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Sky ou Deceuninck, quelle est la meilleure équipe World Tour en 2019?

À l’aube d’une nouvelle saison, il est d’intérêt de se poser la question: quelle est la meilleure équipe WorldTour, du moins sur le papier?

Pour moi, deux équipes se disputent le titre: l’anglaise Sky et la belge Deceuninck-Quick Step.

L’espagnole Movistar pourrait être considérée… mais à bien y réfléchir, non. Elle n’a pas la profondeur des deux premières.

Quelques stats comparatives:

Sky 2019

2ieme au classement UCI World Tour 2018, par équipe

29 coureurs, âge moyen 27,2 ans

12 nationalités différentes

4 coureurs dans les 40 premiers UCI

13 coureurs de 25 ans ou moins

2 vainqueurs de grands tours

Budget: environ 55 millions d’euros

Têtes d’affiche: Chris Froome, Geraint Thomas, Michel Kwiatlowski, Egan Bernal.

Deceuninck-Quick Step 2019

1ere au classement UCI World Tour 2018, par équipe

25 coureurs, âge moyen 27,7 ans

11 nationalités différentes

4 coureurs dans les 40 premiers UCI

10 coureurs de 25 ans ou moins

Aucun vainqueur de grands tours

Budget: environ 40 millions d’euros

Têtes d’affiche: Philippe Gilbert, Julian Alaphilippe, Ela Viviani, Zdenek Stybar, Bob Jungels, Peter Vakoc, Remco Evenepoel.

Le choix est cependant difficile car les deux équipes semblent taillées pour jouer sur des registres différents: la Sky sur les épreuves par étapes, et Deceuninck sur les courses d’un jour.

Personnellement, ma préférence va à Deceuninck, et de loin: plus de coureurs de premier plan, un plus grand registre d’action, une ambiance qui me semble meilleure, et pas moins de 73 victoires acquises en 2018.

Chez Sky, le registre semble plus étroit (les grands tours, essentiellement), et l’ambiance plus plombée avec les soupçons persistants de dopage généralisé qui planent au-dessus de l’équipe. Cette équipe semble toutefois disposer d’un meilleur encadrement des coureurs du côté de la préparation physique générale et spécifique, d’un suivi plus pointu et de matériel au top du top.

Rappelons en terminant que Sky arrête à la fin de l’année. L’incertitude est donc bien présente en ce moment quant à la suite non seulement de l’équipe, mais aussi de personnes clé comme Dave Brailsford dont l’avenir à la tête de la formation pourrait bien ne pas se prolonger au delà de la présente campagne. Si on trouve un nouveau sponsor, gageons en effet que ce nouveau sponsor ne voudra pas trainer les casseroles du passé avec lui dans un nouvel élan.

Barguil, une année à oublier

Le journal L’Équipe proposait hier sur son site un reportage intitulé « Warren Barguil, l’année loupée ». N’ayant pas accès au contenu réservé aux abonnés, je n’ai pas pu lire l’article.

Mais force est de constater qu’en effet, Barguil a eu une saison assez moyenne en 2018. Son dernier fait d’arme remonte à dimanche dernier lors des Mondiaux d’Innsbruck, où il a abandonné assez tôt dans la course après avoir été pris dans une chute. À sa décharge cependant, Barguil n’était initialement pas prévu en Équipe de France, donc n’avait peut-être pas préparé cette course avec toute la rigueur nécessaire.

D’autres résultats de Barguil cette saison: 17e de Paris-Nice, 15e du Tour de Catalogne, 45e de la Flèche Wallonne, 53e de Liège-Bastogne-Liège, 19e du Dauphiné, 17e du Tour de France… Son seul fait d’arme cette saison est probablement sa 3e place acquise sur le Grand Prix de Wallonie le 12 septembre dernier.

Je suis de ceux qui se sont surpris à l’intersaison l’an dernier de voir Barguil quitter une « grosse » formation WorldTour comme la SunWeb et ses grands leaders dont Dumoulin pour la petite équipe française Fortuneo-Samsic.

