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FQSC: une très belle initiative

C’est une très belle initiative de la Fédération Québécoise des Sports Cyclistes: la Campagne de sensibilisation sur l’intégrité et la sécurité dans les sports cyclistes.

Hier, la Fédé a diffusé la troisième capsule qui porte sur le sujet du dopage dans le cyclisme. Les témoignages vidéo de William Goodfellow et Christiane Ayotte sont saisissants, et c’est à ne pas manquer.

Deux capsules ont été diffusées précédemment, la première sur les différences formes de violence, la deuxième sur les troubles alimentaires.

Alors que Louis Barbeau vient d’envoyer par courriel à tous les coureurs maitres un formulaire de sensibilisation sur le dopage à compléter au plus tard le 22 juin prochain, alors que le Tour de Beauce s’est élancé tout récemment, alors que se profile la Grande Messe de juillet sur les routes de France et que la saison de course sur route bat son plein au Québec, le moment est opportun pour chacun d’entre nous de prendre quelques minutes et de (re)penser à notre éthique sportive.

Et surtout de rejeter l’éthique sportive de ceux qui pensent que « tous les cyclistes sont dopés« , ou que l’on triche « seulement si on est le seul à le faire« .

Dans la capsule vidéo, William apporte un élément qui résonne chez moi: l’acceptation de soi.

Il y a quand même une façon d’avoir de la performance avec l’acceptation de soi.

william goodfellow

La non-acceptation de soi, de son niveau physique, peut en effet être un élément menant facilement au dopage.

Personnellement, j’aurais aimé être un champion cycliste mais je n’ai pas tiré le gros lot à la loterie génétique. Et j’ai rapidement compris que la plus grande satisfaction qui soit n’est pas de battre les autres, mais bien de se battre soi-même.

Aujourd’hui, je lutte le plus souvent contre mes propres KOM, en privé; rien ne me fait plus plaisir que de rouler plus vite aujourd’hui, à 50 balais passés, qu’à 30 ou 40 ans. Évidemment, aussi propre aujourd’hui qu’il y a 10, 20 ou 30 ans.

Alors que les cas de dopage sont quasi-inexistants en World Tour depuis plusieurs années (voir ici le récent article de notre ami Marc Kluszczynski sur le sujet) alors même que les vitesses n’ont jamais été aussi élevées dans les cols, ce rappel de la FQSC n’est pas inutile, loin s’en faut. Car il nous rappelle aussi qu’à la base, la lutte contre le dopage est une affaire d’éducation, de sensibilisation, et de bon encadrement dès les premiers coups de pédale.

Et pendant ce temps, Cyclisme Canada…

Faut-il interdire les cétones?

Le débat sur l’usage des cétones dans le cyclisme fait rage de plus belle ces jours-ci, plusieurs coureurs notamment français (Bardet, Demare) ayant recommandé leur interdiction.

« J’ai l’impression d’avoir élevé mon niveau de jeu cette année mais ça ne s’est pas forcément vu, tant le peloton roule vite… Ça va crescendo chaque année et ce n’est sans doute pas près de s’arrêter. »

Romain bardet, sport FR, 13 décembre 2021

L’augmentation du niveau sur les courses pro n’est certes pas qu’une affaire de cétones. Les contrôles anti-dopages sont moins fréquents, et nous savons que d’autres produits sanguins novateurs et au fort potentiel dopant sont certainement déjà en usage au plus haut niveau. J’y ai consacré deux articles en septembre dernier, le nouveau dopage sanguin (article 1 et article 2).

Qu’est ce que les cétones? Ces corps cétoniques sont produits par le foie, suite à la consommation de lipides.

Les régimes « kéto » (pour « ketones » en anglais) sont actuellement très populaires.

Le principe est de forcer le corps humain à utiliser les graisses comme principal combustible, plutôt que les sucres. La perte de poids serait plus facile, ainsi que le maintien du poids par la suite, parce que les gens sur un tel régime consomment beaucoup moins de sucre.

En sport, l’avantage est de retarder l’usage des sucres, et ainsi préserver ses « cartouches » pour les fins de course. On apprendrait ainsi au corps à devenir plus « efficace ».

Un régime cétonique permettrait aussi d’accélérer la récupération.

De nombreuses équipes seraient déjà sur les régimes cétoniques, notamment la Jumbo-Visma et la Deceuninck. La plupart des équipes pro disposent aujourd’hui de nutritionnistes, chefs, et camions-repas, facilitant les choses à ce niveau.

On peut également acheter des produits ou suppléments alimentaires (cétones exogènes) maximisant la production de corps cétoniques.

Ces régimes ne vont pas sans risque, notamment pour le foie. Certains crient à des régimes carrément dangereux pour la santé, en particulier pour les personnes diabétiques.

Alors, dopage les régimes kéto? Pas sûr, surtout que certaines études scientifiques récentes concluent à l’absence d’avantages dans les sports, notamment tel que rapporté récemment par le directeur médical de l’UCI.

Je vous avoue y perdre mon latin! Pour Jean-Pierre de Mondenard, bien connu dans la lutte contre le dopage, le débat sur les cétones est même un « masquant médiatique », des problèmes autrement plus pertinents devant être réglés en matière de dopage.

Marc Kluszczynski nous aidę aujourd’hui à y voir plus clair, et je l’en remercie.

Sky fut la 1ère équipe cycliste à utiliser les cétones incorporées dans les boissons d’effort dès 2011.

Mises au point par le physiologiste anglais Kieran Clarke, Dave Brailsford les considérait comme faisant partie des fameux gains marginaux. A-t-on des preuves de leur effet ergogène ?

Les études sont peu nombreuses ; certaines montrent que les cétones d’apport exogène sont utilisées dans l’effort avec une amélioration de 0,5 à 2% des performances. Une étude de 2016 parlait de 15% !

L’UCI (Pr Xavier Bigard, directeur de la commission médicale) et le MPCC (Roger Legeay) dénoncent leur absence totale d’action et recommandent de ne pas les utiliser. On attend donc une étude indépendante (chez des cyclistes) qui chiffrerait leur avantage réel en cyclisme, mais on sait déjà qu’une consommation élevée bloquerait la lipolyse et diminuerait la glycémie. 

Un petit rappel de la biochimie des cétones endogènes pour fournir une base de discussion: fabriqués par l’organisme à partir de la dégradation des lipides dès le 5ème à 7ème jour de jeûne ou quand l’apport en glucides est insuffisant, les corps cétoniques (ou cétones) lui permet d’épargner la souffrance du cœur et du cerveau qui ne fonctionnent qu’au glucose dont les réserves sont épuisées en une journée.

Mais ces cétones seront aussi utilisés comme carburant alternatif dans les muscles. D’où l’intérêt dans les sports.

L’organisme fabrique trois cétones : le ß-hydroxybutyrate, l’acétoacétate et l’acétone. Lorsque le glucose vient donc à manquer dans la cellule, les acétyl-coenzyme A provenant de ces cétones sont incorporés dans une voie métabolique de dérivation (la cétogénèse) où le cycle de Krebs (ß-oxydation des acides gras) pourra utiliser ces cétones dans la fourniture d’énergie. C’est la théorie biochimique dans un organisme au repos. Peut-il en être le cas chez un cycliste professionnel ? Et les cétones exogènes peuvent-elles être utilisées comme source d’énergie supplémentaire alors que les glucides et le glucose ne manquent pas ?

L’étude de Kieran Clarke (1) l’affirmait : les cétones seront incorporées dans le cycle de Krebs en vue de produire de l’énergie sous forme d’ATP avant l’épuisement des réserves en glycogène, puis éliminées sous forme de gaz carbonique (CO₂) et d’eau. Il est vraisemblable que leur effet ergogène serait fonction du métabolisme du cycliste et des conditions de course.

