Tous les jours, la passion du cyclisme

 

Mois : octobre 2013 Page 1 of 2

Giro 2012: le doute Hesjedal…

Ce que plusieurs observateurs éclairés du cyclisme soupçonnaient mais qu’ils ne pouvaient pas dire publiquement est désormais une réalité: le Canadien Ryder Hesjedal a bel et bien fait usage de produits dopants plus tôt dans sa carrière.

Ses aveux, rendus publics hier en raison du contenu du livre publié par Michael Rasmussen qu’il côtoyait au début de sa carrière pro, auraient été faits à l’automne 2012 dans le contexte du Rapport USADA ayant mené à l’Affaire Armstrong.

Encore une fois, plusieurs tomberont des nues: Hesjedal? Un si bon gars! Si gentil!

Pour moi, la question qui tue est ailleurs: s’il l’a déjà fait, qu’est-ce qui nous prouve qu’il ne le fait pas encore? Rappelons que Hesjedal a gagné le difficile Giro 2012 devant le grimpeur de poche espagnol (espagnol…) et actuel numéro un mondial, Joaquim Rodriguez, notamment en le contenant sur les pentes du Stelvio l’avant dernier jour de l’épreuve.

Bien sûr, certains évoqueront les contrôles anti-dopage actuels: après tout, Hesjedal n’en a échoué aucun récemment, et aucun sur le Giro 2012. Du moins jusqu’ici.

Je vous rappelle que l’Affaire Armstrong et tous les témoignages recueillis dans ce contexte ont montré à quel point l’efficacité des contrôles anti-dopage demeure faible… Les plus gros scandales sont survenus grâce à des enquêtes journalistiques et policières, pas en raison des contrôles.

D’autres diront que Hesjedal évolue au sein d’une équipe au dessus de tout soupçon, ayant une politique anti-dopage claire et forte et étant dirigée par Jonathan Vaughters.

Une politique anti-dopage claire? Du papier tout ca…

Jonathan Vaughters? Quoi de mieux qu’un ex-dopé repentant pour donner une virginité d’apparat à une équipe cycliste professionnelle? « C’est parce que j’ai fait des erreurs dans ma vie passée que je veux gérer aujourd’hui une équipe propre, pour que les jeunes n’évoluent pas dans le climat pourri de mon époque et aient un choix que je n’ai pas eu« . Tout le monde applaudit, mais qui sait vraiment ce qui se passe derrière les portes closes?

En gros, on revient toujours au même point: il faut les croire sur parole. Les croire sur parole notamment quant ils parlent tous d’une seule voix pour nous affirmer, comme c’est encore le cas d’Hesjedal, que ces dérives sont choses du passé et que fort heureusement, le cyclisme a beaucoup changé depuis.

Malheureusement, ces 20 dernières années, le milieu cycliste professionnel nous a prouvé à de trop nombreuses occasions que leur parole ne vaut en fait pas grand chose… et les calculs de puissance sont là pour nous montrer que les grands tours de 2013 se sont encore gagnés à des puissances mutantes…

Quoi qu’il en soit, il sera maintenant intéressant de voir la réaction de Jonathan Vaughters. Le maintien de la crédibilité de l’équipe Garmin exigerait selon moi sa démission, de même que le licenciement de Hesjedal. Wait and see.

Chose certaine, vivement la commission Vérité et Réconciliation!

Les jeunes

Si cette nouvelle histoire ne me surprend guère, je me désole toutefois de voir tout le cyclisme canadien éclaboussé au passage. Nous avions déjà donné, notamment avec l’Affaire Jeanson…

Je me désole encore plus quant au message que cette histoire envoie aux jeunes coureurs canadiens qui aspirent à passer pro, comme des Pierrick Naud par exemple. Le cyclisme canadien apparaît être sur une bonne lançée depuis quelques années et il est normal que les plus jeunes s’identifient à leurs compatriotes évoluant à l’étage du dessus.

L’histoire d’Hesjedal leur envoie un bien mauvais message puisqu’il vient ternir sa victoire au Giro 2012, en plus d’apposer sur le coureur canadien une étiquette de (d’ex) dopé.

Fort heureusement, nous avons d’autres exemples de coureurs canadiens s’étant illustrés – différemment et plus modestement – au plus haut niveau, en particulier David Veilleux et sa victoire lors de la première étape du Dauphiné cette année, suivie de 3 jours en jaune. C’est ce qu’il ne faut pas perdre de vue en ces jours plus sombres.

Les jeunes! Je suis plus que jamais convaincu de la chose suivante: être pro sans se doper est possible (et c’est la voie à suivre – ils sont quelques uns à le prouver), mais le top-10 des grands tours demeure un point d’exception pour un coureur propre.

L’UCI bouge!

Les bonnes nouvelles s’accumulent du côté de l’UCI, ce qui n’est pas sans me réjouir et me donner le moral pour voir enfin le cyclisme retrouver une partie de sa crédibilité et repartir sur des bases plus saines.

Outre les mesures dont je parlais récemment, on a appris ces jours derniers que l’UCI – son nouveau président surtout – a commandé un audit externe concernant les opérations anti-dopage menées par l’organisme. En gros, Cookson a mandaté une équipe indépendante pour qu’elle se penche sur les moyens mis de l’avant par l’UCI pour lutter contre le dopage: ces moyens sont-ils suffisants? Sont-ils efficaces?

Ultimement, cet audit proposera une « feuille de route » visant à instaurer des contrôles anti-dopage indépendants pour la saison 2014.

Enfin!

On apprend également que l’UCI est toujours en pourparlers pour finaliser la mise sur pied de la commission indépendante au sein de laquelle le témoignage de Lance Armstrong serait bien évidemment très attendu. Des témoignages de Tyler Hamilton et Floyd Landis pourraient également y être entendus, ces deux derniers ayant à de multiples reprises affirmés que Hein Verbruggen et Pat McQuaid avaient été complices du système de dopage Armstrong durant les années 2000. On a déjà hâte d’entendre tout ça et d’enfin avoir la réponse à une question importante: pourquoi, durant cette période, de nombreux coureurs – dont beaucoup étaient passés chez US Postal puis Discovery comme Roberto Heras – se sont fait prendre, mais Armstrong jamais?

Cookson a également rapidement mis sur pied une Commission Femmes chargée de formuler d’ici peu des recommandations visant à renforcer le cyclisme féminin sur route et en VTT.

Y’a pas à dire, tout cela va vraiment dans le bon sens!

Le but de toutes ces démarches? Rétablir la confiance dans l’UCI et dans le cyclisme, et veiller à développer ce sport en renforçant d’abord ses activités clef, dont le cyclisme féminin.