Ceci peut-il expliquer cela?

Il est clair que Barguil porte sur ses épaules la formation Fortuneo-Samsic, exempte de grands leaders à part lui. Il a donc davantage de responsabilités que lorsqu’il était à la SunWeb où un coureur comme Dumoulin pouvait le décharger significativement de cette pression.

Il a probablement dû s’impliquer davantage dans les choix de l’équipe également, ce qui coûte en énergie et en… tracas. Je pense ici par exemple à l’histoire du changement d’équipementier de vélos deux semaines avant le Tour, de Look à BH. Apparemment, Barguil n’était pas satisfait des vélos Look… je ne peux pas croire que ca n’a pas perturbé sa préparation.

Une plus petite structure veut également dire moins de gros moyens pour tous les à-côtés du cyclisme: diététique, soins divers, tests de matériel, tous ces « marginal gains » sur lesquels de grosses écuries comme Sky, BMC, Quick Step ou d’autres misent.

Bref, Barguil a peut-être eu la tête « encombrée » en 2018 par des éléments autres que le seul fait de pédaler sur son vélo. La joie de retrouver ses terres bretonnes n’a probablement pas compensé suffisamment pour ces tracas additionnels.

Je suis activement le cyclisme depuis 1983, et j’ai vu beaucoup de grands coureurs qui, après une année de grands succès, ont opté pour des équipes moins aguerries ou émergentes, un choix évidemment souvent compensé par une rallonge salariale. Stephen Roche en 1988 avec Fagor en est un exemple éloquent, mais aussi Luc Leblanc chez Le Groupement en 1995, et d’autres encore.

L’histoire m’a prouvé que c’est là un pari souvent risqué, rarement payant. Barguil est peut-être l’exemple le plus récent de cette série malheureuse.

Affaire Froome: 7 millions d’euros!!!!

Après une absence de plusieurs jours à l’extérieur du pays avec connexion Internet limitée, La Flamme Rouge revient progressivement au service normal.

Et comme vous, j’ai été choqué d’apprendre que l’UCI abandonnait l’affaire du Salbutamol de Chris Froome, et donc le blanchissait de tout soupçon.

Cinq jours avant le début du Tour de France… Orchestré vous dites?

Surtout, je suis outré d’un chiffre, celui avancé par de nombreux sites d’information: 7 millions d’euros.

C’est ce que l’équipe Sky aurait dépensé pour assurer la défense de Chris Froome dans cette affaire, engageant les meilleurs avocats (Mike Morgan) et produisant apparemment 1500 pages d’un dossier étoffé, à grand renfort « d’études scientifiques » commandées depuis 8 mois.

7 millions d’euros!

En 2015, le coureur moldave Alexandr Pliuschin n’a pas eu cette chance: controlé lui aussi avec un niveau de Salbutamol trop élevé, il a été suspendu de son équipe puis sanctionné 9 mois par l’UCI. Sa carrière est aujourd’hui terminée… Sans oublier les cas de Diego Ulissi (2014) et Alessandro Petacchi (2007), eux aussi suspendu par l’UCI pour des niveaux excessifs de la même substance…

Froome n’a non seulement pas été suspendu par son équipe, mais il s’en sort en soulevant un « doute raisonnable », c’est à dire que les niveaux très élevés de Salbutamol trouvés dans son organisme peuvent découler d’une prise de ce médicament « dans les limites acceptées ». En d’autres mots, selon le rapport soumis par la Sky, on ne peut pas dire que Froome a essayé de tricher.

Le dossier élaboré par la Sky montrerait que Chris Froome est un cas particulier, et qu’il stockerait dans ses reins ces substances, plutôt que de les éliminer. L’AMA a parlé d’un cas « extrêmement complexe ».

