Comme prévu, Froome a mis une valise à tous ses adversaires dans le contre-la-montre du Tour aujourd’hui.

Il fait même presque jeu égal avec le champion du monde du chrono, Tony Martin, terminant à 12 petites secondes de l’Allemand!

Ceux qui veulent fausser la comparaison diront que Martin était blessé, et donc pas en pleine possession de ses moyens.

Je n’y crois pas: il a d’abord roulé très, très vite (54km/h de moyenne sur 33 bornes!!!), était bien posé sur son vélo, et était très motivé pour ce chrono, un objectif avoué depuis fort longtemps. Et puis le principal intéressé affirme également que sa chute lors de la première étape ne l’a pas affecté sur ce chrono, et qu’il était à 100%.

Peu importe de toute façon, tous les adversaires de Froome (Valverde, Contador, et les autres) sont à plus de deux minutes sur l’étape, et désormais résignés. Au général, le 2e, Valverde, est à presque 3min30 et on n’est qu’à mi-parcours du Tour.

Prochain rendez-vous pour Froome: le Ventoux!

Surpuissant Froome, pourtant un gringalais qui donne l’impression qu’on a affaire à un anorexique. De surcroît, ca ne prend pas un maître de l’aérodynamisme pour conclure qu’au niveau de la position de chrono, il y a (beaucoup) mieux! Froome doit donc certainement générer davantage de watts que d’autres (de la même morphologie, mais mieux posés sur leur machine) pour rouler à la même vitesse…

Je vous l’ai dit, je ne crois pas à Froome.

LA raison principale est les calculs de puissance de Vayer et Portoleau, qui montrent sans l’ombre d’un doute des performances « miraculeuses », limites mutantes.

Vous êtes encore nombreux à réagir à ces calculs. La principale critique porte sur leur précision, donc sur les conclusions qu’on peut en tirer.

Frédéric Grappe, l’entraineur français bien connu, reconnait certes leur utilité, mais estime que ces calculs manquent de précision au niveau de la prise en charge des conditions météo, atmosphériques, de l’altitude ou encore du degré de fatigue accumulée des coureurs. Donc qu’on peut difficilement se servir de ces calculs pour tirer des conclusions.

Guy Thibault, l’entraineur québécois bien connu, m’écrit également (salut Guy, et merci de ton courriel!)  pour me faire part lui aussi de ses critiques, estimant notamment qu’il est normal que les performances cyclistes augmentent d’époque en époque, avec le développement des techniques d’entrainement, les progrès de toutes sortes (nutrition, etc) ainsi que l’évolution elle-même de l’espèce humaine. Et il remet lui aussi en question la précision des calculs de puissance.

Avec tout mon respect Messieurs Grappe, Thibault et les autres, tout ce débat me fait bien rire!

La réalité? Tous les coureurs, sans exception aucune, « flashés » par les calculs de Vayer et Portoleau à plus de 430 watts sont tombés au dopage. La récente publication « La preuve par 21 » est tellement éloquente à ce sujet, et c’est une lecture incontournable pour quiconque veut poser un regard éclairé sur le cyclisme professionnel.

Point barre!

Ils ont été piqués au dopage pour une simple raison: c’est pas humain de développer 430 watts, 450, 470 voire même 490 watts (Contador à Verbier) sur plus de 20 minutes après une étape de 200 bornes.

La réalité? On se fout éperdument de la précision des calculs!

En d’autres termes, on a de la marge!

On se fout que Froome ait monté à Ax-3-Domaines l’autre jour en 446 watts ou en 435 watts, ou encore en 460 watts.

Ce dont on ne se fout pas, c’est que pour hisser sa carcasse et son vélo de 6.8kg (norme UCI oblige) en 23min15 (une poignée de secondes plus lentement qu’Armstrong chargé), il a fallu qu’il génère une puissance bien supérieure à 410 watts à la fin d’une étape de 5h comportant le col de Pailhères juste avant.

La précision, l’atmosphère, la pression de 8,2 ou 8,1 bars dans les pneus, le vent qui soufflait à 12 ou 14 km/h, tous ces détails sont pour moi secondaires.

Le progrès des coureurs au fil des époques alors?