Julian Alaphilippe considère les cétones comme faisant partie de son plan nutritionnel.

Romain Bardet, par contre, les assimile à des substances de la zone grise, citant comme exemple le tramadol (interdit par l’UCI en 2019, mais pas par l’AMA). On pourrait en citer d’autres comme les hormones thyroïdiennes.

Qui a raison ?

Considérons le métabolisme et l’élimination de ces substances citées : des substances exogènes (tramadol, autres produits dopants) seront éliminées après glucuronoconjugaison ou sulfoconjugaison dans les urines ou les selles, ce qui permet leur détection. Romain Bardet, mais également Arnaud Démare, Guillaume Martin, souhaitent l’interdiction des cétones. 

Si les cétones étaient interdites, on se heurterait à plusieurs difficultés dans leur détection. Comment les déceler puisqu’elles disparaissent totalement de l’organisme sain (2)? Aussi, comment les différencier d’une source alimentaire ou endogène ? Les triglycérides à chaîne moyenne (entre 8 et 12 atomes de carbone) tels ceux présents dans l’huile de coco, peuvent se transformer en corps cétoniques. 

Aucune étude n’a envisagé la dangerosité des cétones. Le MPCC en fait son cheval de bataille. Qu’en serait-il lors d’un apport exogène à haute dose ? Kieran Clarke cite des troubles gastro-intestinaux banaux. On pourrait suspecter à haute dose une acidose métabolique potentiellement mortelle (telle l’acidocétose du diabétique). Il n’y a donc actuellement aucune preuve de leur effet sur l’amélioration des performances (dans la déclaration du 8 décembre du Pr Bigard) et de leur danger.

La question de l’éthique sportive ne peut se résoudre au prix du débat sur les cétones. Peut-on vouloir l’interdiction d’une substance en se basant sur des convictions personnelles ? L’idée de bien « performer » sans l’aide des cétones serait la preuve de leur inefficacité. On se retrouve dans la même situation d’un individu déclarant être capable de faire son sport sans manger de viande, et qui voudrait montrer son inutilité voire son danger. Consommer tous les jours de l’huile de coco fait-il de vous un consommateur de cétones ? Consommer des gélules de glycogène (elles n’existent pas !) ferait-il de vous un dopé ?

Début décembre, l’AMA déclarait que les cétones ne remplissaient pas les conditions pour être interdites. L’UCI était plus nuancée : tout en admettant qu’il serait compliqué de les interdire, Xavier Bigard recommande de ne plus les utiliser (!) en attendant d’autres études que l’UCI a lancées. On doute de la pertinence d’un tel conseil.

Dans ce débat, on se rangera plutôt du côté de Julian Alaphilippe que de celui de Romain Bardet, Guillaume Martin et Arnaud Démare. On retiendra le critère déterminant des cétones incorporées dans la filière énergétique et disparaissant en eau et gaz carbonique, tels les graisses et sucres. Les cétones sont donc bien un aliment. On ne peut interdire l’utilisation de pâtes!

  1. Kinetics, safety and tolerability of (R)-3-hydroxybutyl(R) (3) hydroxybutyrate in healthy adults subjects. Kieran Clarke and coll. Univ of Oxford. Regulatory Toxicology and Pharmacology, vol 63, Issue 3, August 2012, p 401-408. La boisson Delta-G augmente le taux d’acétoacétate et de ß-hydroxybutyrate. Son but était de restaurer les capacités cognitives des militaires soumis à une restriction glucidique. Son prix était exorbitant : 2678 euros le litre. Le prix des cétones reste élevé (1400 euros le litre) alors que leur fabrication ne coûte rien… !
  2. Les corps cétoniques sont néanmoins détectables dans l’air expiré. On connaît l’haleine cétonique en cas de diabète mal stabilisé ou chez les jeuneurs impénitents. On sait aussi que l’isomère lévogyre (L) est moins utilisé par l’organisme que le dextrogyre (D). Chez le diabétique, sucre et cétones peuvent se retrouver dans les urines.

« En une seule année, ça s’est vraiment accéléré »

La déclaration est récente et nous vient d’Arnaud Démare, qui a évolué en 2021 au coeur du peloton WorldTour.

Il évoque aussi un « peloton à deux vitesses », et ca de quoi faire peur puisqu’on a l’impression, à quelque part, de revivre un mauvais film.

Le coureur français se pose manifestement des questions, et a le courage de les exprimer publiquement à l’occasion de la sortie de son livre « Un an dans ma roue« .

De nombreux coureurs ressentent la même chose que moi.

Arnaud Demare

Surtout, l’info est crédible puisqu’elle nous vient du coeur du peloton pro.

Je me pose aussi des questions plus sérieuses depuis quelques mois devant ce que je vois. D’autres aussi, dont les Antoine Vayer, Marc Kluszczynski et d’autres observateurs éclairés du cyclisme.

2022 pourrait nous apporter quelques réponses. Il faudra voir les performances offertes, les analyses de puissance, les forces en présence et celles qui, au contraire, auront du mal à suivre.

Nous vivons une époque particulière, il faut en être conscient: des jeunes coureurs, 20, 21, 22 ans, qui gagnent les plus grandes courses du monde, habituellement réservées à des coureurs plus matures. Des équipes qui gagnent avec des coureurs modestes, et d’autres qui marquent le pas. Des vitesses en hausse. Des coureurs qui ne courent plus beaucoup, qui s’entrainent dans leur petit coin et qui débarquent soudainement pour gagner. Et des nouveaux produits qui, constamment, débarquent du côté des pharmaceutiques, certains défiant toute imagination.

Les limites de l’AMA

Parmi les conclusions de cette saison 2021, peut-être celle que le cyclisme ne tourne plus tout à fait rond.

Avec l’affaire récente de la tizanidine, on peut se demander si les autorités antidopage en font actuellement assez pour prévenir les dérives.

Déjà, des coureurs pro avaient exprimé leurs inquiétudes en 2020 devant la baisse drastique (baisse de 90%!) du nombre de contrôles hors-compétition. La situation serait revenue à la normale en 2021.

Les contrôles ne sont pas tout: encore faut-il qu’ils soient efficaces! Le sont-ils? Pas sûr! L’Affaire Armstrong nous a prouvé les limites de ces contrôles.

Marc Kluszczynski nous aidę aujourd’hui à y voir plus clair, et notamment du côté de l’Agence mondiale antidopage. Je le remercie encore de cette contribution!

Les limites de l’AMA (par Marc Kluszczynski)

Dans l’affaire de la tizanidine, l’AMA a une nouvelle fois montré des limites évidentes.

Non seulement la tizanidine n’est pas citée dans la liste des interdictions, mais la clonidine, substance dont elle dérive, est citée dans les exceptions des stimulants non spécifiés S6b. Elle est donc autorisée alors qu’elle favorise la sécrétion d’hormones de croissance et la mobilisation des lipides.  

La trimétazidine, quant à elle, de stimulante, est maintenant au chapitre des modulateurs métaboliques (S4.4), alors qu’aucune preuve de son action n’existe.

Autre exemple, depuis plus de dix ans, on a assisté à la libéralisation des bronchodilatateurs et l’Agence mondiale antidopage (AMA) continue à nier leurs effets favorisant la performance.

Si les corticoïdes sont maintenant interdits en compétition pour toutes voies injectables, leur effet systémique quand ils sont administrés localement ont été reconnu avec 20 ans de retard.