C’est très intéressant: Froome serait en fait un très grand malade. Voyez un peu:

  • atteint de bilharziose
  • souffre d’asthme sévère (très pratique pour les AUT)
  • souffre d’urticaire
  • atteint de blastocystose (très pratique pour expliquer l’extrême maigreur…)
  • atteint de fièvre thyphoide

Avec de nombreuses voies qui s’élèvent pour affirmer qu’on assiste actuellement dans le peloton au retour d’un dopage plus « classique » et utilisé grâce notamment aux AUT et autres justifications médicales, je pense que c’est ca la stratégie actuelle: passer pour un grand malade! Un petit coup (donc autorisé) de ceci pour maigrir et donc atteindre un rapport poids-puissance exceptionnel, un petit coup de ceci pour la respiration, un petit coup de cela pour la récupération (en plus de tout le reste, cryothérapie et autre), et vous avez les ingrédients actuels du super-champion. Sans  oublier bien sûr les stages à Ténérife pour faire des globules…

Le grand malade Chris Froome sera donc présent sur le Tour, blanc comme neige (et blanc comme un drap). Reste à voir l’accueil du public… je crois personnellement que ca risque de mal se passer. Les huées seront plus nombreuses que jamais selon moi.

Froome sort indemne de tout ce scandale. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant du cyclisme…

Pinot, la quête du podium au Giro

Impressionnant Egan Bernal

Il a 21 ans seulement.

Il est champion 2018 de Colombie dans le contre-la-montre.

Il a commencé sa carrière cycliste en VTT, remportant des médailles aux Mondiaux juniors 2014 et 2015 dans les épreuves de cross-country.

L’an dernier, il remportait le Tour de l’Avenir avec deux victoires d’étape en prime.

Recruté par la Sky, il vient de terminer 2e du Tour de Romandie, remportant au passage une étape.

Lors de la quatrième étape, il a multiplié les démarrages en montagne pour décramponner un excellent Primoz Roglic, lui aussi une révélation de l’épreuve et vainqueur du général.

Où s’arrêtera le jeune colombien Egan Bernal à la feuille de route déjà impressionnante?!

Je vous avoue m’être enthousiasmé des talents de grimpeur du jeune colombien. À cet âge, c’est assez remarquable. Et il ne souffre d’aucun complexe!

Bernal aurait développé environ 6,7 watts par kilo pendant les 25 minutes de son ascension vers Villars lors de la 3e étape. Pour se faire une idée de l’exploit, ChronoWatts nous propose ici une analyse des performances du début de saison sur Paris-Nice et Tirreno-Adriatico. Quant on frise avec les 6,2 ou 6,3 watts par kilo sur ces durées c’est déjà plutôt très bien, imaginez si c’est plus!

On tient peut-être en Egan Bernal le futur grand grimpeur dans le cyclisme, capable de marcher dans les traces de Marco Pantani. Car à 21 ans, il a encore une bonne marge de progression.

Le plus fort, Sagan?

Merci à tous ceux qui ont laissé un commentaire suite à mon texte hier commentant la victoire dimanche de Peter Sagan sur Gent-Wevelgem.

Vous êtes plusieurs à penser que Sagan était tout simplement le plus fort.

Pas sûr!

Comprenez-moi bien: il est clair que Sagan est un coureur d’exception, une pointure du peloton. En ce sens, il est toujours fort.

Ceci étant, ses résultats jusqu’ici n’ont pas été transcendants. 8e de la Strade Bianche, clairement battu à la pédale, il terminait 6e de Milan SanRemo, nettement battu au sprint.

Je persiste et signe: Sagan a gagné au sprint dimanche devant des pointures comme Demare et Viviani parce qu’il a eu l’intelligence de partir au bon moment, c’est à dire le premier.

Sagan lui-même l’a avoué après la course, des propos rapportés par L’Équipe: « Je suis content de gagner cette course à nouveau, grâce au super travail de l’équipe. C’est toujours la loterie, je pensais juste à faire ce que j’avais à faire et partir tôt. »

Ca ne peut pas être plus clair!

Les Mondiaux en Autriche

Reportage intéressant sur la récente reconnaissance du parcours des prochains Mondiaux en Autriche par l’équipe italienne, Nibali inclut.

