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Dominique Perras: salut l’artiste!

La nouvelle passe presque sous silence, du moins beaucoup trop à mon goût: Dominique Perras a pris sa retraite sportive au terme de la Classique Montréal-Québec, disputée dimanche dernier. C’est une immense perte pour le cyclisme québécois et canadien.

Cette retraite discrète est probablement à l’image du coureur, somme toute assez discret. Je pense que Perras aura été un athlète largement sous-estimé par le grand public en raison de cela. Pourtant, ses capacités physiques et ses performances auraient justifié un autre statut. Dominique Perras laisse en effet dans le cyclisme un beau palmarès dont il peut être fier puisque ponctué de victoires et de places d’honneur non seulement sur la scène nationale mais, plus difficile, sur la scène internationale. Rappel sommaire d’une carrière bien remplie…

Dominique Perras s’est selon moi révélé au grand public lors du Tour Trans-Canada en 1999, dans l’étape du Mont Royal qui comportait 8 ascensions de Camilien Houde. Sous la pluie, handicapé par une chute la veille, Perras s’était maintenu dans le groupe de tête au moral et au seuil de la rupture durant toute la course. Les images télé que j’avais vu m’avaient convaincu que j’avais affaire là à un sacré teigneux, les images étant saisissantes quant à la volonté de ce garçon de rester au contact des meilleurs. Cette performance lui valu la place de premier Canadien sur l’épreuve remportée par l’Italien Guido Trentin devant le Français Jean-Cyril Robin… et peut-être, un peu, un contrat pro dans l’équipe suisse Phonak l’année suivante.

Perras aura donc eu la chance de courir de grandes épreuves cyclistes européennes en 2000 chez Phonak et aussi plus tard dans sa carrière: en 2000, je songe au Tour de Romandie, ou il porta durant quelques étapes le maillot de meilleur grimpeur, à la Classique des Alpes ou encore au Tour de Suisse. C’est également en 2000 que Perras aura pris part à son premier championnat du monde professionnel, à Plouay, en Bretagne, ou il avait comme équipier un certain Michael Barry. Perras participera à deux autres championnats du monde pro, soit en 2003 (Hamilton) et 2005 (Madrid).

On pourrait dire que Perras était un coureur à classer dans la catégorie des "toujours placé, rarement gagnant". S’il a multiplié les places d’honneur et démontré une constante rassurante dans ses résultats, il compte à son palmarès somme toute assez peu de victoires: le GP de Charlevoix (2000), deux étapes du Herald Sun Tour (2003 et 2004), une étape du Hokkaido Tour (2002) ou encore Montréal-Québec (2004), une de ses belles victoires en carrière.

Mais c’est surtout la course sur route des Championnats canadiens qui restera la course marquante de la carrière de Perras selon moi. Seulement une fois champion canadien, en 2003 à Hamilton, victoire qui lui assura une sélection pour les Mondiaux dans la même ville quelques mois plus tard, Perras a souvent joué bien placé dans cette course difficile: entre 2002 et 2007, il ne manqua qu’une seule fois le podium, soit en 2004 ou il fut contraint à l’abandon ! 2e en 2002, il terminait aussi 3e durant 3 années consécutives, soit 2005, 2006 et 2007. C’est le plus beau palmarès dans cette course depuis fort longtemps, surtout qu’il avait aussi terminé 3e des Championnats canadiens junior en 1992.

Notons enfin ses autres belles places d’honneur: 2e de Montréal-Québec 2002 et 2008, 2e (2005) et 3e (2007) du GP de Charlevoix et surtout, 2e du Jayco Herald Sun Tour en 2005, peut-être l’occasion ou Perras passa le plus près d’une grande victoire internationale qui aurait, possiblement, changé le cours de sa carrière. Leader jusqu’au dernier clm, Perras s’inclina face à Simon Gerrans, vainqueur d’étape cette année sur le Tour, pour… 14 petites secondes.

Excellent grimpeur, à son meilleur dans des courses longues, difficiles et accidentées, Dominique Perras avait la classe sur un vélo selon moi. Coureur longiligne, donnant une impression à prime abord de fragilité (on est loin de la carrure d’un Rollin dont il partage le prénom…), Perras était selon moi un sacré moteur, ne s’imposant pas en puissance mais plutôt par ses capacités aérobiques exceptionnelles. Bref, Perras avait la classe, celle de ceux qui n’ont l’air de rien mais qui sont en réalité des athlètes nés, faits différemment de vous et moi. Comment d’ailleurs ne pas penser au Campionnissimo Fausto Coppi en voyant Perras sur son vélo, tous deux présentant de longs fémurs et un torse rablé et rond ?

On peut probablement conclure en affirmant qu’il aura manqué à Dominique Perras durant sa carrière cette petite pointe de vitesse qui lui aurait permis de conclure à son avantage les innombrables courses ou il s’est présenté en vue de l’arrivée échappé avec d’autres coureurs. Malgré de nombreuses sélections sur l’équipe canadienne, on pourra également regretter le fait qu’il n’ait jamais pu obtenir une sélection olympique, la chance se présentant pourtant à trois reprises au cours de sa carrière professionnelle (Athènes, Sydney et Pékin).

Quoi qu’il en soit, Dominique Perras est selon moi à classer au même rang que les Gervais Rioux, Yvan Waddell, Alex Stieda, Jacques Landry ou encore Gordon Fraser au panthéon du cyclisme canadien.

Salut l’artiste!

Signé : un "enfant" admiratif

Les équipes professionnelles de Dominique Perras: Phonak (2000), Ficonseils (2001), iteamNova (2002), Flanders-iteamNova (2003), Ofoto (2004), Kodak Gallery/Sierra Nevada (2005 et 2006), Kelly Benefit Strategies (2007), EVA – DeVinci (2008). 

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  1. Pierre Dumais

    Je suis d’accord à 500% avec toi Laurent, pour l’élogieux commentaire sur Dominique.

    Dominique Perras a d’excellentes chances de figurer au Temple de la la Renommée de la FQSC dans quelques années, soit après sa retraite définitive de la compétition, selon les réglements de la sélection du Temple de la Renommée.

    Je souhaite à Dominique une heureuse conversion et de continuer à pédaler pour le seul plaisir de le faire.

    Bonne chance et grand merci Dominique pour ce que tu as apporté au cyclisme québécois.

    Pierre Dumais

  2. François Groleau

    Un chic type qui peut être très fier de tout ce qu’il a accompli.

    F. Groleau

  3. Felicitations à vos très élogieux commentaires.

    Et c’est avec un point d’orgue que je viens me joindre à vous et faire en quelques sortes une petite boucle, puisque nous avons eu l’honneur de découvrir Dominique PERRAS dans notre club de Besançon dans l’Est de la France à l’Amicale Cycliste Bisontine en prélude à ces premières armes professionnelles et ses glorieux résultats.
    Une plume tendre et légère qui s’envolait déjà, dès que la route s’élevait ; c’est vrai qu’il est beau à voir pédaler ; mais il est aussi superbe à vivre et ce fut un plaisir pour moi d’avoir pu le côtoyer alors que je n’étais que cadet.

    Je lui souhaite donc bonne route pour sa reconversion et lui conseille si par bonheur il me lit de jeter un oeil à http://www.vistacycle.com pour agrémenter ces prochaines sorties de retraité ou à m’écrire à cedricjournot@yahoo.fr

    Bonne route à tous !

    Cédric JOURNOT

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