Tous les ans, l’agence promet des études (comme avec les bronchodilatateurs) mais son faible budget annuel ne lui permet pas de les réaliser, ou alors elle n’en a pas la liberté puisque dépendante du Comité international olympique, son principal bailleur. Certains employés, exaspérés, ont démissionné.

Howman claque la porte

Alors qu’il avait occupé le poste de Directeur général de l’AMA de 2003 à juin 2016, David Howman, avocat néo-zélandais, avait déclaré le 16 avril 2019 lors d’une conférence des Partenaires pour un sport propre, que les méthodes de détection du dopage ont 50 ans de retard.

Selon lui, ces méthodes sont tout juste bonnes à attraper les « petits bricoleurs du dopage ». Lors de son passage à l’AMA, Howman avait subi les critiques de scientifiques s’étonnant du manque de volonté (ou de moyens) de l’agence pour innover. L’avocat, dans ses discours, citait « les progrès considérables réalisés par la communauté antidopage au cours des dernières années » (le 21 septembre 2015) ou encore « Notre travail consiste à faire en sorte que ceux qui empêchent les sportifs propres d’avoir un terrain de jeu équitable, soient expulsés du sport ».

Mais ces belles déclarations d’Howman n’étaient pas en adéquation avec les moyens très limités de l’AMA, moyens qui dépendent des pays signataires du code mondial antidopage et du CIO.

Le pire des constats concerne les transfusions sanguines autologues : alors que le Pr Björn Ekblom, pionnier de cette méthode dans le sport, déclarait qu’il est possible de les détecter, rien n’a été fait depuis 50 ans pour venir à bout de leur usage! Cela n’a jamais été un sujet prioritaire pour l’AMA depuis sa création en 1999, malgré leur probable généralisation dans tous les sports.

Pour le passeport sanguin, on sait qu’il peut être manipulé et truqué. Qui va le faire évoluer ?

Le 27 janvier 2019, Howman avait déjà mis la pression sur son ex-employeur, déclarant que Craig Reedie, président à l’époque, était plutôt au service de l’industrie du sport mondial qu’à la protection des athlètes propres. Il ne s’était pas gêné non plus pour critiquer Reedie et sa décision de réintégrer la RUSADA, alors que les critères exigés n’étaient pas atteints (reconnaissance des rapports Mc Laren et transmission des données du laboratoire de Moscou avant le 31 décembre 2018).

Devenu un des plus farouches critiques de l’AMA, Howman est devenu en avril 2017 le directeur de l’AIU (Athletics Integrity Unit) qui oeuvre de façon indépendante pour assainir l’athlétisme mondial. L’affaire n’est pas gagnée!

Howman avait reçu le renfort d’un autre éjecté de l’AMA, le Dr Alain Garnier

Le Dr Alain Garnier, ex-directeur médical de l’AMA dans les années 2000, déclarait en 2018 : « Les préoccupations de l’AMA ne sont pas de lutter contre le dopage, mais de le gérer afin qu’il ne nuise pas au sport ». Garnier, qui n’avait pas hésité à critiquer l’AMA en 2012 dans la conduite de l’affaire Armstrong, sera vite éjecté et remplacé par le Dr Olivier Rabin.

Garnier déclarait encore à propos de l’AMA : « Continuer à utiliser un système qui a fait la preuve de son inefficacité équivaut à tolérer le dopage ».

Avec hypocrisie, on continue de réaffirmer la nécessité de lutter contre le dopage, mais on n’agit que peu, ce qui convient à tout le monde, sauf encore une fois, aux sportifs propres, qui demeurent les premiers bernés.

Bref, l’AMA présente de nombreuses limites: ne vient-elle pas seulement de s’apercevoir que l’agence nationale antidopage d’Ukraine prévenait depuis 2012 les athlètes ukrainiens des contrôles inopinés qu’elle allait réaliser?

Tizanidine: le point avec Marc Kluszczynski

Ca fait beaucoup de bruit dans le monde du cyclisme professionnel depuis quelques jours: une équipe de scientifiques strasbourgeois a retrouvé des traces de tizanidine dans les échantillons capillaires des coureurs de la Bahrain-Victorious, perquisitionnée en juillet dernier lors du Tour de France.

Même s’il est surprenant d’en trouver un usage chez des coureurs cyclistes pro en excellente santé, la tizanidine n’est pas un produit interdit actuellement, il faut le dire.

La tizanidine est un relaxant musculaire, surtout utilisé pour traiter les spasmes musculaires liés à diverses pathologies.

Ce qui me gêne beaucoup plus, c’est que l’équipe Bahrain-Victorious ment: elle nie l’utilisation du produit durant le dernier Tour.

Or, on a bel et bien retrouvé des traces de ce produit dans les échantillons capillaires de trois de leurs coureurs, grâce à leur étude scientifique.

Et les gendarmes de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) qui ont mené la perquisition ont bel et bien retrouvé des boites de ce produit dans la chambre du médecin de l’équipe.

Quoi qu’il en soit et pour nous aider à y voir plus clair, on fait le point avec Marc Kluszczynski, que je remercie une fois de plus pour sa contribution à La Flamme Rouge.

Surprise attendue chez Bahrain-Victorious? Par Marc Kluszczynski 

Le 14 juillet, au soir de la 17ème étape du Tour de France 2021, l’Oclaesp perquisitionnait l’hôtel de l’équipe Bahrain-Victorious. Des prélèvements de cheveux ont été effectués. Un résultat partiel vient de tomber (1) : présence de tizanidine chez trois coureurs.  

Dans un premier temps, on est étonné de la trouvaille. Comme on l’a lu partout, ce médicament est utilisé pour traiter les spasmes musculaires de la sclérose en plaques et certaines paralysies, bien que son mécanisme d’action soit inconnu. Elle a tellement d’effets indésirables que l’on se demande comment des cyclistes peuvent l’utiliser. Est-ce pour son effet hypnotique, couplé à la relaxation musculaire, ou pour remplacer les benzodiazépines classiques ?

Pas sûr car l’accoutumance et la tolérance de la tizanidine sont connues.

D’autres effets indésirables sont gênants : sensation de bouche sèche, tachycardie, tremblements, anxiété, vertiges, hypotension orthostatique, révélation d’une dépression latente… Bref, tous les effets que l’on appelle anticholinergiques, qui empêchent la pratique d’un sport à haut niveau. En gros, une grosse saloperie !

Pourquoi alors la Bahrain-Victorious a-t-elle utilisé de la tizanidine ?

Il s’agit bien de cette équipe car c’est la seule à avoir été perquisitionnée lors du dernier Tour de France. Il s’agit bien de cette équipe car c’est la seule à avoir été perquisitionnée lors du dernier Tour de France. Les démentis du directeur sportif, Milan Erzen, sont donc sans fondement.

L’Oclaesp retrouva dans la chambre du médecin de l’équipe, le Dr Marjan Korsic, de nombreuses boîtes de Sirdalud ou Zanaflex, noms commerciaux de la tizanidine, vendue en pharmacie dans certains pays dont les États-Unis. En France, elle n’est disponible qu’à l’hôpital et bénéficie d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU, à ne pas confondre avec les autorisations pour usage thérapeutiques, les fameuses AUT !).

Quand on fouille dans la littérature, on apprend que la tizanidine est apparentée à la clonidine (antihypertenseur central dont la commercialisation a cessé en France en 2016 suite à des problèmes d’usage détourné chez les toxicomanes).

Sédative et anxiolytique, la clonidine renforce l’effet analgésique de la morphine et est utilisé dans le sevrage morphinique. On sait que la clonidine provoque une hyperglycémie légère, augmente la mobilisation des lipides et favorise la sécrétion d’hormone de croissance endogène. Autant de propriétés intéressantes pour un cycliste.