Les avis sont unanimes: ca sera très difficile. Une bosse de 8 bornes (!) à faire 7 fois, ainsi qu’un mur dans le final avec des inclinaisons à… 28%! Assurément l’un des Mondiaux les plus difficiles de l’histoire, avec peut-être Sallanches (1980), Chambéry (1989) et Duitama (1995).

Et sur un tel parcours, les bons grimpeurs et coureurs de grands tours comme Froome, Dumoulin, Pinot, Bardet, Barguil ou encore Nibali auront d’excellentes chances.

Sur ce coup-là, Sagan aura de la difficulté à renouveler son titre, fort ou pas!!!

Marco Pantani (1970-2004)

Affaire Froome: les questions en suspens…

L’Affaire Froome fait décidément couler beaucoup d’encre ces jours-ci, et c’est pas forcément très « positif » (…) pour l’image du vélo.

Ce qui m’inquiète particulièrement est le temps que cela pourrait prendre pour faire la lumière sur ce contrôle positif: des mois! La suite des choses sera très certainement une bataille d’experts et d’avocats, d’un côté l’UCI et les scientifiques de la lutte contre le dopage, de l’autre les avocats de Chris Froome, ses médecins et les spécialistes engagés (bonjour la crédibilité!).

Tous les motifs seront bons: vice de procédure, déshydratation extrême, variations aléatoires, etc. On risque de tout entendre dans les prochains mois… ca sera long, trop long.

Plusieurs questions sont toutefois à élucider:

1 – comment la concentration de salbutamol a-t-elle pu atteindre un tel niveau (deux fois la limite autorisée!) dans les urines de Chris Froome? Déshydratation extrême? Erreur de mesure?

2 – se sachant testé tous les jours ou presque, pourquoi Chris Froome aurait-il pris un tel risque? À moins qu’une auto-transfusion la veille…

3 – comment est-il possible que Froome ne soit pas positif la veille et le lendemain, mais sur une seule journée durant la Vuelta? Il a été abondamment testé durant le dernier Tour d’Espagne… Si Froome s’était dopé au salbutamol avant la Vuelta par prise orale pour améliorer sa puissance et maigrir (les avantages dopants du produit selon les études), il aurait probablement été positif plusieurs fois durant l’épreuve… à moins d’avoir utiliser un autre produit masquant, mal dosé une journée particulière?

4 – quel intérêt à se doper avec du salbutamol, un produit visant essentiellement à dilater les bronches afin de permettre aux asthmatiques de mieux respirer? L’EPO ou la testostérone je comprendrais mieux, mais du salbutamol? Vraiment?

5 – le passeport biologique de Froome pourra-t-il être utile afin d’y voir clair?

Chose certaine, il semble avoir consensus parmi les experts et journalistes de ce monde: ce cas sera long et complexe à élucider, et le doute subsistera probablement toujours. Dans ce contexte, Froome ne se relèvera probablement jamais complètement de cette affaire, qu’il trainera comme une casserole pour le reste de sa vie. Des journalistes comme David Walsh lui ont retiré leur confiance ces jours dernier, c’est dire…

Affaire Froome: des éléments troublants

Difficile d’échapper à la bombe aujourd’hui dans le milieu du cyclisme: Chris Froome a été contrôlé positif au salbutamol à l’issue de la 18e étape du Tour d’Espagne en septembre dernier.

L’échantillon B a confirmé ce que l’échantillon A révélait: une dose de salbutamol chez Chris Froome deux fois supérieure à la limite autorisée.

Le salbutamol! Une substance pas claire: autorisée lorsque prise par inhalation, à certaines doses et sous autorisation d’usage thérapeutique (AUT). Une substance interdite à certaines concentrations, et lorsque prise en injection ou par suppositoire. Chris Froome bénéficie donc d’un doute, celui qu’il ne faisait que traiter son asthme à l’aide d’une pompe, asthme qui est d’ailleurs connu depuis des années. Il pourra certainement évoquer, dans sa défense, la déshydration comme facteur de concentration du salbutamol dans son organisme.