Personnellement, je tire un grand coup de chapeau à M. Cookson, qui n’a pas perdu de temps puisque son élection remonte à un mois à peine.

Dernier point, non le moindre et qui en dit beaucoup sur l’homme, Cookson a revu à la baisse son propre salaire, le faisant passer d’environ 525 000 $CAN (!!!) à 395 000$. Ce montant demeure certes élevé, mais je demeure estomaqué du salaire de Pat McQuaid, plus d’un demi-million de dollars par an, alors que la plupart des organisateurs de courses cyclistes voire d’équipes peinent à boucler leur budget. Le premier ministre du Canada ne gagne pas ça!

J’ose à peine imaginer le salaire du président du CIO, puis ses bonus et autres frais de service. Probablement somptuaire, et le mot est faible.

Quoi qu’il en soit, on mesure, à la lumière de toutes ces récentes initiatives, tout ce qu’on aurait manqué si McQuaid avait été ré-élu! J’en frissonne encore d’effroi!

Maudit informatique!

Les problèmes informatiques ne sont toujours pas réglés, mais je progresse. Je ne parviens toujours pas à accéder à mes courriels personnels, je m’excuse donc des délais si certains d’entre vous m’auraient récemment écrit. Retour à la normale d’ici quelques jours si tout va bien!

Le Tour de l’actualité

1 – Vous êtes nombreux à avoir critiqué mon analyse du parcours du Tour 2014 et je vous remercie de vos commentaires qui ont le mérite de me faire reconsidérer ma position, notamment à l’égard des étapes courtes.

Des étapes courtes, moyen de lutter contre le dopage? Je n’en suis vraiment pas sûr, du moins pour ceux jouant le général. Mais il est vrai qu’en évitant des étapes de 250 bornes, les organismes fatiguent moins.

Je continue cependant de m’interroger sur des étapes de 125 ou 145 bornes chez les professionnels. Les étapes de la Haute Route étaient souvent de cette longueur!

En fait, l’enjeu n’est peut-être pas la longueur de l’étape, mais bien les difficultés qu’on y propose. Rappelons-nous que l’étape du Galibier-Alpe d’Huez en 2011 avait été le théâtre d’une sacré bataille, Contador et Schleck mettant le feu aux poudres dès le pied du Télégraphe, Voeckler faisant une grosse connerie tactique le maillot jaune sur le dos, tout comme les Schleck dans l’Alpe d’Huez. L’étape avait conduit à un beau vainqueur, Pierre Rolland.

Peu importe donc la longueur, c’est dans la construction de l’étape que réside ses chances de donner lieu à une belle bataille. Dans ce contexte, le Tour 2014 comporte probablement quelques belles étapes, notamment dans les Vosges, avec des parcours casse-pattes.

Pour rejoindre tout le monde, disons que le Tour 2014 ne propose pas les difficultés « classiques », c’est à dire soit en montagne, soit sur les chronos. On joue plutôt la carte des autres difficultés moins habituelles sur un grand tour, c’est à dire pavés ainsi qu’étapes accidentées et piégeuses. On peut penser que sur un tel parcours, le travail d’équipe sera un très gros atout…

2 – UCI. Les nouvelles sont excellentes du côté de la Fédé internationale, Brian Cookson s’employant déjà à changer les choses.

D’une part, on apprenait que sitôt son élection, il avait commandé la saisie du parc informatique de l’UCI, ceci afin de prévenir la destruction éventuelle de fichiers compromettant pour l’organisme. L’examen des disques durs pourrait conduire à des preuves non négligeables si jamais le personnel précédent de l’UCI faisait l’objet de certains soupçons, notamment de corruption.

D’autre part, on apprenait qu’un renouvellement du personnel de l’UCI est en cours. Le conseiller juridique Philippe Verbiest et le directeur général Christophe Hubschmid, présents depuis plusieurs années, sont partis et de nouveaux vice-présidents ont été nommés, notamment le Français David Lappartient.

Enfin, Cookson affirme que des annonces pourraient être très prochainement faites à propos de la commission Vérité et Réconciliation, possiblement même la semaine prochaine. La création d’une telle commission aurait fait l’objet de pourparlers avec l’AMA qui serait donc partie prenante, voire seule responsable. Wait and see, mais tout cela va résolument dans le bon sens et c’est porteur d’un grand espoir pour le cyclisme.

3 – L’Équipe nous offre un excellent petit résumé visuel de la saison 2013 en WorldTour.

Les trois sprinters Sagan, Cavendish et Kittel sont les coureurs ayant engrangé le plus de victoires avec 21, 18 et 16 respectivement. Froome se classe 4e, avec 13 victoires. Le Top-10 des coureurs ayant le plus gagné cette saison consacre pas moins de 6 sprinters, dont les Français Bouhanni et Demare.

On y constate également que trois équipes se sont distinguées en accumulant plus de points World Tour que les autres, soit Movistar, Sky et Katusha.

On y montre surtout que L’Espagne est de loin le pays ayant marqué le plus de points World Tour cette saison, notamment grâce à Rodriguez et Valverde qui terminent 1er et 3e du classement sur l’ensemble de la saison. L’ironie du sort est que le cyclisme professionnel espagnol vit une crise importante ces jours-ci avec la disparition d’Euskaltel, une situation ayant innondé le marché de nombreux très bons coureurs pro. Par exemple, on apprennait récemment qu’un Samuel Sanchez était toujours sans contrat pour 2014…

À noter également que la Colombie figure au 3e rang du classement des pays derrière l’Espagne et l’Italie, un reflet indéniable du renouveau du cyclisme colombien.

La France est 7e, une situation meilleure que l’an dernier, et figure tout juste devant l’Australie et les États-Unis.

4 – Très intéressant reportage sur l’usine des capteurs de puissance SRM à Colorado Springs, aux États-Unis. Une occasion unique et rare de mieux comprendre comment sont fabriqués ces capteurs et pourquoi ils demeurent, années après années, si chers à l’achat.

5 – 13 ascensions du Ventoux en 48h pour souligner ses 48 ans, François-Joseph Walther l’a fait. Soit une « petite sortie » de 559 bornes dont 280 d’ascension et 20 930 mètres de dénivelé. Pour ajouter aux réjouissances, la météo aurait été capricieuse par moment. Dément! Mes respects à l’athlète, il faut reconnaitre qu’il faut une sacré dose de motivation pour réaliser ce genre d’exploit extrème.

6 – Haute Route 2014: decision time soon!