L’usage d’un myorelaxant et d’un antalgique (par quoi le tramadol a-t-il été remplacé dans le peloton ?) pourrait favoriser l’effort en fin d’étape.

Les effets indésirables à base de somnolence devront être vraisemblablement contrebalancés par une bonne dose de caféine le lendemain. Ce n’est certainement pas un problème (2). De très nombreuses équipes comptent parmi leurs sponsors ou fournisseurs officiels un torréfacteur. On peut citer Caffè Bristot pour Bahrain-Victorious, Il Magistrale Cycling Coffee pour Jumbo-Visma, Caffè Vergnano pour Lotto-Soudal ou encore Segafredo, sponsor principal de l’équipe Trek-Segafredo depuis 2016.

Les gels à la caféine sont également très populaires. La marque suédoise Maurten commercialise un gel contenant 100mg de caféine. Elle fournit officiellement pas moins de trois équipes UCI WorldTeam (Israel Start-Up Nation, Jumbo-Visma et Intermarché Wanty Gobert) ainsi qu’une équipe UCI ProTeam (Team Novo Nordisk). 

L’Agence Mondiale Antidopage (AMA), comme souvent, n’a rien vu venir. La clonidine (donc ses apparentés et la tizanidine) figure dans la liste des interdictions 2022 au chapitre S6B des stimulants spécifiés (?) mais au bas de la page à l’alinéa exception (!). La clonidine (et la tizanidine) sont donc des substances autorisées et ne nécessitent pas d’AUT.

Les organisateurs du Tour de France savaient-ils ?

Chaque équipe doit déposer la liste des médicaments autorisés utilisés pendant le Tour. On s’attend à ce que la clonidine et la tizanidine passent maintenant d’urgence dans la catégorie S4 des modulateurs métaboliques.

On peut constater dans cette histoire que l’encadrement médical des Bahrain-Victorious (le Dr Marjan Korsic) est très fort, se fiche de l’éthique médicale, et que l’AMA est encore à la traîne (3). 

La médicalisation à outrance semble continuer en World Tour, grâce à l’aide de médecins à l’affût qui savent interpréter la liste des produits interdits de l’AMA. 

Mais il serait étonnant que la Bahrain-Victorious ne doivent tous ses succès de la dernière saison qu’à la tizanidine !

(1) L’article paru dans Wiley Analytical Sc J (Pascal Kintz, Laurie Gheddar, Jean-Sébastien Raul) ne cite pas le nom de l’équipe. Les concentrations retrouvées sont de 1,1 ;3,7 et 11,1 pg/mg. Seuls des prélèvements urinaire et sanguin sont officiellement reconnus par l’AMA.

(2) L’AMA a libéralisé la caféine en 2004, elle figure maintenant depuis 18 ans sur la liste des substances sous surveillance !

(3) Les similitudes avec la trimétazidine, qui avait suivi le même chemin, sont présentes. Sauf qu’on se demande encore pourquoi cette dernière substance est interdite.

Bardet, le tweet qui fait réagir

Un récent tweet de Romain Bardet, auteur d’un beau Tour de Lombardie (8e), fait réagir le monde du cyclisme professionnel ces jours-ci.

Quand je vois ces images du Tour d’Emilie, une de mes courses préférées, je n’ai pas l’impression d’avoir monté le même versant de San Luca ces années-là (pour la faire simple 2 bornes à 10 %), c’était du moto GP cette année ?

Romain bardet

C’est vrai que les accélérations d’Evenepoel et de Roglic dans l’ascension finale étaient très impressionnantes.

C’est assez rare qu’un coureur pro en activité ose ainsi se poser des questions publiquement.

Du coup, ils sont nombreux à réagir.

Un bon résumé des réactions est disponible ici, dans cet article publié par le journal français Ouest-France. Warren Barguil, Maxime Bouet, Guillaume Martin y confient leurs impressions personnelles.

C’est vrai que globalement cette saison, les watts sont repartis à la hausse, les moyennes aussi. Les calculs de puissance de Vayer et Portoleau vont dans le même sens, notamment sur la récente Vuelta où Roglic a quand même épinglé quelques perfs assez exceptionnelles.

Je suis assez d’accord avec le fait d’être prudent et de ne pas attribuer tous les progrès en watts au dopage; certains viennent certainement de vélos au meilleur rendement, du développement de la science de l’entrainement, des progrès en nutrition et préparation physique générale, de l’usage plus répandu des stages en altitude, des micro-coupures permettant aussi des conditions physiques plus stables à de haut niveau, etc.

Mais on ne peut pas exclure non plus le recours à de nouvelles formes de dopage pour autant! Certains faits troublants ont été observés cette saison. Et beaucoup de très jeunes coureurs affichent une précocité surprenante.

Du coup, je vous ai souvent écrit depuis ces derniers mois que je me pose aussi des questions devant certaines performances ou certaines séries de succès, notamment celle de l’équipe Bahrain-Victorious cette saison. Ca a commencé avec la 2e place de Caruso sur le dernier Giro.

Avec Marc Kluszczynski, fin observateur du cyclisme, on a essayé de faire le tour de la question des nouvelles formes de dopage, dans une série de deux articles diffusés récemment sur La Flamme Rouge. C’est ici et ici.

Marc Kluszczynski a lui-aussi réagi au récent tweet de Romain Bardet, et il revient sur la situation en se posant la question suivante: comment parler de dopage dans le cyclisme?

Je diffuse aujourd’hui son texte, en le remerciant de cette nouvelle contribution pour La Flamme Rouge.

Le dopage est un sujet difficile. Quel cycliste se dope ? Tous les cyclistes sont-ils dopés ? Faut-il attendre un cas positif pour écrire sur le sujet ? 

On peut tout de suite éliminer ce dernier choix, considérant qu’un cycliste comme Lance Armstrong n’a jamais été contrôlé (officiellement) positif. Il n’est pas le seul ! Tous les cyclistes du World Tour ne sont certainement pas tous des tricheurs.  Par exemple, l’irlandais Dan Martin (ISN) vient de prendre sa retraite. Il déclare partir la tête haute, comprenons qu’il n’a jamais cédé au dopage, malgré son passage chez UAE Emirates en 2018 et 2019. Sa dernière année n’aura été marquée que par une victoire d’étape au Giro. Son meilleur résultat sur un Grand Tour a été une 4ème place à la Vuelta 2020.  On se souvient aussi de sa victoire en 2013 à Liège-Bastogne-Liège et de sa chute dans le dernier virage l’année d’après alors qu’il était encore bien placé pour la victoire. Mais Dan Martin n’en dira pas plus sur le dopage, l’omerta étant encore de mise dans le peloton. 

Cette année, devant les performances de certains, en forme de février à octobre, certains pro français encore en exercice ont osé parler. Leur propos rassure sur la manière de traiter le sujet sur la Flamme Rouge. S’ils nous lisent, merci à eux pour leurs déclarations sans équivoques. 

David Gaudu (GFC) déclarait le 8 octobre avant le Tour de Lombardie : « Cela roule beaucoup plus vite qu’avant dans le peloton ! Avec le niveau stratosphérique de Primož Roglič, il faut battre ses records tous les jours sur toutes les arrivées un peu difficiles. C’est une année où cela roule vraiment très très vite ». Quand on pense que le gars a été orienté vers le saut à skis dans sa jeunesse, cherchez l’erreur ! 

Alexis Vuilllermoz (TotalEnergies), de retour dans le peloton suite à sa chute du CLM du Tour de Suisse, parlait d’une reprise délicate au Tour d’Emilie Romagne « Formule I ». 