Le cas aurait été tellement plus simple si la substance trouvée avait été de l’EPO, des hormones de croissance ou de la testostérone! Là, on va en avoir pour des mois d’attente pour en arriver à un verdict de culpabilité ou non. Rappelons que Diego Ulissi a été trouvé positif et sanctionné au salbutamol en 2014, donc Chris Froome n’est pas forcément à l’abri d’une suspension, voire de se faire retirer son titre à la Vuelta.

Chose certaine, toute cette histoire ne me surprend pas: on savait depuis notamment les révélations de Fancy Bears que l’équipe Sky fleutrait depuis un moment déjà avec les limites des AUT, bien pratiques pour se doper légalement. Rappelons que Bradley Wiggins a été lui aussi écorché au cours des derniers mois sur ce point…

Ce qui me surprend, c’est le timing: l’UCI a été saisie du dossier au moment précis (le jour même!) où le Français David Lappartient succédait au Britannique Brian Cookson à la tête de l’organisme!

Comme si, à quelque part, le laboratoire n’aurait pas eu confiance en Cookson pour traiter de l’affaire, et aurait attendu que Lappartient arrive en poste…

Cela soulève légitimement la question de la protection dont bénéficient peut-être certaines équipes « de premier plan » dans le cyclisme. On sait depuis l’Affaire Lance Armstrong que la complaisance existe très probablement, ce dernier ayant assurément bénéficié, à quelques occasions, de la clémence d’Hein Verbruggen à l’époque à la tête de l’UCI.

Que voulez-vous, il vient un moment où certains champions deviennent tellement importants pour l’image et le business d’un sport qu’il faut les protéger. Outre Chris Froome, on peut penser que Peter Sagan est de cette trempe… Chose certaine, Sky comme sponsor est très impliqué avec la Fédé britannique de cyclisme depuis des années, et le cyclisme britannique a collectionné les médailles et titres au cours des dix dernières années…

Drôle de timing également pour l’équipe Sky, comme si on cherchait à la déstabiliser depuis des mois. Ce fut l’affaire Wiggins, les doutes sur Froome et maintenant, un contrôle positif officiel. L’équipe britannique est certainement l’objet d’une attention particulière, Froome ne parvenant pas à convaincre tant ses performances sportives semblent artificielles, ni Brailsford d’ailleurs en tant que manager d’une équipe souvent trop dominante (rappelez-vous le Tour cette année, avec les Henao, Kwiatlowski, Landa, Nieve…

Le plus triste dans tout ca, c’est les dommages à l’image du cyclisme: la nouvelle est partout dans les médias, même au Québec en ce temps-ci de l’année: c’est dire!

Déjà, au bureau, mes collègues qui ne connaissent pourtant rien au vélo me parlent des cyclistes « tous dopés, inévitablement ». Que « ca ne changera jamais ». On me demande même comment je fais pour encore m’intéresser à ce sport.

Des grands malades, ces cyclistes pros!

Le salaire des pros

En 2018, le salaire minimum des coureurs WorldTour sera révisé à la hausse pour la première fois depuis 2013, décision de l’UCI et de son nouveau président David Lappartient.

Du coup, c’est intéressant de faire le point sur le salaire des pros. Si les contrats ne sont pas rendus publics, on trouve des estimations sur Internet, et je vous propose un petit tour d’horizon.

Les chiffres avancés portent sur les salaires touchés des équipes, et ne comprennent pas les autres contrats de marketing avec des compagnies d’équipements (le plus souvent). Ces contrats sont souvent assez juteux et peuvent parfois doubler le revenu annuel d’un coureur. À ne pas perdre de vue!

Le cycliste pro le mieux rémunéré est certainement Chris Froome, vainqueur du Tour et de la Vuelta 2017, avec un salaire estimé à plus de 5 millions d’euros, révisé en 2018 possiblement proche des 6 millions d’euros. C’est beaucoup? On est pourtant très loin de la rémunération des stars d’autres sports, et de Christiano Ronaldo qui touche autour de… 47 millions d’euros annuellement, sans compter ses contrats publicitaires. Et je ne vous parle pas de la F1!

