – Hmmm. J’y allais pour défendre mon titre, pour gagner ou à tout le moins faire un podium pour m’assurer une sélection pour les JO d’Athènes. La course fut initialement très négative entre les prétendants à une sélection olympique, laissant le feu vert à un paquet d’autres coureurs: une dizaine de coureurs ont donc pris le large. Puis, vers la mi-course dans la descente, un groupe de trois coureurs, Wohlberg, Fraser et Tuft, ont réussi à partir et à rejoindre la dizaine de coureurs déjà devant. Derrière, nous nous sommes enterrés plutot que de collaborer et quand leur avance devint insurmontable, je ne voyais simplement pas de but à terminer si loin. Finir 7e ou 8e de cette course ne m’aurait rien apporté. Enfin, je dois aussi préciser que je ne connaissais pas ma meilleure journée. Avoir été très fort il m’aurait peut-être été possible de réduire l’écart en une montée. De plus, tous ces à-coups inutiles dans le peleton m’ont affecté alors que les échappées avait à ce sujet beau jeu: ils pouvaient monter au rythme et rouler vite sur le plat. Bref, je n’ai que moi à blâmer, je prend mes responsabilités, j’ai manqué le bon coup et ma course était terminée (et mes chances d’aller aux JO fort amoindries).

En vous rappelant que le palmarès de Dominique est disponible ici sur le site de notre confrère de Véloptimum, La Flamme Rouge vous invite en terminant à ne jamais hésiter d’encourager ce champion lors des courses!

Et tout-à-fait personnellement, merci Dominique!

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