Sur la même course, Romain Bardet (DSM) comparait la montée de San Luca (2 km à 10%) à une compétition de Moto GP cette année tant la vitesse atteinte par Roglič (Jumbo Visma) vainqueur au général, était élevée.

Il faut donc continuer à écrire sur le dopage alimenté par les soupçons apportés par les surhommes du vélo. Merci à eux aussi : ils se tirent une balle dans le pied !

Le nouveau dopage sanguin (2e partie de 2)

Dans ce deuxième article (de deux – première partie ici) sur l’évolution du dopage sanguin dans le sport, Marc Kluszczynski nous entretient du probable Graal dans ce registre, celui de l’hémoglobine soluble dans le plasma et tirée de vers marins, ainsi que des possibles nouveaux développements plus récents.

Je remercie encore une fois Marc d’avoir permis cet éclairage sur les nouvelles techniques de dopage dans le sport, un dossier pertinent pour tout ceux qui, comme moi, s’interrogent actuellement sur certaines performances offertes en cyclisme professionnel. Sans mettre tout le monde dans le même panier bien sûr.

Où en est le dopage sanguin? par Marc Kluszczynski (partie 2)

Une autre origine possible des hémoglobines est apparue dès les années 2000. Des scientifiques ont alors réussi à extraire l’hémoglobine du ver de terre (Lumbricus terrestris). Cette hémoglobine était toutefois 50 fois plus grosse que l’hémoglobine humaine, donc peu intéressante pour le dopage. 

Dès 2002, Franck Zal, biologiste à Morlaix, s’intéresse au ver des marées basses (Arenicola marina) creusant des sillons sur les plages de Bretagne. Comment ce ver arrive-t-il à survivre plusieurs heures sans pouvoir extraire l’oxygène de l’eau ? En 2008, il parvient enfin à extraire son hémoglobine. Mais ce sera une autre hémoglobine de ver qui sera découverte dans l’affaire Aderlass. C’est que plusieurs groupes pharmaceutiques avaient déjà profité des travaux du Dr Zal.

L’hémoglobine de l’Arenicola marina (M-101 ou Hemo2Life) possède des propriétés impressionnantes : elle n’est pas encapsulée dans un globule rouge et est donc soluble dans le plasma. Elle transporte 40 fois plus d’oxygène que l’hémoglobine humaine (156 atomes d’oxygène contre 4) grâce à sa structure en double hexagone et elle est 250 fois plus petite qu’un globule rouge. Elle est rigoureusement atoxique, n’est pas immunogène, ne provoque pas de vasoconstriction ni d’hypertension artérielle. Elle possède même des propriétés antioxydantes qui lui permettent de prolonger son activité. Lyophilisée en poudre, elle se conserve plusieurs années à température ambiante et s’administre en intraveineuse.

Le produit a une durée de vie courte (demi-vie : 2,5 jours) et disparaît totalement de l’organisme en cinq jours. Le test de détection, qui n’existe que pour M-101, n’est valable que quelques heures. Des microdoses ne seraient détectables qu’entre 4 et 24 heures après l’administration, voire pas du tout selon la quantité utilisée ! 

Hemo2Life est utilisée en thérapeutique pour prolonger la durée de vie d’un organe à transplanter (greffon). L’armée est bien sûr intéressée pour le traitement des blessures de guerre et des hypoxies cérébrales causées par exemple par le souffle d’une explosion. Il y a fort à parier que ces hémoglobines de vers marins soient déjà utilisées en cyclisme, et pas seulement celle du laboratoire français. 

La recherche de nouveaux agents stimulants de l’érythropoïèse reste d’actualité

Le marché mondial du traitement de l’anémie est tellement juteux que les grandes firmes pharmaceutiques rivalisent d’imagination pour créer de nouvelles substances agissant sur l’érythropoïèse.

L’utilisation de l’EPO reste toutefois d’actualité : il existe encore vraisemblablement une bonne centaine de copies d’époétines non approuvées, ou encore de biosimilaires (qui différent de quelques sucres sur la chaîne glycosylée) et pour lesquelles on ne connaît pas la référence amenant à un test positif au contrôle. Leur emploi, on l’a dit, présente un risque de contrôle positif et n’est plus aussi généralisé qu’il y a vingt ou trente ans.

Si l’EPO agit au début de l’érythropoïèse (maturation des réticulocytes), une nouvelle classe d’agents stimulants de l’érythropoïèse agit à la fin en diminuant la prolifération des précurseurs érythroïdes : ce sont les protéines de fusion du récepteur à l’activine II. Elles sont représentées par le luspatercept (Reblozyl) administré en sous-cutané. Il est commercialisé dans le traitement de l’anémie lors de la bêta-thalassémie (malformation génétique de l’hémoglobine).

Des essais de phase II avant commercialisation sont menés actuellement avec le sotatercept (ACE-011) dans le traitement de l’hypertension artérielle pulmonaire. Ces produits sont encore indétectables. Le risque de thrombose, comme avec l’EPO, existe toutefois.

Comment ici ne pas repenser à certaines situations malheureuses étant survenues au début de l’utilisation de l’EPO? Cyclistes devant pédaler la nuit afin de limiter les risques d’accidents cardiaques, vague de décès parmi les cyclistes néerlandais en 1989 et 1990… À la vue de ces situations, la récente et mystérieuse vague de décès parmi les jeunes cyclistes belges et qui s’est arrêtée brutalement en 2018, fait peur.

(Note supplémentaire: Entre 2016 et 2018, sept jeunes coureurs belges sont décédés de problèmes cardiaques, sans pour autant que ces décès aient été attribués directement à une pratique interdite dans le sport. On sait seulement que ce nombre élevé de morts subites ne concorde pas avec les statistiques de morts subites d’origine cardiaque chez les jeunes sportifs (1 à 3 pour 30.000 tous sports confondus.)

Les inhibiteurs de l’HIF-1α-prolylhydroxylase (annoncés en 2006) ne font plus parler d’eux après le cas positif du marcheur français Bertrand Moulinet en 2015 (FG-4592 ou roxadustat). Ces produits, facilement détectables, inhibent la dégradation d’un facteur sécrété en cas d’hypoxie. L’organisme, berné, se met à fabriquer de l’EPO, le tout dans un parfait équilibre physiologique. Y en a-t-il de nouveaux ?

Les mimétiques de l’EPO (hématide d’Affymax, SEStide ou Hemomer d’Aplagen) avaient laissé entrevoir de gros espoirs quant à leur facilité d’utilisation ; sous forme de comprimés, conservés à température ambiante, le SEStide était déjà présent lors des mondiaux d’athlétisme de Berlin en 2019. L’hématide sera retiré de la vente en 2013 suite à des réactions d’hypersensibilité mortelle. 

On peut aussi agir sur l’affinité de l’oxygène pour l’hémoglobine. Dans l’organisme, le 2,3-DPG (diphosphoglycérate) diminue cette affinité. L’oxygène se trouve ainsi relargué plus facilement vers les muscles. L’ITPP (Myo Inositol Trispyrophosphate), en délestant plus facilement que le 2,3-DPG l’oxygène de l’hémoglobine, favorise la sécrétion de l’EPO endogène dans des limites physiologiques. Un cas positif est survenu en hippisme en 2019 !

Des substances à surveiller dans l’avenir

Les plus fortunés et les plus malins ont possiblement accès à des substances en cours d’expérimentation.

GlaxoSmithKline (GSK) étudie la voie enzymatique des DYRK-3. Cette kinase se trouve dans les précurseurs des globules rouges et inhibe l’érythropoïèse. Les inhibiteurs du DYRK-3 (GSK 626616 en phase II) agiront donc en favorisant la production des globules rouges.