Peter Sagan est probablement le 2e coureur le mieux payé du peloton, avec un salaire estimé autour de 5 millions d’euros lui aussi. Ses résultats bien sûr jouent pour beaucoup, mais aussi son image publique décalée, relax, et sa popularité interviennent dans ce montant élevé.

Parmi les autres millionnaires du peloton, on compte très certainement Vicenzo Nibali (un ancien vainqueur du Tour encore en activité, ils sont rares!), Marcel Kittel, Nairo Quintana, Alessandro Valverde, Philippe Gilbert, Greg Van Avermaet, Fabio Aru, Tom Dumoulin (il a signé avec SunWeb jusqu’en 2022) et possiblement Michal Kwiatlowski et Richie Porte.

Marcel Kittel, Philippe Gilbert, Tom Dumoulin ainsi que Greg Van Avermaet auront certainement bonifié significativement leur salaire en 2017 grâce à leurs performances qui ont dépassé les attentes.

Peu de coureurs français toucheraient plus d’un million d’euros par an. Ce serait le cas de Romain Bardet, Nacer Bouhanni et Thibault Pinot.

Après ces « stars » millionnaires du cyclisme, le salaire des autres coureurs diminuerait vite et serait pour la presque totalité inférieur au million d’euros par an.

Entre 0,5 et 1 million d’euros, on a très certainement des coureurs qui ont gagné de grandes courses ou qui jouissent d’une popularité et d’un capital sympathie important auprès du public. Je pense à des coureurs comme Alexandr Kristoff, Mark Cavendish, Michael Matthews, Dan Martin, Rigoberto Uran, Andrei Greipel, John Degenkolb et, parmi les Français, les Tony Gallopin, Julian Alaphilippe, Arnaud Demare, Brian Coquard et très probablement Warren Barguil qui a dû passer à la caisse durant l’intersaison. La liste n’est évidemment pas exhaustive.

Un bon équipier d’expérience en WorldTour peut espérer toucher annuellement entre 200 000 et 400 000 euros, dans de rares exceptions (à ce tarif, un Jens Voigt peut-être?).

Les autres coureurs sont souvent au salaire minimum imposé par l’UCI, qui est de 38 000 euros par an pour un coureur de plus de 25 ans, et de 29 000 euros pour un néo-pro qui débarque, ou légèrement au dessus. Les salaires minimum seront bonifiés de 2% en 2019 et 2020 (ajustement à l’inflation), ce qui est une bonne nouvelle puisqu’entre 2013 et 2018, les salaires minimum étaient restés fixes.

Au total, la moyenne des coureurs WorldTour serait d’environ 264 000 euros par an, mais c’est une moyenne… très affectée par les quelques coureurs qui présentent des salaires hors norme. En analyse des salaires, la médiane est toujours préférable, mais faute d’une distribution précise, je ne peux pas vous la calculer!

Alors, payant le cyclisme? Pas vraiment… même pas du tout. Au litre de sueur et de souffrance, les cyclistes sont assurément parmi les sportifs les moins bien payés au monde. Et parmi les cyclistes, les femmes professionnelles sont sans aucun doute les plus à plaindre, l’UCI n’ayant jamais fixé de salaire minimum pour elles. Dans ces circonstances, avoir un petit salaire est déjà une réussite pour la majorité d’entre elles. À quand l’équité salariale entre les sexes dans le sport?

Encore possible, le doublé Giro-Tour?

Chris Froome a confirmé hier qu’il sera au départ de la 101e édition du Tour d’Italie, dont le parcours a été dévoilé.

Autrement dit, il tente, en 2018, le doublé Giro-Tour.

Un tel doublé est-il encore possible dans le cyclisme d’aujourd’hui? Le dernier à avoir réalisé pareil exploit est Marco Pantani en 1998, dans des circonstances un peu particulières on le sait aujourd’hui (rappelez-vous, le Tour 1998 a été celui de l’Affaire Festina…).

