La bombe vient de sortir aujourd’hui: "Vinokourov a été contrôlé positif aux transfusions homologues":http://www.lequipe.fr/Cyclisme/breves2007/20070724_171249Dev.html suite à son contrôle au soir de l’étape clm d’Albi, qu’il a survolé. Le même truc que pour Tyler Hamilton il y a quelques années. De nouveau contrôlé hier suite à sa victoire à Loudenvielle, les résultats du test devrait confirmé les résultats de samedi. Selon le labo de Chatenay-Malabry, la transfussion serait très récente, probablement la veille du clm. Ce qui prouve sans l’ombre d’un doute que non seulement les coureurs n’ont rien changé de leurs habitudes, mais qu’il existe toujours des réseaux de passeurs et de distribution des produits dopants et des poches de sang sur le Tour. Comment en effet les poches de sang sont-elles parvenues jusque dans la chambre de Vinokourov? L’équipe Astana a décidé de se retirer complètement de l’épreuve suite à la nouvelle. On vous avait prévenu: cette équipe est totalement gangrénée. Mazzoleni a été contrôlé positif après son Giro miraculeux, tout comme Mathias Kessler. Ca fait beaucoup pour l’équipe Kazakh en quelques semaines seulement. Et son manager est Godefroot, celui qui ferme les yeux sur les pratiques… Quoi qu’il en soit, pour la Société du Tour, c’est la grosse, très grosse catastrophe. Suite à l’affaire Riis, aux affaires Armstrong, à l’affaire Landis l’an dernier et aux soupçons qui pèsent contre le porteur du maillot jaune actuellement, le Danois Rasmussen, revoilà une nouvelle grosse affaire de dopage sur l’épreuve. Que reste-t-il de la crédibilité de l’épreuve? À la limite, le seul geste logique et fort serait d’arrêter l’épreuve immédiatement. De renvoyer tout le monde à la maison. De dire basta, on ferme la boutique le temps de s’attaquer réellement au problème. Pour l’UCI, cette nouvelle histoire ridiculise complètement l’institution. Pat McQuaid a beau faire ses grands discours, la vérité demeure. L’UCI n’a plus une once de crédibilité selon nous et devrait carrément fermer boutique elle-aussi. Voilà en tout cas le Tour de France de nouveau souillé, ravagé. Pour La Flamme Rouge, on peut vous dire que cela nous fait vraiment mal, le Tour de France étant l’épreuve phare du cyclisme. Le grand public va de nouveau constater toute la merde du vélo. Déjà tombé très bas, on se demande ce qu’il va rester de notre sport ce soir… Et on a vraiment très hâte d’entendre tous les commentateurs sportifs sur les différents canaux de transmission. On a très hâte d’entendre notamment Phil Liggett et Paul Sherwen, mais aussi Louis Bertrand sur Canal Évasion. Car depuis le Tour, on ne parle que très peu du dopage, probablement pour ne pas effaroucher le spectateur. On continuait de s’extasier devant les accélérations de Rasmussen hier, on continuait de vanter toutes les qualités de rouleur d’Alexandre Vinokourov samedi dernier, qui a mis tout le monde à plus d’une minute. Aujourd’hui, on comprend mieux comment il a fait. Espérons que les commentateurs auront le courage d’expliquer à leurs spectateurs comment on fait pour attaquer 6 fois en 10 minutes dans une pente de 8%… En tout cas, c’est presque un enterrement du cyclisme auquel nous allons probablement assister dans les prochains jours. Les coureurs sont-ils seulement capables de comprendre toute la portée et les conséquences de leurs actes? Combien de sponsors se retireront-ils du cyclisme à la fin de l’année, écoeuré par tant de mensonges? On publie en terminant cette excellente interview de l’hématologue français Gérard Dine, publiée par AFP. Il faut la lire, car l’hématologue nous dit que la lutte contre le dopage n’est pas gagnée, de nouveaux produits étant sur le point d’être commercialisé. _Selon Gérard Dine, la lutte antidopage, parce qu’elle repose sur des concepts juridiques et des méthodes de dépistage et de recherche archaïques, est peu efficace contre les produits actuels, et a fortiori ceux du futur._ _Q: Le suivi biologique des cyclistes par la fédération internationale (UCI) semble toucher ses limites sur le Tour de France…_ _R: "Si le cyclisme ne sort pas de l’ornière, c’est que dans le suivi mis en place par l’UCI, c’est le médecin d’équipe qui traite les bilans des coureurs. Il est juge et partie. On peut imaginer que le médecin d’US Postal ou de Discovery Channel n’allait pas communiquer les données de Lance Armstrong qui auraient éventuellement permis de dépister des anomalies. Le suivi doit aller de pair avec l’indépendance des gens qui ont à statuer. Il faut remplacer le concept juridique par l’outil médecine du travail. Aujourd’hui, il faut trouver le dopant pour pénaliser, avec tous les vices de forme que cela comporte, y compris sur un produit de base comme la testostérone. L’antidopage se base sur le contrôle à posteriori d’un produit interdit, à 95% via les urines. En clair, conceptuellement, ça n’a pas bougé depuis 1960."_ _Q: Les tests ont tout de même évolué depuis quarante ans?_ _R: "C’est un mythe d’imaginer que, par les urines, l’EPO par exemple est détectable. On sait bien qu’un seul cas sur dix au maximum est détecté. Dans les suivis que je coordonne, je dépiste des gens sous EPO qui sont négatifs aux tests. Le test EPO existe, il faut l’utiliser et parfois prendre un tricheur. Mais laisser croire que c’est grâce à cela qu’on va régler le problème, c’est de l’hypocrisie."_ _Q: D’autant plus que vous alertez sur de nouveaux produits, les nouvelles EPO comme la Dynepo par exemple, pour lesquels les tests sont inadaptés…_ _R: "Il se passe avec la Dynepo (fabriquée sur lignée cellulaire humaine et non animale comme l’EPO) la même chose que pour l’EPO traditionnelle dans les années 1990. On a commencé à bouger seulement en 1998 et il a fallu Festina. Il y a une inertie terrible. La Dynepo est en cours de commercialisation sur le marché européen mais elle est déjà utilisée, détournée de certains centres de recherche clinique de phase III. Tout le milieu le sait mais on continue à faire croire que…_ _Q: La Dynepo est là. Et après?_ _R: "On prévoit déjà pour 2008/2010 les EPO synthétiques. Elles sont déjà en phase I et II. Entre 2007 et 2020, on a une vision précise de ce qui sera pris pour faire des globules rouges, du muscle, pour stimuler l’énergétique. Autour de 2015, sortira par exemple une substance qui fait produire de l’EPO par le rein. Une entreprise californienne travaille dessus en phase I et ce sera accessible dès 2010. J’espère que quelqu’un s’inquiète. Il serait intéressant qu’il y ait des actions concertées. Qu’on se rapproche de cette société, Fibrogen, pour étudier comment on peut repérer ce produit."_ _Q: Il faut donc une collaboration étroite avec les producteurs?_ _R: "Oui, un rapprochement pluridisciplinaire. Il faut s’appuyer sur les gens qui travaillent dans la recherche pour voir ce qui va être détourné. Les laboratoires ne travaillent pas pour les sportifs. L’EPO est un médicament extraordinaire et le sport n’est qu’une micro-niche. Il n’y a aucun secret, seulement des confidentialités industrielles. Si l’Agence mondiale antidopage (AMA) veut vraiment régler le problème, elle négocie et s’associe. Ca veut dire, quand même, qu’il faut que le monde du sport donne un peu de pognon."_ Propos recueillis par Françoise Chaptal