Le PBI 1402 (Pro Metic Biosciences Inc) en phase II imite le mode d’action de l’EPO au niveau des cellules souches sanguines, mais possède un mécanisme différent car il ne se lie pas au même récepteur membranaire. Ces deux molécules, actives par voie orale (en comprimé) sont encore en stade d’expérimentation.

En conclusion

La lutte antidopage, et l’AMA, qui doivent mettre au point les tests de détection et les valider, sont probablement actuellement dépassés par la multiplicité des approches structurelles des nouvelles substances agissant sur l’oxygénation musculaire.

La mise au point des tests de détection basée sur des méthodes classiques marque le pas, certains nouveaux produits nécessitant une méthode biotechnologique difficile à mettre au point et très onéreuse.

La lutte contre le dopage n’a jamais été facile.

Et on revient à deux choses, la volonté d’agir, et surtout l’argent, qui demeure plus que jamais le nerf de la guerre. Les budgets annuels des organismes de lutte antidopage sont dérisoires si on compare avec ceux investis ailleurs. Une seule journée en Afghanistan pour les États-Unis coutait deux fois le budget annuel de l’AMA (et ce pendant 20 ans) ! 

Le dopage a (hélas!) certainement encore de beaux jours devant lui.

Le nouveau dopage sanguin

D’étranges colis sur le dernier Tour. L’équipe Bahrain-Victorious perquisitionnée. Des watts en hausse, de retour aux niveaux de l’ère Armstrong.

Des vers marins. De l’hémoglobine. Du plasma, mieux que les globules rouges.

Forcément, je me pose des questions.

J’ai voulu faire le point sur le dopage sanguin, 30 ans après l’arrivée de l’EPO au coeur du peloton pro.

Qui de mieux pour cela que Marc Kluszczynski, un collaborateur fidèle de ce site depuis des années?

Marc a gentiment accepté de m’aider à y voir plus clair sur les nouvelles techniques probables de dopage sanguin. Je lui ai demandé de ne pas m’épargner sur les détails techniques.

Je le remercie chaudement pour sa contribution à ces pages.

L’idée n’est pas d’être négatif face au cyclisme professionnel. Beaucoup de coureurs pro font certainement leur métier dans le respect des règles. Non, ils ne sont pas tous dopés. Et ceux qui le sont, le sont très probablement à échelle variable. Comme dans tout, il y a le comprimé vite avalé en vue de l’arrivée, et la cadillac du dopage sanguin qui implique une lourde logistique sur des mois.

Je veux juste être un observateur éclairé du cyclisme. Être au fait des avancées scientifiques médicales qui peuvent sauver des vies, la création par exemple d’un sang artificiel étant à placer dans ce registre. Mais il y a des effets pervers. L’EPO par exemple a été notamment créée pour venir en aide aux patients cancéreux après les traitements de chimio: noble cause! mais le produit a été détourné pour être utilisé comme dopant.

Premier article d’un dossier en deux temps. Demain, la suite, avec le Graal du dopage sanguin.

Où en est le dopage sanguin? par Marc Kluszczynski

Trente ans après la première utilisation présumée de l’EPO aux mondiaux de ski nordique de Lahti (Finlande) en 1989, le dopage sanguin est-il entré dans une nouvelle ère après la découverte d’hémoglobine lyophilisée (en poudre) dans les mallettes du Dr Mark Schmidt aux mondiaux de Seefeld (Autriche), encore en ski nordique, en février 2019 ? L’affaire Aderlass était lancée. 

Il faut dire que depuis dix ans, les progrès dans la détection de l’EPO sont bien réels et il est de plus en plus risqué de l’utiliser. 

Détectable dès 2000, l’EPO est, depuis, de plus en plus employée en microdoses, décelables que quelques heures. Le passeport sanguin, adopté par la plupart des fédérations internationales (et par l’UCI dès 2008) rendra le dopage sanguin un peu plus difficile, mais encore possible pour des sportifs n’hésitant pas à s’adjoindre le savoir-faire de spécialistes, tel le plus connu d’entre eux, le Dr Michele Ferrari.

Au sein de l’arsenal « classique », il reste aussi actuellement les transfusions sanguines autologues, toujours indétectables depuis leur première utilisation dès 1970 par les coureurs à pied suédois, finlandais et certains cyclistes professionnels des nations dominantes. Ces transfusions ne seront interdites qu’après les JO de Los Angeles 1984, où les cyclistes américains les avaient utilisées. 

Mais la clé aujourd’hui, c’est de pouvoir contourner le passeport sanguin qui se focalise sur les variations des constantes des globules rouges. Les globules rouges contiennent à l’intérieur de leur membrane l’hémoglobine, formée de quatre sous-structures qui, chacune, fixe une molécule d’oxygène grâce à son atome de fer. Il existe aussi une petite quantité d’oxygène dissoute dans le plasma, donc à l’extérieur du globule rouge.

L’idée n’est pas nouvelle : l’industrie pharmaceutique cherche depuis les années 2000 à fabriquer un sang artificiel pour pallier la pénurie des donneurs et aux risques de la transfusion (transmissions de virus). 

Ce fait prend encore davantage d’importance en période de pandémie virale comme celle de la COVID-19.  

Dans l’affaire Aderlass, le procureur en charge de l’affaire, Kai Graber, a parlé d’hémoglobines humaines fabriquées par le laboratoire Merck et sa filiale Sigma-Aldrich : les produits H 7379 et H 0267. 

Il pourrait s’agir de sub-unités d’hémoglobine humaine (qui comporte 4 chaînes protéiques appelées globines). L’hémoglobine humaine réticulée (ou Diaspirin cross linked Hb de Baxter) avait d’ailleurs déjà été utilisée dès 1996 dans les sports d’endurance à la dose de 50 mg/kg. Du point de vue des tricheurs, sa demi-vie de 2 heures était intéressante, malgré des effets indésirables à base de troubles du rythme cardiaque et d’hypertension artérielle. 

Les tricheurs avaient donc déjà compris l’intérêt d’une hémoglobine dissoute dans le plasma : déjouer le passeport biologique puisque cette hémoglobine dans le plasma ne peut pas se fixer à l’intérieur du globule rouge qui en contient déjà.

Ces hémoglobines se présentent sous forme de poudre lyophilisée. Leur conservation est de plusieurs années à température ambiante alors que celle d’une poche de sang est de 7 à 8 semaines à 4°C, sachant que 1% des globules rouges sont détruits chaque jour par hémolyse. 

Ces hémoglobines en poudre se retransforment en hémoglobine fonctionnelle après injection. Les produits H 7379 et H 0267 existent depuis plusieurs années en tant que réactifs chimiques vendus par le laboratoire et ne sont pas très chers. On n’est pas étonné de leur utilisation (probable) dans le sport alors qu’aucune étude sur leur toxicité n’existe !

Il y a vraisemblablement d’autres hémoglobines humaines semi-synthétiques ou modifiées. Le fait de polymériser la molécule évite la formation de dimères néphrotoxiques. Polyheme, une autre hémoglobine humaine polymérisée, avait raté de peu sa commercialisation aux USA en 2009.

Le gros problème de la mise au point des hémoglobines humaines consiste à leur faire diminuer l’affinité pour l’oxygène, pour qu’elles le relarguent dans les tissus. Et à maîtriser l’effet vasoconstricteur qui peut provoquer des infarctus du myocarde. En les polymérisant, cet effet diminue un peu, mais le temps de demi-vie augmente, ce qui facilite leur détection dans les contrôles antidopage. 

Une nouvelle hémoglobine recombinante humaine est-elle actuellement utilisée ? Pas impossible.