Avant Pantani, Miguel Indurain avait lui aussi réalisé ce doublé en 1992 et 1993. Au total, dans l’histoire du cyclisme, et outre Indurain et Pantani, seuls cinq autres coureurs ont réalisé ce doublé, soit Stephen Roche une fois (1987), Bernard Hinault deux fois (1982 et 1985), Eddy Merckx trois fois (1970, 1972 et 1974), Jacques Anquetil une fois (1964) et Fausto Coppi deux fois (1949 et 1952). Des monstres!

On peut penser que Froome n’est pas inconscient et que son doublé Tour-Vuelta en 2017 lui aura servi de répétition générale, boostant sa confiance.

Je pense que Froome prend toutefois de gros risques.

D’une part, 2018 sera l’année de sa 5e victoire sur le Tour, ce qui lui assurerait une place unique dans l’histoire du cyclisme, rejoignant les Anquetil, Merckx, Hinault et Indurain comme quintuple vainqueur de la Grande Boucle. En prenant le départ du Giro, il prend le risque d’y laisser beaucoup d’énergie AVANT son grand rendez-vous de la saison en juillet. En 2017, les risques étaient moindres: le Tour d’abord, et on verra bien ce qui reste pour la Vuelta, qui vient APRÈS le Tour… Ca avait bien marché, il avait encore du jus sur la Vuelta, mais les risques étaient moindres.

D’autre part, le parcours annoncé de ce Giro 2018 est très difficile. Un départ d’Israel, donc un long transfert à assurer après trois jours de course, et pas moins de huit arrivées au sommet, dont l’Etna, le Gran Sasso et le Zoncolan! Définitivement de quoi y laisser beaucoup de plumes, surtout si on se bat pour le maillot rose (Aru a déjà annoncé l’impasse sur le Tour, pour se concentrer sur le Giro…).

Le Giro intervient également plus tôt dans la saison, et la météo peut y être compliquée, davantage qu’en Espagne au début septembre. Pour être prêt au départ du Giro, Froome devra consentir à des efforts dès les mois de mars et avril, parfois dans des conditions moins optimales, ce qui coûte aussi de l’énergie.

Dans ce contexte, je me pose la question: que restera-t-il à Froome comme énergie au sortir du Giro le 27 mai prochain? En gros, six semaines le sépareront alors du départ du Tour, prévu le 7 juillet, pour se refaire la cerise. Suffisant?

Rappelons que plusieurs coureurs ces dernières années ont apparu cramé au Tour, après avoir disputé le Giro. Je pense notamment à un coureur ultra-talentueux comme Alberto Contador, qui s’est cassé les dents sur ce défi à plusieurs reprises au cours des dernières années. Just too much compte tenu des cadences de course, de la pression des médias, des sponsors, des enjeux et de la compétition féroce. Un Tom Dumoulin ne voudra pas faire que de la figuration sur ses grands défis en 2018…

Ajoutons à cela que les équipes ne comporteront plus que… huit coureurs sur les grands tours en 2018, rendant la course un peu plus difficile à contrôler pour les grands leaders. Froome devra également composer avec cette nouvelle donne l’an prochain, ce qui lui compliquera la tâche sans aucun doute. Tu perds deux équipiers en début d’épreuve et te voilà réduit à cinq coéquipiers pour assumer le boulot sur les deux dernières semaines… aie!

Chose certaine, s’il devait réussir, Froome prouverait à tout le monde le caractère exceptionnel de son talent, dans la lignée des grands exploits du cyclisme, je pense à ceux de Coppi, Anquetil, Merckx ou Hinault.

Les « marginal gains » seront-ils suffisants?!

Pantani forever!

Ce vidéo magnifique a fait remonter des tonnes de souvenirs… de passion aussi. C’est de l’essence même du cyclisme dont il est question… Seuls ceux qui ont leur jardin secret, ces rides solo où on se teste, année après année, en se poussant à l’agonie tant physiquement que mentalement, comprendrons. Les miennes s’appellent Luksville, La Patrie, Bonsecours, et parfois la Chartreuse et son col du Coq. Ha! tout cela me manque…

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