 

Tour 2014: l’analyse

Le parcours de la 101e édition du Tour de France, du 5 au 27 juillet prochain, a été dévoilé hier à Paris.

Drôle de Tour quant à moi: ni pour grimpeurs, ni pour rouleurs!

On y compte en effet qu’un seul chrono, soit l’avant dernier jour sur 54 bornes. Pas de chrono en côte, pas de chrono par équipe, pas de prologue. Donc pas vraiment susceptible d’avantager les rouleurs.

Si on y compte 5 arrivées en altitude, le Tour 2014 ne comporte que trois cols au dessus de 2000 mètres d’altitude, deux même si on fait fi du Lautaret à 2058m qui présente peu de difficulté: Izoard (2360m) et Tourmalet (2115m). Les Alpes sont escamotées, les Pyrénées ne sont pas très difficiles (les étapes y sont très courtes) et les Vosges, théâtre de deux belles étapes, offrent plutôt des parcours pour baroudeurs que pour vrais grimpeurs. Bref, rien pour aiguiser les sens des purs grimpeurs!

Un Tour donc qui est ni pour rouleurs, ni pour grimpeurs, vous dis-je.

Pour qui alors?

Difficile de répondre à cela, mais je tente le coup: probablement pour les opportunistes qui seront assez chanceux pour passer au travers de plusieurs étapes piégeuses, dont celle avec des pavés dans le Nord de la France.

C’est en effet le lot de la course cycliste: il faut avoir un peu de chance. Éviter les chutes. Éviter la maladie. Éviter la bordure assassine. Toute course cycliste est, à quelque part, une loterie considérant que tout coureur évolue au sein d’un peloton, donc dépend de la bonne conduite des autres.

Le Tour 2014 mise résolument sur cet aspect pour créer le suspense, n’offrant que peu de terrain permettant aux tous meilleurs de faire la différence « à la pédale ».

Pour me faire comprendre, une image: sur un tel parcours, Claudio Chiappucci aurait certainement gagné le Tour 1990 grâce à son échappée des premiers jours, Greg LeMond n’ayant que trop peu de difficultés par la suite pour parvenir à se refaire!

C’est donc une approche totalement différente des deux autres grands tours qui misent plutôt sur l’enchainement des difficultés pour créer une course spectaculaire et faire émerger LE meilleur coureur du lot. Le Giro 2014 comporte pas moins de… 9 arrivées en altitude!

Force est de reconnaitre que depuis quelques années, Giro et Vuelta nous donnent des spectacles autrement plus passionnants que le Tour. En ce sens,  je ne suis donc pas convaincu que l’approche Prudhomme est la meilleure…

Autre élément pour vous convaincre: le Tour 2014 comporte pas moins de 9 étapes de moins de 170 kms, qui se disputeront donc sur environ 4h de course. En comparaison, le Tour 2004 ne comportait que 5 étapes de moins de 170 kms, et en 1994 que 2 petites étapes.

La tendance à des étapes plus courtes est d’ailleurs assez claire: de 3 étapes comportant moins de 170 kms en 2010, on est passé à 8 en 2011, puis 5 en 2012, puis 6 en 2013 pour enfin arriver à 9 en 2014. En comparaison, une majorité de Tours des années 1990 comportaient très peu d’étapes courtes, voire seulement une pour les Tours 1992 et 1993!

De son côté, le Giro 2014 ne compte que… 4 étapes de moins de 170 kms si on exclut deux étapes de 167 et 169 bornes, très proches des 170 kms.

Bref, le Tour 2014 est résolument facile selon moi et j’estime qu’on peut résolument se poser la question à savoir où les favoris pourront faire la vraie différence l’an prochain?

Il la feront certes, mais cela se résumera probablement chaque fois à une brève course de côte, le focus étant plutôt d’éviter les pièges jusqu’au pied de la dernière ascension, notamment en utilisant les équipiers.

Pour les grands favoris, le premier test physique  surviendra assurément à la Planche des belles filles, une ascension cependant trop courte pour créer de gros écarts: à peine 6 kms de spectacle et basta! C’est probablement voulu des organisateurs. S’il faudra auparavant avoir survécu aux pavés du Nord, cette survie sera davantage le résultat de la chance que d’autre chose.

La deuxième et troisième occasion seront les arrivées en altitude des Alpes, soit Chamrousse et Risoul. Privées de grandes difficultés avant, ces deux étapes se résumeront encore à de brèves courses de côte sans grand intérêt pour le spectateur. Syntonisez votre télé dans les 20 dernières minutes, ca suffira largement!

Ca ira ensuite à Hautacam, pour tout dire, une montée qui sera précédée du Tourmalet, de quoi donner dans ce cas suffisamment de difficultés pour créer des écarts. L’arrivée au Pla d’Adet? Oui, en effet, peut-être, car ce sont les coureurs qui font la course, mais sur 125 bornes, il y aura beaucoup de monde présent au pied de la dernière ascension par ailleurs trop roulante et trop courte pour départager les tous premiers.

Restera le dernier chrono sur un peu plus de 50 bornes.

Bref, 5 étapes seulement pour faire la différence, et chaque fois se résumant essentiellement à une brève course de côte.

En conclusion, j’estime que le pari des organisateurs du Tour de France est risqué: en définissant un parcours moins favorable aux différences « à la pédale », et plus favorable aux différences liées aux aléas de la course, ils s’exposent au risque de couronner un coureur opportuniste, chanceux, et qui aura pu bénéficier d’un excellent travail de son équipe pour contrôler la course sur des étapes ne permettant pas de faire la différence seul, à la pédale.

Ou alors de couronner un grand coureur, mais dont le mérite se sera résumé à quelques très courts efforts sur un nombre très limité de courtes ascensions dans le final de quelques étapes.

En ce sens, le Tour 2014 pourrait de nouveau être assez ennuyant et surtout, pourrait couronner un coureur que peut reconnaitront comme LE eilleur coureur de course par étape au monde en l’absence de vraies difficultés. Or, le Tour de France n’est-il pas LA référence dans le cyclisme, couronnant chaque année celui perçu par tous comme le meilleur coureur? Qui se souvient encore de la victoire de Carlos Sastre sur le Tour 2008, voire celle de Pedro Delgado sur le Tour 1988?

Les derniers Giro et Vuelta nous ont par ailleurs prouvé que des parcours audacieux, difficiles, montagneux pouvaient par ailleurs générer un excellent spectacle, en dépit de la domination d’un coureur comme Nibali cette année sur le Giro. De tels parcours ont au moins le mérite de faire émerger les plus grands au prix d’efforts et d’exploits dignes d’écrire la légende du cyclisme!