Des hémoglobines animales

Il existe aussi des hémoglobines animales (bovines). 

Sigma-Aldrich propose la H 2500, toujours en tant que réactif de biologie. Lors du Tour de France 2003, le danois Michael Rasmussen et l’espagnol Jesus Manzano avaient utilisé l’Oxyglobin (HBOC-301 pour hemoglobin based oxygen carrier) mais avec quels risques pour la santé ! Avec ces produits, on a constaté une augmentation de la pression artérielle pulmonaire et une diminution du volume d’éjection systolique. 

Avec l’Hemopure (HBOC-201), une hémoglobine bovine polymérisée encore vendue en Afrique du Sud, l’effet vasoconstricteur est moindre, mais il y a toujours cet effet d’augmentation des résistances à l’écoulement (synonyme de risque d’infarctus du myocarde ou de thrombose).

Si l’Oxyglobin a disparu dès 2004, les hémoglobines animales ont sûrement progressé depuis en terme d’efficacité et de bonne tolérance.

Lors du Tour de France 2021, des sources crédibles rapportent que des cyclistes de l’équipe Bahraïn Victorious devaient pédaler en pleine nuit sur home-trainer (ce fait explique la descente de police dans la nuit du 14 juillet) comme au temps de l’EPO surdosée. On peut donc soupçonner l’usage de ce type de substances, cette habitude qui ne trompe pas étant nécessaire pour vaincre les résistances à l’écoulement. 

Un autre dopage : les perfluorocarbones

Ces substances formées d’atomes de carbone et de fluor sont toujours en développement et leur usage est toujours envisageable. 

Certaines sont encore utilisées en médecine d’urgence dans les états de choc hypovolémiques, en cas de pénurie de don de sang (le Perftoran russe depuis 2005). Cette recherche intéresse bien sûr l’armée, tout comme celle sur les substituts HBOC. 

Il est connu que Mauro Gianetti, directeur d’UAE Team Emirates, les avait utilisés sur le Tour de Romandie 1998. Atteint d’insuffisance rénale et hépatique, le suisse avait été envoyé aux urgences de l’hôpital de Lausanne. 

Les PFC peuvent véhiculer l’oxygène dans les tissus et disparaissent en 48 heures de l’organisme. L’avantage dans la lutte contre le dopage, c’est qu’elles sont facilement détectables. 

Oxygent a vu son développement stoppé en 2002 pour trop grand nombre d’infarctus en essais de phase III. Le dernier PFC, l’Oxycyte, a vu son développement arrêté en 2014. Il pouvait transporter 5 fois plus d’oxygène que l’hémoglobine humaine, tout en étant constitué de particules 50 fois plus petites qu’un globule rouge. Le développement de ces PFC ne s’est vraisemblablement pas arrêté, bien que leur faible efficacité soit connue (à pression atmosphérique). 

Le milieu sportif reste très probablement à l’affût, mais il existe une meilleure piste pour expliquer la domination de trois équipes sur le dernier Tour de France, le retour de sprinteurs aux premières loges dans les étapes de montagne, et les longs raids solitaires de coureurs dans certaines étapes de montagnes de grands Tours. Ca sera l’objet de l’article de demain, le Graal du dopage sanguin.

Christiane Ayotte – Podium

Excellent reportage sur Christiane Ayotte, la grande dame de la lutte contre le dopage, directrice depuis 1991 du laboratoire de contrôle du dopage sportif à l’INRS-Institut Armand Frappier à Laval, Québec.

Le sport lui doit beaucoup depuis plus de 30 ans.

Une inspiration.

Code Yellow (documentaire Jumbo-Visma sur le Tour 2020)

Il ne faut pas manquer ce documentaire réalisé par la chaine de télévision néerlandaise NOS sur l’équipe Jumbo-Visma lors du dernier Tour de France.

1h15min à partager la vie d’une équipe de tout premier plan et qui jouait la gagne avec Roglic et Dumoulin. Plusieurs séquences sont intéressantes, inédites jusqu’ici: la déception de Dumoulin, les ajustements que l’on fait sur la combinaison chrono du maillot jaune et, bien sûr, toute la déception de l’équipe entière après le dernier chrono, objet des 10 dernières minutes du vidéo.

Et déjà, la controverse! On y entend Roglic et Dumoulin se questionner sur les performances plus que stratosphériques du jeune Tadej Pogacar lors de l’avant-dernière étape, le chrono de la Planche des Belles Filles.

Deuxième du jour, Tom Dumoulin ne comprend tout simplement pas comment Pogacar a pu lui prendre 1min21sec.

Je ne vois aucune solution. Comment diable aurais-je pu faire pour aller une minute et demie plus vite?

Tom Dumoulin

Je ne peux pas y croire. Deux minutes. C’est une énorme différence. Sur 36 kilomètres en plus ! Ils (les observateurs) doivent calculer le type de watts nécessaire pour cela.

Primoz Roglic

Les watts nécessaires pour cela Primoz, on les connait. Grâce à Frédéric Portoleau et Antoine Vayer, qui ont été très clairs sur ce qu’on a vu sur ce dernier chrono du Tour.

Ca se résume très simplement: mutant. 475 watts de moyenne sur les 5,9km de la montée pour Pogacar (50 watts de plus que Pinot!), pour 6,85 watts par kilo. À 21 ans! Rappelons que la montée arrivait après 30 bornes de chrono et 20 jours de course, pour un total de 36 bornes pour l’étape ce jour-là. Pogacar égale le record de la montée établi par Aru quelques années avant lui, à la différence qu’Aru était resté bien au chaud dans le peloton avant de lâcher les chevaux dans l’ascension finale. Pogacar, lui, était seul en mode chrono (donc à bloc) depuis 30 bornes!

Ce qui m’inquiète le plus, ce n’est pas seulement Pogacar: c’est toute cette jeune génération remplie de prodiges hallucinants et qui débarquent bille en tête, sans complexe, sûrs d’eux et très précoces. Il semble qu’on va ré-écrire, dans les prochaines années, les livres d’histoire du cyclisme. La question sera de savoir à quoi tout cela carbure-t-il… Pour Vayer, ce qu’on a vu en 2020, ce n’est pas moins que le retour de l’ère (triste) d’Armstrong.

Et rappelons que Roglic et Dumoulin ne sont pas non plus au-dessus de tout soupçon, notamment du côté de l’Affaire Aderlass…

Attention aux suppléments

90%.

Neuf athlètes amateurs sur dix consommeraient des suppléments alimentaires.

Poudres de protéines, shakes de récupération, vitamines, BCAA, remèdes homéopathiques, probiotiques, brûleurs de gras, autres produits dont l’industrie vante les propriétés dynamisantes pour l’exercice physique: force, tolérance aux lactates, VO2 max, etc.

Ces produits ne sont pas sans danger.

On apprenait la semaine dernière qu’un coureur maitre de 47 ans en Irlande a été contrôlé positif à de nombreuses substances dopantes, et condamné à une suspension de quatre ans.

On a retrouvé dans ses échantillons les substances suivantes: « epioxandrolone, oxandrolone, 18-noroxandrolone, boldenone et boldenone metabolite(s) ».

God knows what this is all about!

Raison évoquée du dit-cycliste: consommation de plusieurs suppléments alimentaires, certains ayant été achetés aux États-Unis via Internet.

D’autres cas de contaminations croisées sont bien connus.

Ces cas malheureux nous rappelle que nous sommes responsables des produits qu’on peut retrouver dans notre corps.

En qu’en matière de suppléments alimentaires, l’extrême prudence est de mise si vous faites de la compétition.

La recommandation des autorités en la matière est simple: ne consommez rien.