Je suis d’avis que depuis l’avènement de l’ère du dopage sanguin, une rupture par rapport à avant ou le dopage était nettement moins efficace, des progrès ont surtout été réalisés dans le matériel qui s’est allégé. Pantani avait des paires de roues Campagnolo légères, les Neutron, à 1800 grammes. Aujourd’hui, certaines paires de roues utilisées en haute montagne font 1000 grammes.

Je suis donc d’avis que des gains de performances ont été réalisés surtout au niveau du matériel, donc que les coureurs montent plus vite qu’avant.

Sauf que.

Sauf que l’UCI impose toujours la norme de 6,8 kg pour chaque vélo et ce, depuis un petit moment déjà.

Et puis autre facteur, l’amélioration des performances humaines est assurément une courbe dite assymptotique, au même titre que l’évolution de l’espérance de vie de la race humaine: plus elles sont élevées, plus il est difficile de faire des gains.

On court aujourd’hui le 100m en 9,5 secondes.

L’être humain ne le courra jamais en 0 secondes, ni même en 9 secondes.

Je le dis, je le répète, la science est aujourd’hui suffisemment développée pour connaître précisement les limites physiologiques du corps humain. Elles se situent à environ 95 pour la VO2max, et à 410 watts en fin d’étape en ligne.

Et ces limites ne peuvent évoluer que très, très lentement. On sera peut-être rendu à 420 watts dans 100 ans, mais pour Froome au delà de 430 watts sur Ax-3-Domaines, ce ne peut constituer une raison!

Les calculs de Vayer et Portoleau sont donc selon moi bien suffisemment précis pour nous permettre de voir clair, si on se donne de la marge.

En fournissant quelques informations (poids, poids du vélo, VO2max, index d’endurance, etc.) à Vayer et Portoleau, ils sont tout à fait capables de vous prédire, à quelques secondes près, vos temps d’ascension sur la plupart des cols de France. Ou dit autrement, ils pourront précisement vous dire les temps que vous ne pourrez jamais faire. C’est le plus important !

C’est pas sorcier: même mon ami Gino, féru de physique et possédant un capteur SRM sur son vélo, sait assez précisement ses et mes limites dans l’ascension de Whiteface, à l’aide de quelques calculs. Si je me dope, il ne mettra pas longtemps à le réaliser en regardant mes temps! L’Alpe d’Huez en 48 min pour moi? Strictement impossible…

Bref, je ne suis pas d’accord avec les critiques à l’endroit des calculs de puissance. Et je suis certain que Vayer et Portoleau ne cherchent pas la sensation, ou à faire parler d’eux. Ils aiment tout simplement le vélo, et essaient de nous fournir des outils scientifiques nous permettant de jeter un regard éclairé sur le cyclisme. Le milieu cycliste professionnel étant maître pour déjouer les contrôles ou pour utiliser des produits encore indétectables, les outils d’analyse de puissance de Portoleau et Vayer, parce qu’ils sont très rapidement disponibles, sont très utiles. Si les coureurs fleurtant avec les 410 watts ne devraient pas être soupçonnés je suis d’accord, ceux tirant à des valeurs beaucoup plus élevées peuvent faire dès aujourd’hui l’objet de textes portant sur un possible dopage, étant donné les probabilités très très élevées que ces puissances soient la conséquence d’usage de produits dopants.

Le milieu a trop souvent joué de la crédulité du public. Geneviève Jeanson pleurait devant les caméras de télé en jurant ne jamais avoir même vu de l’EPO! Armstrong a arrangué pendant 15 ans le public et des honnêtes hommes comme Walsh et Ballester alors qu’en vérité, il était chargé comme une mule… Il a même poussé le bouchon en déclarant d’un ton convaincant sur les Champs Élysées, juste après sa 7e victoire sur le Tour, devant un public monstre « I’m sorry for those who do not believe!!! » 

Et bien non, « I don’t believe« . Je refuse aujourd’hui à croire aveuglement au spectacle qu’on m’offre. Les calculs de puissance sont pour moi en ce sens un outil désormais indispensable pour que le réveil ne soit pas trop brutal dans 2 ou 3 ans… et leur précision est largement suffisante, quant on est au delà de 410 watts en fin d’étape en ligne comportant de nombreux kilomètres, pour identifier les coureurs suspects. Ca marche tellement bien que le milieu cycliste résiste et cache les données SRM des coureurs de premier plan…

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