En 2014, les coureurs feront la course une nouvelle fois. Dans ce contexte, il est toujours hasardeux de prédire l’intérêt de la course. Mais force est d’admettre que sur le papier, je ne trouve pas ce Tour de France 2014 très emballant, y voyant plusieurs raisons de croire que ce pourrait être une Grande Boucle encore très longue où les vainqueurs d’étape seront certes variés, mais également où la course au maillot jaune sera d’une platitude consommée, se résumant à quelques hectomètres durant les 3 656 bornes de l’épreuve.

Or, le maillot jaune n’est-il pas le plus beau trophée du sport cycliste?

Le film du parcours, en un peu plus de 3 minutes

 
Parcours 2014 en 3D / The 2014 route in 3D par tourdefrance

LeMond a raison, mais…

L’entrevue récemment accordée par Greg LeMond au réseau CNN a fait grand bruit dans le monde du cyclisme.

LeMond y affirme notamment que Lance Armstrong n’était pas capable d’un top-30 au Tour de France sans dopage.

J’en suis convaincu: LeMond a raison!

Tous les tests physiologiques de Lance Armstrong ont révélé que ce dernier était très loin de ceux de Greg LeMond, annoncé à 92 de VO2max, comparativement à environ 82 pour un Lance Armstrong au top. La différence est abyssale.

Les débuts de carrière d’Armstrong sont également là pour nous rappeler que ce coureur n’était pas un crack du côté des courses par étapes.

Mais surtout, cela montre avec éloquence à quel point le dopage sanguin de pointe peut s’avérer efficace pour changer un âne en coursier. Cela montre à quel point une rupture est survenue vers la fin des années 1980 et le début des années 1990 entre le dopage « à l’ancienne », peu susceptible de changer les hiérarchies, et le dopage sanguin moderne capable de transformer notamment un Bjarne Riis, modeste porteur d’eau, en vainqueur du Tour, moyennant bien sûr un taux d’hématocrite supérieur à 60%, une barre vertigineuse si on considère les risques à l’égard de la santé.

Chez LeMond, le verdict est sans appel: Armstrong ne devrait pas être autorisé à revenir dans le sport, et devrait même faire de la prison pour ses gestes, notamment d’intimidation à l’égard de plusieurs personnes.

Je suis d’accord avec LeMond, à une nuance près: l’Affaire Armstrong peut aussi représenter une formidable opportunité pour le cyclisme afin de mieux comprendre les dérives du passé et afin de prendre les mesures pour éviter qu’elles ne se répètent. Dans ce contexte, il faut que l’UCI négocie avec Armstrong autour des conditions pouvant mener à des aveux complets du coureur, question de ne pas réduire cette affaire à un seul homme mais bien afin de comprendre le système en place autour de lui ayant rendu ce cirque possible.

En d’autres termes, le cyclisme – l’UCI surtout! – n’a selon moi pas le choix de négocier avec Armstrong pour la suite des choses. Espérons que Cookson, le nouveau président, aura des annonces à cet égard très prochainement.

Quoi qu’il en soit, je ne suis pas sûr que le genre d’interview accordée par LeMond au réseau CNN aide le cyclisme à aller de l’avant. Il eut peut-être été préférable que LeMond invite Armstrong à faire preuve de courage afin de permettre au cyclisme tout entier d’aller de l’avant en connaissant les dérives du passé.

 

Le Tour de l’actualité

Quelques nouvelles qui ont retenu mon attention au cours des derniers jours:

1 – Toujours en rade. Le problème de l’ordinateur n’est toujours pas réglé, La Flamme Rouge fonctionnera encore sous respirateur pour une autre semaine en attendant le retour à la normale. Merci à tous de votre compréhension.

2 – Chrono des nations. Troisième victoire consécutive de Tony Martin qui réussit sa fin de saison et se porte comme LE grand spécialiste des chronos, n’en déplaise à Bradley Wiggins et Fabian Cancellara qui apparaissent plus que jamais appartenir à une autre génération en phase d’être doublée. Martin s’impose sur les 57 km en une heure 10 minutes, 14 petites secondes devant un excellent Gustav Larsson chez IAM Cycling qu’on n’attendait pas à ce niveau. Chavanel complète le podium.

3 – Dominique Rollin. On apprenait il y a quelques jours que le renouvellement de son contrat à la FdJ posait problème, l’équipe de Marc Madiot ayant complété son recrutement pour 2014 sans le coureur québécois. Si tout espoir ne semble pas perdu, la situation s’est drôlement compliquée pour Rollin compte tenu du marché difficile engendré par la cessation de nombreuses équipes pro et World Tour, en premier lieu Euskaltel et Vacansoleil.

Je ne connais pas Dominique Rollin, je ne lui ai jamais parlé, mais j’ai toujours bien aimé ce coureur puissant, efficace en particulier sous des météos peu clémentes. J’ai toujours écrit sur ces pages que Rollin pouvait gagner de grandes courses, surtout les Flandriennes et en particulier Paris-Roubaix qui convient parfaitement au type de coureur qu’il est. À la lecture de la situation récente, une situation qui a surpris même le principal intéressé, j’éprouve colère et déception, estimant que ce coureur a tout à fait sa place au sein du WorldTour. Mais voilà, j’estime aussi que Rollin a trop joué la carte du collectif ces trois dernières années, s’oubliant trop souvent pour le bien de certains leaders qui n’ont pas toujours su concrétiser. Du coup, Rollin a peu gagné, Rollin s’est peu glissé dans des échappées et aujourd’hui, une partie importante du monde qui l’entoure a oublié de quoi il est capable sur le vélo. L’histoire du porteur d’eau laissé pour compte à un moment donné est pourtant classique dans le vélo professionnel…

Je souhaite évidemment à Dominique la meilleure des chances dans les prochains jours pour voir son contrat être reconduit au sein du WorldTour. Je lui souhaite surtout de penser un peu plus à lui au cours des prochains mois, de retrouver rapidement le goût des échappées, le goût de la victoire, le goût d’être devant et non plus derrière à tirer le peloton en entier sans pour autant voir ses leaders concrétiser dans le final.

Quoi qu’il en soit, avec la retraite de David Veilleux et l’incertitude entourant le devenir de François Parisien et Dominique Rollin, c’est une intersaison difficile pour les coureurs québécois en WorldTour. On pourra cependant compter sur la présence, en 2014, de Hugo Houle chez AG2R La Mondiale et de Guillaume Boivin chez Cannondale dont les contrats ont été reconduits.

4 – Chris Froome nommé « Flandrien international de l’année ». Décidemment, y’a des choses qui m’échappent dans le cyclisme… surtout que l’intéressé lui-même affirme redouter les pavés!