De toute façon, pour la vaste majorité des produits dont on nous vante les mérites à grands coups de « testimonials » sur Internet, les effets ne sont pas prouvés scientifiquement. Toutes mes lectures sur le sujet pointent dans une même direction: si vous avez une alimentation équilibrée, pas besoin de suppléments. Ils présentent parfois des effets indésirables, parfois graves.

L’étude la plus sérieuse que j’ai trouvé est cette thèse de doctorat déposée en 2017 à l’Université de Lorraine.

Bref, ces suppléments, c’est le plus souvent du flan. Autrement dit… du vent.

Si vous tenez quand même à utiliser ces suppléments alimentaires, sachez qu’il existe quelques ressources vous permettant de limiter les risques de contamination avec des produits strictement interdits par le code mondial antidopage.

Je pense au label « Certified for Sport » de la NSF aux États-Unis. Les produits portant cette étiquette présentent des risques très réduits de contamination, sans le garantir de façon absolue. Bref, vous réduisez quand même le risque considérablement de vous faire piquer au contrôle.

Le Centre canadien d’éthique sur le sport présente aussi une page intéressante sur son site Internet à propos des suppléments.

En France, la Société française de nutrition du sport (SFNS) propose également une page listant les produits énergétiques ayant reçu la norme « AFNOR » qui garantit l’absence de produits interdits. Parmi ces produits, tous ceux que j’utilise depuis la fin des années 1990: Overstim’s. Serious stuff.

Je ne prends aucun risque dans ce domaine. J’y reviendrai.

Autre ressource très intéressante, le site de l’IRBMS, soit l’Institut de recherche du bien-être, de la médecine et du sport-santé. Vraiment un site avec de nombreuses informations crédibles, dans une grande variété de sujets. On y retrouve plusieurs pages dédiées aux suppléments, notamment celle-ci à propos de l’intérêt des BCAA (rapport final payant). Conclusion de l’étude:

Les recommandations de consommation proposées par les fabricants de supplément alimentaire BCAA sont très souvent excessives et ne respectent que rarement les apports nutritionnels conseillés, même pour les sportifs à haut niveau de performance. Ainsi, des produits « hors norme nutritionnelle » sont en vente libre!

IRBMS, dossier spécial BCAA, 2019

Ou cette page plus générale sur les compléments alimentaires. Selon l’IRBMS, 15% de ces compléments contiendraient des substances dopantes ou dangereuses pour la santé présente et future. De quoi faire réfléchir un peu!

Enfin, vous avez toujours le site GlobalDro pour vérifier si un médicament ou une substance est autorisée ou non selon le code mondial anti-dopage, mais ce site ne contient pas d’information reliée aux suppléments alimentaires.

Une alimentation équilibrée

Pour des conseils dans ce domaine lorsque vous êtes sportif intense, j’aime beaucoup le site diététiquesportive.com que je consulte depuis un bon moment déjà.

J’aime bien leurs fiches consacrées à certains aliments plus précis: spiruline, rhodiola, etc. On voudrait juste que le site soit plus fréquemment alimenté! (sans jeu de mots…)

Et la page des compléments alimentaires est particulièrement intéressante dans le contexte de cet article.

Le cannabis

Légal au Canada, il demeure sur la liste des produits « interdits » de l’Agence mondiale anti-dopage (AMA). Il convient donc de faire attention avec l’usage du cannabis, qui est considéré comme une substance « à seuil », c’est à dire qu’il ne faut pas dépasser une certaine concentration de cannabinoïdes, faute d’être positif.

Fait intéressant toutefois, le CBD (cannabidiol) ne fait plus partie des substances interdites par l’AMA. Soyez toutefois prudent dans sa consommation, les produits de CBD n’étant généralement pas exempts de THC, ce dernier étant toujours interdit au-delà d’un certain seuil.

Les produits pour les allergies saisonnières

C’est un eldorado du dopage chez les coureurs cyclistes maitres selon moi, l’usage de pompes type « Ventolin » étant très répandu. Rien de tel qu’un peloton cycliste pour y trouver une grosse concentration d’asthmatiques sur papier!

Il existe pourtant des solutions.

Souffrant d’allergies saisonnières en croissance chaque saison depuis dix ans (l’année 2020 ne fut pas de tout repos à ce sujet), j’en sais quelque chose.

Mon médecin et moi avons trouvé une solution propre: le Montelukast. Famille d’un nom à coucher dehors: un antagoniste des récepteurs des leucotriènes. Commercialisé par Merck (c’était prédestiné!) sous le nom de Singulair. Officiellement autorisé par la législation anti-dopage, sans autorisation à usage thérapeutique (AUT).

Je n’utilise donc pas de pompes, rien. Juste ce médoc autorisé, pour lequel je suis tranquille à 100%.

Mais je vous ai menti: pas à l’eau claire. En fait le reste, c’est du riesling…

Tour: les questions qui fâchent

Drôle d’époque.

L’ère post-Armstrong est bien spéciale: le public n’est plus dupe. Trop floué par l’Américain et son système US Postal qui carburait on sait aujourd’hui comment.

Son « I’m sorry you can’t dream big » lancé sur les Champs Élysées a laissé des traces.

Et depuis 24 mois, deux cyclismes à la fête, et notamment sur ce Tour de France: le cyclisme colombien et le cyclisme slovène.

À la lumière des faits récents, on peut raisonnablement se poser des questions sur ces deux cyclismes oui, je suis d’accord avec plusieurs lecteurs de ce site qui ont laissé des commentaires récents à ce sujet.

La génération colombienne n’est plus à présenter, ce pays ayant multiplié les champions cyclistes depuis quelques années. Comme par hasard, le cyclisme colombien et sud-américain a fait l’objet de nombreux scandales de dopage depuis quelques années. On s’entraine certes sur des hauts plateaux du côté de Bogota et Medellin, mais y’a probablement pas que.

Côté Slovénie, rappelons qu’outre Primoz Roglic et Tadej Pogacar, ce cyclisme présente aussi des coureurs comme Simon Spilak, Grega Bole et surtout Matej Mohoric, lui aussi ayant connu certains succès récents. Et avant eux, on pense évidemment à Janez Brajkovic, suspendu pour dopage depuis. Pas mal de très bons coureurs pour un pays d’à peine deux millions d’habitants!

Et là encore, méchant timing: plusieurs affaires de dopage, et notamment des slovènes impliqués dans la tristement célèbre et récente Affaire Anderlass. Au total, 8 des 19 coureurs slovènes en World Tour depuis 10 ans ont été touchés par une histoire de dopage, soit 42%.

Puis il y a des acteurs du milieu cycliste un peu louches comme Borut Bozic, encore l’an dernier directeur sportif chez Bahrain-Merida après une carrière de coureur pro.

On pense aussi à ce Milan Erzen, slovène lui aussi et patron de la Bahrain-Merida, impliqué lui aussi dans Anderlass. L’UCI avait à l’oeil les activités de cet individu depuis 2015 apparemment, pour plusieurs affaires. Erzen est souvent présenté comme le Dave Brailsford du cyclisme slovène, un homme qui a des ramifications partout. Low profile, on en sait peu sur lui, et notamment sur ses activités actuelles. Il serait aussi très impliqué dans le milieu des courses de chevaux et de chameaux, avec des relations étroites avec les pays du Golfe.

On ne peut pas aller plus loin, on ne peut pas établir de liens, mais le timing est de nouveau tristement suspect.

On se rabat sur le fait qu’un Egan Bernal ou un Tadej Pogacar n’ont jamais échoué de tests anti-dopage jusqu’ici.

Dans toute sa carrière, Lance Armstrong non plus.

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