5 – C’est un des grands dossiers du mandat de Brian Cookson selon moi au cours des 4 prochaines années: relancer le cyclisme féminin. Cet article nous informe qu’en France, le cyclisme professionnel féminin est au plus mal.

La solution? Il faut une locomotive, et cette locomotive ne peut être selon moi que la renaissance du Tour de France féminin qui permettrait au public de s’intéresser et de connaître les athlètes féminines en cyclisme sur route. Pourquoi ne pas penser (et négocier avec ASO!) à un Tour de France féminin sur une portion de l’étape des hommes et disputé 24h avant ces derniers? Le public aurait deux raisons de se déplacer, des comparaisons pourraient être établies sur les temps d’ascension des cols, la couverture télé ne serait pas tellement plus chère, bref, ce serait une belle solution permettant de créer un levier de développement.

6 – Tour de France 2014. Le parcours sera dévoilé cette semaine, comme d’habitude. En attendant, l’excellent site Velowire nous propose le parcours probable, sur la base d’une enquête détaillée. L’an prochain encore, malheureusement, le Tour de France ne fera pas vraiment dans l’inovation comme on peut le voir sur le Giro ou la Vuelta. Il est probable que le parcours demeure classique, un départ d’Angleterre, un détour par l’Est de la France, notamment la Lorraine puis Besançon, puis les Alpes sans grande étape, puis les Pyrénées jusque l’avant dernier jour, question d’entretenir un pseudo suspense.

On se languit d’un peu d’inovation! À quand le retour du Puy de Dôme? À quand de nouvelles ascensions difficiles, étroites, ou bien placées? À quand un parcours novateur, déstabilisant?

7 – Paris-Tours. L’épreuve a été gagnée au sprint par John Degenkolb. Pour ceux qui connaissent l’histoire du cyclisme et des photos des épreuves, en voici une de circonstance qui nous ramène à la fréquente condition des coureurs cyclistes d’une certaine époque, ces hommes issus et étant demeurés près de la terre. Ceci étant dit, un peu de chasse puis des problèmes informatiques m’ont laissé deux semaines durant sans aucune activité cycliste, et un court test hier après-midi m’a laissé croire que j’ai regressé de six mois… Misère, la reprise s’annonce difficile!

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La Flamme Rouge en panne!

La faute à une tasse de tisane bien chaude renversée par mon petit garçon dans le clavier de mon MacBookPro, La Flamme Rouge sera fortement perturbée dans les prochains jours, le temps de me ré-organiser en tentant d’éviter la faillite personnelle!

À très bientôt le plaisir de vous retrouver suite au retour au service normal.

Les 100 à B7

Samedi prochain 12 octobre, je vous rappelle qu’un des tous derniers événements de cyclisme « sur route » aura lieu dans la région de Lac Brome, en Estrie, avec la nouvelle cyclosportive « Les 100 à B7« .

On peut s’inscrire ici.

Au départ du Centre national de cyclisme de Bromont, la cyclosportive, tracée par Lyne Bessette, reprend en grande partie ses routes d’entrainement.

Petit scoop: je vous rappelle qu’outre la route, Lyne est également spécialiste du cyclo-cross…

… donc la majeure partie de la cyclo (95% du parcours!) d’une distance de 100 kilomètres (un parcours alternatif de 48 bornes est également proposé) aura lieu sur des chemins de terre. Vélo de cyclo-cross recommandé ou, du moins, des pneus de 25 ou 28mm!

Autre scoop: Lyne m’a confié lors de la cyclo Mont Tremblant que le parcours en surprendra plus d’un… Attachez votre casque avec de la broche Sapim ligaturée!

On y annonce du beau monde, entre autres Ted King, Guillaume Boivin, Simon Lambert Lemay, Pierre-Olivier Boily, Tim Johnson, Martin Gilbert de même que François Parisien. C’est donc une occasion unique de cotoyer (brièvement si ca roule vite!) ces coureurs – dont certains ont évolué au sein du World Tour en 2013 – sur une épreuve à l’ambiance résolument décontractée.

Si j’y serai? Malheureusement non. Ma constitution est trop frêle pour ce genre de parcours… On a jamais vu Marco Pantani sur Paris-Roubaix, on ne me voit donc pas plus sur de telles routes! Chicken? Oui Monsieur! Que voulez-vous, je suis un être délicat.

Blague à part, Lyne, bon succès avec cette première édition!

Diner-bénéfice du Centre national de cyclisme

J’en profite pour souligner au passage la tenue d’un souper bénéfice le 21 octobre prochain en soirée au profit du Centre national de Bromont. Il reste encore des billets, au montant de 65$ par personne. Pas simple de se libérer un lundi soir, surtout lorsqu’on habite loin de Bromont, mais pour ceux étant à moins de 2h de route de l’endroit, c’est une activité intéressante permettant de soutenir le développement du cyclisme – notamment sur piste – au Québec. La soirée se déroulera sous la présidence d’honneur de François Parisien, tout juste rentré des Mondiaux et du Tour de Lombardie.

The Armstrong Lie

C’est la grande nouvelle des derniers jours: le film « The Armstrong Lie » sera en salle aux États-Unis le 8 novembre prochain et la bande annonce est sortie récemment.

Big deal!

Ca me fait bien rigoler: la plupart des gens qui aujourd’hui s’offusquent du mensonge Armstrong sont ceux qui, il y a seulement quelques mois, étaient encore du côté du Texan, accusant les libre-penseurs bien informés – dont j’étais – des pires intentions parce que nous osions émettre des doutes quant à la probité de Lance Armstrong. Quand ca venait de France, les Français étaient jaloux, forcément, voire mauvais-perdants. Quand ca venait de ce côté-ci de l’Atlantique, on nous répondait que nous n’avions rien compris puisque Lance Armstrong travaillait en fait plus fort que quiconque à l’entrainement, d’où son remarquable succès. « Just do it » ; « No pain no gain »… Pour peu, on accusait même certains américains de se livrer à une  « chasse à la sorcière », évoquant du coup certaines histoires moins glorieuses du passé!

Tout cela me fait bien rire aujourd’hui. Je me dis qu’au moins moi (et quelques autres), j’ai ma conscience tranquille, ayant émis des doutes sur Armstrong dès le début de La Flamme Rouge en 2003. Par exemple, mes réserves, exprimées en 2009, quant à l’événement « Tour de Lance des cèdres » dans les Laurentides ne m’a certainement pas valu beaucoup d’amis parmi le cercle des admirateurs du Texan au Québec, mais je constate aujourd’hui que le temps m’a donné raison.

Anyway, l’histoire du film « The Armstrong Lie » est archi-connue pour ceux ayant lu les ouvrages bien documentés de Walsh et Ballester. En ce sens, le film en soi présente très peu d’intérêt à mon avis. Et c’est Armstrong qui doit être content, devant forcément saliver à l’idée de pouvoir enfin se refaire un peu financièrement puisqu’il est presque certain qu’il possède des contrats liés à l’exploitation de son histoire et de son image avec le producteur du film, Sony Pictures. Vous irez voir le film? Vous renflouez en partie les finances d’Armstrong… Je vous invite donc à user de discernement, et à considérer l’alternative de l’achat de certains ouvrages des dernières années qui feront encore mieux l’affaire si vous voulez vous instruire sur le parcours de Lance Armstrong.

Pour moi, le seul intérêt de ce film est la déclaration suivante du principal intéressé, Lance Armstrong, qu’on entend à la fin de la bande annonce: « Let’s get to the real nature and the real details of the story. We haven’t heard it yet… is the truth« .

Et ce n’est pas dans ce film qu’il déballera tous les dessous du « système Armstrong », mais bien dans une éventuelle commission mise en place par l’AMA et l’UCI on espère prochainement, maintenant que Brian Cookson est au commande de la fédé internationale de cyclisme.

C’est à ce moment seulement que ca deviendra vraiment intéressant.

Et Hein Verbruggen ainsi que Pat McQuaid auront de quoi nourrir certaines inquiétudes…

Entrevue avec Yves Lefebvre, « ironrider » sur les Haute Route 2013

Je connaissais comme adversaire de course Yves Lefebvre depuis une dizaine d’années, à souffrir dans sa roue lors des Grand Prix de Charlevoix alors qu’il courrait encore pour les Dynamics de Contrecoeur. Il est devenu un ami l’an dernier lorsque nous nous sommes retrouvés sur la Haute Route Alpes ensemble, qu’il faisait avec sa conjointe, la championne canadienne sur route en 2012 Pascale Legrand.

Cette année, Pascale et Yves sont devenus des « IronRiders » de la Haute Route, enchainant la Haute Route Alpes puis la Haute Route Pyrénées une semaine plus tard, excusez un peu. Ensemble, ils ont donc affrontés 14 étapes de haute montagne, près de 1500 kms de course et plus de 30 000 mètres de dénivelé!

Yves a très récemment accepté de m’accorder une petite entrevue pour le bénéfice de La Flamme Rouge, entrevue que je publie aujourd’hui. Il y a quelques semaines, Pascale avait quant à elle accordé cette courte entrevue au site Vélo 101.

La Flamme Rouge: Yves, première question, le parcours de la Haute Route Alpes 2013 était-il plus difficile que celui de l’édition 2012 que nous avons fait ensemble?

Yves Lefebvre: Pas plus difficile, mais les difficultés étaient réparties différemment. En 2012, nous avons dû affronter certaines grandes étapes marathon, notamment le 3e jour entre Courchevel et l’Alpe d’Huez, par delà Madeleine, Glandon et montée finale vers l’Alpe. C’était des étapes très difficiles, longues et comportant beaucoup de dénivelé. En 2013, pas de grandes étapes marathon de la sorte, mais des étapes tous les jours assez difficiles. Les étapes étaient donc dans l’ensemble plus homogènes en 2013 comparé à 2012.

LFR: Vous avez eu de la bonne météo…

YL: Oui, tout à fait. Super température sur la Haute Route Alpes, mais un peu plus froid le matin cependant. Le départ de Val d’Isère cette année, à 1800m d’altitude et à 7h du matin, c’était pas chaud! (2-3 degrés).

LFR: Et le plateau était-il aussi relevé que l’an dernier?

YL: Je dirais que oui. Pouly, en tout cas, a moins dominé même s’il reste sur une autre planète, et a laissé des victoires d’étape à ses coéquipiers. Sinon, pour le reste, c’était pas mal similaire à l’an dernier: sitôt l’étape lancée, c’était tout le monde pour soi et à fond les manettes jusqu’à l’arrivée. Les places au général étaient chèrement défendues!

LFR: Et ta condition personnelle?

YL: Je pense que j’étais à peu près au même niveau que l’an dernier, mais je me suis présenté au départ beaucoup, beaucoup plus frais qu’en 2012. L’an dernier, Pascale et moi sommes débarqués en Europe le jeudi avant le départ de la Haute Route, prévu le dimanche. Cette année, nous y étions un mois avant! Ca a joué énormément, surtout que nous avons passé ce dernier mois à Mégève, dans un chalet situé à 1300m d’altitude, ce qui ne nuit certainement pas à la formation de globules rouges dans le sang!!! Cette année, je me sentais vraiment bien dans les Alpes, plein de jus.

LFR: Et tu exploses tes temps!

YL: Oui, j’ai amélioré ma place au général par rapport à l’an dernier, même si ce n’était pas là mon principal objectif qui était plutôt une étape particulière, le chrono sur la Bonette où je voulais me tester. Je termine 24e je crois de cette étape en améliorant mon temps d’ascension de quelques 18 minutes par rapport à l’an dernier! Ce fut une journée de grâce pour moi, je ne sentais pas les pédales et je me suis fait vraiment plaisir. Je me suis également fait plaisir dans l’Izoard cette année, j’avais l’expérience de 2012 dans ce col et savait donc parfaitement doser mon effort. Globalement, cette année, je montais un peu plus vite les cols et ce, dès le pied où je me mettais rapidement « dans ma zone » grâce à mon capteur de puissance Quarq.

LFR: L’expérience de 2012 t’a donc servi…

YL: Oui, c’est sûr à 100%, ca a fait une grosse différence, notamment au niveau de la confiance et la gestion des ascensions comme des descentes. Je savais ce que c’était que d’enchainer 3, 4 voire 5 grosses journées de travail sur le vélo, je savais que j’étais capable de passer au travers, donc j’étais plus serein qu’en 2012. Je savais également que je pouvais donner un peu plus qu’en 2012 sans risquer de m’effondrer.

LFR: Et tu vis les mêmes émotions avec Pascale à votre arrivée sur la Promenade des Anglais à Nice?

YL: Non! Ce n’était pas la même chose que l’an dernier. La magie de terminer pour la première fois une telle épreuve n’était plus là. On était content, c’était grandiose encore une fois au niveau de l’accomplissement personnel, mais je n’ai pas revécu les mêmes émotions que l’an dernier, alors que tu étais avec nous. Les pros disent souvent que leur première victoire chez les professionnels est la plus marquante: je peux les comprendre!

LFR: Comment as-tu géré la semaine de repos entre les deux Haute Route?

YL: Pascale et moi avons pris ca très très relax. On roulait de 1 à 2h par jour, guère plus, et vraiment en roulottant. On a fait des étirements, mais aucun entrainement intensif. Aucun intervalle. Juste une sortie de 4h en milieu de semaine, mais très mollo là encore.

LFR: Et sur la ligne de départ de la Haute Route Pyrénées une semaine plus tard, tu sentais que tu avais récupéré à 100% des Alpes?

YL: Oui, complètement. Aucun souci de ce côté. J’étais à 100%, avec beaucoup de jus encore une fois. J’ai l’impression que mon corps a su assimiler la charge de travail et surcompenser efficacement. J’étais prêt.

LFR: Plus difficile, la Haute Route Pyrénées?

YL: Non, la Haute Route Alpes est plus difficile. L’épreuve dans les Alpes est plus longue, avec plus de kilomètres à parcourir, et aussi plus de dénivelé. Nous avons été chanceux dans les Pyrénées également, avec une météo très bonne sauf sur les deux dernières étapes. Il a d’ailleurs plu lors de la dernière étape, mais par chance ce n’était pas trop froid.

LFR: As-tu connu une nouvelle journée de grâce dans les Pyrénées?

YL: Journée de grâce je ne sais pas, mais j’ai connu beaucoup de bonnes journées dans les Pyrénées. J’avais ciblé une fois de plus le chrono de Hautacam pour me défoncer. Je termine 14e de cette étape je crois. Que du bonheur…

LFR: Quelle différence t’a frappé le plus entre la Haute Route Alpes et Pyrénées?

YL: Les cols des Pyrénées sont définitivement plus pentus, mais moins longs. C’était donc globalement moins dur dans les Pyrénées, mais c’est casse-pattes par moment.

LFR: Tu avais quoi comme braquet minimal?

YL: Comme l’an dernier: 39-25. Je ne mouline pas beaucoup, je monte en force (ndlr: à la Thierry Claveyrolat!).

LFR: Un col où tu as plus souffert que les autres?

YL: C’est drôle que tu poses la question, mon col d’horreur est resté le même qu’en 2012, soit la montée vers la station d’Auron dans les Alpes. C’est pas très pentu, c’est pas très difficile mais pour une raison que j’ignore, j’y ai beaucoup souffert les deux fois!

LFR: J’ai eu beaucoup de mal avec le sommeil l’an dernier sur la Haute Route, comme si mon corps tout entier avait oublié comment s’endormir. Quelle est ton expérience maintenant que tu as trois Haute Route à ton actif?

YL: De mon côté Laurent, je dors comme un bébé! C’est très important de bien dormir pour bien récupérer, ca doit donc être assez difficile si tu ne dors pas bien. De ce côté-là, pour moi c’était « pas de problème ». Nous avions, Pascale et moi, choisis l’hébergement en hôtel cette année et ca a également fait une grosse différence sur notre récupération, bien meilleure je crois que l’an dernier.

LFR: L’organisation de la Haute Route était toujours à la hauteur en 2013, comme en 2012?

YL: Globalement oui. Les ravitos, les transports de bagages, les massages, tout cela était vraiment au point une fois de plus. J’ai cependant des réserves quant à deux points. D’une part, j’ai trouvé que la sécurité était moins assurée qu’en 2012, avec moins de motos, du moins en apparence, moins de sécurité en particulier dans les descentes de cols. Certains virages dangereux, notamment un virage dans la descente du Cormet de Roseland côté Bourg St-Maurice, n’étaient carrément pas signalés, et ca aurait pu avoir de graves conséquences puisque j’y ai été surpris comme beaucoup d’autres participants. D’autre part, les transferts en autobus le matin des étapes sur la Haute Route Pyrénées étaient vraiment désagréables. C’était toute une logistique et se lever aux aurores pour se taper 1h30 à 2h de bus avant de monter sur le vélo pour l’étape, c’est vraiment pas fameux. Je comprends mieux les pros aujourd’hui qui se plaignent régulièrement des transferts sur les grands tours!!! C’était vraiment usant, plus usant que les étapes elles-mêmes…

LFR: Au bout des deux semaines de course, comment termines-tu à la fois physiquement et mentalement?

YL: Physiquement, je dois t’avouer que ca allait très bien. Mentalement cependant, j’étais usé de tout: la préparation tous les jours, les levers très tôt, les transferts, les hôtels différents tous les jours, etc. Je n’ai jamais été tanné d’être sur le vélo, mais le contexte me devenait difficile mentalement.

LFR: Et pour Pascale?

YL: Trois semaines avant de s’élancer sur la Haute Route Alpes, Pascale a eu une tendinite. Pas le bon timing mettons! Elle n’était donc sûre de rien en abordant ces deux épreuves. Au final, ca s’est bien passé, elle fait même deux podiums sur la Haute Route Alpes et grimpe la Bonette en 1h40, un très bon temps. Dans les Pyrénées, les bobos revenaient doucement au fil des étapes, il était donc temps que ca finisse pour elle. Elle a cependant bien terminé et peut elle-aussi dire « objectif réussi »!

LFR: Un mois après la fin de la Haute Route Pyrénées, il te reste quoi comme impressions dans la tête?

YL: L’idée d’avoir accompli un surpassement personnel incroyable, un réel accomplissement. Je suis également fasciné de voir comment mon corps a réagi à tout ca. Je crois que le corps sait s’adapter à ce genre d’épreuves et devient plus fort encore.

LFR: As-tu sympathisé avec d’autres Canadiens et Québécois sur les Haute Route cette année?

YL: Pas beaucoup avec les autres Québécois, que j’ai à peine vu. Par contre, comment oublier Marg Fedyna, 48 ans, une Canadienne de l’Ouest du pays qui termine 3e du général dans les Alpes et qui gagne dans les Pyrénées!! Elle était incroyable, toute petite, 110 livres mouillée, elle riait tout le temps et elle montait les cols sur le grand plateau de son pédalier compact, style 50-25 ou 50-27, la chaine en travers! Vraiment, une fille très forte qui aime assurément la montagne. C’est également elle qui gagne l’IronRider chez les femmes qui a couronné le meilleur temps des deux Haute Route. (ndlr: une entrevue avec Marg est disponible ici, et son blog personnel est ici).

LFR: Aux cyclistes québécois qui voudraient se préparer pour participer à une ou deux Haute Route, tu leur dis quoi fort de ton expérience en 2012 et 2013, et fort de tes qualités d’entraineur?

YL: Qu’il faut commencer à se préparer tôt! En janvier, il faut déjà avoir bien commencé sa préparation selon moi, notamment avec des séances de home-trainer ici, en faisant des intervalles. La planification de l’entrainement est très importante, afin de ne pas faire d’erreur, notamment au niveau de la récupération. J’ai personnellement appris qu’il faut savoir accepter d’en faire parfois moins, pour taper plus fort à l’entrainement après. Il faut donc s’entrainer, mais pas trop non plus! Pas la peine de faire 2 Haute Route à l’entrainement avant d’aborder les vraies Haute Route en France… Je conseillerais également aux gens de prévoir se rendre tôt en France avant le départ des épreuves, ceci afin d’assimiler le décalage horaire au mieux, et pour fignoler l’entrainement. Ma semaine à Mégève, à 1300m d’altitude, à rouler parfois intensément, mais également moins que d’habitude, m’a permis d’aborder les Haute Route 2013 dans les meilleures conditions, plus frais qu’en 2012. Au final, je crois que ca a fait une grosse différence sur mes performances.

LFR: Dernière question Yves, il se fait tard! Côté alimentation, tu avais modifié quelque chose?

YL: Rien ! Je ne suis pas suivi par un nutritionniste ou un médecin. Mon alimentation est donc demeurée la même que d’habitude, rien de plus. Comme je mange peu de viande rouge, j’ai pris l’habitude, depuis des années, de prendre une vitamine Centrum par jour, et une capsule de fer tous les 3-4 jours, mais c’est vraiment tout. Donc rien de spécial!

LFR: Merci Yves d’avoir pris le temps pour cette entrevue, et au plaisir de me taper le Stelvio à tes côtés l’an prochain lors de la Haute Route Dolomites!

YL: Crois-moi, tout le plaisir sera alors pour moi!

Photo: les « IronRider » des Haute Route 2013, avec Greg LeMond (à droite).

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Revivez la Haute Route 2012 avec La Flamme Rouge:

Les Canadiens sur la Haute Route.

Comment suivre la Haute Route?

Ambiance village-départ sur la Haute Route.

Difficile première étape.

2e étape de la Haute Route: une bonne journée!

3e étape de la Haute Route: difficile, mais une autre bonne journée.

Haute Route: chrono de l’Alpe d’Huez.

5e étape de la Haute Route: une journée difficile.

6e étape de la Haute Route: très bonne journée pour moi!

La Haute Route endeuillée.

Haute Route: 7e étape et épilogue.

Les chiffres de la Haute Route 2012, avec Frédéric Portoleau.

Entrevue avec Peter Pouly, vainqueur des Haute Route 2011, 2012 et 2013 (Alpes).

Entrevue avec Christian Haettich, athlète handisport et IronRider 2013.

Le Tour de l’actualité

1 – Giro di Lombardia, ou la (petite) revanche de Joaquim Rodriguez qui l’emporte comme l’an dernier, sous la pluie. Du coup, il remporte également le classement général World Tour de la saison, comme l’an dernier, un titre pour lequel, j’en suis sûr, il n’accorde que peu d’importance en comparaison au titre (et au maillot!) de champion du monde qui lui a échappé il y a 10 jours à Florence…

Alejandro Valverde termine 2e en solo et quelque chose me dit qu’il n’a pas trop cherché à revenir sur Purito dans les derniers kilomètres, comme pour s’excuser de sa bévue des Mondiaux où il n’a pas accompagné le contre de Rui Costa à 2 kms de la ligne. Une façon pour Valverde de dire à Purito « d’accord, tu avais un bon point » mais aussi « je reste aussi bon que toi, alors ne prend rien pour acquis »…

À noter sur cette « course aux feuilles mortes » la bonne tenue de Thomas Voeckler, échappé solo dans le final, mais aussi les belles 11e et 12e places d’Ivan Basso et de Thibault Pinot.

2 – Giro 2014. La présentation du parcours a eu lieu hier et c’est un nouveau Giro assez spectaculaire – mais plus humain – qui a été dévoilé. Un Giro qui demeure, comme en 2013, pour grimpeurs, question d’honorer la mémoire de Marco Pantani, dont le 10e anniversaire de sa mort aura lieu en février prochain.

Du coup, les organisateurs du Giro revisitent certains théâtres des exploits du Pirate comme Oropa ou Montecampione.

Le départ sera cependant donné de Dublin, en Irlande. En raison du long transfert vers l’Italie au jour 3, un jour de repos supplémentaire (donc trois, au lieu de deux) a été octroyé au Giro l’an prochain.

Ce qu’il faut retenir? Une dernière semaine terrible, avec des étapes certes pas trop longues, mais très difficiles: pas moins de 6 arrivées en altitude sur les 8 dernières étapes!

L’étape reine? La 16e, vers Val Martello, où les coureurs devront affronter une étape certes courte (139 kms) mais musclée avec le passage au Gavia, puis au Stelvio avant l’ascension finale vers Val Martello. Aie! On trouvera ici un intéressant reportage de l’ami Guillaume Prébois sur le Val Martello.

Et le Monte Zoncolan sera une nouvelle fois un épouvantail car situé la veille de l’arrivée de la course à Trieste. De quoi entretenir le suspense jusqu’au tout dernier moment…

Un excellent vidéo de présentation du parcours a été réalisé par les organisateurs qui, décidemment, misent sur le marketing et le packaging pour faire de leur épreuve le meilleur grand tour de la saison.

3 – Vidéo toujours. Je vous invite à découvrir ce vidéo du site La Bordure sur l’équipe de Colombie. 35 minutes de bonheur, afin de mieux comprendre le long et difficile apprentissage chez les pros… Et les Colombiens semblent inspirés par le parcours du Giro 2014!


COLOMBIA CONNECTION par Velovideo

4 – Dopage. Voici pourquoi il ne saurait être question, comme certains l’écrivent encore de temps à autre, de la légalisation du  dopage.

5 – Matos. Nouvelle gamme BH 2014. Outre le Ultralight qui est intéressant pour les grimpeurs dont je suis, on note un magnifique G6 pour les coureurs aimant envoyer du lourd…

6 – Matos toujours. Pour les grimpeurs, quelques cadres intéressants pour 2014 et qui donnent dans le light à l’extrême.

7 – Matos encore. Ringard, les cadres alu. Pas tant que ca.

Philippe Gilbert contre… un facteur!

Très sympathique vidéo opposant Philippe Gilbert à… un facteur! À ne pas manquer.


Versus Philippe Gilbert vs postman par Cyclismactu

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